Les solutions à la congestion dans les urgences

Les solutions à la congestion dans les urgences 

Les solutions envisagées au Québec

Il y a quelques années, le ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec (MSSS) publiait un ouvrage s’adressant directement aux établissements de santé dans lesquels on retrouve une urgence. Dans ce dernier, on retrouve 4 grandes recommandations afin de diminuer la durée de séjour des patients (MSSS, 2006). Les voici :
• La mise en place d’ordonnances collectives;
• La diminution des délais pour les consultations et les examens diagnostics;
• L’attribution ponctuelle des ressources médicales et des infirmières lors des pics d’achalandage;
• Orientation de certains patients vers des ressources alternatives.

Le MSSS définit une ordonnance collective comme étant l’application au triage, par une infirmière, d’un protocole suggéré par le département ou Service de médecine d’urgence et approuvé par le conseil des médecins, dentistes et pharmaciens et le conseil d’administration de l’établissement où l’ordonnance est appliquée. Ces ordonnances peuvent prendre la forme notamment de mesures diagnostics (laboratoires, examens radiologiques, etc.) thérapeutiques ou l’administration de certains médicaments. L’accélération du processus de soin découle du fait qu’un patient recevant une ordonnance collective n’a pas à attendre une première consultation avec un médecin pour être pris en charge. En éliminant l’attente d’ une première consultation avec un médecin ainsi que la consultation en tant que telle, il est probable que l’on obtienne une durée de séjour à l’urgence moindre que si ce même patient n’avait pas reçu d’ordonnance collective. Récemment, le gouvernement a accordé le droit de prescrire certaines ordonnances collectives aux infirmières de l’urgence (Lévesque, 2016).

Il est clair que si le délai de consultation et d’examens diagnostics diminue, les urgences auront la capacité de traiter un plus grand nombre de patients plus rapidement.  » ne faut cependant pas que ce gain d’efficience se fasse au détriment de la qualité des soins en générant, par exemple, des erreurs médicales.

L’attribution ponctuelle des ressources médicales et des infirmières lors des pics d’achalandage amène à modifier les horaires de travail. Si plus de personnel est présent lors de forts achalandages, on peut mieux faire face à la demande de soins.

Finalement, le ministère aborde le sujet des ressources alternatives à l’urgence communément appelé la première ligne. On la définit comme étant le premier point de contact du malade avec le système de santé (Trottier et 01.,2003). Pour beaucoup de Québécois, le premier point  de contact n’est que l’ urgence, mais il existe plusieurs autres professionnels de la santé à leur disposition. Par exemple, il y a les médecins et les infirmières pratiquant dans des groupes de médecine familiale, la ligne Info-santé et même le pharmacien. Dans beaucoup de cas où l’état de santé du patient ne requiert pas de soins urgents, l’une ou l’autre de ces personnes ressources peut effectuer les soins nécessaires pour la guérison des patients. S’il devenait facile pour la population de consulter des ressources alternatives en première ligne, beaucoup moins de gens se présenteraient dans les salles d’urgence.

Il n’a pas été possible de trouver dans la littérature des articles portant sur l’étude des solutions évoquées par le ministère au Québec. Par contre, une revue exhaustive de la littérature permet de voir que ces facteurs ont été testés à l’extérieur de la province. Les prochaines lignes traiteront de tout ce qui s’est fait jusqu’à présent dans ce domaine de la recherche.

La gestion des ressources humaines et matérielles

Selon Dorsey et al. (1996) la productivité dans le milieu de la santé est difficilement mesurable, car soigner un patient est beaucoup plus complexe que de produire des biens dans le secteur manufacturier par exemple. Beaucoup de facteurs humains entrent en jeu et peuvent affecter la perception que l’on a de la qualité d’un acte dans les soins de santé (moral du patient, temps d’attente pour obtenir un soin, etc.). Il n’est donc pas surprenant de voir un grand nombre d’études tester l’impact d’un facteur sur lequel on a le plein contrôle, c’est-à-dire, le nombre de ressources humaines et matérielles déployées à l’urgence et la productivité de ces ressources.

Bucheli et Martina (2004) ont récolté des données par échantillonnage de dossiers sur la durée de séjour des patients ambulatoires et sur civières dans un hôpital. Ils ont comparé les temps avant et après l’ajout d’un médecin résident sur le quart de travail du soir. Les résultats ont démontré que la durée moyenne de séjour des patients ambulatoires avait diminué significativement de 20%. Par contre, il n’y avait pas de diminution significative observée chez les patients sur civières. Donald et al. (2005) ont, quant à eux, mené une étude dans une urgence en milieu rural en Australie. Ils cherchaient à mesurer si le fait d’avoir un médecin sur place en soirée, contrairement à seulement un médecin qui se déplace sur appel, allait faire diminuer la durée de séjour des patients dans cette urgence. L’étude s’est faite sur deux groupes chacun constitué d’environ 125 patients, l’un ayant vu un médecin étant déjà sur place et l’autre groupe a reçu des soins d’un médecin étant sur appel. Leurs résultats démontrent une diminution significative de la durée moyenne de séjour lorsque le médecin est sur place. De plus, une diminution significative du taux d’hospitalisation des patients et du nombre de tests prescrits a été observée.

