Les sites technologiques liés à l’exploration spatiale: les enjeux de leur patrimonialisation

Des sites exceptionnels du point de vue technologique ont vu le jour pour servir la conquête spatiale qui a façonné l’imaginaire de plusieurs générations (Diplomatie GD, 2016, p. 1). Baïkonour, Cap Canaveral, Kourou sont des représentations du génie humain du début de l’Ère spatiale (Kandel, 2008). S’il est possible de reconnaître, un jour, les sites terrestres liés à l’exploration spatiale en tant que patrimoine de l’Humanité au titre de la Convention du patrimoine mondial (Convention 1972) , quel pourrait être l’enjeu principal de leur patrimonialisation ?

Cette recherche met en évidence des enjeux multiples de la patrimonialisation des sites technologiques liés à l’exploration spatiale, et plus particulièrement les profits symboliques que les États et la communauté internationale pourraient tirer d’une reconnaissance des sites représentant des avancées technologiques d’une Valeur universelle exceptionnelle. Elle produit également un outil de pilotage des actions de valorisation de ces sites au titre de la Convention 1972.

Énoncé du problème : le patrimoine de l’Espace sous un prisme d’un instrument normatif international (Convention du patrimoine mondial du 1972)

Le développement des mécanismes et/ou d’un instrument normatif protégeant l’ensemble de monuments, de sites et d’objets du patrimoine de l’Espace doit obligatoirement passer, avant tout, par la création d’une notion du patrimoine de l’Espace. Cette action est d’autant plus urgente, que certains sites, objets et traces matérielles pouvant appartenir à ce type de patrimoine sont menacés (DiPaolo, 2013).

Nous notons que la première démarche pour définir ce concept a été entreprise au titre de l’Initiative thématique de l’UNESCO « Astronomie et patrimoine mondial » en coordination avec un groupe d’experts internationaux. La définition du patrimoine de l’Espace a été proposée par les experts spécialisés dans le cadre d’une étude thématique « Les sites du patrimoine de l’astronomie et de l’archéoastronomie dans le cadre de la Convention du patrimoine mondial de l’UNESCO » conduite, en 2010 et en 2017, par l’Union astronomique internationale et l’ICOMOS.

Si un instrument normatif existe pour protéger, sur l’espace terrestre, les monuments et les sites d’une valeur exceptionnelle universelle au titre de la Convention du patrimoine mondial (UNESCO – Convention 1972, Article 1, 1972), dans l’espace extra-atmosphérique, le champ d’application de la notion du patrimoine commun de l’humanité est restreint. (Smouts, Du patrimoine commun de l’humanité aux biens publics globaux) De nombreuses tentatives pour définir des approches du développement des directives spécifiques ou d’un instrument normatif ont vu le jour.

À ce jour, le cadre normatif dans le domaine de l’espace extra-atmosphérique se résume aux cinq traités conclus sous l’égide des Nations Unies qui réglementent toute une série d’activités dans l’espace :

– Traité sur les principes régissant les activités des États en matière d’exploration et d’utilisation de l’espace extra-atmosphérique, y compris la Lune et les autres corps célestes (annexe de la résolution 2222 (XXI) de l’Assemblée générale) – adopté le 19 décembre 1966, ouvert à la signature le 27 janvier 1967, entré en vigueur le 10 octobre 1967 – au titre de ce « Traité de l’Espace », il est interdit de procéder à l’aménagement de bases ou d’installations militaires sur les corps célestes et notamment la Lune, et la mise en orbite autour de la Terre d’armes de destruction massive (dont les armes nucléaires). Il laisse toutefois la possibilité du transit des armes à travers l’espace et des reconnaissances par satellites artificiels ;
– Accord sur le sauvetage des astronautes, le retour des astronautes et la restitution des objets lancés dans l’espace extra-atmosphérique (annexe de la résolution 2345 (XXII)) – adopté le 19 décembre 1967, ouvert à la signature le 22 avril 1968, entré en vigueur le 3 décembre 1968 ;
– Convention sur la responsabilité internationale pour les dommages causés par des objets spatiaux (annexe de la résolution 2777 (XXVI)) – adoptée le 29 novembre 1971, ouverte à la signature le 29 mars 1972, entrée en vigueur le 1er septembre 1972 – Elle établit un régime de responsabilité pour risques en cas de dommages causés à un aéronef en vol ou à tout bien situé à la surface de la Terre;
– Convention sur l’immatriculation des objets lancés dans l’espace extraatmosphérique (annexe de la résolution 3235 (XXIX)) – adoptée le 12 novembre 1974, ouverte à la signature le 14 janvier 1975, entrée en vigueur le 15 septembre 1976 – Elle prévoit que les Nations Unies sont chargées de collecter et de répertorier toutes les informations concernant les appareils spatiaux lancés à partir de la Terre ;
– Accord régissant les activités des États sur la Lune et les autres corps célestes (annexe de la résolution 34/68) – adopté le 5 décembre 1979, ouvert à la signature le 18 décembre 1979, entré en vigueur le 11 juillet 1984 : au titre de cet « Accord sur la Lune », « la Lune et ses ressources naturelles constituent le patrimoine commun de l’humanité ». Nous notons que c’est la seule fois que la notion du patrimoine est employée dans l’ensemble des traités et des principes relatifs à l’Espace adoptés par les Nations Unies.

