Les systèmes de classifications des massifs rocheux
Tous comme les géologues, les géomécaniciens disposent d’un certain nombre de classifications qui permettent d’identifier les roches. Ces classifications raisonnent en terme de comportement des matrices et des discontinuités mais aussi en terme de familles de discontinuités. Elles interviennent le plus souvent dans le pré-dimensionnement et dans une moindre mesure dans le dimensionnement des ouvrages au rocher. Dans ces classifications, les paramètres structuraux et géométriques des discontinuités sont quantifiés à l’aide de valeurs chiffrées.
Les systèmes de classification tiennent compte alors du degré de fracturation du massif rocheux et de la présence ou non de bancs, du RQD (Rock Quality Designation), du RSR (Rock Structure Rating). Ces deux paramètres, en plus d’être utilisés dans des classifications diverses, constituent aussi des systèmes de classification. Jn, Ja, Jw, SRF sont surtout utilisés pour le Q-system dans l’ensemble des classifications que nous allons exposer. Le Jn quantifie le nombre de familles de discontinuités. Ce paramètre est déterminé en analysant les discontinuités et en y définissant le nombre de familles mais aussi le nombre de joints libres (n’appartenant à aucune des familles définies). Le Ja est un terme qui caractérise l’altération des épontes des discontinuités. Il correspond au Joint Alteration Coefficient ou ”Indice d’Altération des Joints”. Le Jw constitue un coefficient d’évaluation des contraintes hydrauliques. Il est déterminé suite aux venues d’eau lors du creusement d’un ouvrage. Le SRF est le Stress Rating Factor ou ”Facteur de Réduction des Contraintes”.
C’est l’ensemble des notes affectées à ces paramètres qui permettent de déduire l’indice de classification de la roche afin d’en déduire sa Classe. Ces paramètres constituent eux-mêmes les éléments de base des classifications géomécaniques. Pour ceux intervenant dans la même classification, les notes affectées permettent de déduire l’indice à affecter à la roche. En effet, ces classifications, dites mécaniques, permettent non seulement d’estimer indirectement les paramètres mécaniques des roches à l’échelle du massif mais aussi de définir le «Stand-up time» qui correspond au temps de tenu d’un massif sans soutènement (Chalhoub, 2006 ; Tahiri, 1992).
Ainsi, il est vivement conseillé d’utiliser au moins deux systèmes de classification pour le dimensionnement d’un ouvrage géomécanique.
Dans le cadre de ce travail, nous développerons trois des classifications des plus utilisées :
• le système Q ou (Tunneling Quality Index) de Barton et al. (1974),
• le RMR (Rock Mass Rating) de Béniawski (1989) ;
• le GSI (Geological Strenght Index).
Le RQD se définit suite à une campagne de terrain. Lors d’un sondage par forage, la carotte se découpe plus ou moins en des fragments de dimensions variables. Dès lors, le RQD correspond aux sommes de longueurs cumulées des fragments de dimension supérieure à 10 cm sur la longueur totale de la carotte (Deere, 1967). Ce concept est ensuite utilisé par un bon nombre de mécaniciens des roches (Martin, 2007 ; Saitta et Martin, 2006 ; Zhao, 2008). Pour plus de commodité, L’AFTES fixe la longueur totale de la carotte à 1 m. Ainsi, le RQD représente le degré de fracturation de la roche et reflète la qualité du massif rocheux et par conséquent ne donne pas avec précision des informations sur le comportement du massif (Zhao, 2008).
Le système Q ou « Tunneling Quality Index »
Ce système de classification a été mis sur place par Barton en 1974. Le système ainsi mis au point donne une bonne estimation de la qualité des surfaces de discontinuités. Ainsi, il décrit la surface des discontinuités et affecte des coefficients à leur altération, leur rugosité, ainsi qu’au nombre de famille de discontinuités (Barton et al., 1974 ; Carrozzo et al., 2007 ; Zhao, 2008 ; Chahloub, 2006). Les contraintes dans le massif y sont aussi tenues en considération.
Hack et Bekendam (1992) donnent une explication qui permet de mieux comprendre les données utilisées dans cette formulation. Selon ces auteurs, [Jn] doit être amené à une valeur la plus faible possible qui permette d’assurer plus de stabilité. Il sera très important de pouvoir se prononcer sur la quantité des discontinuités. Et dans ce cas, il est recommandé de multiplier le [Jn] par 3. Ce chiffre représenterait alors un coefficient de sécurité. [Jr] et [Ja] caractérise la ”capacité de cisaillement” de la discontinuité. Le premier terme relatif à la rugosité des discontinuités s’oppose au mouvement alors que le second définissant l’altération, favorise le mouvement. Si la valeur maximale est considérée pour le [Jr], tel n’est pas le cas pour le [Ja] pour laquelle plus la valeur est élevée plus la roche a un mauvais comportement.
Le Rock Mass Rating (RMR)
Cette classification, mise au point par Bieniawski (1973, 1976 et 1989), évalue les différents paramètres dont un cœfficient numérique est associé (Russo, 2007 ; Chalhoub, 2006 ; Golder Associate, 2003 ; Hoek et al., 1995). Elle est basée sur une étude de tunnels creusés dans des terrains sédimentaires. Pour l’utilisation de ce système et l’estimation de la résistance à la compression d’un massif rocheux, la connaissance des paramètres mis sur place pour cette classification est nécessaire.