Brenner et al. (2010) ont conduit une étude par simulation à évènements discrets portant sur l’ensemble des ressources d’une urgence qu’elles soient humaines ou matérielles. Les médecins, les infirmières, les agentes administratives, les scans étaient modélisés de façon à pouvoir modifier leur nombre dans les simulations. À priori, les gestionnaires de l’hôpital pensaient que le fait de n’ajouter que des infirmières serait la meilleure solution. Mais l’étude approfondie du taux d’occupation des ressources dans une journée et l’identification des goulots a plutôt démontré que d’ajouter un scan, enlever un médecin et ajouter moins d’infirmières que prévu initialement avaient un meilleur impact que la solution avancée par la direction. Donc, l’ajout d’un médecin n’est pas toujours la solution.

Cette étude démontre l’importance de questionner les croyances des gens et de trouver les goulots dans la production des services à l’urgence. Ahmed et Alkhamis (2009) ont utilisé la simulation à évènements discrets jumelée avec la recherche opérationnelle afin de maximiser le flux de patients et minimiser leur temps d’attente selon les contraintes budgétaires de l’établissement. En ne changeant que les horaires de travail du personnel en place, ils arrivent à une solution qui respecte le budget de l’établissement tout en réduisant de 40% l’attente des patients. Les résultats ont été obtenus avec le modèle de simulation.

L’attribution ponctuelle des ressources médicales et infirmières aux pics d’achalandage peut également être une bonne solution pour diminuer l’engorgement des urgences. C’est d’ailleurs ce que recommande le guide de gestion de l’urgence publié par le ministère de la santé et des services sociaux du Québec (MSSS, 2006). Si plus de personnel médical est présent lors des forts achalandages, on peut mieux faire face à la demande de soins. Cependant, il faut tenir compte des nombreuses contraintes (pauses, temps de repas, conventions collectives, etc.) dans l’élaboration des horaires pour le personnel d’urgence. Ce faisant, l’atteinte d’un scénario optimal est souvent très difficile et complexe étant donné le très grand nombre d’horaires possibles à analyser.

C’est là que la recherche opérationnelle peut être très utile en convergeant très rapidement vers des solutions optimales. Zeltyn et al. (2011) ont d’ailleurs démontré qu’il y a beaucoup d’améliorations possibles en utilisant la recherche opérationnelle afin de générer de bonnes solutions. En utilisant la technique de «rough cut capacity planning» OU RCCP, il a été possible de déterminer le nombre de ressources qu’ il faut déployer dans tous les quarts de travail étudiés. La fonction objectif du modèle devait optimiser à la fois :
• Les coûts d’opération de l’urgence;
• L’utilisation des ressources;
• Le temps d’attente des patients;
• La qualité des soins.

Les scénarios élaborés sont ensuite testés par simulation. Le programme renvoie ensuite l’affectation optimale des infirmières et de médecin d’heure en heure. Selon leur modèle, une diminution de près d’une heure de la durée moyenne de séjour des patients à l’urgence a été observée par rapport à l’affectation initiale des ressources. De plus, grâce au nouvel horaire il a été possible d’atteindre ces résultats avec 2 infirmières de moins sur le quart du soir.

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Table des matières

CHAPITRE 1 : INTRODUCTION
CHAPITRE 2: REVUE DE UTIÉRATURE 
2.1 Les causes de la congestion dans les urgences
2.2 Les effets de la congestion dans les urgences
2.3 Les solutions à la congestion dans les urgences
2.3.1 Les solutions envisagées au Québec
2.3.2 La gestion des ressources humaines et matérielles
2.3.3 L’organisation du travail à l’urgence
2.3.4 L’orientation des patients vers des ressources alternatives
2.3.5 La combinaison de plusieurs solutions
CHAPITRE 3 : MÉTHODOLOGIE 
3.1 Fonctionnement d’ une salle d’urgence
3.1.1 Entrée à l’ urgence
3.1.2 Le triage
3.1.3 Inscription des patients
3.1.4 L’attente pour une première consultation
3.1.5 La première consultation avec le médecin
3.1.6 Les examens et laboratoires
3.1.7 La deuxième rencontre avec le médecin (le revoir)
3.2 Les variables de recherche
3.2.1 Les variables dépendantes
3.2.2 Variables indépendantes et leurs niveaux
3.3 Plan d’expérience
3.4 Modèle de simulation
3.4.1 Prise de données
3.4.2 Modélisation des processus
3.5 Validation du modèle
3.5.1 Causes de disparités entre les résultats simulés et observés
CHAPITRE 4: ANALYSE DES RÉSULTATS 
4.1 Analyse du modèle de simulation initial
4.2 Analyse de la corrélation entre la durée moyenne de séjour et le nombre de patients qui quittent sans avoir vu le médecin
4.3 Analyse des résultats sur la durée moyenne de séjour à l’urgence
4.3 .1 Analyse des facteurs principaux (tamisage)
4.3.2 Analyse des facteurs significatifs (plan complet)
4.3 .3 Analyse effort impact des interactions ayant un effet significatif sur la durée moyenne de séjour
4.4 Analyse des résultats sur le nombre de patients qui quittent sans avoir vu le médecin
4.4.1 Analyse des facteurs principaux (tamisage)
4.4.2 Analyse des facteurs significatifs (plan complet)
4.4.3 Analyse effort impact des interactions ayant un effet significatif sur le nombre de patients qui quittent sans avoir vu le médecin
4.5 Solution retenue
4.6 Étude de sensibilité sur la solution choisie
CHAPITRE 5 : CONCLUSION

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