Les récepteurs nicotiques à l’acétylcholine (nAChRs) : une cible thérapeutique
Les récepteurs nicotiniques à l’acétylcholine (nAChRs) ont été les premiers récepteurs transmembranaires qui furent isolés et identifiés chimiquement. Les nAChRs sont des cibles thérapeutiques capitales pour de nombreux médicaments et sont impliqués dans de nombreuses maladies telles que les maladies d’Alzheimer et de Parkinson, la schizophrénie, l’anxiété, la dépression et les addictions. De récentes avancées sur la connaissance de la structure et des transitions allostériques des nAChRs induites par la fixation du ligand endogène, l’acétylcholine, ont été rapportées dans la littérature. Cependant la maîtrise de la pharmacologie et de la modulation de l’activité de cette cible thérapeutique requiert une meilleure compréhension de la dynamique de ses changements conformationnels à l’échelle atomique. En effet, bien que les informations biochimiques et électrophysiologiques sur les nAChRs soient abondantes, un manque de données structurales sur ce récepteur persiste encore. Cette carence de données provient de la difficulté à cristalliser ces protéines transmembranaires et d’obtenir des clichés radiocristallographiques nécessaires à l’acquisition d’informations à l’échelle moléculaire.
Structure des nAChRs
Les nAChRs sont des glycoprotéines transmembranaires comprenant cinq sous-unités identiques ou homologues d’environ 300 kDa arrangées pseudosymétriquement autour d’un canal ionique. Chez les mammifères, il existe différents sous-types de nAChRs qui diffèrent par leur composition en sous-unités (α, β, γ, δ et ε) et dont l’expression est elle-même dépendante leur localisation tissulaire. Ainsi, 9 sous-unités α et 3 sous-unités β sont exprimées dans le système nerveux central. Leurs structures moléculaires analysées par microscopie électronique sont décrites comme des cylindres transmembranaires de ~8 nm de diamètre et de 16 nm de longueur et sous la forme de rosette comprenant cinq sous-unités organisées autour d’un axe symétrique perpendiculaire au plan de la membrane .
Les structures tridimensionnelles (3D) des nAChRs et de leurs homologues sont relativement bien caractérisées et l’analyse des séquences des protéines révèle un schéma général pour chaque sous-unité qui consiste en (i) un domaine extracellulaire (EC) globulaire N-terminal ressemblant topologiquement à l’immunoglobuline, (ii) un domaine transmembranaire (TM) constitué d’un faisceau de quatre hélices α transmembranaires (M1 à M4) constituant le canal ionique et (iii) un domaine cytoplasmique, inséré entre M3 et M4, contribuant à l’ancrage des nAChRs dans la membrane postsynaptique et modulant l’activité du canal. Les structures complètes des nAChRs ont été dans un premier temps établies à l’aide des études structurales de leurs composants: (i) La structure aux rayons X à 1,76 Å du domaine EC a été d’abord résolue pour l’ACh binding Protein (AChBP), un homologue pentamérique soluble du domaine EC du nAChR, initialement cloné à partir d’escargots invertébrés ; (ii) la structure cristalline à 1,94 Å de résolution d’une sous-unité α-1 du domaine EC issue de souris a révélé la présence d’une molécule d’eau dans le sandwich β et d’une chaîne glucidique N-liée dans le domaine EC; et (iii) des données obtenues par microscopie électronique à 4 Å de résolution basé sur des membranes riches en récepteurs issues de l’organe électrique du poisson Torpedo ont permettent de visualiser les nAChRs en 2D .
De plus, des expériences de marquage d’affinité et de mutagenèse dirigée menées avec divers nAChRs et des récepteurs homologues ont montré que (i) les sites de fixation de ACh sont situés à l’interface des deux sous-unités dans le domaine EC, (ii) les segments M2 du domaine TM bordent le canal ionique et (iii) les éléments de liaison impliqués lors de la régulation de l’ouverture du canal se partagent entre les deux domaines à l’interface des domaines EC-TM. Récemment, l’utilisation du cryo-microscopie électronique nous permet d’étudier la structure en haute résolution des nAChRs de type musculaire. Le récepteur a été stabilisé en l’état fermé par la fixation de l’α-bungarotoxine. La structure révèle que la fixation d’une molécule de toxine à chacune des deux interfaces de sous-unités bloque la fixation de l’acétylcholine. La structure fournit un modèle pour comprendre le déclenchement de canaux activé par des ligands et comment des mutations dans nAChRs provoquent des syndromes myasthéniques congénitaux.
