Les techniques de renforcement par inclusions rigides
Type d’ouvrages renforcés par inclusions rigides
Dans le domaine du génie civil, la technique de renforcement de sols par des inclusions linéaires « rigides » est utilisée dans plusieurs types d’ouvrages tels que :
a) Les fondations sur réseaux de micro-pieux (Plumelle et al., 2002 [42] ; Schlosser et Frank, 2003 [46]) qui sont souvent employées dans le cadre de travaux spéciaux de reprise en sous-oeuvre. Cette technique permet notamment de réhabiliter des aménagements du réseau routier dont les fondations se sont effondrées, ou de réparer des ouvrages d’art tels que ponts et bâtiments anciens endommagés par le temps ou les intempéries. Il s’agit d’un type d’ouvrage de fondation mettant en jeu des inclusions de diamètre réduit, dont la pose par forage peut être effectuée sur des chantiers difficiles d’accès.
b) Les pentes stabilisées par l’introduction d’inclusions rigides capables de reprendre des efforts de flexion afin de diminuer fortement les mouvements de ces dernières (Gudehus et Schwarz, 1985 [23] ; Guilloux, 1993 [24])
c) Les fondations sur groupes de pieux (Borel, 2001 [6] ; Burland et al., 1977 [10]) qui consistent à mettre en place des pieux verticaux solidarisés par un radier (ou une semelle) pour transmettre le poids de l’ouvrage supporté aux couches profondes du sol de fondation. On peut distinguer dans cette catégorie deux types de fondation en considérant le contact entre le massif de sol et le radier.
Il s’agit d’une part des fondations profondes où le radier n’est pas en contact avec le sol, les charges étant transmises par frottement le long des pieux, ainsi que par les efforts en pointe, d’autre part des radiers de fondations sur pieux ou fondations mixtes (« piled raft foundation ») pour lesquelles la semelle de fondation est en contact avec le sol. Cette dernière technique, d’utilisation plus récente que les fondations profondes, combine le mode de fonctionnement de ces dernières avec celui d’une fondation superficielle , extraite de la thèse de Sudret (1999) [51] montre l’utilisation de cette technique qui se révèle efficace pour améliorer la capacité portante de fondations d’immeubles de très grande hauteur.
d) Les fondations sur inclusions verticales en contact ou non avec un substratum, pour lesquelles les chargements sont répartis sur la tête des inclusions par l’intermédiaire d’un matelas de répartition constitué d’un matériau granulaire (Alexiew et Vogel, 2002 [1] ; Berthelot et al., 2003 [5]).
Méthode de calcul et de dimensionnement en conditions dynamiques
On trouvera dans Hassen (2006) [25] une synthèse des principales méthodes de calcul et de dimensionnement des fondations sur pieux ou renforcées par inclusions rigides décrites précédemment, soumises à des conditions de chargements statiques ou quasi-statiques, y compris dans le cas de la prise en compte d’un comportement non-linéaire (de type élastoplastique) des matériaux jusqu’à la rupture. Nous nous proposons de passer ici rapidement en revue quelques unes des modélisations du comportement élastodynamique de ces ouvrages, en particulier pour ce qui concerne l’évaluation de l’impédance dynamique de ce type de fondation.
Approche fondée sur le modèle de Winkler
Largement utilisé pour les calculs en statique de fondation sur groupes de pieux, le modèle de Winkler est également employé pour évaluer la raideur dynamique (impédance) de ce type d’ouvrages. Son principe repose sur une modélisation des inclusions comme des poutres, l’action du sol étant représentée par une distribution des ressorts et d’amortisseurs exerçant une densité efforts horizontaux q(z).
Méthodes des éléments finis et des éléments de frontière
Compte tenu du caractère authentiquement tridimensionnel d’un ouvrage renforcé par inclusions rigides pour lequel il convient de prendre en compte les interfaces entre le sol et les inclusions, la méthode des éléments finis semble la plus appropriée pour traiter le problème du calcul élastodynamique de ce type d’ouvrage dans le cadre d’une telle modélisation. Mais cette approche se heurte à de nombreuses difficultés liées :
– au faible diamètre des pieux qui nécessite de mailler très finement le modèle au niveau des pieux et à leur proximité immédiate ;
– au nombre parfois très important d’inclusions mises en jeu conduisant à la résolution de problèmes de très grand taille ;
– à la nécessité de modéliser les interfaces sol/inclusions;
– au fort contraste des propriétés des matériaux constituant le massif et l’inclusion, qui peut engendrer des problèmes de stabilité des calculs et de risque de divergence du résultat.
Il en résulte des temps de calcul prohibitifs, non compatibles avec la nécessité pour l’ingénieur de disposer d’une évaluation rapide des performances de l’ouvrage.
En raison de cette complexité, les analyses approfondies d’ouvrages renforcés par inclusions rigides, conduites à l’aide de la méthode des éléments finis, sont donc relativement rares. On peut citer à titre d’exemple quelques études récentes consacrées à la simulation par éléments finis tridimensionnels de ce type de problème :
– Guoxi Wu et Liam Finn (1997) [54] ont présenté une méthode des éléments finis quasi tridimensionnels, dans laquelle l’équation des ondes 3D est utilisée pour décrire la réponse dynamique du sol.
