Définition de « petits parleurs » (Florin, Braun-Lamesch & Bramaud du Boucheron 1985)
On peut différencier plusieurs types de parleurs en fonction de trois critères quantitatifs : le nombre d’interventions lors d’un atelier ; le nombre de mots dans une phrase et la longueur moyenne de leurs énoncés. Il existe des grands parleurs, des moyens parleurs et des petits parleurs. Le fait de définir un ou plusieurs enfants comme des petits parleurs est assez subjectif et dépend de la population d’élèves qu’il y a dans la classe. On peut évaluer les élèves selon trois critères qualitatifs : la rapidité des échanges, la complexité des énoncés et la richesse du vocabulaire.
L’Oral
Ses différents stades de développement
Il existe différents stades de développement dans l’acquisition du langage oral (Eduscol – Partie I – L’oral – Tableau d’indicateurs).
Vers quatre ou cinq mois, l’enfant communique sous la forme de jeux vocaux utilisant des sons voyelles. Avant un an, entre six et huit mois, il se limite à la discrimination des sons de sa langue maternelle. Vers huit-neuf mois, on perçoit les premiers signes de compréhension.
Il utilise des cris ce qui lui permet de manifester son anxiété, sa faim ou sa joie. C’est une forme de pré-langage, il envoie des stimuli à destination de ses parents. Aussi appelé stade pré linguistique, le stade du babillage « vocalisation » entre six et neuf mois marque l’acquisition des phonèmes et ont une signification affective : l’enfant parle s’il se sent bien.
C’est une étape universelle quel que soit l’environnement linguistique. Le babillage « vocalisation » devient progressivement un babillage « linguistique ». L’enfant associe un son à un objet (fonction symbolique des sons du type « baba », « dada »). Ce stade est renforcé par le pointage ou « geste déictique » visant un référent en situation avec uneintention de communication. Cette étape est variable d’un bébé à l’autre, certains peuvent avoir besoin de s’entrainer plus que d’autres. À partir de douze mois, l’enfant est capable de produire son premier mot. Il comprend environ une cinquantaine de mots. Entre douze et dix-huit mois, il prononce des « proto-mots » (onomatopées « boum », cris d’animaux, « awoi » pour dire au revoir). À dix-huit mois, il peut produire une cinquantaine de mots et en comprendre cent à cent-cinquante. De dix-huit mois à deux ans, c’est la phase du « non ».
L’oral à apprendre et l’oral pour apprendre
Il existe également deux sortes d’oral : l’oral à apprendre et l’oral pour apprendre (C. Garcia-Debanc & S. Plane, 2004).
Dans le premier cas, l’oral à apprendre est l’objet d’apprentissage, il est travaillé dans des situations dont l’objectif est langagier et les compétences mises en jeu sont des compétences de communication. Les élèves apprennent donc à communiquer, à maitriser la langue orale ainsi que des genres oraux. Les apprentissages peuvent être communicationnels, linguistiques ou locutoires (jeux de rôles et activités métalangagières). Pratiquer l’oral comme objet d’apprentissage à l’école montre que l’enseignant a saisi son importance.
L’élève est confronté toute sa scolarité puis dans sa vie professionnelle à des pratiques orales, notamment pour la préparation du grand oral lors des épreuves du baccalauréat. Dans les programmes, l’oral est un champ d’apprentissage présent dans l’ensemble des cycles : c’est un point central ce qui montre la prise de conscience de son enjeu. « Communiquer avec les adultes et avec les autres enfants, en se faisant comprendre et en pratiquant divers usages du langage oral : raconter, décrire, évoquer, expliquer, questionner, proposer des solutions, discuter un point de vue. » (Programmes 2020).
Dans le second cas, l’oral est un outil mis au service d’objectifs autres que langagiers, spécifiques à une notion. C’est un oral vecteur des apprentissages. Les élèves apprennent par la verbalisation et les interactions. Elles permettent à l’élève d’intégrer dans son discours des éléments venant du discours des autres. Il est possible de mettre en place des situations depratique interactionnelle du langage pour développer ces compétences.