Ces paramètres sont :
• la résistance à la compression uniaxiale de la roche saine,
• la valeur du RQD ;
• l’espacement des discontinuités ;
• les conditions hydrauliques ;
• les conditions de discontinuité ;
• l’orientation des discontinuités.
En effet, cet indice RMR est la somme des cinq premiers paramètres caractérisant le massif rocheux et d’une note d’ajustement qui dépend de l’orientation des discontinuités par rapport à l’ouvrage . Dans cette classification, l’influence jouée par la matrice rocheuse est minime comparée à celle des discontinuités (Bieniawski, 1976). En effet, selon cet auteur 70 % de la note affectée au massif résulte de l’effet des discontinuités tandis que les 30 % restant sont équitablement partagée entre la matrice rocheuse et les eaux présentes dans le massif (AFTES, 2003). Cette classification présente aussi de sérieuses limites dues au fait qu’elle ne tient en compte ni des contraintes in-situ, ni de la rugosité des surfaces de discontinuité et encore moins de l’angle de frottement du matériau de remplissage. Pour l’application de ce système, la masse rocheuse sera divisée en un nombre fini de parties qui seront classées indépendamment. En effet, ces divisions sont d’autant plus nécessaires que les caractéristiques des discontinuités telles que l’espacement varie d’un domaine à l’autre. C’est donc à cause de ces différentes limites de la classification originale que les modifications ont été apportées et permettent aujourd’hui une meilleure applicabilité. Comme pour le Q-system, on définit pour le RMR une valeur dérivée qui est le RMR’ (Améli, 2008). Pour cette corrélation, les massifs de mauvaises qualités et celles présentent des qualités faibles, alors les deux valeurs se valent et elles évoluent en sens inverses .
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Table des matières
Introduction Générale
PARTIE I : Géométrie et mécanique des massifs rocheux
Chapitre 1. – Le massif rocheux
Introduction
1. – Définition du massif rocheux
2. – Les discontinuités dans le massif rocheux
3. – Orientation des discontinuités
4. – Représentation stéréographique
5. – Paramètres physiques des discontinuités
Conclusion
Chapitre 2. – Les systèmes de classifications des massifs rocheux
Introduction
1. – Le système Q ou « Tunneling Quality Index »
2. – Le Rock Mass Rating (RMR)
3. – Le Geological Strength Index (GSI)
4. – Estimation du module de rigidité du massif rocheux
Conclusion
Chapitre 3. – Le comportement mécanique des roches
Introduction
1. – La matrice rocheuse
2. – Comportement mécanique des discontinuités
3. – L’effet d’échelle
Conclusion
Chapitre 4. – Théorie des fractals et applications
Introduction
1. – Fractals auto-similaires
2. – Fractals auto-affines
3. – La Multifractalité
4. – Génération d’une structure fractale
5. – Modèles corrélés longue portée
6. – Détermination des paramètres des fractals autoaffines
7. – Echelle microscopique et microdiscontinuités
Conclusion
Chapitre 5. – Rugosité des discontinuités
Introduction
1. – Estimation approximative du JRC (Joint Roughness Coefficient)
2. – Détermination expérimentale
Conclusion
Chapitre 6. – Les critères de ruptures
Introduction
1. – Le critère de Mohr-Coulomb
2. – Le critère de Hoek-Brown
3. – Le critère de Griffith
Conclusion
Chapitre 7. – Modélisation et ouvrage au rocher
Introduction
1. – Modélisation des milieux rocheux
2 – Les ouvrages au rocher
3. – Dimensionnement des ouvrages souterrains
Conclusion
PARTIE II. – Investigations de terrains et données de laboratoires
Chapitre 1. – Investigations géomécaniques dans le domaine du socle, la série birrimienne de Mako
Introduction
1. – Contexte de l’étude
2. – Description générale
3. – Etude des variables géomécaniques des basaltes du sud de Mako
4. – Etude de lames minces
Conclusion
Chapitre 2. – Etude géomécanique dans le domaine de la couverture sédimentaire entre Pélél Kindéssa et Ségou
Introduction
1. – Contexte général du bassin de Ségou
2. – Description pétrographique des roches du secteur
3. – Etude de la colline de la frontière Sénégalo-guinéenne
4. – Paramètres mécaniques
5. – Stéréographie des discontinuités
6. – Analyse microscopique des microdiscontinuités
Conclusion
Chapitre 3. – Etudes expérimentales par chargements sous sollicitations uni-axiale et paramètres dérivés
Introduction
1. – Phase de confection des éprouvettes de roches
2. – Dispositif et procédure expérimentale
3. – Résultats expérimentaux des essais de Compression Uni-Axiale (UCT)
4. – Détermination des paramètres mécaniques des massifs rocheux
Conclusion
Chapitre 4. Problématique des ouvrages aux rochers
Introduction
1. – Ouvrages de protection des glissements
2. – Dimensionnement d’ouvrages souterrains
Conclusion
Conclusion générale