Toute politique industrielle relative à la santé et à la sécurité au travail doit viser essentiellement la prévention des risques professionnels et une compensation adéquate pour les travailleurs victimes de lésions résultantes de leur travail. Elle appelle donc le développement du machinisme qui ne peut s’opérer sans la prise en compte du facteur humain, qui consiste à adapter l’homme à son milieu de travail et à son travail. En prenant conscience de cela, le législateur sénégalais a mis en place un mécanisme juridique qui entend contrôler la médecine du travail en général et la médecine d’entreprise en particulier. Cette dernière considérée comme un corollaire indispensable à une industrie moderne et développée est un phénomène ancien au Sénégal. En effet, fruit de l’héritage colonial, la médecine d’entreprise a vu le jour et s’est développée au cours de la période 1895-1958 dans le cadre de l’Afrique occidentale française (AOF).Tout au début, et à l’instar de toutes les colonies de l’AOF, le Sénégal a connu le système du travail forcé. Un système caractérisé par l’absence de mesures de sécurité et de prophylaxie traduisant ainsi la précarité de la santé au travail. Cette situation va persister jusqu’en 1925 date à laquelle un décret institua les premières mesures sanitaires dans les colonies de l’AOF. Ce fut une préoccupation de la santé au travail qui sera confirmée en 1946.
Ainsi, sous l’égide de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) la France fit adopter le 11 Octobre 1946 une loi qui instaura la médecine du travail ; cette mesure législative a eu pour conséquence dans les colonies l’interdiction du travail forcé dans toute l’AOF. Le texte qui a mis fin au travail forcé même s’il n’était pas contraignant, conduisait néanmoins à l’émergence d’une politique de santé en milieu de travail. Celle-ci va trouver toutes ses lettres de noblesse dans les années 50. En effet, sous l’impulsion des recommandations du comité conjoint OMS/OIT lors de sa première session en 1950, le travail forcé disparu plus que jamais dans les colonies du fait de la loi du 15 Décembre 1952 portant code du travail des territoires d’Outre Mer. Ce texte législatif de portée historique prévoit pour la première fois l’obligation pour l’employeur de mettre en place des services médicaux pour les travailleurs, notamment à ses articles 138 à 144 tout en définissant les modalités d’organisation et de fonctionnement de ces services. Déjà à cette époque les autorités coloniales avaient compris la nécessité de mettre en place des services médicaux adaptés aux petites entreprises afin de rendre leur exploitation beaucoup plus rentable. Les missions ainsi assignées à ces services étaient à la fois curatives et préventives. En réalité, il y avait une nécessité quasi absolue pour la métropole de se soumettre aux directives des instances intergouvernementales en matière de santé des ouvriers. Pour le comité mixte, la santé au travail doit se fixer comme objectif « l’adaptation du travail à l’homme et l’adaptation de chaque homme à son emploi ».
Cependant, malgré ce vent d’hygiène et de sécurité qui commençait à souffler dans les milieux de travail, la médecine du travail était largement curative dispensée au bénéfice des travailleurs et de leur famille dans un cercle restreint d’entreprise. « Les mesures préventives se réduisaient symboliquement à des visites annuelles, à la prévention des grandes endémies et à quelques mesures d’hygiène du milieu du travail » .
Les sources et les organes de contrôle juridique de la médecine d’entreprise au Sénégal
Les sources du contrôle juridique
Au Sénégal le contrôle de la médecine du travail tire son fondement aussi bien dans les sources internationales que dans la législation nationale.
Les sources internationales
Les sources internationales regroupent l’ensemble des directives, des déclarations et recommandations qui sont l’œuvre des institutions intergouvernementales, régionales et sous régionales.
Les recommandations des instances internationales
Ce sont principalement des recommandations des institutions intergouvernementales de l’organisation des nations Unies et les différentes déclarations et accords internationaux .
Les institutions intergouvernementales de l’ONU
L’Organisation des Nations Unies (ONU) fondée le 24 octobre 1945 est constituée de six organes principaux et parmi lesquelles nous avons le conseil économique et social qui représente l’organe principal de coordination des activités économiques et sociales entre l’ONU et les autres institutions du << système des nations Unies >>. Cette coordination permet d’établir des recommandations dans différents domaines, notamment économique, social, éducatif, santé publique entre autres. Elle permet également de faire ou de susciter des études, des rapports et recommandations dans ces mêmes domaines.
Mais parmi les 16 organismes qui sont reliés à l’ONU, seulement trois retiendront notre attention. Il s’agit de l’Organisation Internationale du Travail (OIT), L’organisation Mondiale de la santé (OMS) et le Centre de Recherche International sur le Cancer (CIRC).
L’organisation Internationale du Travail
Créée au lendemain de la première guerre mondiale, l’OIT est une organisation intergouvernementale qui trouve son siège à Genève (Suisse). C’est un organisme qui s’efforce de promouvoir la justice sociale pour les travailleurs, du monde entier. Elle a pour mission principale l’élaboration des politiques et programmes internationaux destinés à améliorer les conditions de travail, fixer des normes internationales de travail (conventions), met en œuvre des programmes de coopération technique et s’occupe de la formation, de l’enseignement et de la recherche.
C’est donc une institution qui se donne la noble tâche de protéger les travailleurs contre les maladies générales et les accidents résultant de leur travail en suscitant par son action une politique nationale cohérente au sein des Etats dans le cadre de la surveillance de la santé des travailleurs et du milieu de travail et la mise en place des services de santé au travail. Il faut préciser que l’OIT est partie d’une notion de service « médicaux » du travail pour aboutir maintenant à un concept beaucoup plus large de service de «santé » au travail. Ce nouveau vocal témoigne la volonté de l’OIT de susciter une nouvelle orientation de la politique de la santé au travail. En effet, elle doit désormais se baser sur une approche sociale de la santé publique en milieu de travail en tenant compte de la grande diversité des situations nationales et du niveau de progrès scientifique et technique actuel.
C’est en ce sens que le service de santé au travail « désigne un service investi de fonctions essentiellement préventives et chargé de conseiller l’employeur, les travailleurs et leurs représentants dans l’entreprise dans le cadre du maintien d’un milieu de travail sûr et salubre, l’adaptation du travail aux capacités des travailleurs en tenant compte de leur état de santé physique et mental » .
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Table des matières
INTRODUCTION
TITRE PREMIER : Les sources et les organes de contrôle juridique de la médecine d’entreprise au Sénégal
CHAPITRE I : Les sources du contrôle juridique
SECTION I : Les sources internationales
SECTION II : Les sources nationales
CHAPITRE II : Les organes de contrôle juridique de la médecine d’entreprise au Sénégal
SECTION I : Les organes externes à l’entreprise
SECTION II : Les organes internes à l’entreprise
TITRE II : La mise en œuvre du contrôle juridique de la médecine d’entreprise au Sénégal
CHAPITRE I : Le domaine du contrôle juridique
SECTION I : La création et l’exercice de la médecine d’entreprise
SECTION II : La forme du service médicale mise en place
CHAPITRE II : Le déclenchement de la procédure du contrôle
SECTION I : Les personnes habilitées
SECTION II : Les sanctions résultant du non respect des normes
CONCLUSION