L’espace public

L’espace public

Collecte de données

Dans le cadre de mon stage, j’ai eu l’occasion de rencontrer un grand nombre de jeunes durant mes diverses activités. Pendant ces dernières, j’ai été amené à côtoyer les mêmes jeunes à plusieurs reprises ce qui, selon les contextes et la durée des échanges, m’a permis d’établir un bon lien avec eux. Après avoir décidé de m’intéresser au différents points de vue des acteurs, il m’a paru indispensable d’avoir également la perspective directe des jeunes. En revanche ce qui m’a paru moins évident était la manière d’avoir accès à ces informations. Car bien que je sois en contact avec les jeunes et que j’ai régulièrement des échanges informels avec eux, j’ai trouvé que les informations dont ils me faisaient part n’avaient pas toujours la légitimité de se retrouver dans ma recherche et ce bien qu’ils aient été informés de mon statut de « stagiaire » au sein du service de la jeunesse et de mon statut d’« étudiante » en master en droits de l’enfant. Il était parfois difficile pour moi de distinguer si ce qu’ils me confiaient s’adressait à la « stagiaire » ou à l « étudiante » que j’étais.

Dans le premier cas de figure, ce qui m’était communiqué avait une portée plus confidentielle à mon sens, alors que dans le deuxième cas de figure j’ai eu le sentiment que cela avait davantage la légitimité de figurer dans ma recherche. Afin de répondre à mon dilemme, j’ai donc finis par opter pour une méthode de récolte de données multiples. Ainsi les informations qui m’ont été transmise, par tous les interlocuteurs, en dehors des interviews officiels que j’ai effectuées, ont servis de pistes d’explorations pour les thématiques à aborder afin de cerner le plus largement possible la problématique abordée. De ce fait ma récolte de donnée s’est faite sous trois formes: des observations participatives; des entretiens semi-directif ; des sources écrites. (Toutes détaillées ci-après). L’Interdisciplinarité me parut aller de soi dans cette recherche pour diverses raisons: les multiples statuts pris durant le stage, la nature complexe de la problématique et la multidisciplinarité des acteurs concernés. La nuit urbaine représente un sujet interdisciplinaire par excellence et les orientations disciplinaires pour l’aborder s’étendent des sciences sociales aux sciences humaines. C’est pourquoi j’ai fait le choix de mobiliser les théories de plusieurs disciplines (sociologie, psychologie, droit, science politique) pour approfondir les différents angles de cette recherche.

Vision spatiale de l’espace public Lorsque nous parlons « d’espace public » nous l’opposons aux « espaces privés » ce qui amène par définition une dualité entre ces deux territoires. Tierry Paquot (2009) désigne les espaces publics comme « les endroits accessibles au(x) public(s), arpentés par les habitants, qu’ils résident ou non à proximité. Ce sont des rues et des places, des parvis et des boulevards, des jardins et des parcs, des plages et des sentiers, en bref, le réseau viaire et ses à-côtés qui permettent le libre mouvement de chacun, dans le double respect de l’accessibilité et de la gratuité ». Certains les appelleront les « espaces libres », les « lieux publics » ou encore, les « lieux urbains ». Il existe un grand nombre d’expressions pour y faire référence et les représentations qu’elles véhiculent sont toutes aussi nombreuses. Paquot Thierry (2009) insiste sur un point qui nous sera important pour la suite de notre problématique, la dimension « collective » de l’espace public qui « confère à cet endroit une dimension sociale et publique ».

