Les sténoses caustiques de l’oesophage

DEFINITION

On entend par sténose caustique de l’œsophage, le rétrécissement cicatriciel de la lumière œsophagienne entraînant souvent une interruption partielle ou complète du tube œsophagien. Elle survient après une ingestion accidentelle, volontaire, ou criminelle d’un produit corrosif [2,36,61]. L’ingestion de substances caustiques constitue encore un accident fréquent et grave surtout chez l’enfant.

La sténose de l’œsophage, qui est la complication la plus redoutable, pose des problèmes de prise en charge qui varient du traitement conservateur (dilatation) au remplacement de l’œsophage (œsophagoplastie) [2]. La gravité de cette affection, dont la survenue est due au manque de surveillance des enfants et à l’utilisation des produits caustiques, est fonction de la nature, de la concentration, de la quantité du produit ingéré, toujours difficile à évaluer [36], mais aussi de la viscosité du produit qui conditionne la durée de contact avec la muqueuse.

D’après quelques séries, les sténoses caustiques exposent au risque de cancérisation de l’œsophage (1 à 4 pour cent des cancers) avec un temps de latence d’environ 40 ans d’où l’intérêt d’une surveillance à vie pour ces patients [12]. Elles sont graves du fait du nombre de cas de décès et surtout des séquelles redoutables avec un taux de mortalité globale proche de 10 pour cent et une morbidité entre 30 et 40 pour cent [2]. Il n’existe pas de statistique du nombre d’ingestion de caustique rapporté à une population donnée.

Cependant la fréquence estimée est de 1000 cas par an au Pays-Bas, 15000 à 20000 cas par an en France dont la majorité d’entre eux étant des enfants [12,56] ; d’après la Société Française d’Anesthésie Réanimation (SFAR 1996) aux USA, les centres anti-poisons recensent environ 26000 ingestions de produits caustiques/an, dont 17000 enfants. Dans les pays développés, la fréquence des accidents caustiques chez l’enfant a diminué grâce à la législation, aux campagnes d’information menées auprès des parents et des industriels qui ont abouti à la généralisation de l’utilisation d’un double système de fermeture des produits caustiques ménagers. Autrefois le traitement de la sténose caustique était chirurgical, mais il est devenu accessible à la dilatation de première intention grâce aux jeux de dilatateurs performants ; La chirurgie semble désormais réservée aux échecs de la dilatation et peut même, dans certains cas, lui être couplée [23]. Au Sénégal, dans notre service aucune étude n’a porté sur les sténoses caustiques de l’œsophage. Par contre, des travaux ont été effectués dans le CHU notamment l’étude de MBOUP en 2004 portant sur les sténoses caustiques chez les enfants et l’étude de CISSOKHO en 2007 portant sur les sténoses caustiques chez les adultes. Sa difficulté de prise en charge liée au retard de la consultation et le manque de moyens financiers constituent de véritables problèmes dans notre pays. L’intérêt de cette étude sur les sténoses caustiques de l’œsophage portera sur la fréquence, la gravité, les complications qu’elle entraine et surtout la difficulté de sa prise en charge.

HISTORIQUE 

La sténose caustique de l’œsophage est connu depuis le XVIème siècle lorsque CASIVASIO a publié dans Minerva Pratica en 1594 la description d’une sonde utilisée pour l’alimentation gastrique dans les brûlures caustiques de l’œsophage [48]. CESAR ROUX a réalisé pour la première fois une œsophagoplastie en 1906 chez un enfant de 12 ans victime d’une brûlure caustique de l’œsophage. MUNKLEY en 1787 a commencé les dilatations antérogrades à l’aveugle. La reproduction d’un dessin de 1924 du docteur CHEVALIER-JACKSON démontre clairement le risque de perforation lorsque la bougie bute dans un diverticule sous-jacent à la sténose. Au XIXème siècle, les lésions caustiques de l’œsophage devinrent fort courantes dans les descriptions médico-chirurgicales. En 1876, VERNEUIL réalise avec succès la première gastrotomie chez un adolescent de 17 ans victime d’une brûlure caustique de l’œsophage. L’année suivante TRENDELENBURG effectue à son tour cette intervention sur un adolescent de 18 ans. La méthode de dilatation à l’aide d’un fil sans fin, décrite en 1924 par TUCKER, diminue considérablement ce risque. TUCKER ne prétend pas être l’inventeur de cette méthode déjà décrite en 1894 par VON HACKER. Toutefois, à la suite de ses publications de 1924, l’utilisation de sa sonde s’est largement répandue dans les services de chirurgie pédiatrique [76].

