Les Vigiles de Tahar DJAOUT : un roman moderne ?

Les Vigiles de Tahar DJAOUT : un roman moderne ?

Le personnage :

Toute interrogation sur un roman doit passer à notre sens par une interrogation sur cet être de papier crée par l’écrivain qui constitue un moteur pour sa fiction. Il est tellement important que Virginia Woolf a réduit toute la valeur de la création romanesque à des personnages en disant : « la base d’un roman [est] la création de personnages, et cela seulement33 . Le personnage est un élément nécessaire à toute narration. Il est le pole auteur duquel s’agence toute la trame de l’histoire et du point de vue du littéraire il est la clé pour ouvrir et dévoiler l’histoire du roman puisque il constitue un élément clé, à ce propos G.Genette dit : « Les personnages ont un rôle essentiel dans l’organisation des histoires. Ils permettent les actions, les assument, les subissent, les relient entre elles et leur donnent sens. D’une certaine façon, toute histoire est histoire des personnages. »34 C’est pour cela que notre intention est portée sur lui afin de voir la représentation du personnage principal Lemdjad dans Les Vigiles, et essayer de déceler toutes les innovations de la part de l’écrivain Avant d’entamer notre analyse nous devons proposer d’abord une définition du
personnage de l’intrigue classique est définit par Robbe-Grillet : Un personnage, tout le monde sait ce que le mot signifie. Ce n’est pas un il quelconque, anonyme et translucide, simple sujet de l’action exprimée par le verbe. Un personnage doit avoir un nom propre, double si possible : nom de famille et prénom. Il doit avoir des parents ; une hérédité. Il doit posséder un caractère, un visage qui le reflète, un passé qui a modelé celui-ci et celui-là. Son caractère dicte ses actions, le fait réagir de façon déterminée à chaque évènement. Son caractère permet au lecteur de le juger, de l’aimer, de le haïr. C’est grâce à ce caractère qu’il léguera un jour son nom à un type humain, au attendait, dirait-on, la consécration de ce baptême

Héros vs antihéros

Du point de vue littéraire, le personnage est la clé pour ouvrir et dévoiler l’histoire du roman, il constitue un élément clé, le héros dans la littérature classique, par exemple épique est définit comme « les héros est celui qui fait preuve d’heroisme comme le dit l’expression se comporter en héros », mais ici nous allons plutôt parler d’un sens plus « léger »c’est-à-dire celui d’un noyau central de l’histoire . « Le mot héros, est employé au sujet du roman, équivaut à celui de personnage, à cette nuance près que l’on parlera de héros que pour le personnage principal, ou à la rigueur pour un personnage secondaire à condition qu’il joue, fut-ce fugitivement, un rôle essentiel dans l’action »
Cependant le terme antihéros est souvent mis en opposition avec celui du héros comme l’indique Y.Stalloni : « Si le roman a toujours aimé à proposer des personnages d’exception, hors du commun, qui méritent le nom de « héros » car affecté d’une positivité absolue, il a également sécrété, par réaction naturelle, une tendanceinverse : l’invention des «héros négatifs », des personnages sans épaisseur ou sans intérêt, voire totalement antipathiques, qu’on a pris l’habitude d’appeler, tout naturellement, antihéros. »37 Et il nous parait essentiel, avant toutes analyses sur le personnage il faut d’abord le classifier comme héros ou antihéros, dans les vigiles, le personnage principal qui est Lemdjad, présente un être humain ordinaire qui n’a rien à avoir d’héroïque, dès le début on nous annonce que Lemdjad ne déploie pas tous ses efforts et préfère aménager son énergie. Donc le personnage de notre roman est plutôt un antihéros mais pas un antihéros qui signifie un caractère négative, c’est-à-dire le contraire du héros mais au sens qui est appliqué aux personnages romanesques qui jouent des rôles d’êtres indolents, indiffèrent et quasi inexistants mais il est au sens d’un antihéros personnage principale mais qui ne fait rien. Lemdjad est un individu parmi d’autre, replie sur lui-même, étrange à ce qui lui arrive, il est une extériorité livré aux regards et aux jugements des autres (la confrontation avec le service de la marie), ce qui donne qu’il est plus un antihéros qu’un héros.

La non désignation du personnage (héros)

