Analyse statistique des données
Mesurabilité des indicateurs
Nous avons considéré que ces indicateurs n’étaient calculables que si toutes les données nécessaires à leur estimation étaient disponibles pour chaque prescription.
Les intervalles de confiance à 95 % des pourcentages ont été calculés grâce au site BiostaTGV (23).
Validation des indicateurs
On définit V1 comme étant la valeur correspondant au calcul de l’indicateur à partir des données du logiciel métier.
On définit V2 comme étant la valeur correspondant au calcul de l’indicateur à partir des données du logiciel métier et la validation après consultation du dossier patient en prenant comme référentiel les recommandations nationales ou recommandations d’expert selon le cas.
Nous avons alors mesuré l’écart entre V1, la situation en vie réelle, et V2 qui est la situation clinique validée selon les recommandations.
Analyse de la conformité / non-conformité des prescriptions antibiotiques
Nous avons constitué un groupe d’experts multidisciplinaire composé d’un infectiologue, d’un médecin généraliste, d’un microbiologiste et d’un pharmacien. Les durées de prescription ont été comparées aux référentiels en cours en 2021 (11–14). Nous avons analysé les dossiers selon 2 modalités :
– Modalité 1 : les experts n’ont pas remis en cause l’indication de l’antibiothérapie et se sont attachés à calculer la différence entre la durée d’antibiotique prescrite et la durée théorique.
– Modalité 2 : les experts, selon les informations du dossier patient, ont, dans certaines situations, invalidé l’indication de prescription d’antibiotique. Dans ce cas, la durée de traitement théorique a été fixée à zéro.
Il a été fait appel au groupe d’experts dans 3 situations :
– Lorsqu’il n’y a pas de recommandation nationale disponible pour le choix thérapeutique concernant la pathologie observée dans le dossier patient (validation de la non contreindication à la prescription),
– La situation clinique est complexe et nécessite un avis pluridisciplinaire pour la validation en la confrontant aux recommandations et non-contre-indications existantes,
– La prescription est inappropriée en termes de molécule ou de durée.
Les cas concernés ont été revus selon les recommandations, consensus, contre-indications ou absence de contre-indications en vigueur lors de la réalisation de l’étude (recueil et analyse des données). Les informations cliniques disponibles dans le dossier patient ont été confrontées à ces guides et la validation ou l’invalidation décidée après discussion.
RESULTATS
Caractéristiques du pôle de santé étudié
Le PSLA de Saint James est un pôle de santé libéral pluriprofessionnel.
L’équipe médicale est constituée de 6 médecins généralistes, 4 femmes et 2 hommes de moyenne d’âge 44 ans, ayant un exercice varié, pour certains à temps partiel : cabinet de médecine générale, hôpital local (SSR et soins palliatifs), EHPAD, MAS.
Les médecins sont Maîtres de Stage Universitaires pour 3 internes de médecine générale : un interne SASPAS à plein temps au PSLA de Saint James, ainsi qu’un interne premier niveau et un interne SASPAS à temps partagé avec le PSLA de Ducey Les Chéris. Ils accueillent également des externes.
D’après les données communiquées par la CPAM, les médecins généralistes du pôle ont assuré 38174 consultations en 2021 pour 5583 patients, dont 1220 enfants de moins de 16 ans soit 21,9 % de la patientèle globale.
Le PSLA est aussi constitué de 2 cabinets infirmiers, une diététicienne, une pédicurepodologue, une consultation IDE d’addictologie, une équipe mobile EMTEG assurant des consultations gériatriques, une consultation de médecine du travail. Une permanence est régulièrement assurée par une puéricultrice de la PMI d’Avranches. Les patients peuvent également participer à des ateliers d’Education Thérapeutique Pluripathologique.
Caractéristiques de la population étudiée
A partir des données disponibles sur le logiciel métier sur l’année 2021, nous avons relevé 553 prescriptions d’antibiotiques systémiques pour 350 patients de moins de 16 ans.
En raison de l’absence de données essentielles à la validation des indicateurs ou de la présence de critères d’exclusion, nous avons exclu 11 patients, et 16 prescriptions correspondantes.
