L’esthetique a travers la didactique de la litterature

En cette dix-neuvième année du troisième millénaire, les temps sont durs à Madagascar. La plupart de la population peinent à survivre. Leur développement est limité à l’assouvissement de leurs besoins physiologiques. Cette pauvreté est aggravée par l’insécurité, la dégradation voire la perte de valeurs morales et identitaires. Selon le Rapport National de Développement Humain (RNDH) récemment présenté, la grande île est classée 154ème sur 188 avec un score de 0,510 comme niveau d’Indice de Développement Humain (IDH). Selon encore ce rapport, les structures sociales et économiques du pays souffrent d’insuffisance et de perturbation à cause des troubles politiques récurrents. Le ministre de l’économie et de la planification a déclaré : « Madagascar devrait mobiliser plus de ressources dans les secteurs sociaux, entre autres l’éducation, la santé et la nutrition pour améliorer son niveau de développement humain » (NewMada, août 2018). Qu’est-ce qu’un littérateur peut apporter de plus pour aider à dépasser ce seuil de développement ? Comment la littérature peut contribuer à l’amélioration des conditions de vie de la population malgache ?

« Éveiller l’âme : tel est, […], le but final de l’art » (Hegel, 1979 p 41), sachant que la littérature, elle aussi, qu’elle soit écrite ou orale, constitue un art. La littérature dont nous parlons ici est celle liée à la langue française et enseignée au lycée malgache dans le cadre de la discipline français, c’est-à-dire en contexte scolaire. Mais l’aspect artistique de la littérature est-il abordé en contexte scolaire ? Si c’est le cas, cette considération de l’esthétique de la littérature dans le cadre de son enseignement au lycée contribue-t-elle à l’éducation esthétique ? Répondre à cette série de questions nécessite une documentation et nous y viendrons. Justifions d’abord ce choix d’axe de recherche. D’abord, au niveau du Ministère de l’Education Nationale (MEN), une réforme du programme scolaire est en cours de réalisation dans le cadre du Politique Sectorielle de l’Education (PSE). Pour le cas de la discipline Français, le nouveau programme, auquel nous avons participé, intègre la littérature. Parallèlement à cela, les techniciens du MEN, se rendant compte de l’importance de l’esthétique, réintègrent l’éducation artistique au sein de notre système éducatif. Dans le Cadre d’Orientation et d’Organisation du Curriculum Malagasy (COOCM), elle constitue une matière à part (MEN, mars 2018).

La prédisposition de l’homme par rapport à l’éducation

L’éducabilité de l’homme

Certes, si l’éducation a perduré telle qu’elle est aujourd’hui, après avoir laissé ses traces à travers les différentes générations de l’humanité, c’est parce qu’il y avait encore et toujours des sujets à éduquer ou plus précisément des sujets éducables. En l’occurrence, nous voulons parler de l’homme, notamment de sa nature qui dès la naissance présente des potentiels d’évolution et des aptitudes d’apprentissage uniques. Cette prédisposition, une condition sine qua none rendant ainsi possible l’éducation, est développée par Descartes dans la première partie de « Discours de la méthode ». Si les philosophes ont abordé la question du bon sens, c’est dans la perspective de souligner la suprématie de l’homme sur l’animal et d’évoquer la possibilité de se perfectionner. Les psychologues, eux, l’ont abordée dans le but d’optimiser l’apprentissage dans le cadre de l’éducation. Nous, dans le cadre de notre recherche, avons intérêt à voir de près ce qui se trouve à la base du processus de l’éducation lorsque l’on parle de l’éducation esthétique.

La sensibilité : perfectible

La réflexion nous mène directement aux concepts de stades de développement de l’enfant mis au point par les psychologues. Quand ils ont observé de près le déroulement de ce processus, ils ont réussi à catégoriser différents types de développement : postural, moteur, affectif, cognitif et social (Les dossiers de l’Infop, p 14). C’est le troisième qui nous intéresse, car il est impliqué dans l’éducation esthétique. Henri Wallon, dans son ouvrage intitulé Enfance, considère que la personnalité de l’enfant se développe par une succession de six stades au travers de deux fonctions principales : l’intelligence et l’affectivité. L’affectivité est présente chez l’enfant dès son premier âge, notamment de 0 à 3 mois. Wallon appelle cette étape le stade émotionnel durant lequel l’enfant ressent des sentiments comme la joie, la colère, la douleur, ainsi que le chagrin. La sensibilité constitue donc une prédisposition de l’homme, Rousseau affirme : « nous naissons sensibles » (Rousseau, 1762, p.16). Cela veut dire que l’éducation esthétique n’initie pas l’enfant à la sensibilité, mais plutôt qu’elle la cultive de manière à ce que ce dernier puisse s’accomplir (Pyramide de Maslow). Ainsi, si l’éducation ne prend pas en compte l’aspect esthétique (la sensibilité) de la « perfectibilité » de l’homme, elle ne sera pas complète. Cela risquerait de compromettre la pérennité de l’espèce humaine, de rompre le lien naturel garantissant la survie de l’humanité.