RAPPELS

L’œsophage est un conduit musculeux qui relie le pharynx à l’estomac. Son trajet débute immédiatement sous le cartilage cricoïde au niveau de la sixième vertèbre cervicale. Il se termine au niveau de l’estomac qu’il rejoint sous le diaphragme au niveau de la l1e vertèbre dorsale. À chaque extrémité se trouve un sphincter musculaire. La vascularisation artérielle provient au niveau cervical des artères thyroïdiennes inférieures et au niveau thoracique des artères bronchiques et aortiques. Pour le segment inférieur de l’œsophage, elle est sous la dépendance des artères coronaire stomachique, splénique et diaphragmatique. Le drainage veineux est parallèle à la vascularisation artérielle. Le drainage lymphatique de l’extrémité supérieure de l’œsophage se fait vers la base du cou. Le drainage de l’œsophage thoracique se fait en haut vers les ganglions intertrachéobronchiques et en bas vers les vaisseaux de la région cœliaque. Les nerfs vagues droit et gauche longent l’œsophage de chaque côté. La déglutition commence par une phase orale volontaire. Par la suite, le bolus alimentaire est acheminé jusqu’à l’estomac lors d’une phase pharyngo-œsophagienne involontaire [65].

EMBRYOLOGIE 

Au cours de la quatrième semaine, l’embryon va subir un processus complexe de double plicature, qui va avoir pour effet de transformer le disque embryonnaire plat en une structure à trois dimensions. Les contraintes exercées par la croissance différentielle des différentes portions de l’embryon sont responsables de cette transformation. Les bords céphaliques, latéraux et caudaux du disque embryonnaire se rapprochent les uns des autres sur la ligne médioventrale. Les feuillets entoblastique, mésoblastique et ectoblastique fusionnent alors avec leurs homologues du côté opposé, donnant naissance à un corps en trois dimensions en forme de poisson. La fusion sur la ligne médiane va transformer l’entoblaste embryonnaire plat en un tube intestinal [65].

Celui-ci présente deux extrémités aveugles : l’intestin antérieur et l’intestin postérieur, séparés par le futur intestin moyen. Ce dernier est en communication avec le sac vitellin. L’intestin antérieur va être à l’origine de l’œsophage. II va subir un allongement dans le sens antéropostérieur, lié principalement à son enroulement sur la masse cardiaque. Au niveau de l’intestin antérieur, le futur œsophage s’étendra depuis le diverticule respiratoire apparu à la troisième semaine jusqu’à la dilatation fusiforme de l’estomac. L’appareil respiratoire s’ébauche très tôt vers la troisième semaine, sous la forme d’une gouttière trachéale qui est une émanation de la paroi antérieure de l’intestin antérieur. En même temps que se produit la croissance longitudinale de l’œsophage et de la trachée, la séparation des deux organes se fait, d’arrière en avant, par la formation progressive d’un septum trachéo-œsophagien. La muqueuse et les glandes œsophagiennes proviennent de l’entoblaste. La musculeuse est un dérivé mésoblastique.

ANATOMIE DE L’ŒSOPHAGE 

Anatomie descriptive 

L’œsophage est la partie initiale du tube digestif tendue entre le pharynx et l’estomac. Ce conduit musculomembraneux à direction longitudinale transporte les aliments de la cavité pharyngienne à la cavité gastrique au cours du troisième temps de la déglutition. Il va traverser successivement la région cervicale, le médiastin postérieur, le diaphragme et se terminer dans la région cœliaque. La direction de l’œsophage est globalement verticale et médiane dans un plan frontal, épousant les courbures rachidiennes jusqu’au niveau de l’arc aortique. L’œsophage est ensuite séparé du plan vertébral par l’aorte. La longueur moyenne est de 25 cm : 5 à 6 cm pour l’œsophage cervical, 16 à 18 cm pour la portion thoracique et 3 cm pour le segment abdominal. Le transit pharyngo-œsophagien permet de mettre en évidence la présence de quatre rétrécissements.

Ce sont :
– la jonction pharyngo-œsophagienne, au niveau de C6 ;
– le rétrécissement aortique au niveau de T4, lié à l’empreinte de la crosse de l’aorte sur la paroi latérale gauche de l’œsophage ;
– le rétrécissement bronchique au niveau de T6, marqué par l’empreinte de la bronche souche gauche ;
– le rétrécissement diaphragmatique au niveau de T10.

