L’espace périurbain bucarestois : du communisme au postcommunisme

L’Europe connaît des changements urbains et ruraux importants en termes de résidences, services, équipements ou réseaux d’infrastructures. Les différences Est-Ouest sont majeures ; elles sont dues aux différences de développement économique mais surtout à l’histoire de chaque pays. Le phénomène de périurbanisation est ressenti en Europe Occidentale à partir des années 1960, pendant que l’Europe Orientale connaît le début de l’étalement urbain à partir des années 1990, depuis l’effondrement des régimes communistes.

Ces nouveaux espaces émergents sont caractérisés aujourd’hui par une forte dynamique démographique, avec une augmentation des migrations domicile-travail qui va de pair avec une forte motorisation des ménages, une hausse de la distance-temps grâce au développement des infrastructures de transport, une explosion du pavillonnaire et des espaces à destination industrielle ou commerciale, mais également des espaces de loisirs en dehors de la ville. Les villes s’étalent, au détriment des terres agricoles. Ce processus de périurbanisation produit la déconcentration de la population et le changement de l’organisation spatiale.

Des espaces labourés ou en friche deviennent aujourd’hui constructibles, ce qui signifie à la fois perte quantitative et qualitative de terres. Si pour certains l’extension périurbaine est vue comme une véritable crainte, pour d’autres ce processus contribue, de leur point de vue, au développement territorial. Entre l’Est et l’Ouest européen les mentalités ne sont pas similaires, chose qui peut être expliquée par une différence de culture et de développement économique. Ceci fait que la gestion du processus n’est pas envisagée de la même manière, du fait aussi que les outils d’urbanisme et d’aménagement du territoire prennent en compte ou non l’étalement urbain.

Le cadre d’analyse 

La Roumanie, ancien pays du bloc de l’Est, très centralisé, connaît donc aujourd’hui la transition vers une économie du marché. Pendant l’ « ancien régime» la propriété privée (dans tous les domaines) a été remplacée par la propriété socialiste, la « propriété du peuple entier ». A partir de 1990, avec la chute du système étatisé, la Roumanie a connu la décentralisation. Les Roumains sont devenus libres. Le pouvoir est passé des mains des autorités centrales dans celles des autorités locales. Notre pays est entré en période de transition, avec la désindustrialisation et le passage de nouveau à la propriété privée. Premier résultat : les Roumains sont devenus propriétaires de leurs parcelles de terre, de leurs logements, ils ont eu le droit de changer facilement de résidence ou de domicile, voire d’avoir plusieurs logements. La Roumanie a connu plusieurs phases de développement : une première jusqu’en 2000, quand le processus de transition a été lent, une deuxième après l’an 2000 quand le processus s’est accéléré (Erdeli, Nae, 2008), voire même une troisième à partir des années 2007-2008, par suite de la crise économique mondiale, quand la Roumanie a connu l’effondrement du marché immobilier, avec une baisse des prix des terrains et des transactions immobilières, ainsi qu’une diminution du nombre des constructions.

Aujourd’hui la Roumanie connaît un développement urbain continu, un étalement urbain autour des grandes villes. Cela arrive même dans des villes moyennes. En fonction des sites ce sont des paysages résidentiels qui font leur apparition. En fonction de l’existence des axes de communication ce sont des paysages fonctionnels économiques qui naissent. L’espace roumain qui connaît le plus de changements urbains est la capitale. Bucarest ne cesse pas de changer de visage depuis la chute du régime communiste.

A la suite de la privatisation en masse des appartements des « blocs », juste après la révolution, Bucarest a connu une augmentation rapide du nombre d’habitants (changement de domiciliation administrative) pour assister ensuite dans la deuxième phase de la transition à une diminution de la population. Jusqu’en 2000 l’étalement de Bucarest et des communes limitrophes a été lent ; ce phénomène a pris un grand élan dans cette deuxième phase de la transition. Ces territoires qui se dessinent (Debarbieux, Vanier, 2002), ces nouveaux espaces émergents (Dubois-Taine, Challas, 1997), représentent un nouveau support pour la construction résidentielle et économique. L’espace périurbain bucarestois n’échappe donc pas à ce nouveau phénomène qu’est la périurbanisation, l’étalement urbain autour de Bucarest étant autant résidentiel qu’économique. Toutes les communes entourant la capitale roumaine connaissent une hausse de leur population. Cette augmentation du nombre d’habitants se traduit spatialement par une augmentation de la construction neuve, construction représentée par des maisons individuelles principalement, de grands pavillons de haut standing. Elle est également représentée par de l’habitat collectif dans des « appartements de luxe » le plus souvent. L’implantation fonctionnelle économique est aussi importante.

Bucarest s’étend beaucoup et les communes périurbaines également. Il s’agit d’un étalement plus en « tache d’huile », représenté par l’apparition de nouveaux « complexes résidentiels » et moins en « doigts de gants », le long des axes de communication. Cette extension urbaine est très visible au nord de Bucarest, les communes de Voluntari et Otopeni étant les témoins les plus pertinents de l’extension dans l’espace périurbain de Bucarest. Ces deux communes, urbaines aujourd’hui, ont vu leur espace urbanisé s’accroître très vite depuis 2000 et leur population augmenter. La plupart des constructions sont représentées par des « parcs résidentiels » comprenant grands pavillons et appartements de luxe. Ces logements ne sont donc pas destinés au citoyen modeste. En deuxième position se situent les constructions destinées aux bureaux, à la logistique et aux grandes surfaces. Cette partie nord de la capitale représente l’espace le plus attractif en termes d’investissements résidentiels et économiques. Dans la partie ouest on voit de plus en plus d’entreprises de logistique et de centres commerciaux qui s’installent, pendant que les parties sud et est sont encore délaissées, bien que depuis peu de temps on voit l’apparition de petites résidences, mais aussi des supermarchés. MegaImage  est un exemple. On le retrouve souvent dans les communes autour de Bucarest, l’entreprise ayant d’ailleurs la plus grande chaîne de supermarchés de la ville.

Cette extension urbaine apparaît pourtant désordonnée en Roumanie. Les réseaux d’infrastructures n’arrivent pas à suivre le même rythme de développement que les constructions. Souvent, les constructions résidentielles ou à fonction économique font leur apparition avant les réseaux d’infrastructures. Les infrastructures de transport suivent le même rythme. Le résultat est le même partout. Les voies d’accès ne sont pas tout le temps commodes et quand on y arrive il y a souvent des embouteillages, les voies de communications restant médiocres et assez étroites. Les canalisations d’eau courante et d’évacuation des eaux usées, le traitement des déchets représentent aussi d’autres problèmes.

La Roumanie d’aujourd’hui reste encore très marquée par le communisme et ce poids des héritages pèse lourdement dans la vie des Roumains. Le régime communiste a essayé de dominer la société pendant environ quarante ans. L’idée de ce régime était l’égalitarisme, l’existence d’une société sans classes sociales et sans propriété privée, avec pour moyens le collectivisme et la planification territoriale et économique. La propriété privée a vite été remplacée par la propriété collective. L’urbanisation s’est faite d’une manière forcée, l’industrie et le progrès technique étant considérés comme éléments clé de la société. En même temps « les portes des villes étaient fermées » et la mobilité résidentielle ne se manifestait pas. L’État, autoritaire et planificateur, contrôlait la vie des Roumains. Avec la chute du système communiste, la société roumaine a connu un changement radical dans son mode de vie. Tout au long de cette étude ces changements, qui se sont opérés depuis une vingtaine d’années, qui se produisent aujourd’hui et qui se produiront sans doute demain aussi, seront mis en relief.

