Les spécificités de l’épuisement des ressources physiques en métaux

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L’épuisement des ressources dans l’histoire de la pensée néoclassique et néo-institutionnelle

Cette section ne fait qu’évoquer les débats sur la soutenabilité de l’économie qui ont été soulevés par d’autres courants de pensée, pour mieux se concentrer sur la conception de l’épuisement des ressources dans l’ENC. Ces remises en question seront évoquées plus avant dans la section 3. Dans ce paragraphe, nous nous appuierons en particulier sur les travaux de Fizaine (Fizaine, 2014), de Gómez-Baggethun et al. (Gómez-Baggethun, de Groot, Lomas, & Montes, 2010) et de Morales Belpaire (Morales Belpaire, 2013). En effet, ces trois revues explicitent avec une approche historique comment l’ENC, puis une partie des économistes de la nouvelle économie institutionnelle, se sont saisis de cette question. Ces trois revues ont été choisies pour plusieurs raisons. Tout d’abord, elles abordent de manière chronologique et sur la même période de temps, la question de la prise en compte de la base matérielle de l’économie dans l’ENC. Ces trois auteurs font état d’un consensus d’une prise en compte tardive de l’épuisement des ressources dans l’ENC et partage tous les trois l’idée du manque de théorie unifiée sur cette question.
Enfin, il est à noter que le concept de finitude des ressources s’entremêle en économie avec de nombreuses autres questions, comme celle de la possibilité de découpler la croissance économique de l’utilisation croissante de ressources (la question de la dématérialisation), du rapport à la nature tel que conceptualisé dans la société dite « moderne », du caractère spontané du verdissement de l’économie de type environmental Kuznets curve (Grossman & Krueger, 1993, 1995), etc. Si ces questions pourront être évoquées dans cette partie, elles n’en constitueront pas le propos central et nous nous concentrerons sur la question de la prise en compte de la finitude des ressources dans la pensée de l’ENC.

Les débuts de la science économique et l’absence de concept d’épuisement

L’avènement de la première révolution industrielle en Europe est aussi celui de la naissance de l’économie qui « se structure en tant que discipline scientifique […] à la fin du XVIIIème siècle avec le physiocrate François Quesnay (1694-1774) et peu après le classique Adam Smith (1723-1790) » (Boutillier & Matagne, 2016). La question de l’épuisement des ressources naturelles n’est abordée en tant que telle par aucune de ces deux écoles. L’explication à cela peut être que l’« énergie utilisée par l’homme jusqu’au début du XIXème siècle comporte principalement des énergies renouvelables comme la biomasse, le vent et l’énergie animale voire l’énergie humaine dans certaines configurations. Il a fallu attendre la fin du XVIIIème siècle pour voir se répandre les premiers usages des ressources énergétiques épuisables comme le charbon en Angleterre. Du côté des métaux, les premiers usages datés remontent à 15 000 avant J.C. et sont attribués à l’or et au cuivre (Craig, Vaughan, & Skinner, 2001). […] Néanmoins leurs productions restent largement anecdotiques en [… regard] des quantités produites aujourd’hui, confinant dès lors la question de l’épuisement à des périodes précises, temporaires et locales. » (Fizaine, 2014).
