Les TIC au service de l’enseignement et la formation
L’intrusion des technologies au sein des formations universitaires, et notamment celles destinées aux formateurs (futurs enseignant), a fait évoluer ces dispositifs. Nous assistons aujourd’hui à des formations reposant sur l’usage des outils technopédagogiques, d’autres reposant sur les réseaux, et à chacune se tracent des stratégies de formation qui lui sont propres, adoptant des devis pédagogiques spécifiques qui font appels à des technologies en conséquence. Les technologies ont fait d’abord leur incursion dans un objectif d’améliorer l’apprentissage, à présent cet objectif est largement étoffer par d’autres, qui permettent non seulement cette dite amélioration, mais aussi sa diversification, voir ; la création d’« un temps nouveau dans les relations pédagogiques » (Moiraud, p. 102).
Les TICE permettent un enseignement de proximité, jouent sur la motivation des apprenants par leur côté attractif, offrent une efficacité dans la mise en activité des apprenant (Bihouée & Colliaux, p. 117). Elles amènent les apprenant à acquérir « un degré d’autonomie supplémentaire, élément essentiel de réussite […] favorisent aussi l’implication dans leurs apprentissages ainsi que la communication entre eux et avec leur enseignant » (id, p. 118). Poyet (p. 40) recadre cette notion d’autonomie dans le celui des environnements utilisant les TIC, et notamment les environnements virtuels, pour la décrire comme une « autonomie d’action, qui ne s’accompagne pas nécessairement de sens critique lié à des décisions personnels » (id).
« Les TIC peuvent servir des objectifs et des pédagogies très différents […] Utilisées à bon escient, elles développent les connaissances, les compétences de communication, l’apprentissage coopératif, la compréhension et le respect des autres » (OCDE, p. 26). Les outils de communication notamment sont porteurs de dynamique ; par exemple « l’utilisation efficace de l’e-mail au sein d’un groupe d’acteurs est souvent suffisante pour garantir une bonne circulation de l’information, une bonne coordination de l’équipe et une bonne diffusion des résultats d’un groupe de travail. C’est également un outil intéressant pour renforcer les échanges avec les élèves » (Bihouée & Colliaux, p. 110) Ces technologies offrent la possibilité d’abolir les contraintes spatiotemporelles, ainsi le savoir plus consigné sur un livre, un tableau va amener vers un changement d’accès au savoir (Poyet, p. 39) ; les notions du temps et de l’espace changent de sens ; l’apprenant peut travailler à n’importe quel moment, et de n’importe quel espace ; il peut échanger à tout moment selon son rythme avec ses pairs ou son enseignant ; la souplesse et la flexibilité prennent leurs places. De plus, Internet permet le développement du collectif, du travail en groupe, de création de communautés de pratique. Certaines associations d’enseignants en sont des exemples (Sésamath , Les clionautes , Weblettre , Primlangues ). Cette technologie permet de garder le contact et créer des réseaux d’individus, l’association CEMAFORAD en est un autre exemple. Elle regroupe tous les apprenants ayant fait la formation UTICEF ou ACREDITE. Via de tels environnements, un esprit de co-construction, d’échange d’expérience, et de partage voir même de professionnalisation deviennent possibles.
Ces conceptions sont retrouvées de plus en plus dans des formations universitaires reposant sur les réseaux (Internet) ; et qui adoptent délibérément ces technologies afin de créer des espaces de co-construction et de performance commune. Néanmoins entre adeptes et non adeptes, ces technologies forgent leur plus-value sous conditions. Lebrun (2011) explique que les technologies n’aboutissent à un impact positif que si les dispositifs –qui exploitent ces technologies- adoptent des stratégies centrées sur l’apprenant, « soutenus par de nouveaux rôles des acteurs, enseignants et étudiants, et finalisés au développement des compétences humaines, sociales et professionnelles de ces acteurs » (id).
Pour Karsenti et Larose (2001) les technologies représentent un enjeu majeur dans la formation des formateurs et un défi à tenir aux besoins des nouvelles générations. Ils sont source de changement chez l’apprenant (futur enseignant), sur le plan de la motivation à apprendre avec les TIC, sur le plan de l’attitude à apprendre les TIC par les TIC. « Dans le contexte éducatif, il est particulièrement flagrant que les TIC sont mobilisés en tant que facteur de changement » (Jaillet, 2005b).