L’ÉPISTEMOLOGIE DE L’ÉTUDE ET DU CONCEPT

Qu’est ce que la périurbanisation ? Depuis quand on parle de périurbanisation et d’espaces périurbains ? Où ce processus est-il né ? Quels facteurs ont contribué à l’apparition de ce phénomène ? Quels auteurs ont traité de cette question et dans quels domaines d’études estelle présente ? Voilà autant de questions qu’on se pose quand on évoque le mot périurbanisation.

Ce phénomène n’est qu’une étape de l’étalement urbain, processus d’urbanisation qui s’étend en dehors de toute limite et au détriment des terres agricoles et de l’environnement naturel. Ce grand processus comprend plusieurs phases qui se sont succédé au fil du temps, mais avec des degrés de réalisation différents en fonction des pays. Le contexte historique et le développement économique, qui est d’ailleurs en lien fort avec l’histoire, pèsent beaucoup dans ce contexte d’expansion urbaine. L’urbanisation, la suburbanisation, la périurbanisation, la rurbanisation, autant d’appellations qui renvoient finalement au même processus. L’étalement urbain touche l’humanité dès le Moyen Age.

Notre étude s’inscrit dans deux géographies différentes : urbaine et rurale, puisque c’est un domaine d’études à cheval : mi-urbain, mi-rural. Le processus que nous allons étudier porte sur des questions d’urbanisation dans le milieu rural en comprenant également l’extension urbaine des villes : Bucarest d’abord et ensuite les pôles urbains présents autour de la capitale roumaine. La géographie urbaine ainsi que la géographie rurale sont deux branches de la géographie humaine et sociale, celle-ci analysant l’homme, son comportement, ses actes et les interactions avec l’espace dont il fait présence. Bucarest connaît une croissance urbaine importante depuis deux décennies et manifeste son influence fortement sur l’espace qui l’entoure : première, deuxième, même troisième couronne de communes urbaines et rurales .

La ville s’étend continuellement et elle se transforme, les moyens d’extension urbaine qui existent étant très différents : extension tentaculaire tout au long des axes de communications, en tache d’huile en continuité de l’espace urbanisé ou en mitage, constructions par ci et par là, ces trois formes étant présentes en Roumanie et notamment à Bucarest. Nous analyserons par la suite l’apparition du phénomène d’étalement urbain tel qu’on le définit aujourd’hui avec la naissance du terme « périurbain ».

La coexistence d’une multiplicité de termes pour définir le processus périurbain 

Le phénomène de périurbanisation est lié au développement des espaces suburbains dans les pays industrialisés et à l’apparition des zones métropolisées dans les pays en développement, tel que le rapport Newrur l’affirme. Historiquement c’est aux États-Unis qu’est apparue, après la Seconde Guerre mondiale, une conurbation au nord-ouest du pays où le rural ne se distinguait plus de l’urbain. Souvent les centres ont perdu de leurs habitants, pendant que les périphéries en gagnaient. Le phénomène a pris de l’ampleur dans les années 1960 dans de nombreuses villes de l’Europe Occidentale ou des pays anglo-saxons. En Europe de l’Est, et en l’occurrence en Roumanie, la périurbanisation, telle qu’on le définit aujourd’hui, marque son existence depuis à peine deux décennies.

L’urban sprawl : le rêve américain

L’urban sprawl est un processus naissant du désir des Américains d’avoir une maison avec jardin, cadre de vie idéal dans leur vision. La banlieue américaine a été pensée comme une alternative à l’entassement urbain, considéré à l’origine de tous les maux de la société. Il y a trois courants qui ont convergé dans la réalisation de ce souhait : le transcendantalisme, le féminisme domestique et la religion. Le transcendantalisme correspond à « une vision de la banlieue planifiée sublimant la ville » (Ghorra-Gobin, 2003, pp.17-28), courant philosophique revendiquant la nature comme garant de la civilisation. C’est l’idée du mythe pastoral. Le féminisme domestique renvoie à l’organisation de la famille en banlieue avec la division des tâches entre les hommes et les femmes : l’homme qui fait vivre sa famille en allant travailler en ville et la femme mère au foyer. La religion, quand à elle, fait appel à la spiritualité, à vivre proche de la nature, donc en harmonie avec Dieu.

