Les rituels relevant du sous-domaine « Approcher les quantités et les nombres » 

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La lecture en réseau

La lecture d’album est l’une des activités traditionnellement conduites de manière collective en maternelle. J’ai dès lors adopté cet usage, mais en ayant comme objectifde ne pas organiser mes lectures en fonction d’un thème mais plutôt dans le cadre de véritables réseaux de lectures. Pour expliquer et illustrer cette distinction, je me réfèrerai ici aux cours de français dispensés par Barbara Arroyo à l’ESPE, parmi lesquels une séance a été consacrée aux réseaux de lecture. La lecture organisée autour d’un thème n’est pas proprement littéraire : elle prend la forme d’une exploration d’un champ sémantique et vise donc l’enrichissement du vocabulaire des élèves par le biais d’apprentissages lexicaux. Le réseau de lecture répond quant à lui à une « problématique littéraire ou plastique » et doit ainsi déboucher sur un « savoir explicite ». Autrement dit, il ne s’agit pas seulement de préciser et d’augmenter le nombre de mots accessibles aux élèves, mais bien de construire de véritables connaissances littéraires ou, plus généralement, culturelles, lesquelles connaissances permettront aux élèves d’aborder d’autres œuvres à l’aune d’un « horizon d’attente ». C’est là l’un des enjeux centraux de la lecture littéraire conduite à l’école : que les élèves disposent des connaissances nécessaires pour aborder des œuvres en s’attendant à y trouver quelque chose, quitte à ce que quelque chose soit, précisément, modifié, détourné ou, simplement, enrichi par leurs lectures ultérieures.
En maternelle, cette lecture littéraire des textes reste, évidemment, minimale. Mais elle permet néanmoins d’aborder de manière explicite des connaissances qui seront autant de prérequis à la lecture de textes littéraires à l’école élémentaire : la notion d’auteur, celle de série, les personnages archétypiques des contes (qui, s’ils ne sont pas rencontrés ouvertement comme tels à l’école, sont laissés à la seule charge des familles), etc…
J’ai ainsi constitué un réseau de lecture par période tout en faisant bien attention à diversifier en parallèle mes lectures pour ne pas sombrer dans « l’écueil de la série », c’est-à-dire le fait de ne plus lire que des albums s’inscrivant dans un même réseau. Il s’agit en effet là d’une des conditions de la construction de véritables apprentissages : sans intrus, sans altérité, les élèves ne peuvent pas construire par eux-mêmes de véritables similarités.

Un même personnage principal : le loup

J’ai choisi, en période 2, de proposer à mes élèves de nombreux albums mettant en scène un même personnage principal : le loup. Je ne rentrerai pas ici dans le détail des activités que je leur ai proposées dans ce cadre, celles-ci ayantété en effet principalement conduites en petits groupes de langage, objet de ma deuxième partie.
Je me contenterai à ce stade de donner quelques précisions sur la construction de ma séquence consacrée à ce réseau de lecture. Mon idée ici était de rappeler à mes élèves quelles étaient les caractéristiques paradigmatiques du loup25 pour, progressivement, leur présenter des lectures modifiant ces représentations. En d’autres termes, mon objectif était d’utiliser l’horizon d’attente déjà en partie présent chez mes élèves pour créer une surprise avec des albums à contre-courant du personnage archétypique du loup.
J’ai ainsi organisé les albums en trois catégories différentes :
• Le personnage archétypique du loup : Les trois petits cochons (Albums du Père Castor) ; Pierre et le loup (Sergueï Prokofiev – version lue par Gérard Philippe et version illustrée par Erna Voigt chez Gallimard Jeunesse) ; Plouf ! (Philippe Corentin) .
• Le loup, un personnage ambivalent : Tête à claques (Philippe Corentin) ; C’estmoi le plus fort (Mario Ramos) ; Le loup qui voulait être un mouton (Mario Ramos) .
• Le loup ami : Patatras (Philippe Corentin) ; Une soupe au caillou (Anaïs Vaugelade).

