LES THEORIES DU COMMERCE INTERNATIONAL
Le néo-fonctionnalisme
Aucune autre approche théorique n’a étudié le processus et de l’intégration régionale autant que le néo-fonctionnalisme. Il a d’abord apparu dans une conjoncture historique très spécifique de certains événements et le développement de la théorie d’intégration dans un sens où c’était une tentative de donner de la rigueur théorique à la pensée des pères fondateurs de l’intégration européenne. Le néo-fonctionnalisme comme raisonnement a été à l’instar du fédéralisme un courant politique qui s’est vite développé en une approche théorique de l’intégration régionale. Par définition, le néo-fonctionnalisme est moins normatif que le fonctionnalisme et surtout, il utilise des analyses et des approches empiriques et donc testables. La toute première version de cette théorie avait pour but de démontrer comment l’intégration européenne devait progresser dans un contexte où tous les obstacles avaient un caractère soit économique, soit technique.
Les partisans de cette théorie étudient le processus d’intégration de par l’évolution des regroupements des Etats et non le résultat. En d’autres termes, ils présentaient l’intégration comme un processus auto-entretenu, qui se construit graduellement sous l’influence des besoins fonctionnels. Ceci renvoie selon le même auteur à la relation de pouvoir vertical, le pouvoir-gouvernement).
Ce courant était au sommet de sa dominance pendant les années 1960 et la plupart des oeuvres clés de ce courant datent aussi de cette période. La théorie a commencé à prendre forme en 1958 avec les études de Haas sur l’Union de l’Europe, suivi par les travaux de Lindberg3. Grâce à ces auteurs, il a été possible d’esquisser les principaux arguments du raisonnement néo-fonctionnaliste. Des différences existent entre le néo-fonctionnalisme et le transactionalisme. Ce dernier avait défini l’intégration comme une condition et l’accomplissement de cette dernière a été mesuré par l’existence « d’une communauté de sécurité » tandis que le néo-fonctionnalisme définie l’intégration comme un processus dont le résultat final est une nouvelle communauté politique qui supplante les préexistantes. Le néo-fonctionnalisme était aussi clairement distinct du fédéralisme dans sa démarche qui était beaucoup plus scientifique que ce dernier. L’approche plus analytique du néo-fonctionnalisme a profité à la théorie d’intégration en général. Un exemple de ceci est la tentative de définir les conditions préalables à une intégration réussie. Ces conditions peuvent être résumées, premièrement, dans la nécessité d’établir des institutions et des politiques centrales qui permettent d’assurer et de promouvoir « la vision régionale » et de résoudre des conflits entre les États membres. Ensuite, il devrait y avoir un lien entre les intérêts d’États membres et le processus d’intégration.
La partie la plus novatrice de ce modèle est la condition qui stipule toujours selon Lindberg5 que les tâches des institutions établies soient expansives. En d’autres termes, en entreprenant une action peut dans un cadre d’intégration imposer de nouvelles actions ce qui appelle « spillover »1. Ceci renvoie à l’idée de Haas, qui selon lui, est une situation où la création et l’approfondissement de l’intégration dans un secteur économique créeraient des pressions dans d’autres secteurs de l’économie.
L’hypothèse de spillovers comme un phénomène linéaire et progressif a été redéfinie plus tard. En général, ils signifient que l’intégration passe d’un premier secteur à un autre, car l’intégration du premier domaine crée une pression sur le deuxième. On peut citer l’exemple d’une union douanière qui est le fruit d’un approfondissement de la zone de libre échange. A cela s’ajoutent le transfert des alliances domestiques et enfin l’automaticité technocratique. Ceux-ci mènent à la progression de l’intégration par secteurs économiques, mais aussi technologiques et, également, politiques. Ces effets suscités se forment au niveau local et se poursuivent au niveau national, régional et interrégional. Au fur et à mesure que le processus de l’intégration avance, ses répercussions se font sentir tout en profondeur pour aboutir enfin à une intégration politique de « haut niveau ».