Les situations pour enseigner l’oral à l’école maternelle
Il y a différentes situations pour enseigner l’oral à l’école maternelle. On distingue les situations ordinaires dont l’enjeu est de développer le langage de l’enfant dans une relation individualisée de type duelle (adulte-enfant, l’adulte peut être l’ATSEM ou l’enseignant, adulte hors du cercle familial). Ces situations permettent de rassurer l’enfant car elles sont proches de l’univers familial. Elles mettent en jeu la dimension psychoaffective de l’élève ainsi que le développement de ce dernier grâce au langage. L’enfant parle de son vécu ce qui renforce les processus d’individuation et d’affirmation de son identité qui font partie des besoins du petit enfant. Ce genre de situations se déroulent au moment de l’arrivée en classe, du passage aux toilettes, de l’habillage et du déshabillage, de l’accueil après la sieste. Les échanges peuvent porter sur la vie extrascolaire de l’élève (partager un moment vécu le week-end avec sa famille), sur la manière dont il s’est habillé (en fonction de la météo), sur son émotion (contrariétés). Ces échanges instaurent une relation de confiance avec l’adulte.
Les situations régulières comprenant les rituels, quant à elles, permettent à l’enfant d’être rassuré et de comprendre davantage les attentes et les exigences de l’enseignant.
L’enfant a le temps de s’approprier la tâche et le registre langagier associé. Ainsi, par répétition et de manière progressive, il perçoit ce qui est attendu par l’enseignant. Les situations régulières doivent permettre à chaque enfant de trouver sa place au sein du groupe et de faciliter les interactions langagières entre pairs. La régularité rassure l’enfant qui ose donc prendre la parole et s’engager dans la tâche. Ces tâches régulières se déroulent sur des temps comme un bilan de demi-journée, un lancement ou un retour d’activités. C’est pourquoi l’enseignant doit soigner ces temps : ils sont propices aux apprentissages et à l’explication car ils donnent du sens aux apprentissages (l’élève prend de la distance par rapport à son activité : il se représente les connaissances qu’il possède, les construit et apprend à les utiliser, c’est le principe de métacognition). Ces temps permettent de construire une culture commune à la classe. Pour ces situations régulières, l’enseignant doit être organisé de la manière suivante : les objets ou le matériel utilisés (supports divers : images, photographies) doivent être présents ainsi que toutes les traces de l’activité (productions ou réalisations des élèves), un coin est dédié à ce retour d’activités (généralement, le coin regroupement). Chaque enfant a alors une place lors de ce temps et est en posture d’écoute active.
Lors de la phase de conception, l’enseignant doit anticiper les mots qu’il doit utiliser afin d’employer le même vocabulaire pour chaque situation : cela crée une certaine régularité dans les apprentissages. L’objectif est que les élèves se l’approprient afin qu’ils puissent l’utiliser de manière autonome. Ce vocabulaire doit être explicité et choisi avec pertinence.
Les activités ritualisées permettent de communiquer au sein du grand groupe et de travailler le langage à travers différentes activités comme l’appel, la date ou la météo. Ces activités renforcent les repères temporels des élèves (l’ordre des moments de la journée et l’ordre des jours). Les rituels sont aussi l’occasion de développer des compétences langagières plus spécifiques pour apprendre à raconter, ce qui est une conduite langagière attendue.
La compétence langagière « raconter des histoires » est très importante à l’école maternelle. Ainsi, en ritualisant ces activités, l’enseignant laisse du temps aux élèves pour expérimenter cette compétence. L’élève peut s’appuyer sur des marottes, des maquettes ou des boites à raconter. Ces activités s’insèrent dans une séquence autour d’un album de littérature de jeunesse. Il est nécessaire de travailler la compréhension de l’album avant de demander aux élèves de reformuler l’histoire puis de la raconter. L’enseignant doit néanmoins être vigilant : l’élève comprend davantage que ce qu’il peut produire, l’album doit donc être adapté à ses capacités.