Pour les physiocrates « l’objectif n’était […] pas de protéger ses ressources parce que l’on craignait qu’elles ne s’épuisent en raison d’une exploitation irraisonnée, mais parce qu’un ennemi est susceptible de les accaparer » (Boutillier & Matagne, 2016). Les physiocrates sont les premiers à parler du lien entre l’économie et la Nature, principalement à travers la question de la création de richesse. Pour les physiocrates, la seule activité qui est créatrice et non transformatrice est « la production agricole, [grâce à] l’énergie du soleil et de la richesse de la terre. Toute autre industrie serait donc stérile au sens où elle ne créerait point de richesse. » (Morales Belpaire, 2013). L’importance des ressources naturelles agricoles est donc soulignée dans les travaux des physiocrates : « sans nature pas d’activité économique. Il y a l’idée sous-jacente qu’une dégradation ou un épuisement de la nature conduirait à la perte de l’économie. » (Fizaine, 2014). C’est en tout cas une assertion qui peut être déduite de la thèse des physiocrates, même si elle n’est pas explicitée : si la terre est seule créatrice de richesse, la dégradation des terres conduirait à la dégradation de la production. Cependant, la question de la dégradation des terres par l’homme ou de la surexploitation des ressources n’est pas abordée telle quelle par les physiocrates qui se préoccupent « davantage [des…] aléas de la nature qui détruisent parfois la quasi-totalité des récoltes (gelée, grêle, inondation, mortalité des bestiaux, etc.). » (Boutillier & Matagne, 2016). A la même époque le théoricien, et administrateur Anne-Robert Jacques Turgot, en partie considéré comme un disciple des physiocrates va jeter les bases de ce qui sera nommé plus tard la théorie des rendements décroissants. Cette théorie peut être résumée ainsi : la production d’une unité supplémentaire de ressource agricole nécessite de plus en plus d’apport en termes de travail et de capital, ou encore, les rendements sont décroissants6. A la base de cette théorie, il existe plusieurs
6 Il s’agit bien sûr ici d’une réécriture a posteriori avec un vocabulaire néoclassique des concepts physiocrates et, comme nous le verrons plus tard, de certains propos de Ricardo. Ainsi, ni Turgot, ni Ricardo n’utilisent le mot « rendement », ni le concept de « fonction de production » comme cela est formulé aujourd’hui : « On considère une fonction de production à deux facteurs (travail, capital) du type Q=f(K,L). On appellera rendement décroissant d’un facteur si, pour une variation constante donnée de ce facteur, l’accroissement permis de la production totale tend vers zéro (on considère l’autre facteur comme fixe et ne variant pas). Autrement dit, pour une variation dL=k, dQ1/dL >dQ2/dL. » (Isaac, 2002). hypothèses dont l’une d’elle a été développée par Turgot : la qualité des terres agricoles est répartie de manière hétérogène dans l’espace. Ainsi pour Turgot, les « dépenses de la culture consistent à donner aux terres les préparations les plus propres à les rendre fécondes. Or, il s’en faut beaucoup que le succès de ces préparations dont dépend la production, soit proportionné à la dépense : […] Si l’on donnait à une terre légère autant de labours qu’à une terre forte, on dépenserait davantage, et peut-être recueillerait-on moins. […] La production suppose des avarices mais des avances égales dans des terres d’une inégale fécondité donnent des productions très-différentes, et c’en est assez pour faire sentir que les productions ne peuvent être exactement proportionnelles aux avances » (Turgot, 1844). Ainsi, pour Turgot l’hétérogénéité des ressources se traduit ainsi : pour une même quantité de travail ou de capital, la même production ne sera pas obtenue selon l’endroit d’exploitation. De plus, Turgot formule l’idée qu’il existe une limite de productivité pour une même parcelle : « La terre a certainement une fécondité bornée, et en la supposant labourée, fumée, marnée, fossoyée, arrosée, sarclée autant qu’elle peut l’être, il est évident que toute dépense ultérieure serait inutile, et que telle augmentation pourrait même devenir nuisible. Dans ce cas, les avances seraient augmentées sans que le produit le fût. Il y a donc un maximum de production qu’il est impossible de passer, et lorsqu’on y est arrivé, les avances non-seulement ne produisent pas 250 pour 100, mais ne produisent absolument rien » (Turgot, 1844). Ainsi, Turgot formule-t-il l’idée de rendements marginaux décroissants sur une même parcelle de terre agricole, et évoque-t-il même la possibilité de rendements absolument décroissants sur une même parcelle à travers la mention de dépense supplémentaire “nuisible”.