Les personnages dit traditionnels sont d’emblés doter d’attributs (hérédité, caractère, passé), il est vrai que la description des personnages chez Balzac, est très riche, les personnages acquirent une identité civile, le lecteur balzacien dans le pèreGoriot, apprendà connaitre madame Vauquer à travers la description de sa pension. Dans Les Vigiles le personnage principal apparait non déterminé, certes il possède un nom et un prénom, mais ni son physique, son passé et son caractère ne sont cités : « Du café corsé dont l’odeur pénètre comme un spiritueux, la pipe exhalant le tabac parfumé ainsi qu’un vieux passé de résine et sous-bois, un amas irrégulier de feuilles labourées d’écriture et de schémas : Mahfoudh Lemdjad aime cet univers intime, enclos ces choses familières, sécurisantes et stimulantes » Ici l’être exceptionnel, modèle incontestable, s’est substitué à un être commun, loin du personnage traditionnel qui doit être unique. Ce qui déstabilise le lecteur puisque il ne sait rien des particularités physique du personnage. D’entrée de jeu on a l’impression de le lecteur a déjà fait connaissance avec le personnage, aucune présentation ni description lui sont consacrées ; on assiste à la disparition de la description métonymique de chez Balzac, qui est faite pour rendre compte de cet effet de miroir qui s’établit entre le personnage et le milieu dans lequel il évolue. Dans ce roman le personnage se construit dans le temps romanesque, il est un être errant, c’est au fur et à mesure de la lecture que des indices sont parsemés(le personnage porte des lunettes, c’est un trentenaire) mais aucune description physique et psychiques n’est fourni.
Même si chez Philippe Hamon la description demeure l’élément principal de mise en lumière du personnage : « La description doit être au service de la composition de la lisibilité d’un « caractère », d’un personnage de l’intrigue, donc la lisibilité globale du système des personnages de l’œuvre, donc d’une cohérence, si la description doit être au service du  personnage, ce n’est pas n’importe quel personnage, mais (hiérarchisation dans la hiérarchie) des personnages « principaux ». D’où la règlementation de la fonction, voire de la place, du portrait »
Or, ici le lecteur est surpris, voire déstabilisé, par la non détermination du personnage, la description ne met pas en lumière le personnage principal, et les autres personnages ne sont pas hiérarchisés. Les caractères et portraits sont extrêmement rares et peu développés, le lecteur ne sait rien des particularités physique du personnage.

Le rêve comme moyen de s’identifier

Le rêve de Mahfoudh de ressusciter le savoir ancestral de sa grand-mère, c’est-à-dire le métier à tisser : « Mahfoudh s’était promis de ressusciter, en l’allégeant, l’agrémentant et le simplifiant, l’instrument qui restait pour lui l’évocation impérissable du visage et des gestes enchanteurs de sa grand-mère ». Ce rêve peut être considéré comme une volonté ou quête identitaire, mais cette quête n’est pas conçue comme simple action héroïque comme dans les romans traditionnels, où le
héros doit dépasser ses propres limites pour atteindre son objectif, dans ce roman cette quête est doublée d’une angoisse, d’inquiétude et d’une incertitude tout au long du roman. Mahfoudh se retrouve dans un monde qu’il semble ignorer et qui l’ignore, il ressent un sentiment d’inadaptation et d’incompréhension. Son invention est mal perçue, comme le dit le secrétaire générale de la mairie : « Vous n’ignorez pas que dans notre sainte religion les mots création et invention sont parfois condamnes parce que perçus comme une hérésie, une remise en cause de ce qui est déjà, c’est-à-dire la foi de l’ordre ambiante »
On pourrait dire que c’est une quête de soi-même, contre une société dont il se sent exclu, mais cette identité ne peut être considérée comme un refus d’une réalité dont l’Algérie est plongé dans les années 90.Le personnage regarde la réalité d’une certaine distance, il se met à analyser et à juger cette société dont il se sent exclu, et il vit le présent sans trop s’impliquer dans sa lutte. Lors du passage à l’acte, dans différents moments où il doit agir, le personnage se mets à analyser, méditer et s’interroger sur ce qui l’entoure ou s’efforce de penser à autre chose. « Mahfoudh aurait tant donné pour voir la mer. Elle lui aurait rendu l’attente plus supportable. Mais ce lieu de chaleur et de bousculade ne possède aucune ouverture sur le large. Mahfoudh s’efforce néanmoins d’imaginer la mer. Ridée par une brise nonchalante .Sa peau parcourue à l’infini par un frisson de vaguelettes griffues. Il fait de grands efforts d’imagination »

L’individualisme du personnage

Le personnage dans ce roman présente une particularité, qui rend avec le roman traditionnel, qui est l’individualisme du personnage, dans les romans traditionnels une harmonie s’installe entre la société et le personnage, ici Mahfoudh présente une rupture avec la société dont laquelle il vit, le monde qui l’entoure est de de plus en plus étrange, le personnage s’isole, dès son apparition dans le roman à la page 27 il est cité que Lemdjad aime l’univers intime et enclos dans lequel il est, et tout au long du roman il est décrit dans des endroits clos comme dans le bar du scarabée. Il y’a une incompatibilité entre lui et le monde qui l’entoure, dans ce roman le personnage ambitieux se heurte à une injustice sociale, à un système corrompue Autre chose, le personnage n’interagit pas avec les autres personnages, Lemdjad se met à l’ écart et se donne à la rêverie « Mahfoudh n’écoute que par intermittence, ménageant dans son esprit de long espaces de rêveries » La conception de cet individualisme est relie aux valeurs du monde dans lequel il est pris à parti, ce qui fait que le personnage n’est pas seulement un élément de la poétique du récit, mais aussi comme un contenu idéologique.

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Table des matières

Introduction  
Chapitre I  L’organisation narrative 
1. Le schéma narratif 
2-La narration
3-L’intrigue
4-Le personnage
Chapitre II : L’écriture fragmentaire entre discontinuité et transgénéricité 
1.La discontinuité
2.Le fragmentaire dans le genre
Conclusion 
Bibliographie .

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