Il est important d’insister sur cette image « d’espace commun », car l’espace public n’est pas qu’une aire géographique donnée mais il est également un espace d’échange, ouverts à tous résidents. D’après Ostrowersky (n.d.) l’espace public urbain est construit, transformé de manière à être utilisé. Le lieu public n’est pas un espace qu’on est censé s’approprier, il doit favoriser la rencontre de l’autre, et s’inscrire dans une « éthique de l’accueil ». En opposition à un espace privé, ou personnel, que l’on s’approprie comme lieu de vie tel que le domicile (maison-jardin ou appartement-immeuble). L’espace public n’est pas évident à définir car paradoxalement « il est à moi, il est toi, il est à tout le monde et à personne au même temps ». Comme le remarque Robert Philipe (2000) « La nouveauté est alors l’affirmation d’un véritable espace public, c’est-à-dire ouvert à tous mais insusceptible d’aucun accaparement privé, notamment d’aucun attroupement sauvage ». Il met en avant également le fait que la nouvelle économie de la sécurité et l’urbanisation massive font en sorte que l’espace public devienne progressivement un simple lieu de circulation, et qu’il perde sa fonction d’espace de vie du populaire urbain. Il y a une certaine puissance publique qui tend à vouloir contrôler toute circulation, privant ainsi à l’individu sujet de droit d’utiliser la rue comme espace de vie.

Vision Politique de l’espace public

La vision de T. Paquot (2009) de l’espace public représente uniquement une vision spatiale et non politique de la sphère publique. Afin d’éclairer au mieux ma thématique, il est également important d’étudier cette composante « politique », notamment au travers des travaux de Jürgen Habermas (1962) sur l’espace public, comme espace politique. J. Habermas introduit la notion d’« espace public » dans sa thèse publiée en 1962, intitulée L’espace public. Dans celle-ci, J. Habermas (1962) avance que l’espace public bourgeois sert d’instrument politique « au moyen duquel la bourgeoisie montante vise à mettre fin à la domination d’un État absolutiste » (Habermas, 1962). La sphère publique représente « un espace s’ouvrant entre l’Etat et la société civile, où les citoyens se rencontrent afin de débattre librement des questions d’intérêts » (Ibid.). Elle prend ainsi une fonction politique et renvoie « aux conditions de possibilités sociales de formation d’une opinion publique ». (Ibid.)

Habermas décrit également « le processus au cours duquel le public constitué d’individus faisant usage de leur raison s’approprie la sphère publique contrôlée par l’autorité et la transforme en une sphère où la critique s’exerce contre le pouvoir de l’État » (Ibid.,1962). Ce processus amène à une diversité des points de vue, car le public a le pouvoir de légiférer et de remettre en question le pouvoir. « L’espace public apparaît comme un lieu de débats infinis où pourront être jugés collectivement les idées des individus, mais aussi la scène d’où pourra être jugé et contrôlé le pouvoir politique » (Habermas, 1962).

Il est important de mentionner qu’une des critiques faites à la théorie d’Habermas, notamment par l’historienne Arlette Farge (1992), a été le fait qu’il ne considère que la bourgeoisie comme acteur dans la sphère publique bien que l’espace public soit également constitué par la grande masse de la population. A cela vient s’ajouter l’apport de P. Charaudeau (1997), qui considère que « aujourd’hui, la démocratie de masse a fait de la sphère publique un espace beaucoup plus large qu’autrefois, avec un nombre beaucoup plus grand d’acteurs assez hétérogènes. » (Charaudeau,1997, p.202-203). Dans la vision de l’espace public chez Habermas, l’accent est mis sur des processus d’argumentation et de constitution de discours sociaux. Cependant, il est également nécessaire de mentionner les procédés par lesquels les acteurs doivent se rendre visibles et se reconnaître mutuellement afin d’investir l’espace public. C’est pourquoi il est important de prendre en compte ces trois notions que sont : la « visibilité » des acteurs et des organisations politiques, l’espace public « légitime » et « illégitime » ainsi que la notion de « reconnaissance ».

