Les mécanismes généraux du climat
Les mécanismes généraux du climat de notre zone d’étude s’inscrivent dans le cadre de ceux qui assurent la circulation au niveau de l’Afrique occidentale. Cette circulation s’exprime par l’alternance de trois flux ou centre d’actions.
-Le premier flux est représenté par l’alizé maritime issu de l’Anticyclone des Acores qui se trouve dans l’Hémisphère nord de direction nord est.
– Le deuxième flux est représenté l’Harmattan issu de l’Anticyclone Saharo-Libien qui se trouve dans l’Hémisphère nord. Il est caractérisé par une grande sècheresse liée à son long parcours continental et des multitudes thermiques très accusées.
-Le troisième flux est représenté par la mousson issue de l’Anticyclone de Sain Hélène dans l’Hémisphère sud. Elle pénètre dans le pays dans le pays en période estivale selon une direction sud-est à nord-ouest. Elle est marquée par une faible amplitude thermique et favorise l’arrivée des précipitations dans l’ensemble du territoire.
Notre zone d’étude se situe dans le nord ouest du pays ce qui lui confère un climat de type sahélien. Elle bénéficie aussi d’un climat de type canarien dans sa partie occidentale (les Niayes) sous l’influence d’alizé maritime qui est quasi permanente. Du fait de manques de données locales, nous sommes obligés de se référer sur la base de la station de Louga. C’est ainsi que nous avons choisi de travailler sur certains paramètres qui sont les bases pour déterminer le climat d’un espace géographique donné. Parmi ces éléments nous avons : les vents, les précipitations, les températures, et l’humidité relative.
L’érosion éolienne
Le mécanisme de l’érosion éolienne est très complexe. Il consiste au transport par le vent les particules les plus légères du sol (argile, limon, sable fin) au niveau duquel se trouve une grande partie des éléments nutritifs. Elle se produit souvent lorsque la terre est dépourvue de son couvert végétal. Dans la CR de Thièppe, elle constitue le premier facteur de la dégradation des sols. 70% des personnes interrogées soulignent le vent comme étant le principal responsable de la dégradation des sols. En effet, du fait de sa position géographique, la CR est exposée face à des vents violents (vitesse supérieure parfois 3m/s) qui dégagent de grande quantités de sable. Parmi ces vents nous avons l’alizé maritime qui souffle sur la côte nord du Sénégal de décembre à février. Selon un habitant des Niayes « ses vents venants provenant de l’océan sont très agressifs et entrainent le déplacement de beaucoup de sables qui ensevelissent les champs et les maisons. S’il y avait pas la bande de filaos qui a atténué leur vitesse, toutes les parcelles agricoles et les habitats allaient disparaitre ». Quant à l’alizé continental ou l’harmattan, c’est un vent chaud et sec qui souffle à l’intérieur de la CR dans les mois de mai et juin. C’est aussi un vent qui transporte beaucoup de particules de sables et de poussières parce qu’à ce moment de l’année les sols sont nus. Par conséquent, ces deux vents constituent des facteurs essentiels du processus éolien En plus de ces vents violents, les caractéristiques pédologiques du milieu avec la dominance des sols Dior (sols ferrugineux peu lessivés) qui représente plus de 70% des terres de la CR accentuent le phénomène. Ces sols sont très vulnérables face à l’érosion éolienne du fait de leur texture meuble. Les sols Dior qui se trouvent dans la partie continentale où domine la culture de l’arachide sont les plus touchés. Cette situation est due à l’absence du couvert végétal durant toute la saison sèche car après les récoltes, les champs à culture arachide deviennent nus sans protection. Au niveau des sols deck Dior situés dans les dépressions inter dunaires, le phénomène de l’érosion éolienne se manifeste par l’ensablement des cuvettes maraîchères. Cette action est à l’origine d’une diminution progressive des surfaces cultivables.
