Tumeurs malignes de la thyroïde
Epidémiologie Les tumeurs malignes de la thyroïde se manifestent souvent par des tuméfactions basicervicales médianes. Parmi les étiologies des nodules thyroïdiens, 11,33% sont malignes[5]. Elle a une prédominance féminine à cause des stéroïdes sexuels. Les nodules thyroïdiens chez le genre masculin sont toujours suspects. Mais il y a aussi d’autres facteurs favorisants comme l’apport insuffisant d’iode, la notion d’irradiation ionisante cervicale, et les facteurs génétiques[6].
Nature histologique Majoritairement, la nature histologique des cancers de la thyroïde était le carcinome. Les carcinomes papillaires représentent 65 à 80%. Les carcinomes vésiculaires, les carcinomes médullaires et les carcinomes indifférenciés ou anaplasiques sont les types histologiques à rechercher après le carcinome papillaire. Il y a aussi les tumeurs rares de la thyroïde comme les carcinomes mucoépidermoïdes primitifs, les lymphomes malins primitifs de la thyroïde, les sarcomes primitifs et enfin les tumeurs oncocytaires [5,6].
Examen paraclinique Les examens biologiques ne sont pas spécifiques pour confirmer la nature maligne des nodules thyroïdiens. Ils sont représentés par
le dosage des hormones thyroïdiennes (T3 libre, T4libre), dosage TSHus
mesure de la thyrocalcitonine et de la thyroglobuline
dosage des anticorps antiperoxydases et antithyroglobuline
mesure de l’iodémie et iodurie des 24 heures
recherche d’antigène carcino-embryonnaire
test à la TRH et bilan phosphocalcique.
Seul l’examen anatomo-pathologique permet de confirmer cette nature maligne. L’échographie thyroïdienne est une exploration morphologique de première intention. Elle permet de faire la classification de Ti-Rads[7] La scintigraphie thyroïdienne au technétium n’est pas indiquée en cas d’euthyroïdie. Elle est indiquée en cas d’hyperthyroïdie sur nodules toxiques. Son intérêt a beaucoup diminué ces dernières années face à la sensibilité des dosages biologiques [5].La scintigraphie thyroïdienne trouve sa place dans le bilan d’extension et dans la surveillance post-opératoire des tumeurs malignes différenciées de la glande thyroïde. La cytoponction à l’aiguille fine est indiquée à partir de score 4 A de TI-RADS. Cet examen a une sensibilité estimée à 95 à 99% et une spécificité de 55 à 75% [8]. Elle reconnait 50à 95% des cancers en fonction de la qualité de ponction et du cytologiste [7]. Elle donne la classification de Bethesda. La biopsie extemporanée des nodules thyroïdiens est un examen moins sensible mais très spécifique. Elle permet de faire une étude peropératoire macroscopique et microscopique d’un fragment tissulaire suspect prélevé durant le geste chirurgical. [9]
Prise en charge La thyroïdectomie totale avec un curage ganglionnaire cervical est le geste chirurgical à faire devant un cancer thyroïdien. Elle a pour objectif de retirer tous les tissus cancéreux cervicaux. L’irathérapie à l’iode 131 est indiquée en post-opératoire. L’irathérapie détruit les reliquats thyroïdiens normaux, facilitant ainsi la surveillance ultérieure, détruit les éventuels résidus tumoraux, diminuant ainsi le taux de rechute clinique. La chimiothérapie est peu ou pas efficace dans les cancers différenciés. [10]
Moyens de diagnostic
Les patients viennent en consultation pour une tuméfaction latéro-cervicale chronique. Il faut caractériser cette tuméfaction par son évolutivité, sa date de début, l’uni ou bilatéralité. Elle peut être associée à une altération de l’état général. L’examen clinique permet de préciser les caractéristiques de l’adénopathie par :
Le nombre
Le siège
La consistance
La dimension
La sensibilité
Les limites
La mobilité
L’hémogramme, l’immuno-phénotypage des lymphocytes sanguins sont des examens spécifiques au cours deleucémielymphoïde chronique. Au cours des hémopathies malignes, les caractères échographiques des adénopathies sont hypoéchogènes et présentent parfois de renforcement postérieur. La présence de liquéfaction et d’une nécrose de coagulation peuvent créer respectivement des zones hypo et hyperéchogènes. L’analyse des dimensions ganglionnaires est importante. Le diamètre axial minimum plus de 8 mm et un rapport de Solbiati ayant une valeur inférieure à 1,5 mm signent presque toujours une étiologie maligne. Le rapport de Solbiati correspondant au rapport entre le diamètre longitudinal et le diamètre transverse d’un ganglion.[22] La tomodensitométrie et l’imagerie par résonnance magnétique permettent de préciser les caractéristiques des adénopathies et les territoires ganglionnaires atteints. La tomographie en émission de position ou TEP est nécessaire sur le plan diagnostic par l’intermédiaire de la médecine nucléaire en utilisant la 18-fluorodesoxyglucose. L’association de TEP à la tomodensitométrie cervicale permet une fusion d’image en obtenant des informations précises à la localisation anatomique d’un foyer hyper fixant [23]. Selon la littérature, pour la ponction cytologique, sa spécificité est de 98 %, la sensibilité pour la détection d’une tumeur est de 84 % avec une valeur prédictive de 95 % ; pour certains auteurs la sensibilité est de 90 %, la spécificité est de100 % et la valeur prédictive positive à 100 % et le taux d’exactitude pour différencier tumeur bénigne et maligne était de 94 % [22,24]. La biopsie ganglionnaire peut être pratiquée sous anesthésie locale ou anesthésie générale. La biopsie sous AG est indiquée surtout chez l’enfant, ou chez les adultes dont l’adénopathie est très profonde et ou fixe ou de grands diamètres. La biopsie permet de faire une étude histologique, cytologique, immunohistochimique, et moléculair e précises des tissus ganglionnaires. Lors de la LMH, la présence des cellules de Reed Sternberg est spécifique et confirme le diagnostic [25]. L’étude Immunohistochimique et moléculaire montre l’origine lymphoïde de la cellule de Hodgkin, d’où la classification de l’OMS de la maladie de Hodgkin en lymphome de Hodgkin. La classification d’Ann Arbor permet de décrire 4 stades de Lymphome malin Hodgkinien en fonction de l’extension.
