L’enseignement de l’anglais, langue étrangère ou seconde, dans les pays francophones, se trouve confronté à beaucoup de difficultés et les taux de réussite ne sont généralement pas élevés. C’est le cas dans le domaine de l’anglais de spécialité où les enseignants éprouvent beaucoup de difficultés pour amener les apprenants à s’approprier l’anglais économique, l’anglais commercial, l’anglais financier, l’anglais médical, l’anglais agricole, l’anglais informatique, etc. C’est dans le but de contribuer à l’amélioration d’une telle situation, avec nos étudiants béninois, que nous avons souhaité écrire cette thèse « Les supports dans l’enseignement/ apprentissage de l’anglais de spécialité dans un environnement francophone : cas de l’anglais des filières d’économie et de gestion », pour poser et répondre à la question de recherche suivante : quel lien peut-on établir entre les différents supports utilisés, notamment les supports écrits, et la réussite relative que l’on pourrait connaître dans l’enseignement / apprentissage de l’anglais, dans les filières d’économie et de gestion, dans l’environnement francophone d’Afrique et celui béninois en particulier ? En d’autres termes, nous souhaiterions pouvoir apprécier le poids des différents types de supports utilisés dans l’apprentissage de la langue de spécialité qui est enseignée aux élèves et étudiants dans nos écoles et facultés.
Notre ancrage théorique
Pour ce qui est de l’ancrage théorique, nous nous intéresserons tout d’abord à certaines généralités sur enseignement et aussi sur l’apprentissage en nous interrogeant sur ce que l’enseignement et l’apprentissage ont été à l’origine pour voir un peu comment ces concepts ont évolué dans le temps. De façon particulière, nous rappellerons les trois axes du triangle de Houssaye, l’enseignant, l’apprenant et les savoirs qui font l’objet d’enseignement, de même que le modèle SOMA de Legendre.
Comme nous sommes dans le domaine de la didactique des langues en général et celle des langues de spécialité (LSp) en particulier, nous essaierons de définir le terme didactique que nous comparerons au terme pédagogie en essayant de voir ce que ces deux concepts ont de commun de même que ce qui les différencie. Dans l’environnement sur lequel porte notre recherche-action, nous avons affaire à des effectifs de toutes tailles allant des plus petits, soit moins d’une dizaine d’étudiants, aux plus élevés possibles, soit plus de mille (1000) étudiants ou même plus de mille cinq cent (1500) étudiants dans le même amphithéâtre. Nous avons par conséquent voulu nous intéresser au cas particulier de la pédagogie des grands groupes en estimant que les théories développées au sujet des effectifs pléthoriques pourraient nous donner une idée de la manière dont nous pourrions appréhender notre enseignement/apprentissage avec des classes de tailles parfois hors normes comme celles des 1ère années de sciences économiques (SE1) de la Faculté des Sciences Economiques et de Gestion (FASEG) de l’université où nous exerçons.
Lorsqu’on parle d’apprentissage, ou d’enseignement/apprentissage, on doit reconnaître le rôle important du cerveau dont le fonctionnement cognitif peut expliquer les capacités d’apprentissage spécifiques de l’apprenant, d’où la nécessité de recouvrir aux neurosciences pour non seulement voir le degré de complexité du cerveau humain mais aussi pour réaliser à quel point il est nécessaire de tenir compte des capacités réelles du cerveau humain, en tenant compte de l’âge du sujet et des conditions de son développement cérébral, et peut être même de son sexe. Le cerveau est le siège de la pensée humaine et la relation de la langue à la pensée, « the relation of language to thought » (Eric Hawkins, 1987 : 41), c’est-à-dire la psycholinguistique, ou même la neuropsycholinguistique, a justement, selon Cuq (Dir) (2003 : 208), pour objet l’étude des processus cognitifs qui sous-tendent la compréhension et la production de messages linguistiques et ceux qui conduisent à l’appropriation d’une langue, qu’elle soit première, étrangère ou seconde et « se propose d’expliquer les capacités mentales permettant l’acquisition d’une L1 ou d’une L2 ».