De par ce raisonnement les néo-fonctionnalistes ont été mené à penser que les spillovers n’étaient pas la seule option possible dans le processus d’intégration, mais le processus pourrait aussi mener à, une situation de spill-back, se qui signifie une désintégration ou une intégration plus ou moins formelle. Comme il peut mener à se qu’on appelle spill-arround où le processus d’intégration reprend un pas ou retourne même à l’état de choses qui a existé avant que le processus d’intégration n’ait été déclenché.
Depuis ce temps-là, cette théorie a été maintes fois rejetée, maintes fois acceptée et surtout maintes fois refaite et/ou ajustée. La version la plus récente a été élaborée par Stone Sweet et Sandholtz. Les deux auteurs montrent les atouts de la théorie néo-fonctionnaliste et sa capacité prédictive. Selon eux, la théorie est très dynamique – à la différence des autres – dans la mesure où elle explique le processus de l’intégration au cours du temps.
Cependant, ils avouent que cette approche ne peut pas tout expliquer, mais qu’elle possède des outils et des méthodes suffisamment pertinents pour que l’on puisse prédire l’évolution de certains aspects de l’intégration.
L’intergouvernementalisme
Dans les années 1940 et les années 1950, les modèles d’intégration dominants, comme le fonctionnalisme et le néo-fonctionnalisme, avaient prétendu que les principes d’organisation de base d’activité humaine avaient profondément changé et les États-nations perdaient donc leur importance comme la base d’activité humaine. Le néo-fonctionnalisme a été défié déjà dans les années 1960, mais étrangement le défi le plus puissant contre ce courant n’est pas venu d’une direction académique en premier lieu, mais a été fait par le président français Charles de Gaulle, qui a mis un veto à la demande d’adhésion britannique en 1963 et a créé la crise de la chaise vide en 1965. En conséquence les néo-fonctionnalistes avaient des difficultés à correspondre leurs théories à la réalité empirique.
Hoffmann, offre une première interprétation de l’impact de Gaulle sur le processus d’intégration qui est en soi une critique du néo-fonctionnalisme. Cela s’est fait en mettant en évidence l’importance d’intérêts nationaux dans la politique européenne et de l’intégration. Selon Hoffmann, la logique transnationale d’intégration n’avait pas remplacé les Etats-nations et les intérêts nationaux en Europe, même si les premières années d’intégration avaient été prometteuses d’une perspective néo-fonctionnaliste.
Ses avis sont en concordance avec les écoles réalistes de la politique internationale, qui avancent que les Etats sont les unités de base du système international et leur objectif principal est de promouvoir leurs intérêts nationaux. Le veto français avait montré que les Etats pourraient affecter le processus d’intégration tout entier s’ils le voulaient et rien n’est automatique dans l’intégration comme le soulignaient les néo-fonctionnalistes. Il a semblé que les suppositions de base de relations internationales n’avaient pas changé bien que des états européens aient établi un nouveau forum pour leur interaction internationale et ceci a montré les limites de la méthode fonctionnelle.
La courant intergouvernementaliste est très proche de la vision du monde réaliste dominante dans les relations internationales courantes . Selon le courant réaliste et néo-réaliste, les états sont des acteurs personnels, qui adaptent leur comportement dans le système international selon leur vision par rapport à leur position dans ce système. Dans cette évaluation, il a été signalé que le processus d’intégration ne pouvait pas être aussi automatique que pensaient les néo-fonctionnalistes. Mais il interviendrait toujours des variables dans le processus spillover qui fait que les États membres seraient les acteurs intervenants les plus importants.
Selon Kébabdjian, l’approche intergouvernementale, est un jeu à deux niveaux où le gouvernement est l’acteur principal dans la mesure où il agit sur la scène nationale et internationale. L’intergouvernementalisme libéral de Moravcsik,4 accorde, une plus grande autonomie à la société civile.
Ce dernier, pense que les acteurs nationaux, économiques soient-ils ou sociaux peuvent former des positions qui seront défendues par l’élite gouvernementale sur le plan international. Il est allé jusqu’à affirmer que les intérêts économiques (qui sont essentiellement représentés par les groupes d’intérêt) l’emportent sur ceux politiques.
Keohane et Hoffmann n’écartent pas cette possibilité mais en relativisent la portée globale. Garrett, quant à lui se concentre uniquement sur les négociations entre gouvernements, tandis que Dyson montre que les groupes d’intérêt économiques peuvent être exclus de décisions très importantes comme par exemple celle sur l’Union économique et monétaire.