Notion de Visibilité et d’espace légitime & illégitime

D’après l’approche d’H. Arendt (1961), pour qu’un espace public existe il y a forcément une « apparition des acteurs ». Si l’on se base sur cette position, « on peut dire que sans scène de visibilité publique, il n’existe pas d’action politique, ni de public et donc la communauté de citoyens destinataires de l’action est, elle aussi, inexistante. » (Arendt, 1961). De cette vision en ressort l’approche « d’espace public légitime » et « espace public illégitime ». Dans ce premier, ce sont les médias qui prescrivent en partie les règles qui définissent ce qui mérite d’être vu ou publicité et ce qui ne le mérite pas, ainsi que les prises de paroles médiatiquement acceptables ou celles qui doivent être écartées. Par conséquent, certains groupes sociaux et politiques n’ayant pas accès à cet espace légitime, et forcés à user de stratégies de contournement médiatiques, se retrouvent en dehors de cette visibilité publique légitime et donc dans un espace public illégitime. Nous avons d’un côté les « ayants droits qui disposent d’une reconnaissance et d’un accès à la parole publique, légitimés par les instances, pouvoirs et médias en place » (Arendt, 1961) et d’un autre côté ceux qui « n’emploient pas les canaux de la communication…, qui ne sont pas reconnus par l’Etat comme organisation ou parole digne d’être entendue » (Arendt, 1961). Cette notion de reconnaissance est une notion clé pour qu’il y ait une prise de position et une action politique dans l’espace public.

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Table des matières

Table des matières
Remerciement
Résumé
Table des matières
1.Introduction & problématique de la recherche
1.1 Constats de départ
1.2 Rôle de « stagiaire » et statut « d’étudiante chercheuse »
2. Partie méthodologique
2.1 Collecte de données
2.2 Considération Ethique
2.3 Détails des outils Méthodologique
3. Cadre théorique
3.1 L’espace public
3.1.1 Vision spatiale de l’espace public
3.1.2 Vision politique de l’espace public
3.1.3 Notion de Visibilité et d’espace légitime & illégitime
3.1.4 Notion de Reconnaissance
3.2 La nuit urbaine
3.3 La rue : un concept, un espace et un lieu de socialisation nocturne
3.3.1 Un Concept
3.3.2 Un Espace
3.3.3 la rue, les jeunes & la nuit
3.4 les lieux occupés par les jeunes
3.4.1 Espace de transition et appropriation de l’espace public
3.4.2 Les lieux attractifs occupés par les jeunes
3.4.3 Surveillance et fonctionnalité des lieux
3.5 Les « jeunes » et la « jeunesse »
3.5.1 Définition d’un « enfant »
3.5.2 Définition d’un « jeune » et de la jeunesse
3.5.3 Définition commune gardée
4. Les questions de recherches
4.1 La politique actuelle concernant la vie nocturne
4.1.1 Approche du triangle de Knoepfel
4.1.2 Modèle de base
4.1.3 Le triangle selon notre premier axe de la problématique
4.1.4 Qu’est ce qui est défini comme étant le problème ?
4.1.5 Les mesures prises par la Ville et le Canton de Genève
4.1.6 Le vécu des habitants
4.1.7 Conséquences pour les jeunes « cibles » et « lésés »
4.1.6.1 Plus de visibilité & moins de tolérance
4.1.6.2 L’effet de groupe
4.1.6.3 La catégorisation, les stéréotypes et les préjugés sur les jeunes
4.1.6.4 La déviance
4.1.6.5 Discrimination envers les jeunes
4.2 la place des TSHM dans les espaces publics
4.2.1 Le mandat des TSHM
4.2.2 Leurs expériences avec les jeunes et les espaces publics nocturne
4.3 La place des jeunes dans l’espace public nocturne
4.3.1 La mobilisation nocturne en ville de Genève
4.3.2 Le Collectif nocturne: quand les jeunes se mobilisent pour la nuit
4.3.3 la parole de deux jeunes interviewés
4.3.4 Les droits économiques, sociaux et culturel des enfants et des jeunes
4.3.5 Les droits à la Protection, à des Prestations et à la Participation
4.3.5.1 La convention des droits de l’enfant
4.3.5.2 LA politique des 3 P et les espaces nocturnes
4.3.5.3 La participation en tant que droit subjectif 7
4.3.5.4 Participation, laquelle et comment ?
4.3.5.5 La participation des enfants et des jeunes dans la vie politique
4.3.6 Vers une nouvelle représentation et image de l’enfant et du jeune
6. Discussion
6.1 Pistes pour la poursuite de la recherche
6.2 Pistes d’actions & Recommandations pratiques
7. Conclusions
8. Bibliographie
9. Annexes

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