Prise en charge de l’éducation 

L’éducation s’avère donc légitime, elle constitue à la fois une qualité et une contrainte de l’espèce humaine. Ce qui implique la nécessité de sa prise en charge, laquelle se manifeste à travers deux grandes activités humaines liées par une même préoccupation (la réussite de l’éducation) : les sciences de l’éducation et l’enseignement.

Sciences de l’éducation : doublement au pluriel
Les sciences de l’éducation sont actuellement doublement au pluriel. Cette double pluralité s’explique par le fait qu’elles peuvent être classées en deux groupes bien distincts. Le premier renvoie aux « sciences théoriques appliquées à l’éducation » (Reboul, 2010, p.8). Se trouvent entre autres dans ce groupe : l’économie, la sociologie et la psychologie de l’éducation. Il est nécessaire de noter que même si les scientifiques sont spécialistes de leur domaine respectif, quand ils traitent de l’éducation, ils sont appelés à fonctionner en mode d’« interdisciplinarité » pour éviter la tentation de réduire à leur propre matière l’explication d’un phénomène impliquant plusieurs disciplines que Reboul appelle « dogmatisme réducteur ».

Le deuxième groupe de sciences de l’éducation renvoie aux sciences spécifiques qui sont nées des problèmes posés par l’éducation elle-même. Nous citons les sciences des activités physiques, la psychopédagogie, la docimologie, les didactiques et d’autres encore. Ainsi puisque notre recherche relève de la Mention EPLC et le Parcours EPPD, elle rejoint le groupe des sciences spécifiques de l’éducation, notamment les didactiques. Précisément, elle s’inscrit dans la didactique de la littérature parce qu’elle consiste à évaluer la prise en compte de l’esthétique dans l’enseignement de la littérature en vue d’émettre des recommandations et d’y apporter régulation et/ou amélioration. Le schéma suivant récapitule l’épistémologie de la didactique de la littérature, point d’ancrage de notre recherche.

La didactique : science des phénomènes d’enseignement
Comme le montre le schéma, elle se situe dans le domaine de la didactologie. « En sciences de l’éducation, on parle de didactique des disciplines pour faire référence à des discours sur des corps de pratiques et à un travail de réflexion sur l’ensemble des disciplines scolaires, y compris les langues vivantes. » (Cuq p 72). En termes simples, la didactique est la science qui étudie les phénomènes d’enseignement, les conditions de situation d’enseignement /apprentissage de différentes disciplines scolaires.

La didactique de la littérature
La didactique du français apporte une réflexion sur son enseignement. Or à Madagascar comme en France, la littérature couronnait cet enseignement depuis des années. Elle était présente dans le cours de français comme les chiffres dans le cours de mathématiques. Mais durant ces dernières décennies, font régulièrement irruption dans le débat public ou savant, des questions relatives à la crise de l’enseignement du français et/ou de la littérature. En France, cette crise est marquée par deux évènements. D’une part, l’évolution du modèle culturel (de l’écrit à l’écran ou du livresque littéraire à l’audiovisuel) où « une bonne partie de la population qui fréquente le collège n’est plus dans l’état intellectuel de connivence immédiate avec la culture littéraire requise pour accéder aux œuvres des grands auteurs » (Houssaye, 1993, p 36). D’autre part, l’enseignement de la littérature est fortement contesté pour être le lieu de pratiques impressionnistes ignorantes de leurs présupposés épistémologiques et idéologiques. A Madagascar, cette crise se manifeste plutôt par l’échec de l’enseignement du français, la discipline français dans son intégralité mais non pas la littérature en particulier. Cet échec résulte de différents facteurs comme l’insuffisance, l’incompétence des enseignants (Table ronde Mapef, 2015) et les politiques linguistiques éducatives malmenées depuis la malgachisation, ainsi que l’évolution de la technologie qui fait émerger l’audiovisuel au détriment de la culture de livres. Que ce soit le problème épistémologique et idéologique sur la place de la littérature dans la discipline du français ou l’échec de l’enseignement du français que nous, les Malgaches, espérons surmonter par de nouvelles stratégies (y compris la réintégration de la littérature dans les programmes scolaires reformés), il est clair que les problèmes de l’enseignement du français et de la littérature sont les mêmes. Mais puisqu’elle est actuellement l’une des composantes de cette discipline à tous les niveaux scolaires, comme le sont la grammaire, le système sémantico lexical, l’orthographe et bien d’autres encore, la didactique de la littérature se détache de celle du français pour porter une réflexion sur l’enseignement de la littérature. Elle constitue maintenant un champ de discussions théoriques, lesquelles portent aussi bien sur le statut des objets enseignables et leurs conditions d’enseignabilité, que sur la sélection des outils théoriques et méthodologiques permettant leur approche. Ce cadrage épistémologique de la didactique de la littérature nous a permis de clarifier le point d’ancrage de notre réflexion. Maintenant, nous allons voir l’autre grande activité de l’homme qui s’inscrit dans le cadre de la prise en charge de l’éducation : l’enseignement.