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Table des matières
DEDICACES
REMERCIEMENTS
SOMMAIRE
INTRODUCTION GENERALE
PARTIE 1 INTEGRATION REGIONALE: CONCEPTS ET PROCESSU
Chapitre 1 CONCEPT DE L’INTEGRATION REGIONALE
1. INTRODUCTION
2. LES THEORIES DU COMMERCE INTERNATIONAL
2.1. Théorie traditionnelle du commerce internationale
2.1.1. De l’avantage absolu à l’avantage comparatif
2.1.2. La théorie d’Heckscher et Ohlin
2.2. La nouvelle théorie du commerce international
3. DEFINITION DE L’INTEGRATION REGIONALE
3.1. La notion de région en économie
3.2. Régionalisation, régionalisme et intégration régionale
3.2.1. Le régionalisme
3.2.2. La régionalisation
3.2.3. L’intégration régionale
3.3. Le concept d’intégration profonde
3.4. Les vagues du régionalisme
4. LES CONCEPTIONS DE L’INTEGRATION REGIONALE
4.1. Les modèles d’intégration politique
4.1.1. Le fédéralisme
4.1.2. Le transactionalisme
4.1.3. Le fonctionnalisme
4.1.4. Le néo-fonctionnalisme
4.1.5. L’intergouvernementalisme
4.2. Les conceptions non-politique de l’intégration régionale
4.2.1. La conception libérale
4.2.2. La conception institutionnelle
4.2.3. La conception volontariste
4.2.4. La conception territoriale
4.2.5. La conception diplomatique
4.3. Typologie de l’intégration régionale
4.3.1. Une typologie selon le degré d’intégration
4.3.2. Les typologies dichotomiques
4.3.3. Les typologies triangulaires
5. CONCLUSION
Chapitre 2 PROCESSUS D’INTEGRATION REGIONALE
1. INTRODUCTION
2. INTEGRATION REGIONALE ET MONDIALISATION
2.1. L’intégration régionale: étape vers la mondialisation
2.2. L’intégration régionale : composante de la mondialisation
2.3. L’intégration régionale comme réponse à la mondialisation
3. LES EFFETS DE L’INTEGRATION ECONOMIQUE
3.1. Les effets statiques de l’intégration
3.1.1. Les effets de création et détournement de commerce
3.1.2. Les effets sur les termes de l’échange
3.2. Les effets dynamiques de l’intégration économique
3.2.1. Les économies d’échelle et la concurrence
3.2.2. Les investissements directs étrangers
3.3. Les arguments politiques de l’intégration
3.3.1. le renforcement du pouvoir de négociation
3.3.2. Gains de crédibilité
4. LES CRITERES DU SUCCES DES ACCORDS REGIONAUX
4.1. Critères du volume d’échange
4.1.1. Volume du commerce
4.1.2. Proximité géographique
4.2. critères de complémentarité
4.2.1. Complémentarité commerciale
4.2.2. Commerce intra-branche
4.2.3. Politique commerciale et déterminants institutionnels du commerce
4.3. Critères de concurrence
4.3.1. Concurrence des exportations
4.3.2. Concentration des exportations
4.4. Limites d’une régionalisation entre PED
4.4.1. Manque de conditions nécessaires
4.4.2. Complémentarité versus concurrence
5. LES EXPERIENCES D’INTEGRATION DANS LE MONDE
5.1. Intégration entre pays émergents
5.1.1. Le marché commun du sud (MERCOSUR)
5.1.2. L’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN)
5.2. Intégration impliquant des pays développés
5.2.1. L’Union Européenne (UE)
5.2.2. L’Accord de Libre-échange Nord-Américain (ALENA)
5.3. Intégration entre pays en développement
5.3.1. Le Marché commun de l’Afrique de l’Est et de l’Afrique Australe (COMESA)
5.3.2. La Communauté de développement de l’Afrique Australe (SADC)
