Télécharger le fichier pdf d’un mémoire de fin d’études
Le rôle joué par les Raiamandreny
En général, on doit respecter les anciens qui détiennent la sagesse héritée des ancêtres. «ela nietezana ka lava volo », « Hevitry ny ntaolo ka lalina ». Cela veut dire, qui ne se sont coupés les cheveux depuis longtemps, les portent longs. La pensée des ancêtres est profonde. Cette sagesse s’acquiertavec le temps, avec l’expérience (cf. PLATON, in La République, Livre III). Elle estdétenue par les anciens qui ont eu le temps de vivre. Les jeunes doivent puiser cette sagesse auprès des aînés Zoky( rai-amandreny12) qui ont reçu en dépôt l’héritage des ancêtres «Monona ambany saokan’ny hendry » à demeurer sous le menton des sages, on devient sage.
C’est pour cette raison qu’en milieu r ural, il est particulièrement difficile d’apporter une innovation. Le mode de transmission directe de la sagesse héritée des ancêtres se trouve perturber par l’intrusion étranger dont la valeur est contestable.
Les raiamandreny symbolisent donc la sécurité, la stabilité. Ils doivent protéger l’univers du clan, du village contre toutes perturbations extérieures. Ils assurent la liaison entre les ancêtres et les générations à venir.
Cette position n’est pas toujours favorable du point de vue économique car les conséquences sont nombreuses :
le jeune n’ayant pas de droit à la parole est conda mné à vivre dans un milieu sclérosé et rigide. Il n’a aucune possibilité d’affirmer sa personnalité. C’est ainsi qu’on arrive à trouver des hommes de 30-40ans pères de familles qui vivent sous l’entière dépendance du père ou du grand-père. Il ne peut donc décider tout seul sans l’accord préalable de ces derniers.
Les raiamandreny sont hostiles à toute intervention susceptible d’amenuiser leur autorité. Ainsi s’opposeront-ils à toute nouveauté qui pourrait renverser les rapports de force. Par exemple, certaines opérations économiques visant à donner une autonomie financière aux jeunes ; l’éducation des femmes et des filles, susceptible de les rendre moins soumises…
Mais on peut également utiliser efficacement cette autorité des raiamandreny en les consultant fréquemment ce qui peut n’être qu’une simple règle de préséance, mais aussi peut éviter de faire des erreurs graves. Il faut mettre à profit leurs connaissances et leur savoir pour mieux comprendre et mieux appréhender l’approche d’un milieu ; en sollicitant leur adhésion entière pour toute action de développement.
Le culte des ancêtres :
Idéologiquement, les valeurs qui règnent dans les rapports à l’intérieur du groupe de parenté sont fondées sur les valeurs du ultec des ancêtres, les personnes âgées et les lignages anciens puisent leur autorité du fait de leur proximité des ancêtres et on essaie de vivre selon leurs prescriptions, relatées par les anciens et cristallisées dans les proverbes (ohabolana).
Les ancêtres sont des « dieux ». En ffet, le passage de la vie à la mort divinise la personne13 (RAJAOSON (F.), 1969). On invoque leur protection : « Ho tahian’andriamanitra sy ny razana » . Les paroles des ancêtres doivent être suivies et respectées sous peine de sanctions graves. D’où, on pense toujours que les paroles des ancêtres sont sacrées et justes. De ce fait, on peut également demander la protection des ancêtres soit par un sacrifice rituel : coq rouge, zébu,…dans les régions où le culte des ancêtres est très vivace. Cela peut être le seul moyen de s’attirer la confiance des paysans.
L’attachement à la terre :
Ce patrimoine joue un rôle important da ns le comportement du paysan et occupe une place de choix dans son échelle de valeurs. En effet, la terre est traditionnellement sacrée, comme terre des ancêtres (Tanindrazana).