Le rôle de l’album dans les pratiques langagières
Plus l’enfant sera familiarisé tôt à l’objet livre, plus le nombre de mots qu’il connait augmentera. Il comprend que le livre est source d’interactions langagières lorsque l’adulte lui lit l’histoire et qu’il peut le manipuler (Berthomier & Octobre, 2018). Néanmoins, il n’a pas été prouvé que l’enfant sera capable d’utiliser les mots vus et entendus dans les livres. « Les livres constituent des objets culturels essentiels au développement de l’enfant, à ses apprentissages langagiers et culturels » (Eduscol- Mobiliser le langage dans toutes ses dimensions – Partie IV – La littérature de jeunesse à l’école maternelle). L’école maternelle doit donc permettre à chaque enfant de s’acculturer de manière collective et individuelle à la littérature de jeunesse. Rendre accessible cette littérature pour jeunes enf ants est indispensable : cela permet de réduire les inégalités et donner de l’intérêt aux apprentissages.
La découverte des récits et de la fiction se fait de manière progressive dès la petite section.
Les enfants se familiarisent avec le langage écrit et en comprennent le contenu (Programmes de l’école maternelle, 2020). L’enseignant doit créer des conditions favorables à cette acculturation en permettant aux élèves de découvrir, de regarder, d’explorer et de manipuler les livres. De plus, l’enseignant doit favoriser la prise de parole des élèves afin qu’ils structurent leurs pensées (émettre un avis) et qu’ils soient en mesure de reformuler l’histoire écoutée.
L’album permet de développer des compétences en communication dès lors qu’il s’agit de s’exprimer à propos de l’album étudié. Il s’agit alors pour l’enfant de mettre en œuvre des compétences de reformulation dans le but de se faire comprendre. Aussi, il sera nécessaire qu’il organise son propos et sa pensée de façon à être compris de tous. Il devra également s’exprimer dans une syntaxe la plus compréhensible possible.
Pour développer toutes ces capacités langagières (lexique, syntaxe), l’élève pourra pratiquer diverses activités en lien avec l’album :
– Répondre à des questions posées par l’enseignant
– Expliquer ce qu’il se passe dans l’histoire
– Parler de ce que ressentent les personnages de l’histoire (Lancel, 2012).
Théories et concepts clés
Le langage oral est l’une des plus grandes préoccupations de l’école. Les recherches montrent qu’il existe une grande disparité langagière chez les élèves à l’école primaire, elle est présente avant même l’entrée de ces élèves dans le milieu scolaire. Ces différences s’expliquent notamment par l’influence des interactions selon le milieu social dans lequel évolue l’enfant. Bruner, Watson, Piveteau & Chambert (1987), dans leur approche pragmatique, expliquent que l’environnement et les interactions sociales permettent de développer le langage. Par ailleurs, des études (Berthomier & Octobre, 2018) soulignent l’importance de la lecture d’albums de jeunesse aux enfants dès leur plus jeune âge, avant l’entrée en maternelle, dans le cadre familial pour développer le langage et la compréhension des enfants. La recherche met en avant l’importance du rôle de la mère dans l’interaction langagière avec l’enfant, son rôle est plus déterminant que celui du père. 82% des mères restent souvent calmement avec l’enfant en lui parlant contre 77% des pères, 75% des mères chantent souvent des comptines à l’enfant contre 42% des pères et 43% des mères lisent souvent des livres à l’enfant contre seulement 24% chez les pères. La mère interagit plus souvent que le père ce qui peut expliquer son « rôle de premier plan ». D’autres recherches mettent en avant les facteurs qui favorisent l’acquisition du langage avant l’entrée à l’école maternelle : la régularité des activités langagières (se faire raconter une histoire) en s’aidant de matériel d’apprentissage adapté à l’âge de l’enfant (livres et jouets) et la qualité des interactions (stimuler l’enfant et être sensible et réceptif à ce qu’il dit). Les milieux défavorisés ont moins accès à ce matériel et les parents sont moins diplômés ce qui peut freiner le développement du langage. Le langage utilisé ne permet pas à l’enfant d’acquérir autant de compétences langagières que des enfants issus de milieux plus favorisés (TamisLeMonda & Rodriguez, 2014).