6. CONCLUSION
PARTIE 2 IMPACT DE L’INTEGRATION MAGHREBINE SUR L’ALGERIE
Chapitre 3 LES ECONOMIES DU MAGHREB: ETAT DES LIEUX
1. INTRODUCTION
2. L’UNION DU MAGHREB ARABE (UMA)
2.1. Historique de L’UMA
2.2. Objectifs de l’UMA
2.3. Structure de l’UMA
2.4. Conventions signées dans le cadre de l’UMA
3. EVOLUTION DES DIFFERENTS SECTEURS DE L’ECONOMIE
3.1. L’Algérie
3.1.1. L’agriculture
3.1.2. L’énergie
3.1.3. L’industrie
3.1.4. Les services
3.2. Le Maroc
3.2.1. L’agriculture
3.2.2. L’énergie
3.2.3. Les mines
3.2.4. L’industrie
3.2.5. Les services
3.3. La Tunisie
3.3.1. L’agriculture
3.3.2. L’énergie
3.3.3. L’industrie
3.3.4. Les services
4. CARACTERISTIQUES DES ECONOMIES MAGHREBINES
4.1. Une spécialisation traditionnelle
4.1.1. L’Algérie
4.1.2. La Tunisie
4.1.3. Le Maroc
4.2. La transition vers un modèle économique libéral
4.2.1. L’Algérie
4.2.2. La Tunisie
4.2.3. Le Maroc
5. ATOUTS ET CONTRAINTES DE L’INTEGRATION MAGHREBINE
5.1. Les atouts de l’intégration
5.2. Les contraintes de l’intégration
6. ÉTAT DES LIEUX DU COMMERCE DANS L’UMA
6.1. Les principaux cadres d’échange
6.1.1. Les accords bilatéraux
6.1.2. Les principaux accords avec l’Union Européenne
6.2. Évolution du commerce dans la sous région
6.2.1. Evolution du commerce régional
6.2.2. Etat des lieux des échanges avec l’UE
6.3. La faible part du commerce intra zone
7. CONCLUSION
Chapitre 4 ESTIMATION DU POTENTIEL DE L’INTEGRATION MAGHREBINE POUR L’ALGERIE
1. INTRODUCTION
2. PRESENTATION DU MODELE GRAVITATIONNEL
2.1. L’origine du modèle gravitationnel
2.2. Le modèle de gravité dans le commerce international
2.3. Evolution du modèle gravitationnel de commerce international
2.3.1. Les modèles intuitifs
2.3.2. Les modèles théoriquement fondés
2.3.2.1. Le modèle de gravité et la théorie classique
2.3.2.2. Le modèle de gravité et la théorie monopolistique
2.4. Les variables gravitationnelles de l’équation
2.4.1. Les variables favorables à l’échange
2.4.2. Les variables défavorables au commerce
3. LE MODELE GRAVITATIONNEL SUR DONNEES DE PANEL
3.1. Les données de panel
3.2. Le choix de la méthode d’estimation
3.2.1. Méthode des moindres carrés ordinaires(MCO)
3.2.2. Méthode des effets fixes
3.2.3. Méthode des effets aléatoires0
3.3. Les tests de validité
3.3.1. Le test d’hétéroscédasticité
3.3.2. Le test d’endogénéité
3.3.3. Le test d’auto-corrélation
4. DEMARCHE DE LA RECHERCHE
4.1. Revue des principales contributions
4.2. Construction du modèle
4.3. Choix des variables et échantillonnage
4.3.1. Choix des variables
4.3.2. Echantillon et sources des données
4.4. Estimation du potentiel de l’intégration dans l’UMA
4.4.1. Les signes des paramètres
4.4.2. Méthode d’estimation
5. RESULTATS DE L’ESTIMATION
5.1. Validité du modèle
5.1.1. Vérification des signes
5.1.2. Choix du modèle d’estimation
5.1.3. Vérification de l’ absence de corrélation
5.2. Analyse du potentiel de commerce
5.2.1. Le potentiel au niveau global
5.2.2. Potentiel de l’intégration pour l’Algérie
5.2.3. Potentiel de l’intégration pour le Maroc
5.2.4. Potentiel de l’intégration pour la Tunisie
5.2.5. Effet de création du commerce
5.3. Discussion des résultats
6. CONCLUSION
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