Les variations transitoires du champ magnétique terrestre

 Les sources solaires

L’action du Soleil sur la Terre résulte essentiellement de quatre types d’interaction :
– L’interaction gravitationnelle : la masse du Soleil commande le mouvement de la Terre sur son orbite dans l’espace. La présence des autres planètes cause des fluctuations de son orbite et entraîne les fluctuations du flux de rayonnement reçu par la Terre.
– L’interaction électromagnétique (rayonnement) : le rayonnement du Soleil maintient notre planète à température favorable.
– L’interaction magnétique : le champ magnétique du Soleil s’étend loin dans le système solaire, et interagit fortement avec le champ magnétique terrestre.
– L’interaction particulaire, due au vent solaire.

L’interaction gravitationnelle et le rayonnement visible peuvent être considérés comme “constants” sur les échelles de temps “humaines”. Cependant, le rayonnement non-visible (UV, X), le vent solaire, et l’activité magnétique solaire sont très fluctuants. Dans la partie qui suit, nous insisterons sur le rayonnement électromagnétique et le vent solaire qui sont les sources permanentes issues du Soleil, qui président à la formation de la magnétosphère et de l’ionosphère.

Le rayonnement électromagnétique

Le Soleil émet dans l’espace un rayonnement électromagnétique (ondes radio, micro-ondes, infrarouges, lumière visible, ultraviolets, rayons X, rayons gamma) dont les longueurs d’onde sont comprises entre 10−13 m et 10 m. 99% du rayonnement total du Soleil est émis par la photosphère, sur la gamme de longueurs d’onde comprise entre 10−7 et 10−4 m. La photosphère est la “surface” visible du Soleil (voir la figure 2.1). Sa température est à peu près 6000 K. Le spectre de rayonnement de la photosphère est approximativement décrit par celui d’un corps noir à 6000 K (voir la figure 2.2). Le flux total de ces ondes est peu variable dans le temps. Les longueurs d’onde correspondantes aux extrêmes ultra-violets (EUV), aux rayons X et aux rayons gammas dominent lors de fortes activités solaires, notamment durant les éruptions solaires. Le taux maximum des éruptions solaires intervient au maximum de l’activité solaire du cycle de taches. Au maximum du cycle de tâches il y a 10 fois plus d’éruptions solaires qu’au minimum.

Sous l’effet des rotations différentielles du Soleil, les lignes de champ magnétique se déforment, s’enroulent, se torsadent… “Quand les lignes de champ deviennent très denses, il se produit une sorte de hernie au-delà de la photosphère, provoquant localement des tubes de champs magnétiques intenses, perpendiculaires à la surface. Dans cette zone, la matière se trouve freinée par les lignes de champ (ou organisée par elles), les apports de chaleur par des zones voisines se font mal, le gaz se refroidit, donnant naissance à une tache.” (Lilensten et Blelly, 2000). “Les taches solaires, parfois groupées, sont plutôt localisées entre 40° de latitude nord et 40° de latitude sud. Elles semblent plus sombres parce que leur température est plus basse : 4000 degrés environ.”(Lilensten et Blelly, 2000). La couronne solaire s’étend d’environ 15000 km de la photosphère jusqu’à 2 rayons solaires. Elle émet la lumière blanche dans le visible. L’intérieur de la couronne est très chaud (plus chaud que la photosphère) et turbulent. Les éruptions solaires se produisent souvent au sommet des boucles magnétiques coronales qui relient les taches solaires sous-jacentes (voir la figure 2.3 a), mais aussi dans les régions actives où il n’y a pas de taches solaires. L’éruption solaire se déroule en trois phases : précurseur, impulsive et post impulsive. La durée d’une éruption solaire peut varier de quelques minutes à quelques dizaines de minutes (voir la figure 2.3 b). La première phase, ou précurseur, déclenche la libération de l’énergie magnétique, qui a été stockée dans des boucles coronales. Dans cette phase, les émissions sont produites dans l’extrême ultraviolet (les rayons X mous) et dans les ondes radio. Après au plus quelques minutes, la phase impulsive ayant libéré brutalement l’énergie primaire au sommet de la boucle coronale, les électrons et les protons sont rapidement accélérés (en une seconde ou moins) à des vitesses approchant la vitesse de la lumière, puis ils sont redirigés dans le soleil ou éjectés dans l’espace. Les électrons à haute vitesse émettent un rayonnement radio aux environs de l’apex de la boucle coronale (figure 2.3a). Les électrons non thermiques descendent en spirale le long des canaux magnétiques en générant des émissions radio intenses. L’énergie est transportée vers le bas par les électrons et les protons en suivant l’arche magnétique coronale pour entrer dans la chromosphère sous-jacente plus dense. Ici, le faisceau de particules est ralenti par les collisions (le rayonnement de freinage), émettant des rayons X durs et des rayons gamma aux extrémités de la boucle. La chromosphère est chauffée très rapidement par les particules accélérées, elle ne peut pas se débarrasser de l’excès d’énergie et elle engendre donc la montée explosive du matériau chauffé (appelée l’évaporation chromosphérique) dans la couronne. Ce matériau chauffé remplit probablement la boucle coronale complètement. La boucle coronale s’assouplit en une configuration plus stable, l’énergie est libérée de façon plus graduelle. Dans cette phase, les rayonnements X mous et EUV augmentent en raison du matériau chauffé dans la boucle. Il existe une troisième source solaire : les éjections de masse coronale. Leur découverte a été faite en 1973, grâce à des coronographes embarqués sur des satellites dans l’espace. Les éjections de masse coronale sont des changements observables de la structure coronale, qui durent de quelques minutes à quelques heures, elles apparaissent brillantes en lumière visible dans la couronne, et surtout, impliquent une expulsion de plasma et de champ magnétique de la couronne vers l’espace interplanétaire. Les éjections font perdre 10¹²kg de masse au Soleil par jour. Leurs vitesses sont très variables, allant de 100 à 2000 km/s.