Selon la théorie interactionniste de Vygotski, les situations de communication et les relations entre l’enfant et l’adulte ont une importance capitale. Le rôle de l’adulte est de s’approcher de la zone proximale de développement de l’enfant. La zone proximale de développement se définit comme la zone où l’élève possède certaines ressources et peut exécuter la tâche avec l’aide d’un adulte (Vygotski, 1934). Il résout des problèmes en collaboration et non de manière autonome. Pour développer le langage, il faut rester proche de cette zone qui est propre à chacun et qui est en constante évolution. Pour cela, l’adulte se place au-delà des capacités langagières de l’élève mais reste dans une zone atteignable par ce dernier pour ne pas le mettre en échec.
De plus, le jeu, selon ses modalités, peut être un moyen d’acquérir un lexique spécifique. Il est un support d’échanges et de communication. Le jeu permet de proposer des interactions proches de la zone développementale de l’enfant. L’adulte ne doit ni aller audelà de cette zone, ni en deçà afin que le développement du langage soit optimal (Canut & Espinoza, 2016).
En outre, des dispositifs et des situations d’apprentissage ont fait l’objet de recherche pour développer le langage chez l’élève. À ce jour, on trouve plusieurs modèles d’intervention pour l’oral à la maternelle. Il en existe cinq (L. Pulido, 2016). Le modèle linguistique de la formation du langage de Lentin s’axe sur deux critères : les mots utilisés (lexique) et la structure des phrases (syntaxe). Elle fait l’hypothèse que le discours de l’adulte est modélisateur, offrant une richesse des énoncés ainsi qu’une variété et une structuration langagière correcte. Il fait évoluer les schèmes sémantico-syntaxiques de l’élève. L’oral de l’adulte stimule l’appropriation de nouvelles structures langagières chez l’élève à condition que ce discours soit individualisé. On trouve aussi le modèle d’échanges autour d’artefacts de Boisseau : il met en avant l’importance des artefacts pour engager la prise de parole de l’élève. Il fait attention à la structure des phrases que les enfants utilisent et les reformule en restant proche de la zone proximale de développement (contrairement à Lentin qui préconise une reformulation à la manière de l’adulte). Cela fait évoluer les énoncés des élèves que ce soit au niveau de la syntaxe ou de la longueur. Ensuite, il y a le modèle d’entraînement langagier de Zorman : il insiste sur l’importance de faire parler les élèves en s’emparant des situations vécues par et avec les élèves. Il prend en charge les enfants qui parlent le moins dans des ateliers : cette pratique bénéficie ainsi aux petits parleurs puisqu’on observe chez eux des progrès dans les dimensions verbales et langagières. On retrouve également le modèle d’échanges en groupes conversationnels de Florin et le modèle polylogal de Péroz.
La multitude de modèles offre aux enseignants de nombreuses ressources dans leurs pratiques professionnelles. Afin de resserrer notre propos, nous travaillerons sur deux de ces modèles, ceux de Péroz et Florin. Nos objectifs dans les dispositifs mis en place pour notre recherche sont d’instaurer une pédagogie de l’écoute, de développer le langage de chaque élève et de favoriser l’échange entre pairs à l’aide de groupes conversationnels.