Une recherche de terrain fondée sur la recherche-action
Justification du choix de la recherche-action
Le choix de la recherche-action est motivé par le fait que notre recherche, comme c’est le cas pour toute recherche-action, part d’un constat, en l’occurrence celui d’un apprentissage insuffisant e/ou non satisfaisant des concepts, énoncés, patterns linguistiques, formules, etc. objets de l’enseignement/apprentissage de l’anglais de spécialité dans nos classes. Ce constat nous amène à interroger l’apprenabilité, et aussi l’enseignabilité, des supports utilisés, pour arriver à déterminer entre autres si les matériaux linguistiques auxquels les apprenants sont exposés sont des input qui permettent une appropriation progressive de la L2 de spécialité, des « inputs compréhensibles et susceptibles de prendre sens pour les apprenants dans une interaction communicative » (Gaonac’h 2006 : 144).
De plus, nous sommes ici dans le domaine de la pratique enseignante et pour une amélioration de cette dernière « la recherche-action est la méthodologie de recherche qui s’impose en didactique de L2 quand on restreint le champ de celle-là à la pratique » (J.-P. Narcy-Combes 2005 : 112). C’est ainsi que, au cours de la pratique, pendant l’action, des données seront recueillies pour assurer un suivi. Les résultats seront mesurés au fur et à mesure pour être analysés scientifiquement […] Ces résultats et leur analyse permettront de relancer l’action en modifiant les aspects qui ne sont pas pertinents ». (J.-P. Narcy-Combes 2005 : 116-117).
De plus, nous sommes ici dans le domaine de la pratique enseignante et pour une amélioration de cette dernière « la recherche-action est la méthodologie de recherche qui s’impose en didactique de L2 quand on restreint le champ de celle-là à la pratique » (J.-P. Narcy-Combes 2005 : 112). C’est ainsi que, au cours de la pratique, pendant l’action, des données seront recueillies pour assurer un suivi. Les résultats seront mesurés au fur et à mesure pour être analysés scientifiquement […] Ces résultats et leur analyse permettront de relancer l’action en modifiant les aspects qui ne sont pas pertinents ». (J.-P. Narcy-Combes 2005 : 116-117).
Quelques caractéristiques de notre recherche (notre positionnement épistémologique)
Notre recherche-action est compréhensive, c’est-à-dire qu’elle essaie de montrer les réalités de l’enseignement/apprentissage de l’anglais de spécialité telles qu’elles sont vécues dans un environnement francophone comme celui du Bénin. C’est une recherche qui « part de données pour comprendre les phénomènes sociaux. Il s’agit, non de vérifier si les individus fonctionnent d’une façon qui corresponde à des descriptions théoriques préalables, mais de comprendre ce qui les fait agir, et comment ils le font » (J.-P. Narcy-Combes, op.cit. p. 67). Il s’est aussi agi pour nous de visiter nos pratiques enseignantes, de les montrer sous leurs aspects réels, et, par rapport aux théories appropriées, proposer des réaménagements sans pour autant chercher à procéder à une validation qui passerait par la définition d’une nouvelle théorie.
Il s’agit d’une recherche ascendante dans la mesure où elle a comme point de départ des constats de dysfonctionnements sur le terrain, passe par le filtre de nos questions de recherche, se retrouve confrontée à diverses théories pour permettre la construction d’une problématique et aboutir à un objet construit après une prise de «position parmi des théories parfois divergentes » (J.-P. Narcy-Combes, Ibid, 95). Le recours à diverses théories nous place dans une posture polythéiste. Contrairement au courant monothéiste qui favorise un paradigme unique, de telle sorte que la recherche devienne « cumulative, c’est-à-dire que le nouveau savoir s’ajoute au savoir existant en couches successives » (J.-P. Narcy-Combes 2005 : 79), notre recherche invoque plutôt plusieurs théories, tire des aspects de chacune d’elles pour construire ainsi une problématique par le système des entonnoirs.
Notre posture polythéiste n’est pas celle syncrétiste de Jordan (2004 : 116) pour qui « as many theories as possible should be encouraged » mais plutôt une posture intégrative qui, tout comme le faisait l’école de Potamon d’Alexandrie dans le cadre de la philosophie de l’éclectisme, juge « de meilleure méthode de choisir dans différents systèmes certains de leurs éléments sous réserve que ceux-ci soient conciliables entre eux, plutôt que la création d’un système entièrement nouveau » Cuq (2003 : 78) car, dans le domaine de l’apprentissage, aucune science ne peut toute seule donner toutes les explications nécessaires étant donné que « there is no single theory that represents the « absolube truth » about learning » (AMDIN1 2007).