La banlieue, représente une continuité entre la société urbaine et la société rurale, « un compromis entre la ville et la campagne, lieu d’implantation des maisons entourées des jardins, loin du chaos et du désordre de la ville » (Ghorra-Gobin, 2003, p.8, Op. cit.). L’étalement urbain aux États-Unis se traduit à partir des années 1930 par l’accession à la propriété d’un grand nombre de familles. Le prix attractif du foncier, l’aide de l’État ainsi que l’essor des routes et la construction des voies rapides, sont les raisons les plus importantes qui ont poussé ces familles à quitter la ville et aller vivre en banlieue.

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Table des matières

INTRODUCTION GÉNÉRALE
L’ESPACE PÉRIURBAIN BUCARESTOIS : DU COMMUNISME AU POSTCOMMUNISME
PREMIÈRE PARTIE PROBLEMES THÉORIQUES CONCERNANT LA PÉRIURBANISATION. REGARDS SUR LA ROUMANIE
CHAPITRE I : L’ÉPISTEMOLOGIE DE L’ÉTUDE ET DU CONCEPT
CHAPITRE II : LES DIFFÉRENTES PHASES DE L’ÉTALEMENT URBAIN EN ROUMANIE
CHAPITRE III : BUCAREST COMME RÉFÉRENCE POUR L’ÉTALEMENT URBAIN EN ROUMANIE
CHAPITRE IV : COMPARAISONS EUROPÉENNES DU PROCESSUS D’ÉTALEMENT URBAIN
DEUXIÈME PARTIE CHANGEMENTS IMPORTANTS DEPUIS UNE DECENNIE EN TERMES DE POPULATION ET D’HABITAT AUTOUR DE BUCAREST
CHAPITRE V : POLITIQUES PUBLIQUES ET INITIATIVES PRIVÉES ORIENTÉES VERS L’ÉXTENSION
CHAPITRE VI : CARACTÉRISTIQUES DÉMOGRAPHIQUES, QUALITATIVES ET QUANTITATIVES, DANS L’ESPACE DE L’ÉTALEMENT
CHAPITRE VII : L’HABITAT – UNE PRESSION URBAINE CENTRÉE VERS LE NORD ET L’OUEST BUCARESTOIS
TROISIEME PARTIE DYNAMIQUES AGRICOLES ET DES ESPACES ÉCONOMIQUES COMME CONSÉQUENCE DES MOBILITÉS ET DES TRANSPORTS
CHAPITRE VIII : LE RECUL DE L’AGRICULTURE ET L’EXTENSION DES ESPACES ÉCONOMIQUES AUTOUR DE BUCAREST
CHAPITRE IX : LES RETARDS DES TRANSPORTS EN MATIÈRE D’INFRASTRUCTURES ET DE POLITIQUES
CHAPITRE X : LES MOBILITÉS LIÉES AU TRAVAIL ET À LA RECHERCHE DES ÉQUIPEMENTS ET DES SERVICES, DES ACHATS ET DES LOISIRS
QUATRIÈME PARTIE LA GOUVERNANCE, LE POLYCENTRISME ET LE DÉVELOPPEMENT DURABLE, DES PRATIQUES QUI ÉMERGENT
CHAPITRE XI : L’ÉMERGENCE D’UN SYSTÈME MULTI-NIVEAUX EN TERMES DE GOUVERNANCE
CHAPITRE XII : LE POLYCENTRISME EN EUROPE. QUELLE APPLICATION POUR LA ROUMANIE ET LA ZONE PÉRIURBAINE DE BUCAREST ?
CHAPITRE XIII : LE DÉVELOPPEMENT DURABLE : UN OBJECTIF QUI SEMBLE DIFFICILE À ATTEINDRE À COURT TERME
CONCLUSION GÉNÉRALE
BIBLIOGRAPHIE

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