Présentation des dispositifs mis en œuvre
Les dispositifs mis en place mêlent les études quantitatives et qualitatives. Ce sont des dispositifs longitudinaux prenant en compte le critère temps. L’album sert de support aux élèves pour décrire les images et raconter l’histoire.
Nous avons mis en place ces dispositifs dans les deux classes, ce qui nous permettra de comparer et d’analyser nos résultats. Pour procéder aux recueils de données, nous avons enregistré chaque phase de chaque dispositif. Puisque nos données font appel au registre oral, nous avons retranscrit nos enregistrements sous la forme de verbatim afin de faciliter notre analyse de données. Ces enregistrements nous permettent d’obtenir des données quantitatives en collectant les informations et en les quantifiant. Dans nos dispositifs, le nombre de prises de parole et la longueur des énoncés sont des données quantitatives. Nous notons par un trait chaque prise de parole des élèves ce qui nous permet de comparer le résultat obtenu d’un élève par rapport à un autre (comparaison quantitative). Pour la longueur des énoncés, nous procédons de la même manière en marquant d’un trait chaque mot prononcé par élève et par prise de parole. Nos dispositifs permettent de produire également une étude qualitative en analysant la complexité syntaxique lors de leurs prises de parole et donc leur manière de s’exprimer.
Nos dispositifs s’appuient sur trois critères à évaluer :
– Nombre de prises de parole : nombre de fois où l’élève lève la main et est interrogé par l’enseignante ou lorsque l’élève prend la parole de manière spontanée.
– Longueur des énoncés : le nombre de mots par prise de parole.
– Complexité syntaxique : utilisation de mots-outils ; emploi de différents temps verbaux ; utilisation de phrases simples ou complexes ; lexique de l’histoire employé.
Le nombre de prises de parole témoigne d’une entrée dans une situation communicationnelle connue de l’élève. L’objectif est que tous les élèves puissent prendre la parole afin de créer un équilibre entre les petits parleurs et les grands parleurs pour que les grands parleurs ne prennent pas trop de place lors d’une situation de communication. Il ne faut pas empêcher les grands parleurs de parler mais simplement réguler leurs prises de parole. Intégrer les petits parleurs dans la situation de communication permet de faire évoluer leur langage et donc de prendre confiance en eux pour participer. Par ailleurs, plus le petit parleur est amené à produire un énoncé long et plus la prise de risque est importante. Les erreurs syntaxiques seront peut-être plus nombreuses mais cette évolution témoigne d’une prise de confiance de la part de l’élève. La répétition du vocabulaire et des tournures de phrases employées pour raconter l’histoire permet de réduire les hésitations et les ancrer dans leur capital linguistique. Nous souhaitons que les petits parleurs passent d’une phrase nominale ou averbale voire absence de prise de parole à une prise de parole complète et complexe grâce à la pédagogie de l’écoute et à la répétition des dispositifs mis en place. Nos dispositifs permettent de faire une étude longitudinale. En dehors des séances de langage, des séances de lexique ont été organisées au travers d’activités en motricité et lors de chants et de comptines. Pour s’imprégner du lexique, il était nécessaire de travailler les actions de l’histoire, le déplacement des personnages en le vivant avec son corps et en faisant l’expérience corporelle. Les comptines sont, quant à elles, une aide à la mémorisation du déroulé de l’histoire. Notre étude porte sur deux études de cas différentes. Même s’il s’agit de niveaux différents, nous pensons pouvoir réaliser une étude comparative en fonction de l’âge des élèves et de leurs propres capacités : il s’agit d’un modèle de comparaison. De plus, cette étude nous permet d’observer l’évolution langagière des enfants de trois à cinq ans.