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Table des matières
INTRODUCTION
Chapitre 1 : Méthodologie de recherche
1. Notre ancrage théorique
2. Une recherche de terrain fondée sur la recherche-action
2.1. Justification du choix de la recherche-action
2.2. Quelques caractéristiques de notre recherche (notre positionnement épistémologique)
Chapitre 2 : Quelques généralités sur l’enseignement et l’apprentissage
1.1. Définition de l’enseignement
1.2. Bref historique de l’enseignement
1.3. L’enseignement : plus un art qu’une science
2. Qu’est-ce qu’apprendre ?
2.1 Définition de l’apprentissage
2.2. Différents types d’apprentissage
2.2.1. Apprentissage commun aux humains et aux animaux
2.2.2. L’apprentissage par l’action (learning by doing)
2.2.3. L’apprentissage situé
2.2.4. Apprentissage collaboratif/coopératif/collectif
2.2.4.1. Différences entre collaboration et coopération, entre « collaboratif » et « coopératif »
2.2.4.2. L’apprentissage coopératif ou « cooperative learning »
2.2.4.3. L’apprentissage collectif
2.3. Quelques modèles d’apprentissage
2.3.1. Le triangle de Houssaye
2.3.1.1. Définition du triangle de Houssaye
2.3.1.2. Quelques réactions de chercheurs par rapport au triangle de Houssaye
2.3.2. Le modèle SOMA de Legendre
2.3.3. Le modèle d’Engenstrom
Chapitre 3 : Didactique et pédagogie, et pédagogie des grands groupes
1. Didactique et pédagogie
1.1. Qu’est-ce que la didactique ?
1.2. Qu’est-ce-que la pédagogie ?
2. La pédagogie des grands groupes
Chapitre 4 : Les neurosciences et l’appropriation des langues étrangères
1. Définition des neurosciences
2. Complexité du cerveau humain
3. Nécessité de tenir compte des capacités du cerveau de l’apprenant et de faire travailler les apprenants dans un environnement chaleureux et convivial
3.1. Les capacités d’apprentissage des apprenants par rapport à leur âge
3.2. Le sexe des apprenants serait-il déterminant dans leurs capacités d’apprentissage ?
Chapitre 5 : La psycholinguistique et l’apprentissage des langues
1. Essai de définition de la psycholinguistique
2. Etude de quelques théories relevant de la psycholinguistique
2.1. Le béhaviorisme et la méthode audio-orale/l’exercice structural
2.2. Cognition et psychologie cognitive
2.2.1. La psychologie cognitive par rapport au behaviorisme
2.2.2. Le mentalisme chomskyen
2.2.3. Chomsky et la distinction entre compétence et performance
2.3. Le constructivisme
2.4. L’interactionnisme
2.5. L’innéisme
Chapitre 6 : Apprentissage et acquisition, et la place de l’erreur dans l’appropriation des langues étrangères
1. Apprentissage vs acquisition ?
1.1. Comparaison des deux concepts, apprentissage et acquisition
1.2. L’explicite et l’implicite par rapport à l’apprentissage et à l’acquisition : les deux termes sont-ils mutuellement exclusifs ?
1.3. Comment évoluer de l’apprentissage vers l’acquisition ? (le traitement du sens)
1.4. Le terme appropriation pour départager les chercheurs par rapport aux termes
apprentissage et acquisition
2. L’analyse des erreurs et la notion d’interlangue
2.1. L’analyse des erreurs ou productions non conformes aux attentes (pnca)
2.2. L’interlangue
3. La nativisation
3.1. Qu’est-ce que la nativisation ?
3.2. Nativisation ou transfert ?
3.3. Comment dénativiser ?
Chapitre 7 : Médiation et activités épilinguistiques et métalinguistiques
1. Le rôle et l’importance du médiateur/de la médiation
2. Activités épilinguistiques vs activités métalinguistiques
2.1. Définitions des activités épilinguistiques et des activités métalinguistiques
2.2. Quelques caractéristiques des activités épilinguistiques
2.3. Quelques caractéristiques des activités métalinguistiques
CONCLUSION
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