Stadification d’Ann Arbor.
Stade I Atteinte localisée à un territoire ganglionnaire
Stade II Atteinte d’au moins deux territoires ganglionnaires du même côté du diaphragme
Stade III Envahissement ganglionnaire situé des deux côtés du diaphragme
Stade IV Atteinte viscérale (foie, poumons, moelle, os) avec au moins une atteinte ganglionnaire ou atteinte médullaire
Cancer du larynx
Dans notre série des cas, la dysphonie, dysphagie et dyspnée constituent les motifs de consultation les plus fréquents. Selon la littérature, les signes cliniques évoquant le cancer du larynx sont représentés par ces 3 signes. Pour le cancer des plis vocaux, le diagnostic est précoce à cause de la dysphonie [29]. Nos patients ont bénéficié de la nasofibrolaryngoscopie, après l’examen au miroir laryngé, à la recherche des éventuels tumeurs supra-glottique, glottique et sous glottique. Selon les auteurs, cet examen clinique est indispensable et obligatoire devant toute suspicion de cancer du larynx [29,69]. La laryngoscopie directe en suspension (LDS) permet de préciser l’extension d’une lésion endolaryngée et de réaliser un prélèvement biopsique pour examen anatomo-pathologique[70]. Dans notre étude, le LDS sous anesthésie générale constitue la technique de prélèvement pour examen anatomopathologique. La tomodensitométrie spiralée en coupe fine avec et sans injection de produit de contraste est l’examen essentiel pour les bilans de lésion et les bilans d’extension [11]. Par contre, dans notre étude, certains patients n’ont pas pu bénéficier cet examen pour l’inaccessibilité de cet examen. Aucun de nos patients n’a bénéficié de l’IRM cervicale. Certains auteurs ont marqué que devant le cancer du larynx, l’IRM est un examen indispensable mais pas obligatoire car ceci donne un risque de surestimation de l’extension tumorale[11].
Les adénopathies cervicales lymphomateuses
Les adénopathies cervicales constituent la première manifestation clinique des hémopathies malignes. Aucun de nos patients n’a bénéficié de cytoponction à l’aiguille fine pour prélèvement anatomopathologique. Selon les auteurs, la fiabilité de la cytoponction n’est pas de 100%. Cet examen pouvait donner des faux positifs et faux négatifs, et insuffisante pour typer le lymphome [71].Dans notre étude, la biopsie ganglionnaire sous anesthésie locale ou générale, constitue la technique de prélèvement anatomopathologique. Ceci rejoint la littérature car elle est le dernier temps du diagnostic et parfois le premier temps thérapeutique [72].