La validation des indicateurs a donc été réalisée à partir des données concernant 341 patients de moins de 16 ans pour 537 prescriptions d’antibiotiques systémiques à visée curative.
L’échantillon est constitué de 175 enfants de sexe masculin et 166 enfants de sexe féminin soit un sex ratio de 1,05.
Sur cet échantillon, la distribution des âges s’étend de 5 mois à 14,9 ans. La médiane est de 3,7 ans et la moyenne 4,9 +/- 3,93 ans.
Pathologies rencontrées dans l’étude
Les motifs de prescription antibiotique sont renseignés figure 3 ci-dessous. Les données sont détaillées dans l’annexe 1.
Les otites et syndromes otite – conjonctivite, les infections respiratoires hors pneumopathies et les infections pharyngées représentent 84,54 % des étiologies à l’origine prescription d’antibiotiques systémiques. On observe ensuite un groupe de pathologies très différentes mais avec une fréquence d’occurrence proche : les infections cutanées pour 5,21 %, les infections urinaires à 4,47 % et les pneumonies avec 4,10 %. Les sinusites, infections buccales, digestives et ophtalmiquescomptent chacune pour moins de 1 % des pathologies ayant conduit à prescrire un antibiotique systémique.
Durée de prescription des antibiothérapies
Durées de prescription excessives
Le nombre de prescriptions d’antibiotiques de durée trop longue et le nombre de jours en excès par prescription sont indiqués dans le tableau 4 ci-dessous. Les données sont détaillées en annexe 3. Elles ont été validées selon les modalités décrites dans le paragraphe “analyse de la conformité / non-conformité des prescriptions antibiotiques” p. 10.
Le nombre de prescriptions de durée trop importante représente 39,11 % de l’ensemble des prescriptions sur les valeurs observées (modalité 1) vs. 59,22 % après reprise des dossiers.
De même, le nombre de jours excédant la durée recommandée par prescription est de 0,62 jour par prescription selon la modalité 1 contre 2,37 jours après correction.
La figure 5 page suivante montre le nombre de prescriptions de durée prolongée selon les 2 modalités. Si l’on regarde les variations de nombre de prescriptions avant et après correction, on constate que les infections pharyngées montrent une différence de 57 prescriptions supplémentaires après réévaluation. Les infections respiratoires en dehors des pneumonies sont à 22 et les infections ORL de type otites à 19 prescriptions d’écart respectivement. Les infections cutanées n’ont que 6 prescriptions de différence et les infections buccales un seul écart de prescription. Les autres infections recensées ne présentent pas de discordance dans le nombre de prescriptions avant et après correction des données.
Lorsqu’on considère le nombre de jours prescrits en excès (figure 6), on note une inversion dans le groupe des valeurs observées, les pneumopathies passant devant les infections pharyngées. Cette inversion n’est pas retrouvée avec les valeurs corrigées. Lorsqu’on observe les valeurs corrigées, ce sont les infections pharyngées ont le plus grand différentiel avec 388 jours entre les 2 modalités, la valeur corrigée étant la plus importante. On retrouve ensuite les infections respiratoires sauf les pneumonies avec 339 jours d’écart et les infections ORL de type otites avec 162 jours. Les infections cutanées sont en 4 ème position avec 41 jours de différence.
Prescriptions non indiquées par rapport au diagnostic
Comme mentionné dans le paragraphe concernant les durées excessives de prescription d’antibiotiques, nous avons calculé le nombre d’antibiothérapies prescrites hors indication et sans argument clinique franc annoté dans le dossier patient pour justifier cette prescription.
Au total, selon ces critères, 32,77 % des prescriptions antibiotiques ne paraissent pas indiquées pour l’échantillon étudié.
Les données par pathologie sont détaillées dans le tableau 5 ci-dessous.
DISCUSSION
Contexte du lieu d’étude
Selon les données nationales de la DREES publiées en 2021 (24), d’un point de vue territorial, la Manche se situe en 2021 légèrement en deçà de la densité standardisée de médecins généralistes par habitants : 134 médecins généralistes pour 100 000 habitants contre 139 en moyenne.