Le dispositif
Vers un dispositif technopédagogique
Le Larousse définit le dispositif comme étant un « ensemble de pièces constituants un mécanisme ». Ce n’est que dans les années soixante-dix, que ce concept émerge le monde des sciences de l’éducation (Peraya, 1999, p. 153), en se conjuguant aux conceptions et aux finalités de l’éducation et de la formation. Il devient « un ensemble cohérent constitué de ressources (matérielles et humaines), de stratégies, de méthodes et d’acteurs interagissant dans un contexte donné pour atteindre un but» (Lebrun, Smidts, & Bricoult, 2011). Blandin (2002) dans (Charlier, Deschryver, & Peraya, 2007), le définit dans le champ de la formation, comme un agencement en vue de faciliter un processus d’apprentissage. Peraya (p. 153) défini le dispositif comme étant « une instance, un lieu social d’interaction et de coopération possédant ses intentions, son fonctionnement matériel et symbolique enfin, ses modes d’interaction propre ». Le concept de dispositif devient rattaché à la notion de ressources au sens large, d’une instance, d’organisation/gestion et de finalité. L’incursion des technologies, à rajouter une autre dimension à ce concept ; il s’agit de la dimension d’action. En effet, ces technologies permettent à l’apprenant d’être actif, d’agir et d’interagir, et il change même (selon le modèle pédagogique) de posture, pour devenir l’acteur de son propre apprentissage, de sa propre formation. Pour Peraya (p. 153), le fonctionnement du dispositif « déterminé par les intentions, s’appuie sur l’organisation structurée de moyens matériels, technologiques, symboliques et relationnels qui modélisent, à partir de leurs caractéristiques propres, les comportements et les conduites sociales (affectives et relationnelles), cognitives, communicatives des sujets ». Ainsi, cet auteur rend compte des dimensions incisées par de tels dispositifs. L’articulation entre le modèle pédagogique et les technologies donne naissance au concept de dispositif technopédagogique. « C’est dans cette mesure que nous parlons d’environnement technopédagogique, à la fois comme un concept essentiel dans le cadre de l’ingénierie de la formation et du design pédagogique, mais aussi comme élément central du dispositif de formation » (Depover, Peraya, & Jaillet, p. 92).
Du dispositif technopédagogique à distance vers le campus virtuel
Dès les années quatre-vingt, ce type de dispositif de formation à distance commence à se déployer. Il a la spécificité de rompre avec la co-présence temporelle et spatiale. « L’intégration des TIC provoquerait un basculement paradigmatique condamnant la sainte trilogie « horaire/classe/enseignement disciplinaire » (Liautard, Marquet, & Wallet, 2005). Le dispositif technopédagogique à distance a la particularité de reposer sur le multimédia interactif, la communication médiatisée par ordinateur, et sur des ressources en accès via le réseau d’Internet (Peraya, 2003) . Son succès et son déploiement sont dû d’une part, aux facteurs technologiques qui lui offrent de plus en plus d’avantages et de flexibilité, comme rompre l’éloignement, raccourcir le temps de réponse, son adaptabilité aux conditions socioprofessionnelles de l’apprenant, …etc. D’autre part, les facteurs pédagogiques suivent. A présent, il est possible de penser l’accompagnement, le travail en collectif et le partage, la diversification des approches, l’autonomie d’activité, …etc. La technologie et la pédagogique se conjuguent au temps de l’ingénierie pédagogique. «L’environnement technopédagogique est constitutif de la formation à distance et celle-ci ne peut exister sans formes de médiatisation : médiatisation des contenus et de ressources pédagogiques, des activités, de la relation et de l’accompagnement, de la gestion, de l’évaluation, etc. » (Depover, Peraya, & Jaillet, p. 92). Une telle conception est confortée par les travaux de (Charlier, Deschryver, & Peraya, 2007) et de (Jacquinot Delaunay & Monnoyer, 1999), qui mettent en relief l’incidence d’une ingénierie de formation ; la notion d’action et d’interaction prend sa place, alimentée par celle de l’échange et de partage avec d’autres personnes du dispositif, et même avec des nonpersonnes. Un fait qui change le statut de l’outil, son usage, son appropriation et sa relation à l’individu (Jacquinot-Delaunay & Monnoyer, 1999), invitant de nouvelles dimensions à s’infiltrer dans le monde de la formation technopédagogique à distance. Ces dimensions relèvent du champ ergonomique, cognitif, psychologique et social (Charlier, Deschryver, & Peraya, 2007).