Le vent solaire

Le vent solaire a été découvert dans les années 1950 quand on a remarqué que la queue des comètes pointe toujours dans la direction opposée au Soleil et ceci même lorsque la comète s’éloigne du Soleil. Il y a des mesures du vent solaire faites à bord des satellites depuis 1962. Une particule échappe à l’attraction gravitationnelle du Soleil lorsque sa vitesse est plus grande que la vitesse d’évasion du Soleil (618 km/s). Dans la couronne solaire (de 15000 km à quelques rayons solaires) où la température atteint un million degrés Kelvin, il y a un grand nombre de particules qui ont des vitesses suffisamment grandes pour échapper au Soleil. Ces particules forment le vent solaire. Le vent solaire est un flux de plasma constitué de protons, de noyaux d’hélium, et d’électrons. Ce flux de plasma emporte avec lui le champ magnétique du soleil. Le vent solaire est donc un plasma magnétisé. Le champ magnétique emporté par le vent solaire est à l’origine de l’existence du champ magnétique interplanétaire (l’IMF – Interplanetary Magnetic Field, en anglais).

Le vent solaire est très peu dense (10 particules par centimètre cube), mais très rapide. On distingue deux types de vent solaire: le vent solaire rapide et le vent solaire lent. Le vent solaire rapide a des vitesses d’environ 750 km/s au niveau de l’orbitre terrestre. Ce type de vent est émis par les trous coronaux qui sont principalement localisés aux pôles du Soleil. Le vent solaire lent dont la vitesse est d’environ 400 km/s, est éjecté au dessus de la photosphère calme, dans les régions près de l’équateur du Soleil. Il existe des processus d’accélération du vent solaire qui sont mal connus aujourd’hui. Actuellement une hypothèse pour expliquer cette accélération du vent solaire serait le transfert d’énergie engendrée par la turbulence des grandes échelles, 100km, aux petites échelles, 10km.

L’environnement ionisé de la Terre

La magnétosphère

En passant au voisinage de la Terre, le vent solaire modifie la forme du champ magnétique autour de la Terre et son écoulement est dévié par l’obstacle que constitue le champ magnétique terrestre. La magnétosphère de la Terre est la cavité formée par le champ magnétique terrestre dans le vent solaire.