L’âge moyen des médecins toutes spécialités confondues en France est de 49,3 ans.
L’activité mixte libérale et salariée se développe dans toutes les spécialités, y compris en médecine générale.
Dans une étude sur l’activité des médecins généralistes en maison de santé pluriprofessionnelle publiée en 2021 (25), il était estimé pour l’année 2014 qu’un médecin dans ce type de structure a environ 1171 patients l’ayant déclaré comme médecin traitant. Cela correspond à 5750 actes par médecin et par an. Parmi cette patientèle, la part d’enfants de moins de 15 ans est évaluée à 21,5%. L’étude ne précise pas la présence d’internes dans les MSP étudiées, et les médecins remplaçants ne sont pas comptabilisés.
Par ses caractéristiques, et compte-tenu de l’organisation liée aux médecins ayant un exercice mixte, l’activité des médecins du pôle semble relativement bien refléter ce que l’on observe en moyenne pour le paysage de la médecine générale au niveau national.
Indicateurs de pertinence
A l’image du monde adulte, nous avons proposé des indicateurs de pertinence pour évaluer les prescriptions d’antibiotiques systémiques chez l’enfant. Nous avons repris 4 indicateurs qui avaient été auparavant développés et évalués par N. Thilly et al. en 2020 (21) à partir des données de remboursement de l’Assurance Maladie, et nous avons également adapté 3 indicateurs préexistants chez l’adulte (19). Cela constitue un ensemble de 7 indicateurs dont la mesure peut être faite directement à partir du logiciel métier des praticiens.
Sur l’ensemble, 5 d’entre eux pouvaient être réévalués avec les recommandations nationales ou un avis d’experts : PI 1 prescription de quinolones, PI 2 prescription de cyclines chez l’enfant de moins de 8 ans, PI 5 prescription de durée > 7 jours, PI 6 co-prescription antibiotique et AINS systémique, PI 7 co-prescription antibiotique et corticoïde systémique.
Dans ce groupe, seul l’indicateur PI 2 atteint la cible optimale dès l’observation directe à partir du logiciel métier : il n’y a aucune prescription de cycline chez l’enfant de moins de 8 ans. La révision avec les recommandations n’apporte donc pas de différence significative.
Concernant PI 1, le résultat dépasse de peu la cible optimale, et lorsqu’on calcule V2, on rentre dans l’objectif cible de 0 %. Or la prescription de fluoroquinolones chez l’enfant est actuellement contre-indiquée pour différentes raisons (26) : atteintes cartilagineuses articulaires chez l’animal en croissance lors de l’administration de fluoroquinolones sur modèles animaux, effets indésirables d’ordre musculo-squelettiques dans toutes les séries pédiatriques avec un profil de sécurité un peu inférieur aux antibiotiques fréquemment utilisés en pédiatrie (beta-lactamines et macrolides), crainte d’apparition rapide de résistances chez les pneumocoques et Heamophilus influenzae en raison de la fréquence de portage de ces bactéries chez l’enfant, passage dans le lait maternel pour les plus jeunes enfants en cours d’allaitement. Cependant, 2 molécules de fluoroquinolones sont utilisables en pédiatrie : la ciprofloxacine, qui est la plus connue chez l’enfant et bénéficie d’une AMM européenne, et la lévofloxacine pour laquelle il existe aussi une expérience pédiatrique conséquente. Ces molécules restent limitées à des usages spécifiques, généralement lorsque les antibiotiques habituels ne conviennent pas à la situation bactériologique.
On estime donc que les fluoroquinolones n’ont pas leur place dans l’arsenal antibiotique chez les enfants en médecine générale. Le seul cas relevé dans l’étude présentée ici est une suspicion de pyélonéphrite aiguë, sans réalisation d’examen complémentaire pour diverses raisons, et n’est donc pas une prescription appropriée.
Dans le cas de PI 5 et PI 6, les résultats se situent entre la cible acceptable et la cible optimale. La différence entre V1 et V2 est non significative. La réévaluation des dossiers et la correction des données pour ces 3 indicateurs ne permettent donc pas d’atteindre la cible optimale.
Parmi les pathologies rencontrées dans l’échantillon, en dehors des otites et syndromes otite – conjonctivite des enfants de moins de 2 ans, des bronchiolites avec complication, des sinusites, des pyélonéphrites aiguës et certaines infections cutanées, les antibiothérapies sont en principe inférieures à 7 jours selon les recommandations actuelles. Il existe donc un excès de prescriptions de durée > 7 jours d’après l’indicateur PI 5 si l’on considère la cible optimale. Elles pourraient être partiellement liées à des habitudes de prescription sans actualisation par rapport aux recommandations.
Les co-prescriptions d’antibiotiques et AINS, estimées par le PI 6, n’ont que peu de références de recommandations nationales. Dans sa fiche mémo de 2016 sur la prise en charge de la douleur chez l’enfant (27), la HAS livre quelques recommandations en cas de pathologie infectieuse : contre-indication en cas de varicelle, utilisation prudente dans les situations d’infection pulmonaire, ORL ou bactérienne sévère et en cas d’infection cutanée ou des tissus mous. En 2017, la SPILF et la société française d’ORL ont publié des recommandations pour l’utilisation des AINS dans les infections ORL (28). Le seule rôle des AINS retenu dans ce contexte est l’antalgie, l’efficacité sur l’hyperthermie n’est pas un objectif prioritaire. Les infections ORL les plus douloureuses sont les OMA et les angines, l’indication de la prescription d’AINS est donc plus fréquente pour ces pathologies que pour les rhinosinusites aiguës et les otites externes. Les infections dentaires et stomatologiques ne sont pas couvertes par ces recommandations. Il y a donc peu d’indications en dehors de la prise en charge de la douleur dans les infections ORL.
Seul PI 7 présente une différence significative après la comparaison de V1 et V2, c’est donc le seul indicateur pour lequel la reprise des dossiers aurait pu faire basculer la proportion de prescriptions d’antibiotiques et corticoïdes sous le seuil acceptable. Il y a donc lieu de s’interroger sur la capacité de cet indicateur à être un bon reflet de la réalité s’il était calculé à grande échelle, dans les conditions étudiées ici : à l’échelle du praticien, sur les données du logiciel métier. Cet indicateur avait été proposé chez l’enfant à l’échelle régionale mais sur les données de remboursement, en comparant les performances de prescription entre médecins généralistes et pédiatres. Il n’y avait donc pas d’accès aux données cliniques pour évaluer la pertinence de la prescription. Dans cette étude, il n’y avait pas de différence significative pour cet indicateur entre les prescriptions par les médecins généralistes et les pédiatres (21). Par ailleurs, il n’existe pas, à notre connaissance, de recommandations nationales sur l’utilisation des corticoïdes dans les infections pédiatriques courantes en dehors des recommandations de prise en charge du 1 er épisode de bronchiolite aiguë : dans cette situation, il n’est pas recommandé d’administrer des corticoïdes systémiques (29).
Concernant les indicateurs ne relevant pas d’une révision, le PI 4 rencontre bien l’objectif attendu. Cela reflète l’utilisation préférentielle de l’amoxicilline, ce qui est attendu, par rapport à son association à l’acide clavulanique, ce qui élargit son spectre et de ce fait en réduit les indications. A l’heure actuelle, seul un seuil minimal de ratio > 1 est déterminé (cf. annexe 2). Celui-ci est probablement sous-estimé en raison des indications beaucoup plus limitées de l’amoxicilline – acide clavulanique.
La proportion de prescriptions d’antibiotiques sur la saison chaude par rapport à la saison froide, reflétée par PI 3, reste plus élevée qu’attendu par rapport à la saison froide quelle que soit la pathologie observée. Une des explications pourrait être un accroissement d’activité lors de la saison estivale en raison du tourisme.
Les résultats obtenus montrent donc que 6 des 7 indicateurs obtenus sont robustes et pourraient être utilisés pour l’évaluation des prescriptions d’antibiotiques chez l’enfant en médecine générale.
Notre but était en effet d’obtenir des indicateurs aisés à calculer et d’utilisation facile en médecine de ville, à la différence de certains indicateurs de veille sanitaire, pour une application en vie réelle que les médecins généralistes pourraient s’approprier. Ces indicateurs restent au plus près de la prescription, pouvant avoir un impact direct dans la stratégie de lutte contre l’antibiorésistance en amenant les praticiens à modifier leur pratique par l’observation de leurs résultats.
Si l’on considère la Stratégie Nationale 2022 – 2025 de prévention des infections et de l’antibiorésistance (10), ces indicateurs correspondent au premier objectif de l’axe 5 « utilisation partagée des données de santé et de surveillance au service de l’action » et s’inscrivent dans l’action 30 : développer de nouveaux indicateurs relatifs à la prévention des infections et de l’antibiorésistance et mobiliser les leviers incitatifs existants.
Dans notre étude sur le pôle de Saint James, on constate que les performances des prescripteurs sur 5 de ces indicateurs peuvent être améliorées, ce qui signifie notamment sensibiliser les médecins sur les indications et durées de prescription ainsi que renforcer leurs connaissances sur la résistance aux antibiotiques pour limiter les prescriptions inappropriées ou inadaptées. Il existe déjà différents outils d’aide à la décision et à la prescription : recommandations HAS accessibles en ligne, Antibioclic, guides intégrés de posologie des logiciels métiers en sont 2 exemples. Les médecins généralistes doivent faire face très régulièrement à des modifications de recommandations dans toutes les disciplines médicales, et il n’est pas toujours aisé de suivre tous ces changements. Une fois qu’une série de recommandations a été intégrée aux habitudes de prescription, le médecin ne regarde plus systématiquement les outils, et de nouvelles recommandations peuvent passer inaperçues. Il est donc important de diversifier les supports de sensibilisation et de formation au bon usage des antibiotiques et à la prévention des résistances, objectifs également développés dans la stratégie nationale dans l’axe 3. C’est l’un des rôles des EMA, qui interviennent au niveau local pour le bon usage des antibiotiques dans les différents secteurs de soins dont la ville.
Durées de prescription des antibiotiques
L’objectif secondaire de l’étude était d’évaluer le nombre de prescriptions d’antibiotiques de durée excessive par rapport aux recommandations. Toujours dans le cadre de la stratégie nationale de lutte contre l’antibiorésistance, suite aux travaux réalisés par la HAS, la SPILF et le GPIP, de nouvelles recommandations ont été éditées en 2021 sur le choix des antibiothérapies pour les infections bactériennes courantes, préconisant les durées les plus courtes possibles, avec une harmonisation nationale (11).
Les 3 classes de pathologies présentant le plus de prescriptions avec excès de durée sont également celles qui sont les plus représentées dans l’échantillon : le groupe otites, les infections respiratoires hors pneumonies et les infections ORL pharyngées, suivies des infections cutanées et buccales. La plus grande variabilité est sur les infections pharyngées, suivies des infections respiratoires autres que les pneumonies et les otites. Ceci vient pour partie de prescriptions inadaptées par la durée elle-même, par exemple dans les OMA chez les enfants de plus de 2 ans ou les infections respiratoires. Mais elles sont aussi expliquées par les prescriptions inappropriées par rapport aux recommandations, c’est-à-dire des prescriptions non justifiées, essentiellement dans les infections respiratoires et pharyngées, et à moindre échelle les otites (otites séreuses, otites congestives, non compliquées, peu algiques) et certaines infections cutanées (impétigo).
On notera que les infections digestives et ophtalmiques sont peu contributives en nombre dans toutes les situations, mais leurs prescriptions sont toujours inappropriées en termes de durée trop importante.
Pour les durées trop courtes d’antibiothérapie, le facteur correctif a porté sur la modification des recommandations avec disparition de la plage de durée indiquée (8 à 10 jours) (30) pour certaines pathologies avant 2021. Les durées ont donc été réévaluées avec la durée minimale encore en vigueur jusqu’à l’été 2021. Les otites sont les plus touchées autant avant et après modification des recommandations pour le nombre de prescription, probablement par non-conformité aux recommandations pour cet âge. En revanche, le nombre de jours manquants est relativement plus influencé par le changement de recommandations pour ce groupe de pathologies, et concerne donc majoritairement les enfants de moins de 2 ans. Ce changement concerne aussi les sinusites. Dans les infections respiratoires, les durées trop courtes sont principalement liées à des bronchiolites avec complication motivant une antibiothérapie.