Le déboisement
Le défrichement, la déforestation et l’extension des zones de cultures pour satisfaire les besoins des populations, sont autant des facteurs responsables de la dégradation des sols. Toutes ces formes de destruction du couvert végétal participent au processus de la dégradation des terres. Au-delà du rôle de protection qu’elle assure pour le sol, la végétation fournit aussi de matières organiques qui participent à la fertilisation des terres grâce aux racines et aux feuilles. Ce qui fait que cette destruction continue des arbres rend vulnérables les sols face aux différents types d’érosions et constitue des pertes progressives en matières organiques. Dans la CR, le déboisement engendré par l’action anthropique prend de plus en plus de l’ampleur ces dernières années. Les causes de cette destruction sont multiples. D’abord, nous avons l’utilisation massive du bois et du charbon de bois par la majorité des populations locales pour faire la cuisine. Lors de nos enquêtes de terrain, 90% des ménages interrogés utilisent régulièrement le bois et charbon de bois comme combustible. Cette situation a fait l’exploitation des arbres une activité génératrice de revenu. Certains chefs de ménages sont totalement dépendants de l’exploitation du bois de chauffe pour assurer leur dépense quotidienne. Ils coupent les arbres de façon clandestine sans autorisation ni règles conformes au code forestier. Certains pour ne pas se faire attraper par les services des Eaux et Forêts, vont jusqu’à attendre la nuit pour couper les arbres. « Nous n’avons pas les moyen d’acheter du gaz butane, notre seule solution c’est l’approvisionnement du bois de chauffe et du charbon de bois pour préparer nos repas.» Ces deux principales sources d’énergies sont devenues des denrées rares du fait de leur cherté. Certaines populations vont jusqu’à utiliser la bouse de vache pour faire la cuisine. Cette situation chaotique pousse certaines populations à abattre sauvagement les arbres pour faire fortune ou pour avoir de bois de chauffe dans leur ménage. A côté de cette exploitation des arbres liée aux besoins combustible, nous avons aussi le prélèvement du fourrage aérien par les éleveurs pour l’alimentation du bétail. Cette pratique se fait souvent pendant la haute saison sèche où la steppe herbacée est presque inexistante et la nourriture du bétail devient rare et chère. Pour maintenir la soudure du bétail, les éleveurs n’ont qu’une seule solution qui consiste à couper les branches d’arbres et d’arbustes. Acacia albida (kad) dont la floraison se fait en saison sèche sont les plus touchés. A cela s’ajoute la confection de l’habitat qui est un autre type d’exploitation de la végétation au niveau de la CR. En effet, par faute de manque de moyen pour construire des bâtiments solides avec du ciment, les populations locales utilisent le bois et la paille d’herbes pour la construction des cases et des cours des maisons. Dans beaucoup de villages, les clôtures et même certaines chambres sont faites à base de la paille d’herbes et d’arbustes. Nous pouvons prendre l’exemple de Guiera senegalensis (guer) qui un buisson très résistant est très utilisé pour les clôtures des maisons. Toutes ces formes de constructions à base de plantes sont très fragiles et demandent des renouvellements annuels, ce qui va entrainer une exploitation continue des arbres. Enfin, il faut souligner le défrichement que subisse la végétation à l’approche de l’hivernage. C’est un facteur très négligé par les populations locales mais il participe beaucoup à la destruction du paysage végétal. Cette destruction appelée débroussaillement se fait souvent avant la saison des pluies où les paysans nettoient les champs en coupant les petits arbres, les arbustes, et en brulant la laitière. Cette pratique de nettoyage des champs participe à la dégradation des sols dans la mesure où elle empêche le renouvellement et la croissance des petites plantes. Par exemple tous les petits Acacia albida (Kads) et Guiera senegalensis (guer) sont coupés et brulés. En somme, nous pouvons dire que la pression que les populations exercent sur la végétation pour satisfaire ses besoins a fortement diminué la biomasse végétale au niveau de la CR. Cette baisse du couvert végétal a joué un rôle essentiel dans les processus de la dégradation des sols car elle les rend vulnérables face à l’action mécanique des différents types d’érosions et diminue leur apport en matières organiques.