Portrait de la magnétosphère

Dans la magnétosphère, la densité de particules chargées est faible, il y a peu de collisions, le champ magnétique terrestre domine le mouvement des particules chargées. L’interaction avec le vent solaire déforme le champ magnétique terrestre, qui est fondamentalement un champ dipolaire, en comprimant les lignes de champ sur le côté jour et en les étirant pour former une longue queue sur le côté nuit. Du côté jour, la magnétosphère s’étend jusqu’à une distance d’environ 10 rayons de la terre (RT ), en moyenne, tandis que la queue de la magnétosphère s’étend sur plusieurs centaines de RT du côté nuit. La limite externe de la magnétosphère, appelée magnétopause, est la région où la pression totale (la somme de la pression dynamique et des pressions thermiques et magnétiques) du vent solaire équilibre précisément toute la pression à l’intérieur de la magnétosphère. Dans un plan perpendiculaire à la direction Soleil-Terre, la section de la magnétopause a une forme ovale. La magnétosphère s’étire et se distend pour former la queue de la magnétosphère dans la direction opposée au Soleil. Dans la direction verticale, le rayon de la magnétopause est en général de 15 RT (figure 2.6). Du côté nuit, la magnétosphère se referme à 25-30 RT . A l’avant de la magnétopause, du côté jour, à la distance d’environ 12-14 RT du centre de la Terre, se situe l’onde de choc, où le vent solaire supersonique ralenti par le champ magnétique terrestre devient subsonique (figure 2.6). Cette région est appelée l’onde de choc car elle se forme comme les ondes qui s’empilent devant l’étrave d’un aéronef en mouvement supersonique dans l’atmosphère. Entre l’onde de choc et la magnétopause, il y a la magnétogaine. C’est une région de transition entre le vent solaire libre et la magnétosphère terrestre. La magnétogaine est remplie d’un plasma provenant directement du vent solaire, pour lequel l’énergie cinétique du mouvement d’ensemble a été en grande partie transformée en énergie cinétique de mouvements aléatoires, ainsi qu’en énergie d’ondes. Cette région est dominée par l’IMF (champ magnétique interplanétaire).

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Table des matières

1 Introduction
2 Les variations transitoires du champ magnétique terrestre : sources et principales caractéristiques
2.1 Le Soleil et le rayonnement solaire
2.1.1 Les sources solaires
2.1.2 Le rayonnement électromagnétique
2.1.3 Le vent solaire
2.2 L’environnement ionisé de la Terre
2.2.1 La magnétosphère
2.2.1.1 Portrait de la magnétosphère
2.2.1.2 Courants de la magnétosphère
2.2.2 L’ionosphère
2.2.2.1 La formation de l’ionosphère: modèle de Chapman
2.2.2.2 Les régions ionosphériques
2.2.2.3 Dynamo ionosphérique
2.2.2.4 Les systèmes de courants ionosphériques
2.3 Le champ magnétique transitoire
2.3.1 La variation diurne
2.3.2 L’activité magnétique irrégulière
2.3.2.1 Les sous-orages magnétosphériques
2.3.2.2 Orages magnétiques
2.3.3 Le champ magnétique transitoire au Vietnam
3 Le sondage MT
3.1 Bases physiques
3.1.1 Les équations de Maxwell – Etats quasi-stationnaires
3.1.1.1 Les équations de Maxwell
3.1.1.2 Approximation des états quasi-stationnaires
3.1.2 Un cas simple: demi-espace conducteur
3.1.2.1 Milieu isolant
3.1.2.2 Induction pour une source harmonique
3.1.3 Influence de la géométrie de la source
3.1.3.1 Le cas de l’onde plane : la magnétotellurique (MT)
3.1.3.2 Cas général et effets de source
3.2 La magnétotellurique (MT)
3.2.1 Demi-espace conducteur
3.2.2 Cas 1-D
3.2.3 Cas 2-D
3.2.3.1 Equations
3.2.3.2 Détermination de la dimensionnalité
3.2.3.3 Détermination de la direction principale
3.2.3.4 Un exemple de résolution numérique
3.3 Sondages électromagnétiques dans les zones équatoriales
3.3.1 Cas d’une distribution de courants gaussienne
3.3.2 Conclusion
3.4 Les données : acquisition et traitement
3.4.1 Équipement
3.4.1.1 Capteurs magnétiques
3.4.1.2 Capteurs telluriques
3.4.1.3 Chaîne d’acquisition des données
3.4.2 Acquisition de données
3.4.3 Traitement de données
3.5 Le problème inverse
3.5.1 Cas 1-D
3.5.2 Cas 2-D
4 Etude du bassin de Ha Noi
4.1 Contexte géologique
4.1.1 Histoire tectonique de l’Asie du Sud Est
4.1.2 La dépression de Ha Noi
4.1.2.1 Les campagnes de terrain
4.1.2.2 Structure de la dépression de Ha Noi
4.2 Le profil MT
4.2.1 La campagne de terrain
4.2.2 Traitement des données
4.2.3 Analyse du tenseur d’impédance
4.2.4 Inversion 2-D des données
5 Conclusion

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