En partant de l’histoire de Madagascar, le roi Andrianapoinimerina avait déjà, de son temps, mis au point la législation sur l’attribution des terres. Celles-ci appartiennent à celui qui mettait en vale ur14. Il y a un lien qui s’instaure entre le propriétaire et les génies du sol. Pour que la terre soit féconde, il faut qu’elle passe aux descendants de ceux qui l’ont cultivée en premiers. La terre devient donc propriété du clan familial. Elle acquiert une valeur sacrée. C’est pour cette raison que le paysan reste attaché à la terre des ancêtres. Celui qui osera vendre le « Tanindrazana » est considéré comme le dernier des hommes fara(-faika : la lie). Cet acte lui attire immanquablement la colère des ancêtres, et ses entreprises futures sont à l’avance vouées à l’échec à plus au moins lo ngue échéance. Il est dépouillé de la partie de lui-même et c’est un signe de malédiction (Ozon-drazana). En un mot « la terre est une essence de l’identité du groupe parental »15
Le territoire que le paysan habite est un facteur important du milieu dans lequel il évolue. Ses caractéristiques propres: sol, climat, relief…conditionneront son comportement. Il se sent ira solidaire de ce milieu et en équilibre avec tout son environnement. Lorsqu’il s’en éloigne, il se sentira perdu et en gardera une perpétuelle nostalgie.
Dans ce sens, la terre, en dehors de sa valeur intrinsèque, possède une valeur plus impalpable, proportionnelle à ce qu’ell e représente pour l’individu. Par exemple, « Ny lova navelan-dRay anan-dReny » (héritage des parents) de loin, a plus de valeur qu’un terrain acquis par soi-même indépendamment de sa valeur vénale.
La croyance aux « sampy », aux « ody », aux « vazimba »
Les apports extérieurs de la civilisation ou de la religion n’ont pas fait disparaître les croyances aux « sampy », « ody » et « vazimba ». Les personnes de l’extérieur les qualifient de superstitions, sans chercher à comprendre leurs origines et leurs significations.
Le monde rural est un monde dominé par la nature. Les phénomènes naturels prennent pour les ruraux une valeur disproportionnée, par rapport à celle que leur accordent en général les gens des villes. La foudre, la grêle etc.…revêtent un sens de punitions consécutives à l’infraction d’une loi ou d’un interdit. C’est ainsi que les ruraux s’entourent de protecteurs : les « sampy » ou idoles qu’ils vénèrent ; les « ody » ou talismans contre les maux. Les « vazimba », anciens habitants, sont encore redoutés : Les « tanim-bazimba » (terrain de vazimba), ou les « fasam-bazimba » (tombeaux de vazimba) sont sacrés et ne doivent pas être profanés 16(DURKHEIM, 1925). On doit même offrir des sacrifice pour les apaiser. Ces croyances sont encore très vivaces dans toute l’île même dans les régions déjà touchées par le christianisme. Parfois, elles peuvent être antiéconomiques :les tanim-bazimba ne doivent pas être mises en cultures et malheur àceux qui oseraient s’y hasarder. Ou bien les mpanao ody détenteurs des talismans peuvent avoir un rôle néfaste ; on a recours à eux pour jeter un sort sur un concurrent qui réussit trop. Ils sont généralement craints de la population et peuvent avoir des influences considérables sur son comportement.
Ceci nous amène à la conclusion que l’essentiel des sampy, c’est qu’ils constituent la consécration magique du pouvoir légit me. La religion chrétienne a fortement entamé cette perception des sampy et les a même substitués par des dévotions aux représentations concrètes des saints(statues, médailles, chapelet,…) Une fois que les pratiques magiques communes en fonction de la cohésion du groupe se sont désagrégées, les techniques magiquesont tendance à se transformer en pratiques magiques individuelles indépendants ou même contraires aux valeurs sociales. Ainsi l’individu peut-il obtenir pour des buts personnels soit réussite dans ses actes illégaux, soit pour satisfaire des sentiments de haine, d’inimitié, de jalousie, un concours d’ordre magique par l’emploi des « ody ».