De manière concomitante à ce mouvement des physiocrates dont l’apogée est marquée par l’oeuvre de Quesnay, « Tableau économique » en 1758, d’énormes progrès sont effectués pour améliorer la productivité agricole et diminuer l’impact des aléas climatiques. Ainsi, pour l’historien Paul Bairoch (Bairoch, 1997, p. 317), ce seraient les progrès agricoles importés des Pays-Bas en Angleterre au début du XVIIIème siècle qui auraient initié un « processus cumulatif d’interactions » (Bairoch, 1997, p. 317) avec l’industrie (notamment à travers les besoins sidérurgiques de l’agriculture) et conduit à la révolution industrielle. Pour Morales-Belpaire, « ces progrès diminuent le sentiment de rareté des ressources naturelles. Le goulot d’étranglement dans l’accroissement du bien-être se situe maintenant dans le progrès technique et dans la lutte pour la répartition de la richesse » (Morales Belpaire, 2013). L’intérêt des physiocrates pour la production agricole et la considération de la Nature comme seule productrice de richesse sera donc « vivement contestée par les courants classiques et marginalistes qui voient plutôt dans le travail et le capital la création de valeur d’une économie » (Fizaine, 2014).
Chez les classiques, il n’existe pas non plus de pensée explicite de l’épuisement des ressources dites non renouvelables (voir définition paragraphe 2.1). Cependant, les limites physiques à la croissance de la production font l’objet de certaines préoccupations, principalement « au travers de la question du facteur terre, mais dans une vision étroite et réductrice. » (Fizaine, 2014). Malgré la révolution agricole récente, la peur de manquer de ressources agricoles reste perceptible après « plusieurs siècles de famines, de guerres et d’épidémies » (Boutillier & Matagne, 2016) en Europe, pour les classiques il existe deux solutions pour lutter contre les pénuries : «augmenter les autres facteurs de production (travail et capital) ou accroître la surface productive (cultiver plus de champs, ouvrir d’autres mines) » (Fizaine, 2014). Chez Malthus, c’est le premier facteur qui est étudié (Malthus, 1798). L’augmentation de la main d’oeuvre sur une surface limitée de terres agricoles n’est pas suffisante pour pouvoir subvenir à l’augmentation des besoins liés à l’augmentation de la population. Ce qui conduira à des catastrophes (famines, etc.). C’est pourquoi ses théories ont été qualifiées de dismal science ou science lugubre notamment par l’historien victorien Thomas Carlyle en 1848 (Fizaine, 2014; Morales Belpaire, 2013). Chez Ricardo, c’est le deuxième facteur qui est étudié : ses préoccupations concernent la quantité limitée et la qualité hétérogène de terres arables disponibles. Ainsi, Ricardo est-il également un contributeur de la théorie des rendements décroissants, à la suite de Turgot. En effet, en plus de considérer la qualité des terres comme hétérogène, Ricardo émet également l’hypothèse que les meilleures terres sont utilisées en priorité, ce qui conduit à formuler l’idée de rendements décroissants au cours du temps (Fizaine, 2014; Gómez-Baggethun et al., 2010; Morales Belpaire, 2013). Ricardo développe cette idée dans sa théorie de la rente, définie comme « cette portion du produit de la terre que l’on paie au propriétaire pour avoir le droit d’exploiter les facultés productives et impérissables du sol » (Ricardo, 1817, Chapitre 2). Pour lui, l’existence d’une rente s’explique par la qualité hétérogène et l’appauvrissement des sols aux cours du temps : « Si la terre jouissait partout des mêmes propriétés, si son étendue était sans bornes, et sa qualité uniforme, on ne pourrait rien exiger pour le droit de la cultiver […]. Dès que par suite des progrès de la société on se livre à la culture des terrains de fertilité secondaire, la rente commence pour ceux des premiers, et le taux de cette rente dépend de la différence dans la qualité respective des deux espèces de terre. [… À] l’époque où les terrains sont le plus fertiles, le plus abondants, le plus productifs, ils ne donnent point de rente ; et ce n’est qu’au moment où ils s’appauvrissent, – le même travail donnant moins de produit, – qu’on