L’éthique de l’amitié face aux valeurs

L’éthique de l’amitié face aux valeurs

Les fausses valeurs

Que peut-on faire dans un monde où les valeurs traditionnelles sont niées, où l’on ne peut différencier l’authentique du faux ou du falsifié. La référence obsédante à l’argent qui se traduit dans le roman par la circulation des fausses pièces d’or renvoie symboliquement à la crise des valeurs philosophiques, éthiques et esthétiques. La révolte contre la famille en montrant le mensonge, l’adultère, la morale religieuse avec les Vedel, entraîne la démythification des sentiments. Gide les dévalue comme illusions et préjugés. La quête de l’amitié anime les personnages adolescents ou adultes des Faux-Monnayeurs afin de se libérer des liens du sang et de contester l’ordre naturel et social. Chaque référent à la société est un reflet des personnages : la justice, famille, le mariage, l’éducation, la religion, les relations sociales et personnelles et par la même de l’absence des éléments qui les fondent. La justice est partiale, la famille et le mariage ne sont que tromperie et mensonge, l’éducation ressemble aux murs de l’institut (défraîchis), la religion se réduit à des pratiques dépourvues de sens et les gens passent le plus de temps à se mentir et à mentir aux autres.

Dans une société bourgeoise où les relations sont basées sur le circuit économique, l’unique valeur demeure l’argent. Sa détention définit la place occupée dans la société. En introduisant dans ce circuit de la fausse monnaie, qui est très similaire à la vraie, on remet en cause l’idée du vrai et du faux qui constitue le fondement de toutes les situations, de tous les faits et actions de l’ouvrage des Faux-Monnayeurs. En effet tout au long de l’œuvre les personnages vont véhiculer cette dualité entre les apparences et la réalité. Comme l’économie est déstabilisée par la fausse monnaie, l’être humain est dérouté par la fausseté des sentiments.

Le piège ultime de cette situation réside dans le fait que le recours continuel à un substitut de réalité peut développer une situation si bien calquée sur le monde réel qu’elle vient à tromper non seulement celui qui reçoit mais aussi celui qui transmet :

« Le véritable hypocrite est celui qui ne s’aperçoit plus du mensonge celui qui ment avec sincérité. » .

L’ultime paradoxe réside en l´importance donnée à la fausse monnaie. Sa valeur ´est pas celle qu´elle représente en argent mais celle que Bernard veut lui donner dans le texte.

« [….] il m´a détrompé ; puis me l’a laissé pour cinq francs . » .

Il a trouvé un moyen pour épater Édouard, mais malheureusement celui-ci ne montrera aucun contentement, aucune réaction et Bernard sera très déçu.

Les adolescents, privés des valeurs de base, sont réduits à s’inventer un monde imaginaire. Ils deviennent voyous pour combattre les idées de leurs aînés mais ceci n’aboutit qu’à une situation plus ou moins identique à celle de l’univers banni et critiqué. On pourrait comparer cette évolution à une partie de jeu. Une fois la partie jouée, tous retournent à la case départ. Seul, Bernard, sur un plan interne et personnel, présentera des modifications importantes. Premièrement il part de chez lui en apprenant que Profitendieu n’est pas son père. Veut se cacher chez son meilleur ami et apprend un nouveau sens de l’amitié :

« Ce qu´il y avait de beau dans notre amitié, c’est que, jusqu’à présent, nous ne nous étions jamais servis l’un de l’autre. ».

Apprendre la vie, apprendre l’amitié, tel est le mouvement dialectique de l’itinéraire de Bernard.

Parallèlement, se joue la quête amoureuse pour Bernard, qui passe par Laura. Quand celle-ci se confie à lui, il comprend la profondeur de la vie et commence à se défaire de sa tendance à jouer des personnages : il est lui aussi victime du mensonge à soi-même et des fausses valeurs.

Pour Bernard, la quête de soi s´approfondit dans la deuxième partie. Il reconnaît être en pleine maturation :

« Je ne me sens plus le même qu’avant de l’avoir connue. » dit-il de Laura .

Les relations amoureuses sont nombreuses et variées mais elles ont un point commun : la présence de valeurs négatives, le mensonge, la tromperie, la fausse apparence. Ces valeurs ne sont en aucun cas influencées par l’origine, la durée ou le devenir des relations. L’amitié amoureuse de Laura et d’Édouard sera rapidement supplantée par le dévolu qu’Édouard a jeté sur Olivier, le soutien de Lilian à Vincent, les liaisons de Vincent et de  Laura, le pardon de Profitendieu à sa femme par soi disant amour pour elle, représentent entre autres des affinités amoureuses dont les finalités varient de la conjugalité au plaisir sensuel. La fluctuation de ces affinités est tout aussi frappante que leur diversité : Édouard aime Laura, puis Olivier, puis peut-être Caloub ; Laura aime Édouard, mais aussi Douviers, Vincent et Bernard ; Vincent aime Laura, puis Lilian ; Bernard s’attache à la fois à Laura et à Sarah ; Passavant s’intéresse à Vincent puis à Olivier, à Ghéridanisol, à Armand. Quelquefois ces chaînes sont décalées : l’un s’arrête d’aimer l’autre ou un amour a à peine commencé qu’on peut deviner déjà que l’un du couple s´intéresse à quelqu’un d’autre.(Édouard – OlivierCaloub). Le moins que l’on puisse dire c’est que les ménages ne vont pas bien.

La confusion des sentiments

De même que la vie de l’auteur est au centre de son œuvre, l’auteur est au centre des Faux Monnayeurs, relayé pour l’essentiel par l’écrivain Édouard (Gide adulte), et le petit Boris (Gide enfant). La définition traditionnelle de l’amitié veut que ce sentiment ne soit pas fondé comme l’amour sur les liens de sang ou de la chair. Nous ne trouverons dans ce livre aucunedescription pédérastique, une seule est clairement suggérée, celle entre Olivier et le Vicomte.Aucune certitude non plus ne sera donnée quant à l’homosexualité d’aucun des personnages. Dès la deuxième page, Bernard décrit Olivier, beau comme un ange, timide, qui éclate en sanglots quand il lui demande asile. Et pour finir, Olivier lui propose de dormir dans son lit. Et là commence toute l’ambiguïté de ce personnage. Olivier raconte sa première expérience sexuelle avec une femme, qui d’après lui ne sera pas suivie de si tôt par une autre. Après s’être confiés, ils s’endorment. Il n’était donc pas question d’un prélude à une relation sexuelle, malgré toutes ces apparences bien faites pour troubler le lecteur. Pour l’auteur, « les préjugés sont les pilotis de la civilisation ». Les personnages du roman vivent dans leur « monde » : juristes, pasteurs, pédagogues pour la conscience desquelles famille, sexe et argent sont trois tabous.

Pour Gide, l’homosexualité revient à la pédérastie qui est une pratique sociale avérée dès l’âge archaïque, en Grèce. Le mot « pédérastie » (du grec ancien paid-« d’enfant » et erastès « amant ») tend aujourd’hui à désigner l’attirance sexuelle d’un homme pour les garçons adolescents ou préadolescents. Le mot grec désignait à l’origine une institution morale et éducative de la Grèce antique, bâtie autour de la relation particulière entre un homme mûr et un jeune garçon alors que pour l’homosexualité, il ne s’agit que de l’attirance de deux personnes du même sexe. L’attirance pour les jeunes garçons qu’Édouard et Passavant ont, est la définition même du mot pédérastie, puisque les deux veulent instruire ces jeunes à leur façon. Passavant à trouver en Olivier un lecteur prêt à travailler à ses côtés et Édouard voit en Olivier un avenir amoureux où le fait qu’il écrive en rajoute à son plaisir. À la suite d’un voyage de Gide et de Marc Allegret, Madeleine, l’épouse de Gide, découvre la relation des deux hommes et brûle toutes ses lettres pour montrer leur rupture. La pédérastie d’André Gide sera désormais un fait de notoriété publique. Il n’aura plus à se cacher, d’autant plus que sa mère ayant juste décédée, il aura encore moins de scrupules de se montrer en public avec Marc.

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Table des matières

1 Introduction
PREMIÈRE PARTIE
2 L´argent
2.1 La fausse monnaie
2.2 Relation d´argent entre les différents personnages
2.3 Caractères romanesques de certaines transactions d´argent
2.4 Les autres monnaies d´échange
2.5 Argent symbole de nos relations sociales
DEUXIÈME PARTIE
3 L´éthique de l´amitié face aux valeurs
3.1 Les fausses valeurs
3.2 La confusion des sentiments
3.3 Mise en abyme du regard d´André Gide sur l´amitié
3.4 Les faux amis
TROISIÈME PARTIE
4 Le mensonge
4.1 Abondance du mensonge et des faux semblants
4.2 La sincérité dans les Faux-Monnayeurs
5 Conclusion
6 Bibliographie

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