Les troubles du spectre de l’autisme : Généralités

Les troubles du spectre de l’autisme : Généralités 

Le terme d’autisme provient du grec « autos » qui signifie soi. Il est introduit en psychiatrie en 1911 par le psychiatre Eugen Bleuler pour décrire un des symptômes de base de la schizophrénie : l’isolement social et le repli sur soi. Ce terme d’autisme est repris par Leo Kanner en 1943, pour décrire 11 cas d’enfants présentant un ensemble de symptômes particuliers définissant ce qu’il nomme ≪ des troubles autistiques innés du contact affectif ». Aujourd’hui cette appellation a évolué et dorénavant le terme de troubles du spectre de l’autisme (TSA) est employé en référence au DSM-5 (American Psychiatric Association, 2013). Les TSA touchent un enfant sur 150 selon la Haute Autorité de Santé. Cette prévalence est en augmentation depuis les 20 dernières années, compte tenu des changements de pratiques, notamment diagnostiques. De ce fait, la France a mis en place, depuis 2005, quatre « Plans autisme » visant notamment à soutenir la recherche sur l’autisme et à améliorer la prise en charge de ces personnes. Un retard mental peut être associé dans 40 à 70% des cas, et une association avec l’épilepsie est observée dans 30% des cas. Dans 10% des cas, les enfants avec autisme présentent un syndrome autistique dit « syndromique » c’est-à-dire associé à un syndrome neurologique, génétique, ou métabolique (syndrome de l’X fragile, neurofibromatose, syndrome d’Angelman). Les TSA peuvent également s’accompagner de troubles du sommeil, de problèmes psychiatriques (dépression, anxiété), de troubles du développement (trouble de l’apprentissage ou de l’attention/hyperactivité). Les TSA surviennent dès la petite enfance, entre 2 et 4 ans, avec une répartition d’environ 1 femme pour 4 hommes. Cependant depuis quelques années, cette répartition tend à être réévaluée et une méta-analyse récente rapporte un ratio qui tendrait plutôt vers une fille pour trois garçons diagnostiqués avec TSA (Loomes, Hull, & Mandy, 2017). En effet, de par le rôle imputé aux femmes dans notre société, plusieurs études ont mis en avant une meilleure capacité des femmes, et notamment celles avec un TSA, à mettre en œuvre des stratégies de camouflage dans les situations sociales afin de masquer leurs difficultés (Baldwin & Costley, 2016; Bargiela, Steward, & Mandy, 2016; Cridland, Jones, Caputi, & Magee, 2014; Rynkiewicz et al., 2016). Ainsi les symptômes autistiques chez les filles sont repérés plus difficilement, les femmes seraient diagnostiquées 4,3 années plus tard que les hommes (Begeer et al., 2013). Par ailleurs, cette difficulté de diagnostic pourrait également provenir du fait que les critères utilisés par le DSM-5 ou la CIM-10 sont fondés sur l’observation des comportements d’individus majoritairement masculins. Le diagnostic de l’autisme est clinique et pluridisciplinaire. Les outils principaux utilisés par le médecin sont l’ADOS-R (Autism Diagnostic Observation Schedule, Gotham et al., 2008), qui repose sur l’observation de l’enfant dans une situation standardisée de jeu, et l’ADI-R (Autism Diagnostic Interview, Lord, Rutter, & Couteur, 1994) qui est un entretien semi-structuré avec les parents portant sur le comportement de l’enfant dans la petite enfance. Ces troubles, anciennement caractérisés par la « triade autistique » (anomalies de la communication orale et/ou non verbale, anomalies des interactions sociales et centres d’intérêts restreints), se regroupent en deux catégories dans le DSM-5 : troubles de la communication sociale et comportements restreints et répétitifs. Des particularités sensorielles sont également souvent rapportées.

Les causes neuro-développementales de l’autisme ne sont pas encore clairement identifiées mais il est établi qu’il s’agirait d’un trouble d’origine multifactorielle avec une part génétique, neurobiologique et environnementale. Les études en génétique ont identifié plus de 140 gènes, notamment des gènes impliqués dans la formation du système nerveux et des connexions synaptiques, en particulier la synaptogenèse et la croissance/guidance des axones pour l’établissement des réseaux neuronaux, ainsi que dansla synthèse de substances chimiques indispensables au bon fonctionnement du cerveau (sérotonine, glutamate, acétylcholine ou GABA) (Ramaswami & Geschwind, 2018; Shailesh, Gupta, Sif, & Ouhtit, 2016; Waye & Cheng, 2018). L’interaction avec l’environnement joue également un rôle important dans le développement du cerveau (Lam et al., 2016). Les causes environnementales comprennent les risques pendant la grossesse (médicament, infection, pollution…), les liens avec le système immunitaire et le microbiote, les hormones (testostérone, mélatonine) .

Symptomatologie

Comportements restreints et stéréotypés

Les comportements et intérêts restreints et stéréotypés se manifestent par un attrait excessif pour un domaine particulier, une rigidité comportementale entrainant une résistance importante aux changements. Des ritualisations se mettent en place, toute modification des trajets ou des séquences pouvant entrainer de fortes réactions émotionnelles. Ils regroupent notamment un défaut de monitoring de la réponse et un déficit à inhiber des comportements inadaptés au contexte. Les aspects répétitifs se manifestent par des mouvements (balancement, tourner un objet près des yeux…) mais également au niveau du langage avec des écholalies, c’est à dire en répétant des sons, des mots ou des phrases. Ce comportement interviendrait comme une attitude défensive, rassurante ou encore comme une autostimulation. Ces stéréotypies ou ces intérêts particuliers peuvent limiter le contact avec le monde environnant. En effet, les personnes avec autisme peuvent se renfermer sur ces attraits excessifs pour lesquels elles vont y consacrer un temps important et la résistance au changement rend la nouveauté et la rencontre compliquées.

Difficultés de communication sociale

La communication rend compte de processus multiples et complexes qui demandent des habiletés dans des domaines différents, autant dans des processus non verbaux (langage corporel, regard, expression faciale, intonations …) que verbaux (choix des mots, compréhension des expressions, timing entre les tours de parole…), impliquant soi-même et l’autre. Dans les TSA, des altérations se retrouvent aussi bien dans ces deux composantes, ce qui va avoir un impact sur les interactions sociales des personnes avec autisme.

La communication non verbale est la première à se développer et une altération de ce processus est souvent le premier signe qui va alerter les parents dans les premiers mois. Au cours de la 2eme année de vie, des anomalies dans le développement de l’attention conjointe vont également être des signes probants de l’autisme. L’attention conjointe est la capacité à partager un évènement avec l’autre, à attirer et maintenir son attention vers une personne ou un objet dans le but d’obtenir une observation commune et conjointe. Les personnes avec TSA peuvent également présenter une absence ou une moindre utilisation des mouvements des bras pour appuyer les éléments de langage, l’intonation de la voix peut être monocorde. Ainsi, tous ces éléments non verbaux sont essentiels pour la communication et les interactions sociales.

Les personnes avec autisme présentent également des difficultés de communication verbale. Elles renvoient à un possible retard ou une absence de langage, une mauvaise utilisation des pronoms personnels (« tu » à la place de «je»), des difficultés de compréhension, d’expression, pour traiter le sens des phrases complexes, ou encore une hyperlexicalité (traitement excessif des mots individuels). Les notions implicites ou de sous-entendus sont également difficiles à comprendre pour les personnes autistes qui ont une utilisation pragmatique du langage, les informations sont prises au premier degré, entrainant des non compréhensions de l’humour ou des expressions imagées.

Ces problèmes de communication vont être en partie expliqués par les difficultés dans les interactions sociales mais d’autres processus entrent également en jeu. Les personnes avec autisme vont afficher des anomalies dans la sphère de la cognition sociale, qui regroupe l’ensemble des processus cognitifs qui permettent à l’être humain d’avoir un comportement adapté dans son monde social (perception, mémorisation, raisonnement, émotions…) et notamment une perturbation de la théorie de l’esprit qui fera l’objet d’un développement ci-après. Les émotions, notamment complexes (envie, fierté, mépris…), sont également perturbées avec des dissociations entre les indices émotionnels et leur signification sociale. Des difficultés pour initier une discussion mais également pour la maintenir dans le temps sont également observées. Cela peut engendrer une impression de dialogue à sens unique où la personne avec TSA ne va pas rebondir sur la discussion et rester passive mais peut également rester enfermée dans un sujet restreint sans prendre en compte l’intérêt de l’autre. L’ensemble de ces difficultés a conduit à l’émergence de différentes théories cognitives tentant d’expliquer cette symptomatologie.

Lien avec les différentes théories cognitives

Les théories majeures seront décrites ci-dessous mais il faut noter que ces théories apportent des pistes pour comprendre le fonctionnement des personnes avec TSA, mais aucune ne permet d’expliquer à elle seule toutes les particularités de la symptomatologie.