détache une partie du produit primitif des terrains de premier ordre, pour le paiement de la rente » (Ricardo, 1817, Chapitre 2). Selon Ricardo, ces rendements décroissants conduisent à un état stationnaire de l’économie, dans lequel la production n’augmenterait plus (Morales Belpaire, 2013), et c’est cette conclusion qui sera rejetée par le mouvement néoclassique comme cela sera souligné dans le paragraphe 1.3. Cependant, la principale préoccupation de Ricardo dans sa théorie de la rente (et donc des rendements décroissants) est liée à la répartition du produit national entre ouvriers (salaires), propriétaires de terres agricoles (rente) et capitalistes (profits) : « C’est d’après la répartition du produit total d’une exploitation agricole entre le propriétaire, le capitaliste, l’ouvrier, que l’on juge de l’accroissement ou de la diminution de la rente, des profits et des salaires : ce n’est pas, ce ne saurait être d’après la valeur qu’aurait ce produit si on le comparait à une mesure type, reconnue variable, mobile, inconstante. » (Ricardo, 1817, p. 33). Pour lui le problème est que la part de la rente dans le produit grandit au fur et à mesure que les rendements agricoles décroissent. Ce phénomène profite donc aux propriétaires fonciers au détriment des ouvriers et des capitalistes : «l’augmentation portera sur cette partie du revenu qui appartient aux propriétaires fonciers et aux ouvriers : ils obtiendront plus que le produit additionnel, et par leur position ils pourront même empiéter sur les profits antérieurs du capitaliste. […] Chaque ouvrier recevra plus d’argent ; mais sa condition, comme nous l’avons déjà montré, sera moins heureuse, en ce qu’il ne pourra plus se procurer qu’une moindre quantité des produits nationaux. Les propriétaires gagneront à cet état de choses ; ils recevront de plus fortes rentes, d’abord parce que les produits auront plus de valeur, et ensuite parce qu’ils recevront une plus grande quantité de ces produits [… . L]orsqu’on commence à défricher des terrains peu fertiles, ou lorsque plus de capital et de travail sont consacrés aux vieux terrains avec un moindre retour de produits, cet effet est alors permanent ».
En ce qui concerne les ressources minières, Ricardo fait le même constat de l’hétérogénéité de la ressource : « les mines sont de qualité différente, et, avec la même quantité de travail, chacune donne un résultat différent » (Ricardo, 1817, Chapitre 3). Cependant, il n’applique pas le raisonnement de rendements décroissants, car il ne fait pas l’hypothèse que les meilleures ressources sont exploitées en premier et les moins bonnes ensuite. Un élément d’explication à cela vient du fait que Ricardo écrit son ouvrage après une longue période de « découverte » de ressources minières de qualité exceptionnelle notamment des mines d’or et d’argent exploitées lors de la colonisation espagnole sur le continent américain7 : la « découverte de l’Amérique, et celle des riches mines qu’elle renferme, produisit un effet remarquable sur le prix naturel des métaux précieux. » (Ricardo, 1817, Chapitre 3).
Enfin, John Stuart Mill développe le concept d’état stationnaire introduit par Ricardo. Il introduit également pour la première fois dans Principles of Political Economy (1848), une différence entre l’activité minière et l’activité agricole. « Mill adhère à la thèse de Ricardo selon laquelle on recourt de plus en plus à des ressources inférieures (rendements moindres), mais il accepte que cette tendance puisse être interrompue ponctuellement par la découverte de nouvelles mines plus efficaces. Cette différence s’explique par l’antagonisme entre production future et production présente dans le cas de la mine. Mill marque ainsi les prémisses de l’analyse d’optimisation intertemporelle néoclassique qui naîtra au début du XXème siècle. La pensée de Mill traduit aussi la présence d’un état stationnaire inéluctable, mais à l’inverse de Ricardo et Smith, l’auteur se félicite de cette issue qui permettra aux individus de se détourner de l’accumulation des richesses au profit d’autres activités comme l’art, l’éducation, le sport ou la religion » (Fizaine, 2014).