La croyance en « ZANAHARY »
Zanahary est un Etre Supérieur dont la définition eutp varier d’une ethnie à une autre. « Zanahary » gouverne la destinée des hommes. Il récompense les bons et punit les mauvais. La perception de cette puissance supérieure qui exerce une force mystérieuse et inconnue, conditionne l’attitude fondamentale du paysan. La crainte de « Zanahary » lui dicte sa conduite vis-à-vis de la communauté. Ses comportements sociaux ou économiques échappent alors à des personnes de l’extérieur. En effet, l’étranger ne peut expliquer certains faits : dépenses sacrificatoires en argent, en récoltes ou en animaux, élaboration de tout système de tabous et d’interdits pour préserver le « hasina ». Nous, en tant que chercheur doit saisie cette réalité et respecter cette autre perception du monde. Et on doit admettre que toute société humaine ressent la présence d’unêtre supérieur dénommé différent selon le cas, et qui dépasse la simple réalité objective. En fait, en tant qu’élément de la culture, « il faut remarquer que l’identité ne se réduit pas à un élément de la culture mais comme l’ensemble d’un destin collectif »17
Comme nous avons constaté plus haut, le fait d’êtredes créatures d’une même créature nous permet de « dépasser les frontières qui s’établissent selon la valeur de la parenté entre des personnes qui n’ont pas d’ancêtre connu en commun. L’invocation des Zanahary est en effet le seul recours à une autorité spirituelle possible entre étrangers. Toutes fois, selon la psycho-physiologique de « l’étroitesse de la conscience », nous pouvons supposer que, plus l’observation et la crainte des ancêtres et des génies de la nature occupe l’espritd’une personne, moins elle aura la possibilité de sentir la présence et le contrôle d’un être aussi vague et abstrait que zanahary. D’où notre proverbe, « aza ny lohasaha mangina no jerena fa Zanaharyao an-tampon’ny loha”. Ne pensez pas que la vallée soit solitaire, car dieu y est présent et domine tout (c’est-à-dire ne comptez pas la solitude pour faire le mal, car Dieu vous voit)
Les interdits :
Il peut sembler étrange de classer les « interdits » parmi les valeurs. Malgré son caractère négatif, l’interdit est une notion de la plus haute importance pour l’appréciation d’une culture. L’interdit relève de la sphère du sacré. En Polynésie, celui-ci est identique au « tabou » et ans doute, le malgache le désigne « fady »
Fady est défini par le dictionnaire MALZAC comme « ce qui est sacré, défendu, prohibé, ce dont on s’abstient ouontd on doit s’abstenir »
Le tabou n’est pas justifié consciemment et souvent, on a oublié ses origines. L’ensemble des tabous a pour but de protéger la société de ce qui est impur. Et considérer comme impur tout ce qui sort de l’ordinaire, de l’ordre établi : par exemple, une bête anormalement constituée est onsidéréec comme tabou, de même l’inceste qui est contraire aux lois biologique est aussi tabou…
Lorsque le groupe a été souillé par uneimpureté, il faut procéder à un rite de purification (ala-faditra). En générale, il s’agit de sacrifice : cop rouge,oie, zébu…Le sang avec lequel on oint la pierre sacrée, a une qualité purificatoire par excellence. Cependant, on peut utiliser le feu (exemple : pour chasser les esprits des défunts lorsqu’on retourne à la maison après un enterrement), l’eau ( rano masina) : les malgaches prennent un brin d’herbe et demandent leur délivrance en jetant superstitieusement ce brin d’herbe par derrière leur tête. Dans cette perspective, il conviendra d’examiner les interdits en s’aidant des critères suivants :
a) Classification des interdits :
Interdits alimentaires (certains castes ne mangent pas de viande de porc) Interdits de travail (le jour fady)
Interdits sociologiques (concernant les diverses couches sociales, parentales, inter-ethniques,etc…)
b) Appréciation socioculturelle des interdits : Il conviendrait de distinguer ;
Des interdits inconscients qui commandent des comportements mais que l’intéressé est incapable d’exprimer,
Des interdits conscients. Ceux-ci peuvent, à leur t our, se diviser en deux. D’une part, les interdits qui ne peuvent être levés(pour le maintient de l’équilibre du groupe social, par exemple, l’inceste). Et d’autre part, il y a des interdits qui peuvent être levés. Pour amorcerun processus de « levée d’interdit », il faut soigneusement tenir compte de divers facteurs. Premièrement, on doit chercher les bases objectives de l’interdit, ceci suppose une recherche de l’origine de l’interdit. D euxièmement, ce sont les bases subjectives, c’est-à-dire pour lever un i nterdit, il ne suffit pas de le « démystifier » en indiquant les origines, les diagnostiques, surtout l’impact de cet interdit sur le psychisme de l’indi vidu.
