Les sources relatives à l’histoire des Seereer
Elles sont, pour l’essentiel, constituées de la tradition orale seereer, de l’archéologie et des sources européennes du XVIe au XIXe siècle.
La tradition orale
Elle constitue l’une des principales sources de l’histoire africaine. L’Afrique étant un continent de l’oralité. Les Seereer, à l’instar des autres populations africaines, ont leur propre tradition orale, nous permettant de remonter à la source de leur histoire. Pour étudier le sacrifice dans le monde seereer, il est impératif pour le chercheur de faire usage de la tradition orale. Les versions de la tradition orale seereer dont nous disposons sont celles publiées par Henri Gravrand dans la civilisation seereer. Nous avons aussi recueilli quelques traditions en milieu seereer au cours de nos enquêtes sur le terrain. Parmi les principales composantes de la tradition orale seereer, nous avons les mythes. Toutes les divinités seereer sont entourées de mythes. On distingue ainsi le mythe de Waasila Faye , le mythe de la rivière de Kissay, un village situé dans l’arrondissement de Niakhar(Fatick) , le mythe de Diegane Diayi , le mythe de Khini Ndiagkalar , entre autre. Ces mythes étant précieusement gardés par les conservateurs de ces lieux de cultes. Il y a aussi le conte et la légende qui jouent un rôle important dans la connaissance du passé en milieu seereer. L’objectif du conte étant l’éducation et la correction. Il véhicule des histoires captivantes et convaincantes.
Toutes ces composantes de la tradition orale seereer abordent la question de l’origine du culte Seereer. Celui-ci trouvant son origine dans le contrat entre l’homme et les génies de sa contrée ou les ancêtres associés à son lignage et à ses pérégrinations. Etant les premiers à s’installer sur ces terres, les génies ou les pangool auront droit à une reconnaissance de la part de tous nouveaux arrivants que sont les Seereer. Cette reconnaissance peut être traduite en acte par un culte rendu. La tradition orale permet donc de remonter à la source du culte sacrificiel seereer. Mais elle n’est pas la seule source de l’histoire seereer.
L’archéologie
Parmi les sources de l’histoire seereer figure en bonne place l’archéologie. Elle est l’œuvre des archéologues. Les fouilles archéologiques menées en milieu seereer dont nous disposons sont celles conduites par V. Martin et Ch. Becker dans les zones protohistoriques sénégambiennes. Ces recherches ont mis au jour plusieurs zones protohistoriques dont celle des vestiges de villages. Elles sont repérées le long du fleuve Sénégal par ces deux chercheurs. Ils estiment qu’elles sont « dispersées en direction du sud-est, ces emplacements sont repérables en raison de matériel rencontré : débris de poterie, perles, objets métalliques, restes osseux.».Ces vestiges de villages étant attribués aux Seereer par les Toucouleurs montrant ainsi leur provenance septentrionale . Les pratiques retrouvées dans cette zone étant similaires à celles des Seereer aux temps des royaumes du Sine et du Saloum. C’est ce qui fait dire à Gorgui Aliou Diouf que « ce sont ces traces d’établissements seereer que V. Martin et Ch. Becker appellent la zone des vestiges de villages dit seereer » . Les débris de poterie laissent supposer l’existence d’un culte sacrificiel dans cette zone. Si l’archéologie permet de découvrir certains objets du culte sacrificiel seereer, les informations qu’elle fournit restent encore très insuffisantes, du moins pour ce qui concerne le rituel du sacrifice.
Les sources européennes (XVIe – XIXe)
L’histoire seereer, bien étant dominée par les sources orales, peut admettre comme source les écrits des auteurs étrangers ayant visité leur pays entre le XVIe et le XIXe siècle. Les premiers écrits concernant l’histoire des Seereer auraient remonté à l’époque médiévale avec l’apparition des Tarikh Es Soudan d’Abderrahmane Es Saadi et El Fatach de Mahmoud Kati. Mais les sources écrites de l’histoire seereer les plus célèbres sont celles dites européennes. Il s’agit, principalement, des relations de voyages des explorateurs, des rapports de mission des missionnaires, et des notes des agents de l’administration coloniale française. Elles fournissent des informations d’ordre général sur les Seereer. Ainsi, une note d’histoire coloniale, parue dans le journal du Docteur Corre en pays seereer(Sénégal) (décembre 1876- janvier1877), décrit le culte religieux seereer en ces termes : « ils croient en un seul Dieu et en une multitude de génies bons ou mauvais. Ils ont de petites cases sous lesquelles ils déposent des offrandes à ces génies. D’autres fois le génie doit se contenter d’accepter ses dons au pied d’un bâton fiché en terre ou de libation de lait au pied d’un baobab. (…) On fait aux morts des offrandes de mil et de lait. Les morts ne manquent jamais de les consommer au plus vite car on n’en retrouve aucune trace au bout de quelques heures . » L’auteur s’intéresse donc ici au sacrifice aux morts et aux pangool. Les Seereer rendent un culte aux Pangool et aux morts. Ces sources sont importantes pour cette étude en ce sens qu’elles relatent des choses vues et vécues par des gens étrangers à ce monde écartant, ainsi toutes « parties prises ».
Les travaux sur le sacrifice
La littérature concerne les ouvrages généraux, les articles, et les thèses et les mémoires. Nous commençons par la littérature rapportant le sacrifice seereer.