Il a donc été vu qu’une première définition d’un problème lié à l’épuisement des ressources fait jour à travers la question de l’hétérogénéité des ressources agricoles et la théorie des rendements décroissants pensée par Turgot et Ricardo. Pour Ricardo, le principal problème lié aux rendements décroissants est la part croissante que va prendre la rente des propriétaires au détriment des salaires des ouvriers et des profits des capitalistes. Dans le paragraphe suivant, il sera montré que la pensée néoclassique s’est focalisée sur la question de l’état stationnaire de la production dans le travail des classiques. Pour Fizaine, il existe un « paradoxe dans l’économie classique qui bien qu’elle ne perçoive plus la nature comme la source de la création de la valeur (désormais attribuée au travail et au capital) ressasse la sempiternelle menace de l’état stationnaire au travers des rendements décroissants affectant la production des ressources naturelles.» (Fizaine, 2014).

Le marginalisme et l’épuisement

Si les physiocrates et les classiques ont en commun une certaine préoccupation concernant les ressources agricoles, aucun des deux mouvements ne théorise un risque d’épuisement du stock des ressources non renouvelables. Nous verrons au paragraphe suivant que la question de la finitude des ressources, et des outils économiques permettant de la prendre en compte, est réellement devenue un objet de débat à partir de la fin des années 1960. Cependant, certains travaux économiques se sont intéressés à la question de l’épuisement avant cela (Hotelling, 1931; W. S. Jevons, 1906; Zimmermann, 1933) et deviendront les bases théoriques de son traitement par l’école néoclassique. Ce paragraphe présente leurs travaux, ainsi que la formation du courant que constitue l’ENC.
En 1865, dans le livre The coal question, William Stanley Jevons effectue la première tentative de modélisation de la déplétion d’une ressource (William Stanley Jevons, 1866) et traite de la question de l’épuisement à travers le principe des rendements décroissants. Il est important de souligner que pour Jevons, il n’y a pas de problème lié au caractère fini du stock de ressource, ce qu’il annonce dès la préface de son ouvrage : « It is almost needless to say [ …] that our mines are literally inexhaustible » (Preface, William Stanley Jevons, 1866). Cependant, il existe bien pour lui un problème d’épuisement des ressources, la qualité des ressources baissant au fur et à mesure de l’exploitation, la production du charbon devient de plus en plus coûteuse : « En bref, les couches de charbon les plus épaisses payent les dépenses générales de la mine, en plus du coût de leur propre exploitation, de ce fait il suffit que l’exploitation des couches les plus fines de charbon ne dégage qu’un petit profit. Mais il faudrait que le prix du charbon augmente à un niveau tout à fait extrême pour que l’exploitation des couches de charbon non encore exploitées [en Grande-Bretagne] puisse couvrir les dépenses générales liées au drainage, à la ventilation et à la maintenance en plus du coût de la taille elle-même. La même considération est vraie à l’égard des masses immenses de charbon laissées dans le sous-sol lors des exploitations précédentes […]. Il est difficile de se représenter comment cela [l’exploitation de ressource de qualité inférieure] pourrait empêcher les maux liés à l’épuisement des ressources. Tout comme l’usage des haveuses à disque n’affectera que peu cette question. » (traduit de William Stanley Jevons, 1866, p. 71‐72). Jevons applique donc un raisonnement similaire à celui de Ricardo sur les ressources agricoles aux ressources minières : le capital et le travail nécessaires pour exploiter des couches de charbon de plus en plus profondes et de moins en moins épaisses sont de plus en plus élevés. Cependant, il existe quelques différences avec les considérations