Dispositif 1
Le dispositif se fait en trois étapes : le pré-test, la phase de test et le post-test. Le prétest se déroule en groupe « classe », l’objectif est de réaliser une évaluation diagnostique pour déterminer le groupe homogène nécessaire à la phase de test. La phase de test est réalisée sous la forme de groupes conversationnels comme préconisé par Florin. Cette étape s’effectue sur une séance de langage. Les groupes ont été constitués de la manière suivante : les élèves faisant partie du groupe homogène lors de la phase test n’ont pas pris la parole durant le pré-test ou l’ont pris une fois (classe B). Nous nous sommes fixé un maximum de huit élèves pour le groupe homogène. Le post-test est identique au pré-test, il se déroule en groupe « classe » et nous permet de faire une évaluation formative. Les résultats obtenus nous permettent d’évaluer l’efficacité du dispositif mis en place. Nous cherchons à montrer que les petits parleurs vont prendre de l’assurance et oser parler lors des groupes conversationnels : cela va se traduire par une augmentation du nombre de prises de parole.
Ils prendront ainsi confiance et ce dispositif aura des répercussions lors du post-test en groupe « classe ». Nous supposons qu’ils prendront davantage la parole lors du post-test que lors du pré-test. Il est possible que pour certains élèves, la langue reste un obstacle à la prise de parole.
Dispositif 2
De la même manière que le dispositif 1, le dispositif 2 se présente sous trois étapes : le pré-test la phase de test et le post-test. Ce dispositif repose sur la mise en confiance des petits parleurs pour faire évoluer leurs prises de parole du point de vue de la longueur des énoncés ainsi que la complexité syntaxique. C’est pourquoi nous avons choisi de garder le même groupe de petits parleurs qu’au dispositif 1. Le pré-test se réalise en petit groupe hétérogène.
Nous formons deux groupes hétérogènes dans le but de ne pas avoir un groupe hétérogène trop important. Ces derniers sont formés de quatre à six petits parleurs, un moyen parleur et un grand parleur. Nous ne souhaitons pas ajouter trop d’élèves dans les groupes afin d’éviter d’avoir des groupes trop conséquents qui s’apparenteraient à un groupe « classe ». L’objectif de ce pré-test est d’observer plus précisément la longueur de leurs énoncés et la complexité syntaxique. La phase de test s’effectue en petit groupe homogène de manière identique au dispositif 1. Le post-test reprend la même configuration que le pré-test : petit groupe hétérogène. Nous réalisons une évaluation formative.
Conclusion commune du dispositif 1
Nous remarquons que le nombre de prises de parole chez les petits parleurs a augmenté du pré-test au post-test tandis que pour les grands parleurs le nombre de prises de parole a diminué. Nous pensons que les petits parleurs ont pris davantage de place lors du post-test.
Le dispositif mis en œuvre a permis aux petits parleurs de s’exprimer et de prendre confiance en eux afin de prendre la parole. Néanmoins, nous notons que les petits parleurs ont moins parlé au post-test par rapport au test. Nous supposons que cela est dû au retour en grand groupe, ils n’ont pas totalement confiance en eux et que le travail en petit groupe homogène et hétérogène est nécessaire. Le dispositif 2 nous sert de support pour confirmer cette hypothèse. À noter que tous les élèves n’ont pas pris la parole lors du post-test dans les deux classes y compris certains élèves considérés comme moyens et grands parleurs. Nous pensons que certains élèves de petite section de la classe B ne sont pas encore entrés dans la communication orale. Pour la classe A, l’hypothèse est que les élèves ne sont pas suffisamment entrainés ce qui engendre une prise de parole plus aléatoire. Dans les deux cas, pour consolider les compétences langagières orales, il faut continuer de mettre en œuvre des situations d’apprentissage que ce soit pour les petits parleurs ou pour les moyens et grands parleurs.