Ainsi « l’analyse du concept de dispositif oblige donc à repenser les rapports entre le symbolique, le technique et le relationnel comme d’ailleurs celui de la médiatisation et de la médiation » (Charlier, Deschryver, & Peraya, 2007). Peraya (2003) nuance deux concepts ; le premier celui de dispositif de formation à distance et le second, celui du campus virtuel. Pour le premier, l’auteur précise que le fait de mettre des ressources sur Internet, d’exploiter des outils de communication tel que le mail ou le forum, ne font pas de ces dispositifs, des campus virtuels. Le propre du campus virtuel consiste « de se présenter comme un environnement unique intégrant différentes fonctionnalités ou dimensions ainsi que les outils correspondants. Il s’agirait donc d’une plateforme unique, intégrative, multidimensionnelle ou multifonctionnelle mettant à disposition des outils spécifiques susceptibles de réaliser les objectifs de base du projet de formation. On peut déjà avancer qu’il s’agira des fonctions d’information, de communication, de collaboration, de gestion et d’apprentissage. » (Peraya, 2003).
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Table des matières
INTRODUCTION GENERALE
Chapitre I CADRE THEORIQUE ET CONCEPTUEL
Etat de la recherche sur les TICE, les dispositifs et l’apprenant face aux mutations technopédagogiques
I.1 Les TIC au service de l’enseignement et la formation
I.2 Le dispositif
I.2.1 Vers un dispositif technopédagogique
I.2.2 Du dispositif technopédagogique à distance vers le campus virtuel
I.2.3 La médiation et médiatisation : les processus subjacents au dispositif technopédagogique à distance
I.3 L’apprenant : l’acteur en mutation
I.3.1 Caractéristiques personnelles
I.3.2 D’autres caractéristiques personnelles
I.3.3 Caractérisation des profils
I.4 La dimension téléologique
I.5 Conclusion
Chapitre II PROBLEMATIQUE ET HYPOTHESES DE RECHERCHE
II.1 De l’impact au changement
II.1.1 Des recherches sur le changement
II.1.2 Structure et système
II.1.3 Environnement – milieu
II.1.4 La notion de compétence
II.1.5 La cognition
II.1.6 La métacognition
II.1.7 Les nouvelles approches pédagogiques
II.1.8 Les interactions pédagogiques en ligne
II.1.8.1 Le groupe
II.1.8.2 Le tutorat
II.1.8.3 L’interaction apprenant-instrument
II.1.9 La plateforme- les outils technologiques
II.2 Problématique
II. 3 Hypothèses de recherche
Chapitre III L’APPROCHE SYSTEMIQUE ET MODELISATION COMPLEXE : QUELQUES NOTIONS THEORIQUES ET RECADRAGE
III.1 Etat de l’art
III.2 L’approche systémique
III.3 Complexe ou compliqué
III.4 Quelques concepts rattachés à l’approche systémique
III.4.1 Modélisation
III.4.2 Système- système général
III.4.3 Structure
III.4.4 Système ouvert/fermé, environnement et milieu
III.4.5 Les composantes primaires d’un système « processus et processeurs » et référentiel TEF
III.4.6 L’activité, l’évolution et fermeté d’un système complexe
III.4.7 Variété et état d’un système
III.4.8 Interrelation, matrice structurelle, feed-back et réseau
III.4.8.1 Interrelation
III.4.8.2 La matrice structurelle
III.4.8.3 Feed-back ou recyclage
III.4.9 Le réseau du système
III.4.10 L’organisation
III.5 Les niveaux téléologiques d’un système complexe
III.6 Modélisation théorique de Jean-Louis Le Moigne
III.7 Conclusion
CONCLUSION