de Ricardo et de Turgot concernant les ressources agricoles. Tout d’abord les coûts en capitaux liés à la mise en production de ressources de moindre qualité peuvent être tels que la mise en production n’est économiquement pas possible, cas qui n’est pas envisagé par Ricardo. Cela découle d’une différence de conception de la valeur comme cela sera évoqué plus loin, mais également du fait que le capital à investir sur l’exploitation des ressources agricoles et minières de moindre qualité n’a rien de comparable. De plus, contrairement au cas des ressources agricoles où la production des terres fertiles continue quand les terres de moindre qualité sont mises en production, la production des nouvelles couches de charbon exploitées n’est pas nécessairement concomitante de l’exploitation d’anciennes couches de charbon de meilleures qualités, puisque les ressources sont non renouvelables. Si le charbon de moindre qualité est exploité après celui de bonne qualité, les rendements ne sont pas marginalement décroissants quand la qualité décroit, ils sont absolument décroissants. Si les ressources sont infinies, que les coûts de production augmentent de manière absolue au fur et à mesure de l’exploitation, le problème de l’épuisement correspond donc au moment où les acheteurs (en l’occurrence l’industrie) refusent de payer un prix permettant de couvrir les coûts de l’exploitation et d’en dégager un profit. Jevons en conclut que la déplétion finira par rendre le charbon tellement cher que l’industrie britannique ne pourra plus se permettre de l’extraire et la production commencera à baisser. Une des principales préoccupation lié à la baisse de la production étant la question de la dépendance de l’industrie britannique à d’autres nations (William Stanley Jevons, 1866, p. 74). Un siècle plus tard, le géologue M.K. Hubbert (Hubbert, 1956) prévoyait que la production de pétrole aux Etats-Unis dans les années 1970 suivrait une courbe de Gauss, courbe qui serait cohérente avec le principe des rendements décroissants de Jevons. C’est ainsi qu’est né le concept de ce qui a été renommé plus tard le « pic pétrolier » (Bardi, 2015).

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Table des matières

INTRODUCTION
PARTIE 1 : Le coût social de l’épuisement des ressources métalliques
CHAPITRE 1 : Revue et définition de l’épuisement des ressources métalliques
1. L’épuisement des ressources dans l’histoire de la pensée néoclassique et néo-institutionnelle
1.1. Les débuts de la science économique et l’absence de concept d’épuisement
1.2. Le marginalisme et l’épuisement
1.3. La réponse néoclassique au mouvement conservationniste : le concept d’efficience intergénérationnelle
1.4. À partir des années 1960 : controverse sur l’épuisement
1.5. Le courant néo-hotellinien : continuité du modèle néoclassique et approche de la question de développement soutenable
1.6. La nouvelle économie institutionnelle et la nouvelle économie des ressources
1.7. Les théories de l’abondance
2. Les spécificités de l’épuisement des ressources physiques en métaux
2.1. Les ressources non renouvelables et les ressources renouvelables, quelles différences sur la question de l’épuisement
2.2. Les ressources énergétiques fossiles, les métaux et l’interdépendance des exploitations
2.3. Les métaux : des usages non énergétiques en expansion
2.4. Les métaux : diminution des teneurs
2.5. Le recyclage et ses limites physiques
2.6. Le recyclage et ses limites économiques
3. . Les angles morts des approches économiques néoclassiques concernant les enjeux associés à l’épuisement physique, approches de l’économie écologique
3.1. L’irréversibilité du temps et la non-substituabilité des capitaux : l’approche de l’économie écologique et la perspective de la soutenabilité forte
3.2. Liens entre la sphère économique, et les sphères sociale et biophysique : impacts en augmentation du fait de la diminution irréversible de qualité