Tromboline et Foulbazar

En période 3, j’ai choisi de concevoir un réseau de lecture autour d’une même série : les albums de Tromboline et Foulbazar, de l’écrivain Claude Ponti, publiés à L’École des loisirs. Ici, le travail en réseau s’est accompli quasi intégralement sur l’impulsion de mes élèves. Ce sont eux qui, d’emblée, ont reconnu les personnages d’un album à l’autre et qui, à partir de ce lien initial repéré, ont commencé à chercher points communs et différences.
Ils ont dans un premier temps cherché à identifier les deux poussins : leurs noms, si bizarres et déroutants (« ça ressemble à trampoline » ; « c’est lui qui met le bazar »), mais aussi leurs identités respectives (« lequel est Tromboline ? », « lequel est Foulbazar ? », « c’est ungarçon ! », « c’est une fille ! »). Ces interrogations, qui les animaient véritablement, les ont conduits, comme je ne les avais jamais vus faire avant, à chercher des indices et des réponses dans les lectures et les relectures des albums. Le fait d’avoir un but les rendait extrêmement attentifs tant à l’écrit qu’aux illustrations. Il se créait ainsi une véritable émulation collective qui a fait de ces moments des moments importants dans la vie de la classe.
Un autre point sur lequel les élèves ont d’eux-mêmes initié une recherche ont été tous les éléments de mise en page: la taille des livres, mais aussi la couleur des couvertures (et donc l’exception du Cauchemar) ainsi que celle des plumes dessinées en début et fin d’albums (et donc, là encore, l’exception du Cauchemar). Cette quête a ainsi été l’occasion de consolider le lexique lié au livre en tant qu’objet (couverture ; pages ; auteur ; titre ; …).
L’apparition de personnages secondaires récurrents, mais pas systématiquement présents dans tous les albums, a aussi été une source de questionnement : Tromboline et Foulbazar sont-ils amis ? Frère et sœur ? Ont-ils un père ? La sobriété des illustrations et la simplicité syntaxique des textes26 de ces albumsont en outre permis à tous les élèves de prendre une part active à cette recherche collective.
Dès lors, la création d’une affiche27 récapitulant les albums lus (par leurs couvertures respectives) ainsi que l’auteur (par une photo et l’écriture du nom de Claude Ponti) et distinguant, en deux colonnes, les « points communs » et « différences » entre tous les albumsest venue formaliser un travail déjà effectué de manière collective à l’oral. Elle a néanmoins permis en retour de revenir à des albums afin d’y chercher la confirmation ou l’infirmation d’une hypothèse émise par l’un des enfants de la classe.

Les livres à compter

Dans le cadre d’un cours organisé par l’ESPE et intitulé « Projet pour la classe : Les mathématiques dans un projet pluridisciplinaire » (animé par Jean-Baptiste Mayenson et Agathe Nguyen), j’ai été conduite à développer, avec deux camarades, un projet de livre à compter, lequel devrait être mené dans ma classe en période 5. Il m’a dès lors fallu mettre en place, dès le milieu de la période 4, un réseau de lecture consacré aux livres à compter ou, plus généralement, aux livres numériques.
Je partirai de cette distinction entre livres à compter, entendu au sens strict, et livres plus globalement dits numériques pour rendre compte d’une démarche encore en cours et sur laquelle je n’ai pas encore tout le recul nécessaire.
En cherchant à construire une typologie des albums à compter que nous avions réunis, il nous est apparu, à mes camarades et à moi-même, que la distinction première rangeait d’un côté les albums à compter simples, qui présentaient, sur une double page le plus souvent, une collection (un éléphant ; deux singes ; trois lions ; …) ainsi que l’écriture chiffrée du cardinal correspondant (1 ; 2 ; 3 ; …) et, de l’autre, les livres numériques intégrant le déroulement de la suite numérique à un récit plus ou moins élaboré. Cette dernière catégorie intègre ainsi tous les albums où l’itération (ou le retrait) d’une unité est lié à la narration : ainsi, dans Dix petites graines(Ruth Brown), l’on passe de huit à sept graines parce qu’une souris en a mangé une.
En partant du constat selon lequel l’immense majorité des élèves de ma classe, PS compris, connaissait la suite numérique jusqu’à au moins 1028, j’ai choisi d’approfondir la lecture de livres numériques29 et ai dès lors organisé mes lectures de la façon suivante :
• une première lecture classique, sans aucune orientation de ma part sur la dimension de numération .
• une deuxième lecture aboutissant à la construction d’une trace écrite simple et mettant en avant l’écriture des nombres : par exemple, après avoir lu Maman !, de Mario Ramos, j’ai proposé à mes élèves de compter le nombre d’animaux présents sur chacune des doubles pages (que j’avais préalablement scannées et imprimées au format A4) ; une fois le cardinal déterminé, j’écrivais sur chacune des pages imprimées l’écriture chiffrée correspondante et les accrochais les unes à la suite des autres, en-dessous d’une frise numérique .
• une troisième phase de jeux en lien avec cette dimension numérique ainsi apparue (plus ou moins explicitement chez les élèves – je reviendrai sur ce point dans le paragraphe suivant) : pour poursuivre sur l’exemple de l’album Maman !, j’ai à nouveau accroché les pages de l’album au tableau, dans l’ordre, et ai demandé aux élèves de fermer les yeux pendant que je retirais et cachais l’une des pages et, une fois les yeux rouverts, de trouver non pas l’animal (beaucoup de mes élèves avaient beaucoup aimé l’histoire et cherchaient d’avantage à retrouver les animaux que leur nombre !) mais bien le nombre manquant.
Mon objectif pour le début de la période 5 serade faire apparaitre à mes élèves explicitement les liens entre tous ces albums. Implicitement, ils ont en effet compris qu’il s’agissait d’album numériques : ils ont d’eux-mêmes été rapidement demandeurs de venir compter le nombre d’animaux (ou autres) présents sur les pages. Mais, pour autant, le lien entre tous ces albums lus ne leur est pas apparu comme tel, et je ne pense pas qu’aucun d’entre eux n’a construit l’idée selon laquelle il s’agissait de livres à lirepour apprendre à bien compter.

POINTS FORTS ET LIMITES DES APPRENTISSAGES CONDUITS DE MANIÈRE COLLECTIVE

Les points forts

Le premier et le plus manifeste des avantages de cette organisation de la classe renvoie, du point de vue de mon ressenti propre, au fait que je me suis d’emblée sentie plus à l’aise lors des regroupements que lors des moments d’activités en ateliers. J’ai immédiatement senti que j’avais plus de prise sur mes élèves et sur les apprentissages que je souhaitais conduire avec eux lorsque je les avais tous en face de moi. Trouver ma place alors que les élèves étaient tous dispersés, affairés à des activités différentes a en revanche été beaucoup plus difficile !
Cette posture me permet en outre de solliciter de manière très précise certains de mes élèves : ceux qui sont les moins à l’aise avec les apprentissages dans certains cas et, au contraire, les élèves les plus avancés lorsque je souhaite utiliser leurs compétences pour les offrir en modèle au reste de la classe. Il s’agit ainsi, dans mon esprit et compte tenu des limites que je développerai à ce propos plus bas, d’une différenciation individuelle et in situ des apprentissages. Je garde en effet dans ces moments une place centrale dans les échanges et c’est moi distribue la parole aux élèves.
L’organisation de séquences collectives permet en outre de ne pas multiplier les préparations matérielles : pour ne pas sombrer dans la surenchère du travail de préparation sans pour autant revoir à la baisse le contenu des séances, les regroupements me semblent être à bien des égards un compromis utile à exploiter. En outre, l’organisation collective permet de proposer de très courtes activités aux élèves mais, si besoin, de les répéter aussi souvent que nécessaire, sans passer par l’exécution strictement individuelle, là encore très coûteuse en matériel.
Les activités conduites de manière collectives me semblent par ailleurs nécessaire à l’alternance entre les types d’enseignement proposés aux enfants. Dans mon école, la récréation du matin a en effet lieu à 10h30 et celle de l’après-midi à 15h30 soit, les deux fois, deux heures après l’arrivée en classe des élèves. Il est dans ce cadre incontournable de relancer leur attention et leur motivation par des ruptures et des réorientations de l’effort.
Enfin, la conduite d’apprentissages proprement collectifs me semble être la seule à même de constituer une sorte de culture de classe et, adossée à celle-ci, un sentiment d’appartenance commune entre les élèves.

Les limites

Conduire des apprentissages de manière collective limite en revanche, pour la majorité des élèves, les activités langagières à leur seule dimension de réception. Il est dès lors nécessaire de combiner ces moments collectifs à des moments conduits en groupes plus réduits pour que les élèves passent à la production au sens propre.
D’autre part, sur le plan strictement matériel, le nombre important d’enfants ainsi que la disposition en carré autour du tableau complique l’accès aux affichages et génère rapidement des tensions entre les élèves, qui se poussent bien souvent les uns les autres.
Mais la limite principale à ce type d’organisation a trait, me semble-t-il, à l’une des plus grandes difficultés de l’enseignement : la différenciation. J’ai en effet bien conscience que le fait de solliciter spécifiquement tel ou tel élève lors des échanges collectifs ne suffit pas à apporter à chacun les éléments qui sont nécessaires à la construction de ses compétences. Lorsqu’il s’agit, notamment, de viser des objectifs proprement langagiers, il me semble incontournable de diminuer la taille des groupes et de penser spécifiquement leur composition pour, dans la majorité des cas, créer des groupes de niveaux.
C’est d’ailleurs pour palier à ces difficultés que j’ai conduit des apprentissages organisés différemment et c’est à leur analyse que jeconsacre les deuxième et troisième parties de cette étude, qui portent respectivement sur les ateliers de langage conduits en groupes réduits et sur les ateliers autonomes inspirés par la pédagogie de Maria Montessori.

LES ATELIERS DE LANGAGE CONDUITS EN DEMI-GROUPES

DÉFINITION ET RAISONS DU CHOIX

Avant de retracer le cheminement qui a été le mien autour des ateliers de langage, je dois avant tout préciser qu’il y a, dans ma classe, peu de problèmes liés à la langue : mes élèves, dans leur très grande majorité, et PS comprises, parlent très bien. Ils disposent d’un vocabulaire riche et précis et savent correctement utiliser des formes syntaxiques complexes et même, bien souvent, très élaborées. Quatre d’entre eux seulement rencontrent de réelles difficultés, parmi lesquels un élève de PS présent à l’école le matin uniquement et un élève pour qui le français n’est pas la langue maternelle et qui est, par ailleurs, extrêmement à l’aise avec les apprentissages.
Pour autant, l’apprentissage et l’amélioration de la langue orale reste, même dans ces bonnes conditions, l’objectif central de l’école maternelle : « Le langage oral est le pivot des apprentissages à l’école maternelle »30. Il m’a donc rapidement semblé nécessaire d’organiser de véritables apprentissages en la matière et de ne pas me contenter du « bain de langage » des regroupements et des discussions informelles conduites avec des élèves. Dès lors, j’étais bien consciente que le grand groupe ne conviendrait pas et qu’il serait indispensable non seulement d’en diminuer la taille mais aussi de réfléchir à une constitution adéquate.
Mais j’ai fait face, en début de deuxième période, lorsque je me suis réellement attelée à cet objectif, à la difficulté suivante : comment conduire de véritables ateliers de langage en petits groupes, lesquels demandent une grande attention et une présence continue du PE, alors qu’un nombre non négligeable d’élèves travaillerait en autonomie et risquerait donc de se lever et de me solliciter régulièrement ? Il me semblait bien impossible de confier à mon ATSEM, pourtant extrêmement compétente et bienveillante avec les élèves, tout le reste de ma classe. L’écueil ici me semblait inévitable : parmi les élèves qui ne participeraient pas au groupe de langage, certains seraient, certes, avec mon ATSEM, mais d’autres, plus nombreux, seraient simplement occupés par une activité ou une autre. La dérive occupationnelle me semblait ainsi très difficile à éviter. C’est la raison pour laquelle je me suis tournée vers une division en deux de ma classe : je conduirais donc des groupes de langage en demi-classe, l’autre moitié étant placée sous la responsabilité de l’ATSEM. Cette formule, dont je savais bien qu’elle n’était pas idéale, me permettait néanmoins de différencier les apprentissages, les élèves étant en effet répartis en un groupe de « faibles parleurs » et un autre groupe de « bons parleurs », tout en étant à même de proposer de véritables apprentissages à tous les autres élèves.

FONCTIONNEMENT EFFECTIF

Je décrirai au sein de ce point le fonctionnement initial (périodes 2 et 3) de mes groupes de langage, car les modifications ont été nombreuses et la formule que j’ai finalement adoptée en fin de quatrième période sensiblement différente. J’expliquerai dans le point suivant, à l’aune des difficultés que j’ai ressenties face à ce fonctionnement, les tentatives de réorganisation qui ont été les miennes tout au long de l’année.
De manière générale, mes ateliers de langage étaient organisés au coin regroupement, les enfants assis sur le tapis, par terre donc, en demi-cercle autour de moi, également assise par terre. Pour chacune des séances, j’ai en outre systématiquement prévu un ou plusieurs supports matériels pour aider la concentration et la participation active de mes élèves.

Les activités de langage en lien avec un réseau de lecture : le loup

En deuxième période, j’ai choisi de construire des séances de langage en lien avec le réseau de lecture en cours sur le personnage archétypique du loup. J’ai ainsi développé deux séances types. Lors de la première,je souhaitais que mes élèves, répartis donc en groupes de niveaux, relèvent des liens entre les trois albums que je leur avais préalablement lus et qui faisaient partie de la catégorie du « personnage archétypique du loup »31 et qu’ils construisent, sur cette base, une représentation explicite du loup-type. Je leur proposais pour cela des images scannées et imprimées des trois albums et leur demandais de les classer. Ils devaient ensuite décrire les trois types de dessins du loup, de telle sorte à déterminer des points communs (dents apparentes et longues ; langue pendante ; griffes ; …), lesquels points communs étaient dans un deuxième temps recensés sur une affiche d’identité du loup.
La deuxième séance était, quant à elle, consacrée à un album de Mario Ramos, Le loup qui voulait être un mouton, lequel joue avec les représentations habituelles du loup pour les détourner. J’aiainsi sélectionné un certain nombre de pages de l’album et ai demandé aux élèves, sans leur avoir préalablement lu le texte, de décrire les pages et, sur cette base, d’imaginer l’histoire et le titre de l’album. Mon objectif était qu’eux-mêmes se servent de leurs propres représentations pour construire une histoire conforme à l’idéal-type du loup pour être encore plus frappés et décontenancés par son détournement lorsque je leur lirais l’album.

Ecrire l’histoire d’un album sans texte : Le voleur de poule

Lors de la troisième période, j’ai choisi un album sans texte, Le voleur de poule (Béatrice Rodriguez) avec pour ambition d’écrire le texte correspondant avec mes élèves et, dans un deuxième temps, d’utiliser des marottes pour les faire jouer à partir de leur création. J’ai donc commencé par « lire » l’album à mes élèves, en leur disant qu’il s’agissait d’un livre très spécial mais sans leur faire part de l’absence de texte. Ils ont rapidement perçu qu’il n’y avait « pas d’écritures ». Je leur ai donc proposé qu’on écrive ensemble un texte qui rende compte des images.
Les séances de la période trois prenaient ainsi cette forme : une moitié de classe, répartie en trois groupes de trois ou quatre élèves, produisait, avec l’ATSEM, des fonds reprenant schématiquement les différentes planches de l’album32, en grand format. Ces fonds étaient destinés à la phase de la séquence où les enfants joueraient avec des marottes le texte qu’ils auraient écrit. L’autre moitié de la classe était, elle, installée au coin regroupement afin de rédiger avec moi le texte de l’album. Je commençais la séance en lisant aux élèves ce que les autres avaient écrit la séance précédente ; puis les élèves racontaient ce qu’ils imaginaient sur chacune des trois planches sélectionnées et, enfin et après reformulation, l’ensemble du groupe me dictait le texte correspondant.

POINTS FORTS ET LIMITES

Points forts

Le premier avantage de ces groupes de langage est intrinsèquement lié à mon constat de départ : les élèves de ma classe parlent bien et ont plaisir à intervenir à l’oral, quel que soit le motif de cette participation. La plupart du temps, les ateliers de langage fonctionnent bien dans le sens où un nombre important d’élèves se prennent au jeu, apportent sa contribution et, surtout, semblent bien comprendre l’objectif de la séance. Les projets dont, notamment, l’écriture du texte du Voleur de poule, ont ainsi pu être menés à bien sans difficulté majeure.
D’autre part, la répartition des élèves par demi-classes a permis à certains de mes élèves ayant un bon niveau de langage mais étant peu enclins à prendre la parole devant les autres à d’avantage oser prendre part aux discussions.

Limites

Ma première difficulté avec ces ateliers conduits en demi-groupes était spatiale : le fait de rester au coin regroupement a beaucoup déstabilisé mes élèves, notamment les PS, qui avaient des difficultés à associer le coin regroupement à une véritable activité. L’un d’entre eux me disait ainsi régulièrement, en me montrant les élèves assis aux tables : « Maitresse, moi aussi je veux faire un travail ». Le fait que les élèves soient assis directement sur le sol, sans place clairement définie, était en outre source d’innombrables conflits qui venaient parasiter la progression de la séance. J’ai cherché plusieurs solutions à cette difficulté. J’ai ainsi d’abord pensé à faire tenir aux élèves assis par terre une ficelle, à la fois pour qu’ils se répartissent mieux dans l’espace et pour qu’ils la tiennent pendant toute la séance. Mais cette idée s’est révélée être parfaitement contreproductive : les élèves finissaient par s’intéresser d’avantage à tirer la ficelle vers eux qu’à participer à la séance en tant que telle.
J’ai ensuite installé autant de chaises qu’il y avait d’enfants (quatorze environ) à l’intérieur du coin-regroupement. Cette formule, que j’ai conservée comme telle pendant un nombre important de semaines, avait à mon sens deux avantages principaux. Elle garantissait tout d’abord à chaque enfant une place assise claire et, si je puis dire, égale : un enfant assis sur sa chaise ne pouvait pas s’accaparer l’espace de son camarade. Mais elle modifiait également la représentation que les enfants avaient alors de l’espace : il ne s’agissait plus du coin-regroupement tel qu’ils l’associaient aux activités collectives (rituels, lectures d’albums, …) mais d’un lieu spécifique, à la fonction plus claire. Les ateliers de langage dans le coin-regroupement étaient par ce biais devenues de véritables activités, identifiées comme telles par les élèves. Je pense que, aujourd’hui encore, lorsqu’ils repensent à l’écriture du texte du Voleur de poule, mes élèves voient les chaises installées à l’intérieur du coin regroupement. Cette modification de l’organisation spatiale a été à mon sens la plus bénéfique et la plus rentable pour le bon fonctionnement de cette première formule d’ateliers de langage.
Mais, néanmoins, ces demi-groupes de langage ne m’ont pas permis de différencier suffisamment mes enseignements, c’est-à-dire de cibler plus précisément les compétences lexicales et syntaxiques que je souhaitais travailler avec mes élèves. A cet égard, je distinguerais trois catégories d’élèves :
• la première est constituée par une moitié de classe extrêmement à l’aise avec le langage oral et pour laquelle cette formule reste à mon sens tout à fait pertinente : il s’agit en effet d’élèves qui sont à la fois à l’aise sur le plan relationnel, qui n’hésitent pas à prendre la parole devant les autres et qui font, en même temps, preuve d’un très bon niveau de langue. Avec eux, j’ai ainsi commencé des ateliers de philosophie, pour lesquels il est conseillé de ne pas fonctionner avec un groupe trop réduit afin de créer une dynamique de réflexion. Je n’ai néanmoins pas assez de recul sur cette pratique pour en faire part dans le cadre de cette étude.
• la deuxième est constituée par six des sept PS de ma classe, lesquels ont un très bon niveau de langue, tant sur le plan syntaxique que lexical et qui, pour la plupart, et de plus en plus depuis le début de l’année, osent prendre la parole en grand groupe. Avec eux, un travail spécifique et plus ciblé me semble pour autant pertinent pour consolider ces acquis et entériner les bonnes pratiques.
• la troisième, enfin, est constituée par des élèves de MS (six) et un élève de PS qui ont des difficultés avec la langue orale : certains n’osent pas ou peu prendre la parole malgré un niveau tout à fait bon, d’autres ont des difficultés importantes de prononciation et deux autres s’expriment enfin de manière encore tropsommaire. C’est avec eux que des ateliers en groupe encore plus restreint, avec des compétences très ciblées, me semblent prioritaires.
En fin de quatrième période, je suis donc parvenue à la formule suivante : un groupe de langage en demie-classe avec la première catégorie d’élèves, dans le coin-regroupement, avec les chaises disposées au centre ; et deux groupes de quart de classe avec les élèves de deux autres catégories, installés, quant à eux, sur l’une des tables de la classe. Le fait d’être finalement installés à une table de la classe lève les ambiguïtés qui déstabilisaient les élèves les plus fragiles et permet, en outre, de mieux utiliser les jeux. J’ai ainsi tenté de construire de véritables séances de langue – je n’ai pas encore pu développer de séquence sur le temps long – visant un objectif lexical ou syntaxique précis et non pas la seule participation orale des élèves. Mon objectif n’est plus tant de faire intervenir les élèves sur un sujet ou un autre, mais bien de construire avec eux les compétences langagières qui leur font encore défaut.
Ces ateliers de langage m’ont ainsi permis d’approfondir ma réflexion sur les possibilités de différencier les apprentissages, et m’ont également permis de tester un fonctionnement qui, s’il n’a pas seulement fait preuve de résultats satisfaisants, a finalement abouti à une formule équilibrée, d’avantage en mesure de donner à chaque élève l’attention spécifique dont il a besoin pour progresser.
En parallèle de cette réflexion sur les activités de langue en groupes plus ou moins restreints, et toujours avec, entre autres, cette volonté de différencier les apprentissages, j’ai proposé dans ma classe, dès la fin de la première période, des activités autonomes inspirés par la pédagogue Maria Montessori. L’analyse de ce dispositif fait l’objet de la troisième et dernière partie de cette étude.

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Table des matières

Première partie : Les apprentissages conduits de manière collective
A. Définition et raisons du choix
B. Fonctionnement effectif
a) Les rituels collectifs
i. Les rituels relevant du sous-domaine « Approcher les quantités et les nombres »
ii. Les rituels relevant du domaine « Découvrir l’écrit »
b) La lecture en réseau
i. Un même personnage principal : le loup
ii. Tromboline et Foulbazar
iii. Les livres à compter
C. Points forts et limites
a) Les points forts
b) Les limites
Deuxième partie : Les ateliers de langage conduits en demi-groupes
A. Définition et raisons du choix
B. Fonctionnement effectif
a) Les activités de langage en lien avec un réseau de lecture : le loup
b) Ecrire l’histoire d’un album sans texte : Le voleur de poule
C. Points forts et limites
a) Les points forts
b) Les limites
Troisième partie : Les ateliers autonomes
A. Définition et raisons du choix
B. Fonctionnement effectif
C. Points forts et limites
a) Les points forts
b) Les limites
Conclusion
Annexes
Bibliographie

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