Perception atypique

Les perceptions sensorielles sont souvent identifiées comme atypiques dans l’autisme avec à la fois des hypo et des hyper-sensibilités présentes dans les cinq sens. L’équipe de Laurent à Montréal émet l’hypothèse qu’un sur-fonctionnement perceptif expliquerait les difficultés rencontrées dans l’autisme (Mottron, Dawson, Soulières, Hubert, & Burack, 2006). Ils proposent que les personnes avec autisme effectuent un traitement préférentiel de l’information à un « bas niveau », orientant le traitement perceptif vers un traitement local. L’information est encodée sous sa forme brute, dans la modalité sensorielle d’entrée et des difficultés existent pour faire des liens avec les autres modalités sensorielles. Ce profil renvoie aux difficultés d’intégration sensorielle corticale, pouvant avoir un impact sur les processus cognitifs de plus haut niveau. De ce fait, une scène est perçue comme une entité unique comprenant de multiples détails mais sans qu’ils ne soient traités simultanément (Brosnan, Scott, Fox, & Pye, 2004). Les personnes avec TSA auront une incapacité à briser l’image entière en unités signifiantes. Donna Williams, une femme avec autisme décrit : « Alors que quelqu’un d’autre aurait vu une  » foule », je voyais un bras, une personne, une bouche, un visage humain, une chaise, un œil. Je voyais 10 000 images, là où quelqu’un d’autre n’en voyait qu’une». De plus, lorsqu’il y aura un changement d’élément (ajout, retrait, déplacement), ces personnes vont vivre ce changement comme une toute nouvelle scène à explorer. Ce processus peut donc être anxiogène, envahissant et très coûteux. Des difficultés à différencier les éléments pertinents des autres moins pertinents, situés en arrière-plan, ont également été identifiées. Ces processus engendrent une surcharge d’informations importantes: « c’était comme avoir un cerveau sans filtre » écrit Donna Williams en 1995.

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Table des matières

Introduction Générale
Chapitre 1 : Introduction aux troubles du spectre de l’autisme
1. Les troubles du spectre de l’autisme : Généralités
2. Symptomatologie
2.1. Comportements restreints et stéréotypés
2.2. Difficultés de communication sociale
3. Lien avec les différentes théories cognitives
3.1. Perception atypique
3.2. Défaut de Cohérence centrale
3.3. Déficit dans l’intégration des informations complexes
3.4. Dysfonctionnement exécutif
3.5. Défaut de théorie de l’esprit
4. Anomalies cérébrales
4.1. Approche neuro-développementale
4.2. Anomalies biologiques
4.3. Anomalies structurales
4.4. Anomalies de connectivité fonctionnelle
4.5. Anomalies cérébrales au repos
4.5.1. Réseau du mode par défaut
4.5.2. Réseau sensori-moteur
4.5.3. Réseau attentionnel
4.5.4. Réseau du contrôle exécutif
4.5.5. Réseau de la saillance
Chapitre 2 : L’électrophysiologie au repos dans les troubles du spectre de l’autisme
1. Particularités en EEG de repos
1.1. Introduction
1.1.1. Principe et intérêt
1.1.2. Bandes de fréquences et implication cognitive
1.2. Etude de la Puissance dans l’autisme
1.3. Etude de la Connectivité dans l’autisme
1.4. Localisation de source
2. Projet 1
2.1. Etude 1: Sources of alpha abnormalities in autistic adolescents establish in regions involved in social cognition and attention
2.2. Etude 2 Préliminaire : Liens entre les anomalies de la bande alpha et la symptomatologie de l’autisme
Chapitre 3 : La mémoire autobiographique dans les TSA : approche neuro-développementale et mise en place d’une réhabilitation
1. La mémoire autobiographique
1.1. Composante épisodique ou expériences personnelles
1.2. Composante sémantique ou connaissances personnelles
1.3. Autres composantes cognitives mises en jeu
1.3.1. Fonctions exécutives et attention
1.3.2. Langage
1.3.3. Cognition sociale
1.3.4. Perception et sens
1.3.5. Émotion
1.3.6. MAB, self et identité personnelle
2. Développement de la MAB
2.1. L’amnésie infantile
2.2. Développement de la MAB chez l’enfant au développement typique
3. La mémoire autobiographique chez les enfants avec TSA
3.1. Défaut de la composante sémantique
3.2. Défaut de la composante épisodique
3.2.1. Difficultés d’encodage
3.2.2. Difficultés de récupération
3.2.3. Richesse des souvenirs
3.2.4. Défaut de cohérence centrale et association
3.2.5. Cognition sociale et émotion
3.2.6. Diminution de l’implication du self
3.3. Limites des études
4. Pistes d’interventions
4.1. Réhabilitation de la MAB
4.2. Réhabilitation dans l’autisme
4.2.1. Supports et aides
4.2.2. Structuration et richesse du souvenir
4.2.3. Rapport à soi et aux autres
5. Projet 2
5.1. Etude 3: Positive effect of visual cuing in episodic memory and episodic future thinking in adolescents with autism spectrum disorder
5.2. Etude 4 : Mémoire autobiographique chez l’adolescent avec TSA : une analyse textométrique
6. Projet 3
6.1. Etude 5 : Improving Social Interactions through Autobiographical Memory training in Autism: SIAM program
6.2. Etude 6 : Effet d’une réhabilitation de la mémoire autobiographique chez 3 adolescents avec autisme : une étude pilote
Chapitre 4 : Discussion générale
Conclusion Générale

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