CHAPITRE 2 : Définition du coût social de l’épuisement et cadre méthodologique pour son évaluation
1. Approches existantes pour évaluer le coût de l’épuisement
1.1. Approches par le prix
1.2. Approches par le coût de production
1.3. Coût énergétique de l’exploitation
1.4. Reformulation de la problématique
2. La notion d’externalité et le phénomène d’épuisement des ressources
2.1. La définition des externalités de Pigou à Stigler
2.2. La mobilisation du concept d’externalités
2.3. Externalités et épuisement des ressources
3. Approche de l’épuisement dans le travail de K.W. Kapp et choix de ce cadre conceptuel pour la thèse
3.1. Limites et avantages de l’évaluation monétaire, approches de l’économie écologique et du Basic
3.2. Définition du concept de coût social
3.3. Causalité circulaire cumulative et approche en système ouvert
3.4. Les coûts sociaux de l’épuisement des ressources dans le travail de K.W.Kapp
4. L’objet d’étude : de l’entreprise chez Kapp, aux filières de production mondialisées
4.1. Des filières mondialisées marquées par une asymétrie amont-aval
4.2. Contexte de l’émergence des théories sur les chaînes globales de valeur
5. Cadre pour l’évaluation des coûts sociaux de l’épuisement des ressources métalliques
5.1. Précisions de la définition des coûts sociaux
5.2. Les critères généraux d’évaluation monétaire des coûts sociaux et environnementaux et concept de Kapp
5.3. L’identification des chaînes de causalité circulaire cumulative amplifiant la génération de coûts sociaux
PARTIE 2 : Cas d’étude, application de l’approche d’évaluation des coûts sociaux de l’épuisement
CHAPITRE 3 : Caractérisation des coûts sociaux liés à l’épuisement dans la chaîne de valeur du néodyme utilisé dans les aimants Nd-Fe-B
1. La chaîne de valeur du néodyme utilisé dans les aimants Nd-Fe-B
1.1. Cadre de l’analyse, les chaînes globales de valeurs
1.2. Les évolutions organisationnelles historiques de la production des terres rares
1.3. Les principales étapes et acteurs de la chaîne de valeur du néodyme dans les aimants Nd-Fe-B
1.4. Structure la chaîne globale de valeur du néodyme dans les aimants Nd-F-B en Chine et au Japon, éclairage des entretiens
2. Les coûts sociaux dans la chaîne de valeur du néodyme dans les aimants Nd-F-B et leur lien avec l’épuisement de la ressource
2.1. Les enjeux sociaux, sanitaires et environnementaux concentrés en amont de la filière, avec des spécificités au nord et au sud de la Chine
2.2. Évaluation des coûts sociaux des déchets miniers et de leur lien avec la dynamique d’épuisement de la ressource
3. Lien entre les coûts sociaux de l’épuisement et l’organisation de la chaîne globale de valeur des aimants Nd-Fe-B
4. Discussion sur les résultats du cas d’étude sur les coûts sociaux et environnementaux du néodyme et sur la méthodologie utilisée
4.1. Rentabilité de l’investissement pour la prise en charge des coûts sociaux de l’épuisement dans la chaîne de valeur des aimants Nd-Fe B
4.2. Coûts sociaux de l’industrie extractive et investissement des industries aval dans la production de terres rares et le recyclage
4.3. Intervention des pouvoirs publics, recyclage et souveraineté
4.4. Freins macroéconomiques pour la prise en charge des coûts sociaux dans les chaînes de valeur extractives
CONCLUSION
Synthèse générale
Contributions de la thèse
Limites et perspectives
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES
Annexe 1 : Tableau périodique des éléments
Annexe 2 : Les minerais de terres rares dans le monde
Annexe 3 : Cadrage méthologique et synthèse anonyme des entretiens réalisés
Annexe 4 : Traduction de l’article de Xu et Shi, 2005
Annexe 5 : Comparison of different social cost methodologies used on the case of cocoa value chain
Annexe 6 : Formules et variables utilisées au chapitre 3

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