En plus de ces traités, l’Assemblée générale des Nations Unies a également adopté les principes suivants :
– Déclaration des principes juridiques régissant les activités des États en matière d’exploration et d’utilisation de l’espace extra-atmosphérique, adoptée le 13 décembre 1963 (résolution 1962 (XVIII)) ;
– Principes régissant l’utilisation par les États de satellites artificiels de la Terre aux fins de la télévision directe internationale, adoptés le 10 décembre 1982 (résolution 37/92) ;
– Principes sur la télédétection, adoptés le 3 décembre 1986 (résolution 41/65) ;
– Principes relatifs à l’utilisation de sources d’énergie nucléaires dans l’espace, adoptés le 14 décembre 1992 (résolution 47/68) ;
– Déclaration sur la coopération internationale en matière d’exploration et d’utilisation de l’espace au profit et dans l’intérêt de tous les États, compte tenu en particulier des besoins des pays en développement, adoptée le 13 décembre 1996 (résolution 51/122).

La ratification de ces instruments par les États et la mise en place des actions sont présentées dans un document , tenu régulièrement à jour par le Bureau des affaires spatiales des Nations unies (UNOOSA) .

Selon le Traité sur l’espace extra-atmosphérique (1967) « l’exploration et l’utilisation de l’espace extra-atmosphérique, y compris la lune et les autres corps célestes, doivent se faire pour le bien et dans l’intérêt de tous les pays, quel que soit le stade de leur développement économique ou scientifique ; elles sont l’apanage de l’humanité toute entière » (art. 1 de la Convention de 1967). L’idée du patrimoine commun de l’humanité n’est pas retenue dans cette définition (Smouts, Du patrimoine commun de l’Humanité aux biens publics globaux, pp. 56- 57). En 1968, la première Conférence des Nations Unies sur l’exploration et les utilisations pacifiques de l’Espace extra-atmosphérique réunit 78 États Membres, 9 institutions spécialisées, 4 organisations internationales, afin d’examiner des avantages que pourrait apporter l’exploration de l’espace et les possibilités de coopération internationale dans ce domaine.

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Table des matières

1. Introduction
2. Énoncé du problème : le patrimoine de l’Espace sous un prisme d’un instrument normatif international (Convention du patrimoine mondial du 1972)
3. Objet d’étude et la méthodologie de la recherche
4. « Culture de l’Espace » : vers la prise de conscience des valeurs de l’Espace
4.1. L’« Espace » à l’UNESCO
4.1.1. État des lieux
4.1.2. Patrimoine de l’Espace : patrimoine commun de l’humanité ?
4.1.3. Patrimoine lié l’exploration spatiale : axes de recherche
4.2. « Science – Culture » : vers un projet interdisciplinaire
4.2.1. Valorisation du patrimoine scientifique et technologique : initiation des démarches formelles
4.2.2. Qu’est-ce qu’un site lié à l’exploration spatiale ?
4.3. Panorama du patrimoine spatial : État des lieux
4.3.1. Panorama du patrimoine spatial du Centre National d’Études Spatiales (CNES, France)
4.3.2. Projet de l’Histoire de l’Espace de l’Agence Spatiale Européenne (ESA)
4.3.3. Les États Unis d’Amérique
4.3.4. Question de l’innovation
5. La définition des contextes
5.1. Le contexte de la création des sites technologiques liés à l’exploration spatiale
5.1.1. L’Espace – un lieu de manifestations symboliques répondant à des nécessités politiques
5.2. Le contexte actuel et les enjeux associés
5.3. Le contexte de patrimonialisation : ses enjeux politiques, économiques, identitaires
5.3.1. Le patrimoine : sa définition, son rôle, son pouvoir
5.3.2. Les Listes : l’état des connaissances
5.3.3. Du patrimoine au patrimoine mondial de l’UNESCO
5.3.4. Patrimoine mondial de l’UNESCO : les repères
5.3.5. Les patrimoines : la géographie thématique du patrimoine mondial
5.4. Les passerelles : points de convergence inter-contextuels
6. Les enjeux de patrimonialisation
6.1. Le patrimoine mondial – un enjeu politique et économique majeur
6.2. La création et la répartition des valeurs
6.2.1. Les liens entre la Valeur universelle exceptionnelle et les valeurs associées : état des connaissances
6.2.2. L’union des valeurs universelles et scientifiques : la faisabilité d’une patrimonialisation des sites terrestres liés à l’exploration spatiale
7. Cas d’étude : Baïkonour – le site-laboratoire de recherche
7.1. Les origines de l’Histoire du Futur
7.2. Le contexte
7.2.1. Création – les origines du choix
7.3. La symbolique du lieu
7.3.1. Création des valeurs identitaires
7.3.2. Évolution / transformations
7.4. Le processus de patrimonialisation
7.4.1. Enjeux multiples
7.4.2. Points de corrélation des intérêts
7.4.3. Une approche comparative
7.4.4. Les procédures
7.4.5. Les acteurs
7.4.6. Les facteurs de facilitations
7.4.7. Les facteurs de blocage
7.5. « Appel de Baïkonour »
8. Création des valeurs identitaires de la Civilisation de l’Ère spatiale : l’Espace comme élément de gouvernance supranationale
8.1. De la « matérialisation » de l’Espace à la création d’un nouvel instrument normatif
8.2. Un nouvel élan – l’Espace comme moteur du développement de la Citoyenneté mondiale
9. Conclusion

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