CONCLUSION
Au terme de notre étude, les tumeurs malignes de la région cervicale antérieure sont des tumeurs malignes relativement fréquentes pour les cancers ORL en générale. Comme tout cancer ORL, l’alcool et le tabac constituent les facteurs de risque le plus importants sauf pour le cancer de la thyroïde. La multiplicité des signes cliniques au stade de début, l’inaccessibilité des examens complémentaires sont des facteurs de retard de diagnostic. Actuellement, pour le cancer de la thyroïde, le score Ti-RADS par l’échographie cervicale et la cytoponction des nodules thyroïdiens ont permis pour les praticiens de bien orienter les patients. En outre, les examens complémentaires comme les scanners cervicaux et IRM sont encore inaccessibles pour la majorité des patients, ce qui rend difficile pour les médecins de faire les bilans d’extension en vue de réaliser la classification TNM. Du point de vue thérapeutique, la chirurgie a une place très importante pour la prise en charge de ces cancers. La biopsie pratiquée par les équipes ORL, permet de prélever une partie de la tumeur pour les examens anatomopathologique ainsi que l’exérèse de la tumeur ,associée ou non avec les autres moyens thérapeutiques (Chimiothérapie et radiothérapie). La radiothérapie est l’un des traitements de choix. Par contre, l’inaccessibilité de ce centre est encore un des facteurs qui rendent la prise en charge difficile. La prise en charge implique une multidisciplinarité. La réunion de concertation multidisciplinaire faisant intervenir des spécialistes en ORL, radiologie, endocrinologue, cytopathologie, médecine nucléaire et oncologue. A Madagascar, le pronostic des tumeurs malignes de la région cervicale antérieure reste encore sombre du fait de ce retard de diagnostic.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS
I. ANATOMIE DE LA REGION CERVICALE
I.1 Situation générale
I.2 Différentes régions du cou
I.2.1 Région infra-hyoïdienne médiane
I.2.1.1 Axe viscéral du cou
I.2.1.2 La loge thyroïdienne
I.2.2 La région infra-hyoïdienne latérale
I.2.2.1 La région sterno-cléido-mastoïdienne
I.2.2.1.a Axe vasculaire du cou
I.2.2.1.b Eléments nerveux de la région sterno-cléido-mastoïdienne
I.2.2.1.c Lymphocentre cervical profond latéral
I.2.2.2 La région supra-claviculaire
I.3 Les spécificités de la région cervicale par rapport aux tumeurs
II.LES DIFFERENTES TUMEURS DE LA REGION CERVICALE ANTERIEURE
II.1 Tumeurs malignes de la thyroïde
II.1.1 Epidémiologie
II.1.2 Nature histologique
II.1.3 Examen paraclinique
II.1.4 Prise en charge
II.2 Cancer du larynx
II.2.1 Epidémiologie
II.2.2 Facteurs de risques
II.2.3 Nature histologique
II.2.4 Moyens de diagnostic
II.2.5Prise en Charge
II.2.4 .1 Chirurgie
II.2.4 .2 Radiothérapie et la chimiothérapie
II.3 Tumeur maligne de l’œsophage cervical
II.3.1 Epidémiologie
II.3.2 Nature histologique
II.3.3 Facteur de risque
II.3.4 Moyens de diagnostic
II.3.5 Prise en Charge
II.3.5 .1 Chirurgie
II.3.5. 2 Radiothérapie et la chimiothérapie
II.4 Cancers parathyroïdiens
II.4.1 Epidémiologie
II.4.2 Moyens de diagnostic
II.4.3 Prise en charge
II.4.3.1 Chirurgie
II.4.3.2 Radiothérapie et chimiothérapie
II.4.3.3 Traitement associé
II.5 Adénopathies cervicales malignes
II.5.1 Epidémiologie
II.5.2 Nature histologique
II.5.2.1 Lymphome malin hodgkinien
II.5.2.2 Lymphome malin non Hodgkinien
II.5.2.3 Autres hémopathies malignes
II.5.3 Moyens de diagnostic
II.5.4 Prise en charge
DEUXIEME PARTIE : METHODES ET RESULTATS
I. METHODES
I.1 OBJECTIF DE L’ETUDE
I.1.1Objectif général
I.1.2 Objectifs spécifiques
I.2 PATIENTS ET METHODES
I.2.1Cadre de l’étude
I.2.2 Type d’étude
I.2.3 Période et durée d’étude
I.2.4 Population d’étude
I.2.4.1 Critères d’inclusion
I.2.4.2 Critères de non inclusion
I.2.5 Recueil et analyse des données
I.2.6 Considérations éthiques
I.2.7 Variables étudiées
II. RESULTATS
II.1 Selon l’âge
II.2 Selon le genre
II.3 Selon le genre et l’âge
II.4 Selon les facteurs de risques
II.5 Selon la localisation tumorale
II.5.1. Les localisations tumorales en fonction de l’âge
II.5.2 Les localisations tumorales en fonction du genre
II.6 Selon le motif de consultation
II.7 Selon l’examen paraclinique
II.8 Selon les résultats anatomo-pathologiques
II.9 Résultats anatomo-pathologiques en fonction de la localisation
II.10 Selon les classifications TNM : UICC 2010
II.11 Classification TNM en fonction de la localisation
II.12 Selon les modalités de prise en charge
TROISIEME PARTIE : DISCUSSION
I.EPIDEMIOLOGIE
I.1 selon l’âge
I.2 selon le genre
I.3 Selon les facteurs de risque
II. LOCALISATIONS TUMORALES
II.1 Le cancer thyroïdien
II.2 Les cancers du larynx
II.3 Les cancers de l’œsophage cervical
II.4 Les adénopathies cervicales malignes
III. LES MOYENS DE DIAGNOSTIC
III.1 Le facteur de retard de diagnostic
III.2 Moyens de diagnostic pour chaque localisation
III.2.1 Cancer de la thyroïde
III.2.2 Cancer du larynx
III.2.3 Cancer de l’œsophage cervical
III.2.4 Les adénopathies cervicales lymphomateuses
IV. LES PRISES EN CHARGE
IV.1. Cancer de la thyroïde
IV.2. Cancer du larynx
IV.3. Cancer de l’œsophage cervical
IV.4. Adénopathies cervicales malignes
IV.4.1. Lymphome malin non hodgkin
IV.4.2. Lymphome malin Hodgkinien
Conclusion
Références bibliographiques
Annexes
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