Le surpâturage
Il constitue un autre facteur anthropique qui participe à la dégradation des sols. Les effets de surcharge du bétail dans le terroir peuvent entrainer la destruction des sols. En effet, dans la CR, l’élevage a pendant longtemps constitué la seconde activité économique développée par les populations locales. Mais depuis quelques années, avec l’extension des terres de cultures, les zones pastorales perdent de plus en plus une grande partie de leurs surfaces au profit des espaces aménagés pour l’agriculture. Dans la CR, il existe une seule zone pastorale et cette dernière se trouve à l’ouest dans les Niayes. A l’intérieur de la CR, dans les terroirs de Mbaor et kayor, il n’existe pas un espace réservé uniquement aux bétails. Ces éleveurs n’ont qu’une seule solution qui consiste à se contenter des terres laissées en jachère pour assurer la nourriture du bétail. Cette situation d’insuffisance d’espaces de pâture fait que l’effectif des troupeaux dépasse largement la capacité de charge du terroir réservé. Cette fréquentation des animaux sur des espaces réduits avec l’action répétée et continue de leur piétinement, provoque la destruction des agrégats du sol. Ces animaux prennent aussi souvent de petits couloirs pour aller s’abreuver autour des forages ou des points d’eaux. Ce qui fait que leurs pieds déchirent la terre et créent des allées qui facilitent la progression de l’érosion hydrique. La carte ci- dessous illustre le mode d’occupation et d’affectation des sols dans la CR. Ce mode d’occupation montre que la zone Sylvio-pastorale est très éloignée de certains villages situés à l’Est de la CR. En plus de cet éloignement, il n’existe pas de pistes qui permettent de relier la zone sans gâter les cultures. Ce qui fait que pendant l’hivernage les éleveurs qui habitent dans ces localités regroupent leurs troupeaux dans les petits espaces laissés en jachère.
Les impacts au niveau des sols
Au niveau de la Communauté Rurale, les sols montrent diverses formes de dégradations qui sont liées à la différence des agents morpho dynamiques, au degré de résistance des sols face à l’érosion mais aussi aux systèmes d’exploitation. Parmi les impacts notés dans la CR au niveau des sols, nous avons d’abord les effets induits par l’érosion éolienne. Ces conséquences sont très visibles au niveau des sols dans la CR. En effet, dans la Communauté Rurale, la présence des vents violents ont favorisé le transport des particules fines du sol qui renferment les éléments nutritifs et ont laissé en place des petits cailloux et de pierres latéritiques. De ce fait, les sols deviennent de plus en plus secs, pauvres en matières organiques et très sensibles aux différents types d’érosions. A l’Est de la CR, dans les terroirs de Cayor et Mbaor, les sols Dior montrent des signes de pauvreté avec leur couleur rouge claire et la faiblesse de leur profondeur. L’érosion éolienne est aussi à de l’ensablement des cuvettes maraîchères et l’avancée des dunes littorales dans les Niayes. La force des vents océaniques et la présence de grandes dunes (parfois elles dépassent 150m de longueur et 20m de hauteur) ont favorisé l’ensevelissement des terres de cultures et des habitats. La superficie des cuvettes maraichères diminue progressivement sous l’effet de cette dynamique éolienne. Pour ce qui concerne l’érosion hydrique ses effets sont plus ressentis à l’Est de la CR. Le premier effet néfaste de la pluie est le lessivage qui se manifeste surtout au niveau des sols Dior. Il est facilité par la porosité de la texture sableuse des sols qui favorise le transfert en profondeur des éléments nutritifs. Ce phénomène a entrainé la baisse de la fertilité des sols au niveau de la CR. L’érosion hydrique est aussi à l’origine des ruissellements des eaux qui transportent les matières organiques du sol et creusent parfois des rigoles. Ce phénomène est présent surtout dans les plateaux qui se trouvent dans la zone pastorale des Niayes. Ce ruissellement des pluies cause de pertes de terres arables par la destruction des surfaces cultivables. Enfin nous avons les effets induits par le sel. Il s’agit de la salinisation qui affecte les cuvettes maraîchères ces dernières années. Le sel attaque les sols decks des cuvettes et la nappe phréatique. Le maraîchage devient impraticable dans ces terres affectées par le sel car les cultures ne peuvent pas pousser à un certain état de salinité des sols ou de la nappe. Cette situation entraine la diminution ou même la disparition des surfaces cultivables dans les cuvettes maraichères. En somme, les différents types d’érosions enregistrés dans la Communauté Rurale sont à l’origine de l’appauvrissement des sols et la diminution de grandes surfaces cultivables. Cette situation a entrainé des conséquences directes sur l’aptitude culturale des terres par un appauvrissement de ses éléments nutritifs.