– Étude du comportement dynamique d’un groupe de pieux mis en place dans un massif de sol compressible (Messioud et al., 2011 [31]). Une modélisation complexe de l’ensemble sol-pieux-dalle a été mise en œuvre par la méthode des éléments finis à l’aide du code ASTER .
Afin de surmonter la complexité et la lourdeur de la méthode des éléments finis ci-dessus, d’autres approches numériques sont proposées :
– la méthode des éléments de frontière (« boundary element method ») dans laquelle seuls les contours du sol, c’est à dire l’interface entre le sol et les pieux d’une part, entre le sol et le radier d’autre part, sont discrétisés (Poulos et Davis, 1980 [44] ; Maeso et al. 2005 [37], etc.) ;
– la méthode des éléments finis couplée à celle des éléments de frontière où le sol est séparé en deux blocs : l’un contenant les inclusions modélisées par éléments finis (FE bloc), l’autre entourant le premier bloc modélisé par éléments de frontière (BE bloc). Ces deux blocs sont assemblés en utilisant la technique de Craig-Bampton [14] (Taherzadeh et al. (2002) [52], Coda, Venturini, 1998 [13] ; Padron, Aznarez, Maeso, 2006 [29], etc.).
C’est sur le base de l’utilisation systématique conjointe des méthodes des éléments finis et des éléments de frontière que Taherzadeh et al. (2002) [52] ont établi des formules analytiques permettant d’évaluer l’impédance dynamique d’un radier de fondation reposant sur un groupe de pieux flottants ou encastrés, soumis à des sollicitations dynamiques latérales ou de renversement. De telles formules sont fondées sur la construction d’un modèle général de matrice d’impédance (FIG (1.9)) relative au comportement global de l’ouvrage : chacun des termes de cette matrice est alors identifié à partir de simulations numériques. L’avantage de cette démarche est de pouvoir disposer de formules analytiques simples, d’application directe, permettant d’évaluer les propriétés dynamiques de la fondation en fonction d’un certain nombre de paramètres géométriques et mécaniques, notamment pour des ouvrages comportant un grand nombre d’inclusions.
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Table des matières
1 Introduction
1.1 Introduction
1.2 Les techniques de renforcement par inclusions rigides
1.2.1 Type d’ouvrages renforcés par inclusions rigides
1.2.2 Caractéristiques communes des ouvrages renforcés par inclusions rigides
1.3 Méthode de calcul et de dimensionnement en conditions dynamiques
1.3.1 Approche fondée sur le modèle de Winkler
1.3.2 Méthodes des éléments finis et des éléments de frontière
1.3.3 Les approches par homogénéisation
1.4 Vers une modélisation multiphasique pour l’analyse dynamique des sols renforcés
1.4.1 Une brève histoire du modèle multiphasique
1.4.2 Plan du mémoire
2 Comportement dynamique d’un sol renforcé par inclusions, modélisé comme un milieu homogène anisotrope
2.1 Introduction
2.2 Principe de l’approche par homogénéisation classique
2.3 Equation homogénéisée de l’élastodynamique
2.4 Une solution particulière : la propagation d’une onde plane harmonique
2.4.1 Tenseur de Cristoffel et polarisation des ondes
2.4.2 Exemple illustratif
2.5 Traitement numérique pour un calcul dynamique
2.5.1 Le problème traité
2.5.2 Méthode d’homogénéisation vs simulation directe
2.6 Intérêt et limite de l’approche par homogénéisation
3 Modélisation dynamique du sol renforcé comme un milieu multiphasique avec prise en compte de l’interaction sol/inclusions
3.1 Introduction
3.2 Principe de la modélisation
3.3 Equations de l’élastodynamique
3.3.1 Dynamique d’un système multiphasique
3.3.2 Comportement élastodynamique
3.4 Application à la propagation d’une onde de compression parallèlement à la direction du renforcement
3.5 Exemple d’application : Calcul de l’impédance d’une couche renforcée
3.5.1 Position du problème
3.5.2 Solution en déplacement
3.5.3 Identification des coefficients d’interaction et résultats
3.6 Positionnement du modèle multiphasique par rapport à la méthode des développements asymptotiques
3.6.1 Rappel de la méthode des développements asymptotiques
3.6.2 Confrontation avec le modèle multiphasique
3.7 Conclusion
4 Mise en œuvre numérique 2D du modèle multiphasique dynamique en élasticité linéaire
4.1 Introduction
4.2 Formulation éléments finis en dynamique appliquée au modèle multiphasique
4.3 Méthode de résolution dans le domaine temporel
4.4 Conditions aux limites absorbantes
4.5 Application au dimensionnement de fondations renforcées par inclusions rigides
4.5.1 Position du problème
4.5.2 Données du problème
4.5.3 Simulation numérique et résultats
4.5.4 Conclusion
5 Conclusion
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