Concernant la longueur moyenne des énoncés du post-test, les petits parleurs ontaugmenté leur nombre de mots par énoncé par rapport au pré-test mais par rapport au test,cela est hétérogène. Certains ont continué d’augmenter la longueur de leurs énoncés quand d’autres l’ont diminuée. Nous pensons qu’il y a eu une progression par rapport au pré-test mais que, comme pour le nombre de prises de parole, certains ont encore du mal à s’affirmer dans le grand groupe. Nous observons donc le même phénomène entre la longueur des énoncés et le nombre de prises de parole : une augmentation par rapport au pré-test mais une diminution par rapport au test chez les petits parleurs. De même, nous constatons que la longueur moyenne des énoncés chez les moyens et grands parleurs a diminué entre le pré test et le post-test. Nous pensons qu’il s’agit de la même hypothèse que celle faite sur le nombre de prises de parole : les petits parleurs prennent plus de place. Les échanges sont plus dynamiques et rapides, les élèves ont davantage de difficultés à se laisser parler entre eux et attendre leur tour. L’enseignante a plus de mal pour réguler la parole. Nous pensons que le bâton de parole pourrait les amener à maitriser la distribution de la parole et à les mettre en confiance mais cela n’est pas certain : un petit parleur risque d’être apeuré et en position d’insécurité en ayant le bâton dans les mains et le regard de ses camarades sur lui.
De plus, nous savons que l’attention des élèves à cet âge-là est limité d’autant plus quand le français n’est pas leur langue maternelle. Il est plus facile pour l’enseignante de capter etconserver l’attention de tous les élèves en petit groupe qu’en groupe classe. Nous observons une évolution significative des élèves de petite section jusqu’à la grande section : la longueur moyenne des énoncés du groupe de la classe B (PS) est de 3,6 mots par énoncé alors que dans la classe A (MS-GS), la moyenne s’élève à 5,35 soit 1,75 mots d’écart. De plus, la plus grande prise de parole de la classe A s’élève à 35 mots alors que pour la classe B, la plus grande prise de parole est de 16 mots soit plus du double. Cela confirme donc que nous sommes dans un moment charnière et propice au développement du langage oral à condition de le travailler régulièrement. Nous nous sommes cependant demandé à partir de quel moment la prise de confiance chez les petits parleurs était suffisante pour ne plus voir de différences entre petits groupes homogènes et grand groupe.
|
Table des matières
1 Introduction
2 Cadre théorique
2.1 Définitions
2.1.1 Définition du terme « langage »
2.1.2 Définition d’hétérogénéité
2.1.3 Définition de « petits parleurs » (Florin, Braun-Lamesch & Bramaud du Boucheron 1985)
2.2 L’Oral
2.2.1 Ses différents stades de développement
2.2.2 Les composantes de la prise de parole
2.2.3 L’oral à apprendre et l’oral pour apprendre
2.2.4 Les enjeux de l’oral
2.2.5 Les situations pour enseigner l’oral à l’école maternelle
2.2.6 Le rôle de l’album dans les pratiques langagières
2.3 Théories et concepts clés
3 Dispositifs de recherche
3.1 Présentation de la population étudiée
3.1.1 Classe « A »
3.1.2 Classe « B »
3.2 Présentation de la séquence
3.3 Présentation des dispositifs mis en œuvre
3.3.1 Dispositif 1
3.3.2 Dispositif 2
4 Résultats et analyse
4.1 Analyse du dispositif 1 classe A
4.2 Analyse du dispositif 1 classe B
4.3 Conclusion commune du dispositif 1
4.4 Analyse dispositif 2, classe A
4.5 Analyse dispositif 2, classe B
4.6 Conclusion commune dispositif 2
5 Conclusion
6 Références
7 Annexes
7.1 Recueil de données : dispositif 1, classe A
7.2 Dispositif 1, verbatim, classe A
7.3 Recueil des données : dispositif 1, classe B
7.4 Dispositif 1, verbatim, classe B
7.5 Recueil de données : dispositif 2, classe A
7.6 Dispositif 2, verbatim, classe A
7.7 Recueil de données : dispositif 2, classe B
7.8 Dispositif 2, verbatim, classe B
8 Résumé