L’usage de la fumure organique
C’est une ancienne pratique utilisée par les populations locales pour améliorer la fertilité des terres. Il s’agit de la fumure organique issue de la déjection animale ou les déchets ménagers. Ce type de fumier est plus accessible et moins coûteux pour les habitants parce que beaucoup d’entre eux possèdent des animaux domestiques. 90% des ménages interrogés utilisent ce type de fumier pour fertiliser leurs sols. Dans la partie continentale de la CR où domine la culture pluviale, les paysans épandent la fumure dans les champs à l’aide des charrettes durant la saison sèche pour que la décomposition puisse être facilitée par l’eau des pluies. Il ya aussi des paysans qui payent des éleveurs pendant la saison sèche pour que leurs troupeaux passent les nuits dans leurs parcelles. Ces animaux peuvent être attachés avec des piquets ou restés dans de petits enclos d’épineux qui seront déplacés de temps en temps. Dans les Niayes, les maraichers mélangent le fumier avec le sol à l’aide des pelles avant de semer ou de piquer les pépinières. Ces dernières années, avec l’augmentation de la demande des intrants due au développement de la culture maraichère et la pauvreté des sols, le fumier est devenu une matière chère et rare. Cette difficulté de trouver une quantité suffisante pour couvrir toutes les parcelles, poussent certains maraichers à utiliser le fumier issu des déchets de la volaille pour combler ce gap. << On utilise maintenant les déjections de la volaille parce que les sols sont devenus pauvres et on ne parvient plus avoir suffisamment du fumier des animaux domestiques »
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Table des matières
Introduction
Synthèse bibliographique
Problématique
Objectif principal
Objectifs spécifiques
Hypothèses
Méthodologie
Définition des concepts
Première partie : Présentation de la Communauté Rurale de Thièppe : Cadre physique et humain
Chapitre I : Cadre physique
I-1 Relief
I-2 Climat
I-2-1 Les vents
I-2-1-1 Les direction des vents
I-2-1-2 La vitesse des vents
I-2-2 Les précipitation
I-2-3 Les températures
I-2-4 Humidité relative
I-3 Les Ressources hydriques
I-3-1 Les eaux de surfaces
I-3-2 Les eaux souterraines
I-4 Les sol
I-5 Végétation
I-6 Faune
Chapitre II : Cadre humain
II-1 Structure de la population
II-2 Migration
Chapitre III : Les activités socio-économiques
III-1 L’agriculture
III-1-1 L’agriculture pluviale
III-1-2 Le maraichage
III-2 L’élevage
III-3 La pêche
Deuxième partie : Les facteurs de la dégradation des sols
Chapitre I : Les facteurs naturels
I-1 La sècheresse
I-1-2 L’érosion éolienne
I-1-3 L’érosion hydrique
I-1-4 La salinisation
Chapitre II : Les facteurs anthropiques
II-1Le déboisement
II-2 Les systèmes de production
II-3 Le surpâturage
II- 4 Le poids démographique
Troisième partie : Les conséquences de la dégradation des sols et les stratégies de lutte
Chapitre I : Les impacts sur les ressources naturelles
I-1 Les impacts au niveau des sols
I-2 Les impacts sur la végétation
Chapitre II : Les impacts sur les activités socio-économiques
II-1 Sur l’agriculture
II-2 Sur l’élevage
II-3 Les impacts socio économiques
Chapitre III : Les stratégies de luttes contre la dégradation des sols
III-1 Les stratégies des populations locales
III-1-1 L’usage de fumure
III-1-2 La Jachère
III-1-3 La rotation des cultures
III-1-4Les haies vives
III-1-5 Les Limites des techniques locales
III-2 Les stratégies modernes
III-2-1 Les engrais minéraux
III-2-2 Les engrais verts
III-2-3 Le reboisement
III-2-4 Appréciations et limites des techniques modernes
III-2-5 Les projets mis en place par les Organisations Non Gouvernementales
III-2-5-1 SOS Sahel
III-2-5-2 FAO
Conclusion
Bibliographie
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