|
Table des matières
INTRODUCTION GENERALE
1-contexte
2-intérêt de la recherche
3-Motif du choix du thème
4-Motif du choix du terrain
5-Problématique
6-Objectifs généraux
7-Objectifs spécifiques
8-Hypothèses
9-Méthodologies
9.1. Les travaux préliminaires
9.2. Les concepts et instruments d’analyse
9.3. Techniques d’enquêtes
9.4. La phase exploratoire
9.5. L’enquête proprement dite
9.6. Techniques d’échantillonnage
10. Structuration du document
PREMIERE PARTIE : CADRE THEORIQUE ET PSYCHOLOGIQUE DE L’ETUDE
CHAPITRE 1 : La culture traditionnelle malgache
1. Les valeurs de bases au sein d’une communauté villageoise
1.1. La famille
1.1.1-La famille élargie
1.1.2. La famille restreinte
1.2. Le rôle joué par les Ray aman-dreny
1.3. Le culte des ancêtres
1.4. L’attachement à la terre
1.5. La croyance aux « sampy », aux « ody », aux « vazimba »
1.6. La croyance en « ZANAHARY »
1.7. Les interdits
2. Les valeurs empreignant les comportements économiques et sociaux
2.1. La valeur de l’ÊTRE
2.2. La valeur des relations affectives
2.3. Le système de communication : « La parole »
CHAPITRE 2 : Les structures sociales du milieu rural malgache
2.1. Les structures traditionnelles
2.1.1. Les ethnies
2.1.2. Les lignages
2.1.3. Les castes
2.2. La migration
2.3. Synthèse sur l’harmonie sociale malgache
DEUXIEME PARTIE : LE VECU PAYSAN A AMPASINA MANINGORY
CHAPITRE 3 : Présentation monographique de la commune
3.1. Historique de la commune
3.1.1.- Approche chronologique
3.1.2.- Les traits physiques de la commune
3.2.- La géographie humaine
3.2.1.- Localisation et rattachement administratif
3.2.2.- Les communes voisines
3.2.3.- Les fokontany constituants la commune
3.2.4.- Occupation des sols
3.3. Les caractéristiques démographiques
3.3.1.- Données démographiques
3.3.2.- Mouvement de la population
3.3.3.- Composition ethnique
3.4. Les données sociales
3.4.1.- Enseignement et éducation
3.4.2.- Secteur santé
3.4.3.- Les services fournis
3.4.4.- Les maladies courantes
3.4.5. – Médecine traditionnelle
3.4.6.- Habitat
3.5. L’agriculture comme activité principale
3.5.1.- Cultures vivrières
3.5.2.- Cultures de rente : « Girofle et café »
3.5.2.1.- Le giroflier,
3.5.2.2.- Le caféier
3.5.3.- Les activités d’appoints : « Elevage »
3.5.4.- La destination de la production
CHAPITRE 4 : vie sociale, culturelle et associative à Ampasina Maningory
4.1. Le respect des traditions et des coutumes
4.1.1. Les traditions
4.1.2. Les coutumes
4.2. L’approche projet
4.2.1 Acception générale
4.2.2. Pauvreté et sous développement
4.3. La coopérative « FANEVAN’ANALANJIROFO »
4.3.1- Identification
4.3.2- Caractéristiques
4.3.3- Environnement social et relation avec les partenaires
4.3.4- Valeur productive
4.3.5- Valeur technique
4.3.6- Les relations intragroupes
4.3.7- Appréciations sur l’éducation
4.3.8- Les accès et activité les plus importants
4.3.9- Le budget des ménages
TROISIEME PARTIE : PROSPECTIVES DE DEVELOPPEMENT RURAL A PARTIR DES ASSOCIATIONS PAYSANNES
CHAPITRE 5 : Prospectives de développement communautaire à partir des associations paysannes
5.1. Perception de la population sur le développement
5.1.1. Selon les élus locaux
5.1.2. Selon les responsables du projet
5.1.3. Selon les populations locales
5.1.4. Résultat d’enquête
5.2. Les différents problèmes existant au sein de la commune
5.2.1.- Au niveau communal
5.2.2.- Au niveau de la région d’Analanjirofo
5.2.3.- Au niveau des OP et le projet AVSF
CHAPITRE 6 : Esquisses de solutions et autres propositions
6.1. L’influence des relations de domination
6.2. Le système de communication
6.3. Vers la formation d’un esprit managérial
CONCLUSION GENERALE
BIBLIOGRAPHIE
TABLE DES MATIERES
LISTE DES ABREVIATIONS
LISTE DES TABLEAUX
LISTE DES GRAPHES ET CARTE
ANNEXES
Télécharger le rapport complet