Que ce soit pour le nombre de prescriptions ou pour le nombre de jours en excès, on trouve une différence significative avant et après révision des dossiers. Il y a donc là très probablement un terrain d’amélioration possible. Dans le cas des durées insuffisantes, on ne trouve une différence significative que pour le nombre de jours. Il y a potentiellement également une part imputable à une inadéquation par rapport aux recommandations, mais on ne peut négliger une éventuelle influence du changement de référentiel.
Dans le contexte de la résistance aux antibiotiques, les durées trop longues comme les durées trop courtes d’antibiothérapie peuvent avoir un impact non négligeable sur l’écologie bactérienne et le développement de souches résistantes. Ceci peut conduire à l’échec du traitement et la difficulté de traitement ultérieur en cas de résistance.
Indication des prescriptions par rapport au diagnostic
Sur base des recommandations actuelles, les prescriptions ont été revues par rapport au diagnostic identifié (tableau 5). Il n’y avait qu’une seule infection ophtalmique dans l’échantillon, sans justification d’une prescription antibiotique systémique, expliquant le taux d’inadéquation de 100 %.
De même, pour les infections digestives, buccales et cutanées, le taux d’inadéquation peut ne pas être représentatif compte-tenu du faible nombre de cas dans l’échantillon. Comme pour les durées excessives de traitement, les infections respiratoires et les infections ORL pharyngées représentent la majorité des prescriptions non justifiées, soit parce que les pathologies n’ont pas d’indication à une antibiothérapie, soit parce que les critères pour proposer l’antibiotique ne sont pas remplis a priori.
En revanche, les otites et infections apparentées ne présentent que 11,07 % des prescriptions non indiquées. L’un des biais possibles est la liberté d’appréciation de l’état clinique laissée au prescripteur pour les enfants de plus de 2 ans, et non évaluable dans cette étude. Cela peut entraîner une sous-représentation des prescriptions inappropriées dans ce cas.
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Table des matières
INTRODUCTION
1.1 Des débuts des antibiotiques…
1.2 Jusqu’à aujourd’hui
1.3 Les stratégies de lutte contre l’antibiorésistance
1.4 Objectifs de l’étude
PATIENTS ET METHODE
2.1 Type d’étude
2.2 Critères d’inclusion et d’exclusion
2.3 Recueil des données
2.4 Calcul des indicateurs de pertinence
2.5 Analyse statistique des données
2.5.1 Mesurabilité des indicateurs
2.5.2 Validation des indicateurs
2.5.3 Analyse de la conformité / non-conformité des prescriptions antibiotiques
RESULTATS
3.1 Caractéristiques du pôle de santé étudié
3.2 Caractéristiques de la population étudiée
3.3 Pathologies rencontrées dans l’étude
3.4 Indicateurs de pertinence
3.5 Durée de prescription des antibiothérapies
3.5.1 Durées de prescription excessives
3.5.2 Durées de prescription insuffisantes
3.6 Prescriptions non indiquées par rapport au diagnostic
3.7 Prescription inadaptée de l’amoxicilline
DISCUSSION
4.1 Contexte du lieu d’étude
4.2 Indicateurs de pertinence
4.3 Durées de prescription des antibiotiques
4.5 Indication des prescriptions par rapport au diagnostic
4.6 Adéquation des posologies d’amoxicilline
4.7 Limites de l’étude
CONCLUSION ET PERSPECTIVES
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES
Annexe 1 : Distribution des classes de pathologies dans l’échantillon
Annexe 2 : Ressources pour la construction des indicateurs de pertinence, à partir des constructions
des indicateurs pédiatriques et adultes
Annexe 3 : Données des prescriptions avec excès de durée
Annexe 4 : Données des prescriptions avec durée insuffisante
Annexe 5 : Données des prescriptions d’amoxicilline par pathologie
Annexe 6 : Document d’information destiné aux patients et à leurs tuteurs légaux ..