Les traumatismes sont responsable de 8% des décès dans le monde et de plus de 36 000 décès annuels en France [1][2]. Ils représentent 42% des décès chez les moins de 50 ans [3] ce qui en fait la première cause de mortalité dans cette population. Parmi les traumatisés sévères, 50% des décès sont secondaires à un traumatisme crânien tandis que 35% surviennent dans les suites d’une hémorragie. Celle-ci reste néanmoins la première cause de décès réversible en population générale et la première cause en médecine de l’avant [4][5]. Elle est de survenue précoce, responsable du décès par exsanguination massive sur les lieux de l’accident dans 50% des cas et par état de choc prolongé au cours des 24 premières heures dans 35% des cas. Elle est précipitée par la présence d’une coagulopathie aigue traumatique (CAT) [4]. La coagulopathie aigue traumatique est retrouvée chez 25% des traumatisés sévères en milieu civil et jusqu’à 33% des traumatisés de guerre.
Définition de la coagulopathie aigue traumatique
La coagulopathie aigue traumatique (CAT) se définit par une défaillance systémique des mécanismes de l’hémostase survenant au décours d’un traumatisme. Elle a été décrite pour la première fois en 1969 par Richard L. Simmons chez des soldats américains blessés lors de la guerre du Vietnam [6]. Elle se traduit cliniquement par un saignement diffus dont l’hémostase mécanique n’est pas réalisable. Biologiquement, elle se défini par des anomalies des paramètres standards de la coagulation : baisse du taux de prothrombine (TP), allongement du temps de céphaline activée, du temps de Quick, thrombopénie ou augmentation de l’«international normalized ratio » (INR) [7]. Elle contribue à précipiter le choc hémorragique. Elle est significativement associée à des besoins transfusionnels massifs, à l’apparition d’une défaillance multiviscérale et de co-infections et à l’allongement des séjours en services de réanimation. Elle est donc fréquente, précoce et grave ce qui en fait un enjeu thérapeutique majeur dès la phase initiale de la prise en charge.
L’hémostase est le résultat de processus complexes intriqués. Elle se déroule en trois phases. La première d’entre elles est l’hémostase primaire qui consiste en l’aggrégation plaquettaire. La coagulation quant à elle aboutit à la formation du caillot, elle correspond à l’hémostase secondaire. La fibrinolyse consiste en la destruction de ce dernier par la plasmine. Il s’agit de la troisième et dernière phase [8]. La physiopathologie de la CAT n’est actuellement que partiellement élucidée. Elle est complexe, multifactorielle et atteint l’ensemble des phases de l’hémostase. La défaillance de la cascade physiologique de la coagulation s’expliquerait par l’association de multiples mécanismes. Notamment, l’activation de la protéine C (aPC) en contexte traumatique aurait un effet anti-coagulant et hyperfibrinolytique [4 [8]. De même, l’agression endothéliale et l’inflammation systémique induiraient une atmosphère anticoagulante et hyperfibrinolytique [9][10][11]. De plus, chez le traumatisé, la phase de suractivation plaquettaire serait suivie d’une période réfractaire qualifiée de « parésie plaquettaire » induisant une dysfonction des thrombocytes [4][12] et un défaut de l’aggrégation. Enfin, le fibrinogène a un effet inhibiteur sur l’activation de la protéine C. Ainsi, Rourke et al ont montré ainsi que la diminution des réserves de fibrinogène étaient un facteur de risque de l’apparition d’un phénotype hémorragique au décours d’un traumatisme [13][14].
Les facteurs précipitant la CAT sont actuellement bien identifiés au titre de la dilution, l’hypothermie, l’acidose et l’endothéliopathie. L’acidose modifie la structure des sites de liaison entre les facteurs et le calcium. L’hypothermie inhibe les réactions enzymatiques, principalement l’interaction entre le facteur tissulaire (FT) et le facteur VIIa (FVIIa). S’y associent un déficit en facteur de coagulation par consommation ou par dilution et un trouble de la coagulation préexistant qu’il soit génétique, constitué ou iatrogène [7].