En endoscopie, la jonction pharyngo-œsophagienne est à 15 cm des arcades dentaires, le rétrécissement aortique à 25 cm, le rétrécissement diaphragmatique à 35 cm et le cardia à 40 cm .

Œsophage cervical 

Limites

L’œsophage cervical fait suite au pharynx au niveau du bord inférieur du cricoïde, à la hauteur du corps de la sixième vertèbre cervicale.

Il se continue par l’œsophage thoracique au niveau de l’orifice crânial du thorax, repéré en avant par le bord supérieur de la fourchette sternale et en arrière par le corps de la deuxième vertèbre thoracique.

Jonction pharyngo-œsophagienne 

Elle représente l’extrémité supérieure de l’œsophage. Les fibres musculaires longitudinales externes de l’œsophage naissent de la partie médiane de la face postérieure de la lame du cartilage cricoïde. Les fibres vont ensuite avoir un trajet oblique en bas, en dedans et en arrière pour se rejoindre sur la ligne médiane. Ces fibres dessinent un V barré en haut par la partie cricopharyngienne du muscle constricteur inférieur du pharynx. La deuxième partie de ce muscle, ou partie thyropharyngienne, est formée de fibres qui naissent de la face externe du cartilage thyroïde. Elles ont ensuite un trajet oblique en haut et en arrière pour se rejoindre au niveau du raphé médian postérieur avec celles du muscle controlatéral. Entre les deux parties du muscle constricteur inférieur du pharynx, il existe un point faible fonctionnel de la paroi musculaire où se produisent les hernies de la muqueuse pharyngée (diverticule de Zenker). C’est aussi une zone dangereuse pour l’endoscopie. Un deuxième triangle de faiblesse, situé entre la partie cricopharyngienne et les premières fibres musculaires longitudinales de l’œsophage, est classiquement décrit. Néanmoins ce triangle a peu d’importance sur le plan pathologique, car il est comblé par la couche circulaire profonde de l’œsophage.

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Table des matières

INTRODUCTION
1. DEFINITION
2. HISTORIQUE
1. EMBRYOLOGIE
2. ANATOMIE DE L’ŒSOPHAGE
2.1. Anatomie descriptive
2.1.1. Œsophage cervical
2.1.1.1. Limites
2.1.1.2. Jonction pharyngo-œsophagienne
2.1.1.3. Rapports
2.1.2. Œsophage thoracique
2.1.2.1. Limites
2.1.2.2. Orifice crânial du thorax
2.1.2.3. Rapports
2.1.2.4. Orifice diaphragmatique œsophagien
2.1.2.5. Vascularisation et innervation
2.1.3. Œsophage abdominal
2.1.3.1. Rapports
2.1.3.2. Vascularisation et innervation
2.2. Variations suivantes
3. HISTOLOGIE
4. PHYSIOLOGIE DE L’ŒSOPHAGE
4.1. Physiologie du sphincter supérieur œsophagien
4.1.1. Méthodes d’étude
4.1.2. SSO au repos
4.1.3. SSO lors des mouvements de déglutition
4.1.4. Contrôle
4.2. Physiologie du corps de l’œsophage
4.2.1. Méthodes d’étude
4.2.2. Étude au repos
4.2.3. Péristaltisme primaire
4.2.4. Péristaltisme secondaire
4.2.5. Origine et contrôle des phénomènes moteurs
4.3. Physiologie du sphincter inférieur de l’œsophage
4.3.1. Méthodes d’étude
4.3.2. Étude au repos
4.3.3. Étude après déglutition
4.3.4. Contrôle
5. ETIOPATHOGENIE
5.1. Agent lésionnel
5.2. Evolution anatomopathologique de la brûlure
6. ÉTUDE CLINIQUE
6.1. Présentation clinique initiale
6.2. La sténose
6.3. Examen ORL
6.4. Explorations
6.4.1. Endoscopie digestive au tube souple
6.4.2. Radiographie du thorax et de l’abdomen debout de face
6.4.3. Transit œso-gastro-duodénal avec contraste hydrosoluble
6.4.4. Scintigraphie au 99m technétium sucralfate
6.4.5. Manométrie œsophagienne
6.4.6. Bilan biologique
7. TRAITEMENT
7.1. Buts
7.2. Moyens
7.2.1. Moyens médicaux
7.2.2. Moyens instrumentaux
7.2.3. Moyens chirurgicaux
7.2.3.1. Gastrostomie d’alimentation
7.2.3.2. Œsophagoplastie
7.2.3.3. Pharyngoplasties
7.3 Indications
CONCLUSION

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