Les études relatives au sacrifice Seereer
Le révérend père Henri Gravrand, étudiant la civilisation seereer, distingue deux types de cultes sacrificiels chez les Seereer : le culte des ancêtres et le culte des Pangool. A propos du culte des morts qu’il assimile au culte des ancêtres, il écrit : « Le mort est entretenu par les vivants. Dès l’inhumation, une souche de bois est enfoncée près du tombeau, du côté de la tête du défunt, à l’est. Sur cet autel et sur un canari renversé, la parente verse le lait, le couscous et les offrandes, viatique qui transmet au défunt les énergies dont il a besoin pour parvenir à janiw » . Ces offrandes suivent le rythme des jours et des saisons. Chaque jour le seereer doit faire des offrandes pour ses ancêtres, mais aussi après chaque récolte, « il fallait offrir les prémices aux ancêtres ».
Ce sacrifice se fait sur l’autel et répond à un principe particulier que Henri Gravrand précise en ces terme : « la matière du sacrifice répandit sur l’autel et consommée en partie par le sacrificateur et les assistants, libère le double de la chose sacrifiée pour la faire passer au défunt et le nourrir, lui et ses compagnons ». En plus, il insiste sur la matière du sacrifice qui, pour lui, « peut être exceptionnellement sanglante : mouton blanc, poule blanche, bœuf. Elle est la plupart du temps non sanglante : bouillie de couscous de mil arrochée de lait ou même simple oblation de lait ». On peut offrir aux ancêtres des animaux immolés ou des prémices de mil et du lait. Le seereer offre des sacrifices aux ancêtres pour obtenir d’eux une faveur, une aide.
L’acteur principal de ce culte étant le chef de famille. Il est le plus ancien descendant de l’Ancêtre commun et de ce fait le plus près des morts pouvant parler avec eux. Les Seereer consacrent également un culte aux Pangool, ces derniers étant les dieux protecteurs des seereer. Il existe plusieurs types de pangool. Toutes ces divinités reçoivent des sacrifices habituels de bouillie de mil et du lait caille : « chaque mercredis, le yaal Pangool doit nourrir ses Pangool. Il doit leur préparer la farine trempée de lait ou simplement le lait caillé et faire sur les autels les libations obligatoires ». Ce sacrifice obéit aussi à un rituel complexe. Le Seereer en rendant un culte aux Pangool vise un certain nombre d’objectifs. Les Pangool sont sollicités par les Seereer pour obtenir la pluie, la fertilité des plantes, la fécondité des femmes, la richesse, la protection dans les voyages et les entreprises…Mais également lors des calamites naturelles : sècheresse, stérilité, maladie, revers de fortune… Chacune de ces situations fait appel à un type de sacrifice spécifique. La tradition rapportée par Gravrand stipule que chaque Pangool demande la matière de son choix. Ainsi, « les Pangool de lait réclament du lait de vache. Ils ont horreur du lait de chèvre. (…)Les Pangool de sang ne se contentent pas de n’importe quelle viande. Ils n’aiment pas les viandes salées ni les viandes de chèvre. Les poules et les viandes de vache leur conviennent ». Ainsi, le culte seereer atteint son point culminant avec le sacrifice aux ancêtres et le sacrifice aux Pangool qui rythment le quotidien des Seereer. Ils obéissent à des normes religieuses et répondent à des objectifs particuliers.
Lilyan Kesteloot s’est intéressé à la question du sacrifice seereer. Elle a passé en revue les différentes catégories de pangool et précise la nature des offrandes qui leur étaient administrées. Cette étude est assez englobante, car voulant toucher toutes les étapes du rituel du sacrifice. A propos des pangool, elle écrit : « il y a des pangol de famille, les pangol de village, les pangol royaux honorés au niveau d’une région, et des pangol liés seulement à un individu(…). Les uns reçoivent un culte collectif, d’autres ne sont servis que par une seule personne ». Selon Kesteloot, le culte seereer est essentiellement constitué du sacrifice au pangool. Il peut être exécuté en groupe ou individuellement.
Des articles parus dans les cahiers William Ponty ont aussi abordé la question du sacrifice chez les Seereer. Ainsi Jacques-Marie Ndiaye, dans « Le peuple sérère », s’intéresse entre autre aux offrandes offertes aux nombreux génies des seereer. Voici ce qu’il en dit : « Ceux-ci(les génies) résident volontiers sur les grands arbres : on leur fait de nombreux sacrifices pour se les rendre favorables. Les prémices de mil ou récoltes leur sont offertes».
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Table des matières
INTRODUCTION GENERALE
PREMIERE PARTIE : ANALYSE DE LA DOCUMENTATION
Chapitre I : Revue critique de la documentation
A. La critique des sources
B. Les sources relatives à l’histoire des Seereer
Chapitre II : Les travaux sur le sacrifice
1. Les études relatives au sacrifice Seereer
2. Les études relatives au sacrifice égyptien
DEUXIEME PARTIE : SITUATION GEOGRAPHIQUE ET CROYANCES RELIGIEUSES DE L’EGYPTE ET DES SEEREER
Chapitre I : L’Egypte pharaonique
1. Situation géographique
2. Croyances religieuses
Chapitre II : Le pays seereer traditionnel
1. Emplacement géographique
2. Coutumes religieuses
TROISIEME PARTIE : LE CULTE EN EGYPTE ANCIENNE ET EN PAYS SEEREER
Chapitre I : L’Egypte pharaonique
1. Lieux de culte
2. Les officiants du culte
3. Le culte divin
4. Le culte des ancêtres
5. Le culte des animaux en Egypte ancienne
Chapitre II : Le pays seereer
1. Lieux de culte
2. Le saacuur
3. Le culte des pangool
4. Le culte des morts
5. Le culte des animaux
Chapitre III : Le sacrifice dans le culte égyptien et seereer
1. Le sacrifice sanglant
2. Le sacrifice pacifique ou non violent
3. Le sacrifice propitiatoire
4. Le sacrifice expiatoire
CONCLUSION GENERALE
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES