Les risques de pollution maritime accidentelle au large des côtes françaises

La France métropolitaine, largement bordée par la mer, comprend trois façades maritimes (Manche – mer du Nord, Atlantique et Méditerranée). Les 5 500 km de littoral se répartissent sur 883 communes (785 en bord de mer ou d’océan et 98 sur les estuaires en aval de la limite transversale de la mer) et 26 départements littoraux . De nombreuses activités s’y développent (transport de marchandises, transport de passagers, pêche, conchyliculture, tourisme, etc.), entraînant une forte dépendance économique des départements littoraux vis-à-vis du littoral.

Ces façades maritimes sont le théâtre d’un trafic maritime très dense, particulièrement en Manche – mer du Nord, à l’origine de nombreuses pollutions maritimes depuis les années 1960, parmi lesquelles le Torrey Canyon (1967, 119000 tonnes), l’Amoco Cadiz (1978, 227 000 tonnes), l’Erika (1999, 31 000 tonnes,), le Prestige (2002, 77 000 tonnes). Dans la littérature consacrée à la pollution du milieu marin, il est souvent question de pollution marine. L’adjectif maritime est préféré dans cette étude, considérant que marine englobe ce qui vient de la mer ou est produit par elle, tandis que maritime est relatif à l’activité humaine en mer. Ainsi, les pollutions causées par le transport maritime sont qualifiées de pollutions maritimes, les pollutions marines recouvrant des pollutions générées par la mer elle-même. À titre d’exemple, certains arrivages réguliers de boulettes d’hydrocarbures, observés sur des plages californiennes, sont à classer dans la catégorie des pollutions marines. Elles sont, en effet, « issues de suintements sous-marins naturels » provenant des failles nombreuses au large de ces côtes. Notre étude est centrée uniquement sur l’analyse des pollutions maritimes issues du transport maritime. Par ailleurs, seules les pollutions accidentelles seront traitées. Les pollutions volontaires causées par des rejets opérationnels ne sont mentionnées que dans la perspective des contraintes de nettoyage qui peuvent en résulter.

En 1967, la pollution issue du naufrage du Torrey Canyon atteint les côtes bretonnes et provoque une prise de conscience au sein de l’opinion publique et des autorités. L’État structure alors progressivement, au fil des retours d’expérience des pollutions successives, une organisation pour répondre à ce risque, centrée autour d’un plan de secours spécialisé, le plan POLMAR (POLlution MARitime). Il permet la préparation, la mobilisation et la coordination des moyens de lutte contre tous types de pollution maritime (hydrocarbures et chimiques). La réglementation scinde le plan POLMAR en deux dispositifs distincts :
➤ Le plan POLMAR Mer : la gestion des opérations de lutte anti-pollution en mer est confiée aux préfets maritimes, dépositaires de l’autorité de l’État en mer.
NB : Les enseignements tirés de l’Erika ont ajouté un volet supplémentaire à la réponse en mer au travers de la procédure d’accueil des navires en difficulté, également du ressort du préfet maritime.
➤ Le plan POLMAR Terre : l’organisation de la lutte à terre est du ressort du préfet de département. Le plan POLMAR Terre n’est déclenché qu’en cas de pollution d’ampleur exceptionnelle ; pour les pollutions de moindre ampleur, la conduite des opérations de lutte revient au maire.

Il n’existe pas de plan POLMAR national. Seule la réglementation dépend de l’échelon central. Chaque préfecture et chaque préfecture maritime dispose de son propre plan POLMAR et, est responsable de la préparation et de l’organisation de la lutte dans sa zone de compétence. Afin d’améliorer la coordination des opérations de lutte en mer, les autorités françaises signent avec les États limitrophes des accords de coopération (accord de Bonn et accord RAMOGE) qui se traduisent par la création de plans d’intervention communs (carte 2) :
● le Manche Plan, signé le 15 mai 1978 avec le Royaume-Uni ;
● le Biscaye Plan, signé le 25 novembre 1999 avec l’Espagne pour la côte atlantique ;
● le Lion Plan, signé le 22 juillet 2002 avec l’Espagne pour la côte méditerranéenne ;
● le plan RAMOGEPOL , signé le 11 janvier 2005, avec Monaco et l’Italie, à partir de l’accord RAMOGE du 10 mai 1976.