Traumatismes et lésions de la ceinture pelvienne
L’anneau pelvien est constitué du sacrum prolongé via les articulations sacro-iliaques par les deux os coxaux qui se rejoignent pour constituer la symphyse pubienne. Les lésions de ce dernier sont secondaires à trois forces distinctes :
– La force de compression latérale à l’origine de la rotation interne d’un hémi-pelvis,
– La force de compression antéro-postérieure à l’origine de la rotation externe d’un hémipelvis,
– La force de cisaillement à l’origine de la dislocation verticale d’un hémi-pelvis.
Les mécanismes traumatiques sont fréquemment une combinaison de ces trois forces et définissent la stabilité de l’anneau pelvien selon la classification de Tile (modifiée par l’association pour l’ostéosynthèse (AO)) [15][16]. Il s’agit de la classification la plus fiable [17]. Elle classifie en fonction du mécanisme traumatique et du bilan lésionnel selon trois types principaux qui définissent la stabilité de l’anneau pelvien [16][18] :
– Tile A : le type A inclus l’ensemble des lésions qui ne compromettent pas la stabilité de l’anneau pelvien,
– Tile B : le type B inclus l’ensemble des lésions secondaires à un mécanisme de compression ayant créé une instabilité rotationnelle, dans le plan horizontal,
– Tile C : le type C inclus les lésions secondaires à un mécanisme mixte induisant une instabilité dans le plan vertical .
Les fractures du bassin représentent 1,5 % de l’ensemble des fractures de l’adulte tous mécanismes inclus. Leur distribution est bimodale avec une incidence dans deux catégories d’âge : les personnes âgées victimes d’un mécanisme traumatique de faible cinétique et un groupe d’âge compris entre 20 et 40 ans dont le mécanisme lésionnel est d’une cinétique supérieure [18]. L’incidence des fractures du bassin dans ce second groupe est de 25% [19]. Parmi les militaires français engagés sur le théâtre afghan entre 2010 et 2012, Hoffman et al dénombrent 1080 militaires blessés dont 4% atteints d’un traumatisme du bassin [20]. Une étude réalisée au sein de la population militaire américaine décrit un risque de traumatisme du bassin prédominant dans l’armée de terre, atteignant préférentiellement les soldats de moins de 20 ans et de grade le moins élevé [21]. La mortalité générale des fractures du bassin est comprise entre 8 et 14%. Cette dernière est majorée jusqu’à 57% en présence d’une instabilité hémodynamique ou d’une fracture pelvienne ouverte [22].
La gravité des fractures du bassin réside en urgence dans la complication hémorragique. L’espace rétropéritonéal peut contenir un volume d’exsanguination compris en 4 et 5 litres [23]. Une fracture instable ne délimitant plus cet espace rend une tamponnade physiologique impossible [24][25]. Todd W. Costantini et al ont décrit un état de choc hémorragique chez 13,3% de polytraumatisés présentant un traumatisme du bassin [25]. L’association de ces derniers à une CAT est de pronostic majeur pourtant peu décrite chez le polytraumatisé.
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Table des matières
Table des matières
INTRODUCTION
Définition de la coagulopathie aigue traumatique
Traumatismes et lésions de la ceinture pelvienne
MATÉRIELS ET MÉTHODE
Objectifs de l’étude
Design de l’étude
Source des données
Éthique
Critères d’inclusion et d’exclusion
Données recueillies
Définitions
Analyse statistique
RÉSULTATS
Inclusion des patients
Description de la population
Caractéristiques de la population présentant une lésion du bassin
Description des patients présentant une coagulopathie aigue traumatique à l’admission
Facteurs associés à la coagulopathie aigue traumatique
DISCUSSION
CONCLUSION
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
LISTE DES ABRÉVIATIONS
ANNEXES
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