L’enseignement : résultat de la prise en charge de l’éducation

Le cadrage épistémologique du processus d’enseignement vise à identifier et à cerner les points d’ancrage de la recherche du point de vue de l’organisation des cours de littérature. L’enseignement constitue le résultat de la prise en charge de l’éducation à travers son institutionnalisation. Cette prise en charge est bénéfique pour l’éducation, tel que Reboul le confirme : « La spécificité de l’enseignement scolaire, c’est qu’il est le seul à pouvoir se charger à coup sûr du long terme » ( Reboul, 2010) .

Le niveau Macro : lieu d’orientation théorique de l’enseignement
Le « niveau-macro » du système éducatif se trouve dans le cadre supérieur. Il représente les instances supérieures composées des dirigeants politiques et techniques qui sont chargées de décider et d’organiser l’enseignement. Sa mission repose sur la traduction des aspirations de la société qui a ses propres caractéristiques (démographique, économique, sociale et culturelle), selon des objectifs éducationnels correspondant aux finalités éducatives. Puis, à partir de ces objectifs éducationnels, il permet de baser les contenus, les structures et l’organisation de l’enseignement. Cela renvoie à la notion de sélection ou de choix de valeurs et de contenus évoquée dans la problématique de Lukusa. A ce niveau, nous avons ce que les enseignants appellent communément « les programmes scolaires ». Il faut noter que derrière ce substantif se cachent toujours les questions de méthodes et supports d’enseignement. Néanmoins, toute cette organisation, aussi élaborée soit-elle, reste encore théorique ; c’est au niveau micro que l’acte d’enseignement-apprentissage s’actualise par l’intervention des enseignants qui entrent en relation directe avec les apprenants. Le niveau micro se caractérise par le lieu où le processus d’enseignement se déroule, tel que le milieu scolaire, notamment la classe. Dans ce cas, le professeur sélectionne, organise et présente l’enseignement en se référant aux instructions officielles du niveau macro, lesquelles préconisent les objectifs éducationnels, les programmes scolaires, la méthode d’enseignement (PP0 actuellement en vigueur à Madagascar), mais aussi les supports. C’est ici que la littérature trouve sa place dans le processus enseigné. Les œuvres littéraires constituent les supports les plus recommandés dans l’enseignement du français.

Le niveau micro : lieu de coïncidence entre processus enseigner et processus apprendre

Quand l’enseignant sélectionne le savoir à enseigner, il passe à la « formulation des objectifs d’enseignement ». Ces derniers sont appelés objectifs opérationnels (ou encore but des leçons) chez POCZTAR (Pocztar, 1982, P.31). Puis, il passe à l’organisation de son enseignement qui comprend le « diagnostique de comportement initial » ou évaluation diagnostique ou encore test de niveau en terme archiconnu, ainsi que le choix de support et stratégie appelé « Moyens et technique d’enseignement » chez Lukusa. Enfin, il présente en classe ce qu’il a organisé et préparé. C’est là que le processus enseigner coïncide avec le processus apprendre. A l’intérieur de ce processus, lequel se déroule à travers la relation humaine entre l’enseignant et l’apprenant, s’opère l’évaluation formative qui a souvent pour but de vérifier et de consolider les connaissances nouvellement acquises, ou en cas d’erreur  à défaut d’acquisition, de procéder à la régulation. Après le niveau micro, l’action d’éducation revient au niveau macro pour l’évaluation sommative (examen officiel), dont le résultat permettra de rectifier certains points si nécessaire. Donc, un cycle semi fermé s’établit entre les deux et permet la régulation en cas de besoin. Ce niveau micro accueille notre recherche et toutes les dispositions théoriques du niveau macro y sont traduites en actes éducatifs. C’est exactement là que notre problématique repose.

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Table des matières

INTRODUCTION
Ière partie CADRAGE EPISTEMOLOGIQUE ET THEORIQUE DE LA RECHERCHE
CHAPITRE I- CADRAGE EPISTEMOLOGIQUE DE LA RECHERCHE
CHAPITRE II-CADRAGE THEORIQUE DE LA RECHERCHE
Conclusion de la première partie
IIème partie CADRAGE METHODOLOGIQUE DE LA RECHERCHE
CHAPITRE I- LES ELEMENTS THEORIQUES DE LA METHODOLOGIE
CHAPITRE II- LES ÉLÉMENTS RELATIFS AU TERRAIN D’INVESTIGATION
Conclusion de la deuxième partie
CONCLUSION

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