Depuis les années 1960, la réponse française aux risques de pollution maritime accidentelle est influencée par quatre types de facteurs : l’évolution des risques, l’évolution du rôle des acteurs en présence, les enseignements tirés de modèles étrangers et la gestion globale de la sécurité civile en France. L’objectif de cette étude est de comprendre comment et pourquoi la réponse française aux pollutions maritimes accidentelles a évolué depuis les années 1960. Quels facteurs ont influé sur la politique de préparation et de gestion menée par les autorités françaises ? La réponse française est-elle, et fut-elle depuis les années 1960, capable de gérer une pollution marine accidentelle ? Cette réponse est-elle, et fut-elle, adaptée aux risques présents sur les façades maritimes françaises ? Quels sont les risques précisément présents au large des côtes françaises ? D’autres pays ont opté pour des réponses différentes de celle de la France. Quels en sont les avantages et les inconvénients ? Certains modèles étrangers peuvent-ils enrichir la réponse française et vice versa ? Les années 2000 sont aussi le théâtre de mutations réglementaires qui ne sont pas sans conséquence sur l’organisation POLMAR : loi du 13 août 2004 de modernisation de la sécurité civile, mise en place des Plans Communaux de Sauvegarde (Infra POLMAR), émergence de nouveaux acteurs. La partie opérationnelle de cette étude a permis d’analyser ces changements et de conduire quelques expériences pilotes, notamment en matière de programmes Interreg et de plans Infra POLMAR.

En raison du principe de libre circulation en mer, un État n’est jamais totalement souverain sur les mers qui bordent son territoire. En matière de prévention, l’État doit principalement se conformer aux exigences et règlements internationaux. Il peut seulement renforcer les mesures de prévention aux abords de ses côtes. Il est, en revanche garant de la préparation et de la conduite des opérations de lutte. Les mesures de prévention regroupent tout ce qui est mis en œuvre en amont pour limiter la fréquence des accidents. Les mesures de protection comprennent, quant à elles, tout ce qui est prévu pour limiter la gravité de l’accident une fois celui-ci survenu. Il s’agit donc dans le premier cas d’agir sur les causes, dans le second sur les conséquences d’un accident. La prévention est donc essentielle, tout particulièrement en matière de sécurité maritime mais elle ne suffit pas. Partant du principe que la meilleure prévention du monde ne permettra jamais d’écarter tout risque de pollution maritime, notre étude s’attache à analyser ce qui relève de l’État souverain à partir du moment où un navire est en difficulté et présente un risque de pollution du milieu.

LES RISQUES DE POLLUTION MARITIME ACCIDENTELLE AU LARGE DES CÔTES FRANÇAISES

La première partie de l’étude est consacrée à l’évaluation des risques de pollution maritime accidentelle au large des côtes françaises. La définition de l’aléa « pollution maritime accidentelle » se fonde sur l’étude du trafic maritime (routes maritimes, densité du trafic, nature des marchandises transportées), les conditions de navigation au large des côtes françaises et la constitution d’une base de données géoréférencées sur les pollutions maritimes accidentelles survenues au large des côtes de France métropolitaine depuis les années 1960. Le degré de vulnérabilité des départements, ou somme des enjeux potentiellement affectés par l’aléa, est ensuite calculée à partir de caractéristiques physiques, écologiques, économiques et humaines des littoraux . La pondération de l’aléa et de la vulnérabilité permet d’aboutir à un zonage précis des secteurs où l’aléa est maximal, des départements où la vulnérabilité est la plus forte, et, résultat du produit aléa/vulnérabilité, des départements où le risque est le plus élevé .

LA GESTION DES POLLUTIONS MARITIMES EN FRANCE DU TORREY CANYON AU PRESTIGE (1967 – 2002)

L’évolution de l’organisation POLMAR au fil des pollutions maritimes et de leurs enseignements, du Torrey Canyon au Prestige, fait l’objet de la deuxième partie. Comment la réponse des autorités françaises se structure-t-elle ? Parvient-elle à capitaliser l’expérience acquise ou recommence-t-elle de presque zéro à chaque fois ? Du Torrey Canyon en 1967 à la veille de l’Erika en 1999, le plan POLMAR se met en place et développe son envergure et ses prérogatives . Alors qu’on la croyait viable et opérationnelle, l’organisation POLMAR montre ses limites et est mise à rude épreuve au cours des années 1999-2002, successivement par l’Erika, une refonte majeure de la réglementation, de nombreuses petites pollutions et le Prestige .

ÉVOLUTIONS DE LA GESTION DES POLLUTIONS MARITIMES DEPUIS L’ERIKA 

Le grand chambardement des années 1999-2002 entraîne de profondes mutations du système POLMAR. Tout un arsenal réglementaire est développé tant aux niveaux français, européen qu’international en vue d’améliorer la prévention, la préparation et la gestion des pollutions maritimes. Des réformes plus globales de l’État français (loi de modernisation de la sécurité civile et décentralisation) amplifient encore les changements . L’analyse du fonctionnement et des dysfonctionnements actuels du réseau d’acteurs de l’organisation POLMAR permet d’établir un état des lieux des forces et faiblesses du modèle français . Enfin, ils est possible de dessiner les perspectives d’évolution du plan POLMAR par l’analyse des changements en cours, la comparaison et les potentiels échanges de bonnes pratiques avec l’organisation développée dans d’autres pays, le Royaume-Uni et l’Alaska en particulier, et la proposition de pistes d’améliorations .

LES RISQUES DE POLLUTION MARITIME ACCIDENTELLE AU LARGE DES CÔTES FRANÇAISES

L’ALÉA « POLLUTION MARITIME ACCIDENTELLE » AU LARGE DES CÔTES FRANÇAISES

Les Nations Unies (International Strategy for Disaster Reduction) ont défini les principaux termes relatifs aux risques et aux crises. L’aléa y est présenté comme un « événement matériel, phénomène physique et/ou activité humaine potentiellement destructif susceptible de faire des morts et des blessés, d’endommager des biens et des propriétés, de provoquer une rupture de la vie sociale et économique, et d’entraîner une dégradation de l’environnement » (UNISDR, 2003). L’aléa « pollution maritime accidentelle » est donc l’ensemble des causes pouvant conduire au déversement accidentel en mer de combustible et/ou de marchandises, dangereuses ou non, déversement qui constitue une menace pour les populations riveraines, l’environnement et les activités économiques. La probabilité de l’aléa « pollution maritime accidentelle » est calculée à partir de toutes les causes pouvant conduire à la survenue du phénomène. Cependant, en raison de leur complexité, il est impossible de caractériser avec précision l’ensemble des paramètres définissant cet aléa, les facteurs spnt trop nombreux et les données nécessaires n’existent pas toujours. Par conséquent, les critères pour lesquels des données sont disponibles seront évaluées ici en distinguant deux types de facteurs pouvant conduire à l’aléa « pollution maritime accidentelle » (Robin, 2002) : les facteurs naturels (vents, courants, état de la mer, etc.) et les facteurs anthropiques (routes maritimes, densité du trafic, types de navires, etc.). L’aléa se caractérise à la fois par la probabilité d’occurrence du phénomène, son intensité, mais aussi la durée considérée et l’espace pris en compte (Dauphiné, 2003). Afin de caractériser l’aléa « pollution maritime accidentelle » au large des côtes françaises, notre analyse portera sur quelques facteurs significatifs et pour lesquels des statistiques existent, et ce au travers de trois axes principaux :
● l’étude du trafic maritime (routes maritimes, densité du trafic, nature des marchandises transportées)
● les conditions de navigation au large des côtes françaises
● l’analyse des pollutions maritimes accidentelles survenues au large des côtes de France métropolitaine depuis les années 1960.

LE TRAFIC MARITIME

Le trafic maritime ne cesse de croître, passant de 2,5 milliards de tonnes chargées en 1970 à 7,1 milliards de tonnes en 2005 (CNUCED, 2007), pour représenter aujourd’hui 90 % des échanges mondiaux. Cet essor tient principalement au coût faible et décroissant de ce mode de transport par rapport aux autres.

Les routes maritimes et la densité du trafic
L’intensification des flux maritimes due à la globalisation des échanges, l’essor économique de nouveaux pays comme la Chine, l’Inde ou le Brésil et l’explosion du transport de marchandises sèches engendrent de nombreuses routes maritimes. Celles-ci se concentrent en certains endroits du globe, véritables goulets d’étranglement : détroits de Malacca, de Singapour, d’Hormuz et de Gibraltar, canaux de Suez et de Panama, mer Méditerranée, Manche et mer du Nord. Les côtes françaises sont ainsi cernées par deux aires à très forte densité de trafic maritime : la Manche – mer du Nord et la Méditerranée. Cependant, l’évaluation du trafic maritime ne connaît pas la même précision d’une façade maritime à l’autre. En Manche – mer du Nord, la quantification du trafic est précise en raison de l’obligation internationale de signaler les marchandises dangereuses lors de leur passage dans les dispositifs de séparation du trafic (DST). Sur la façade atlantique, le trafic est très lié à celui de la Manche – mer du Nord mais les connaissances spécifiques sur cet espace sont quasi inexistantes. En Méditerranée, il n’y a pas de suivi global des flux maritimes, mais plusieurs études ponctuelles très détaillées permettent de disposer d’une bonne vue d’ensemble, en particulier sur la Méditerranée occidentale, celle conduite par SCOT en 2004 pour le compte du ministère de l’Équipement, des Transports, du Logement, du Tourisme et de la Mer. L’imagerie satellite et radar ouvre, cependant, de nouvelles perspectives en matière de détection des navires. C’est le cas notamment du satellite ENVISAT et de son application ASAR (Advanced Synthetic-Aperture Radar) qui fournit en continu, de jour comme de nuit, par tous temps, une imagerie radar haute résolution. Ses applications sont nombreuses, par exemple pour détecter le trafic maritime et surveiller le déplacement des pollutions en mer. Les cartographies réalisées dessinent les grandes voies de navigation et matérialisent la densité du trafic au large des côtes européennes .

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Table des matières

Introduction
PREMIÈRE PARTIE : LES RISQUES DE POLLUTION MARITIME ACCIDENTELLE AU LARGE DES CÔTES FRANÇAISES
Chapitre 1 : L’aléa « Pollution maritime accidentelle » au large des côtes françaises
Chapitre 2 : La vulnérabilité des côtes françaises
Chapitre 3 : Le risque de pollution maritime accidentelle au large des côtes françaises
DEUXIÈME PARTIE : LA GESTION DES POLLUTIONS MARITIMES EN FRANCE DU TORREY CANYON AU PRESTIGE (1967 – 2002)
Chapitre 4 : Du Torrey Canyon à la veille de l’Erika : mise en place du plan POLMAR
Chapitre 5 : 1999-2002 : un plan POLMAR mis à rude épreuve
TROISIÈME PARTIE : ÉVOLUTIONS DE LA GESTION DES POLLUTIONS MARITIMES DEPUIS L’ERIKA
Chapitre 6 : Évolutions réglementaires aux niveaux français et européen depuis l’Erika
Chapitre 7 : Fonctionnement et dysfonctionnements du plan POLMAR
Chapitre 8 : Bilan et perspectives
Conclusion générale
Bibliographie
Table des matières
Table des cartes
Tables des figures
Table des sigles
Annexes

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