Les structures complètes de pLGICs ont été obtenues avec une résolution atomique grâce à deux homologues procaryotes des nAChRs issus de Gloeobacter violaceus (GLIC) (Figure 2), d’Erwinia chrysanthemi (ELIC) et avec trois récepteurs eucaryotes: GluCl de Caenorhabditis elegans, le récepteur 5- HT3 de la souris et le récepteur GABA chez l’Homme. Généralement, les structures cristallographiques disponibles des procaryotes et des eucaryotes des pLGICs révèlent une similitude frappante de la structure 3D des nAChRs avec ses récepteurs homologues.
Les derniers structures obtenus des homologues des nAChRs nous permettent de mieux comprendre le mécanisme d’ouverture-fermeture du canal ionique pentamérique. Tout d’abord, les structures cristallographiques de l’AChBP qui représentent la partie extracellulaire de la protéine donnent une image partielle, et figée du domaine EC des nAChRs sous forme ouverte, compliquant de fait le développement rationnel de molécules bioactives. Si les récepteurs ELIC et GluCl ont été obtenus dans un seul état, respectivement fermé et ouvert, le récepteur GLIC a lui pu être obtenu dans un état ouvert actif, puis dans deux états complémentaires, localement fermé et fermé par l’équipe de Dr Pierre Jean Corringer. Ceci fait de GLIC un modèle de choix pour la compréhension des transitions allostériques de la famille des récepteurs canaux pentamériques, car ces trois structures cristallographiques de GLIC ont permis de donner un regard nouveau sur les mouvements de transitions entre ces différents états.
Transition allostérique: vers la compréhension de mécanisme d’ouverte fermeture du canal ionique
Sur la base du modèle de Monod-Wyman-Changeux (MWC), la réponse fonctionnelle du nAChRs a été interprétée comme une séquence entre quelques états conformationnels globaux et discrets induits par la fixation de l’agoniste (Figure 3). En associant des études de stimulations de dynamique moléculaire avec des structures à haute résolution de pLGIC, ces approches ont permis d’établir une nouvelle dimension temporelle et ont mis en lumière les événements liant la liaison du neurotransmetteur à l’ouverture du canal ionique à une distance de 60 Å. Grâce à ces données, le mécanisme de déclenchement a été illustré avec précision. Il est initié par une isomérisation conformationnelle progressive, qui commence au niveau de site de fixation orthostérique (boucles A, B et C), se propage à l’interface des domaines EC et TM (boucle β1-β2 et boucle Cys) via un réarrangement de la partie extracellulaire en sandwich β et descend ensuite vers les hélices transmembranaires (d’abord M2, puis M4 et M3) pour finalement ouvrir le pore .
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Table des matières
CHAPITRE I INTRODUCTION
1 Les récepteurs nicotiques à l’acétylcholine (nAChRs) : une cible thérapeutique
1.1 Structure des nAChRs
1.2 Transition allostérique: vers la compréhension de mécanisme d’ouverte-fermeture du canal ionique
2 Optopharmacologie : contrôle optique des récepteurs ionotropiques et allostériques par la lumière
2.1 Optopharmacologie chimique
2.2 Optopharmacologie et les nAChRs
3 Molécules photoisomérisables
4 Projet de thèse
4.1 Contexte de recherche
4.2 Projet de recherche
CHAPITRE II IODATION D’AZOBENZENES
1 Iodation par substitution électrophile aromatique
1.1 Approche historique : iodation avec I2
1.2 Iodation oxydante
1.3 Iodations activées par les métaux de transition
1.4 Iodation sans additif en présence de HFIP
2 Iodation par activation C-H
2.1 Iodation par activation C-H pallado-catalysée
2.2 Activation C-H catalysée par les autres métaux de transition
3 Résultats et discussion
3.1 Iodation d’azobenzènes par activation C-H
3.2 Iodation d’azobenzènes par substitution électrophile aromatique en présence de HFIP
4 Conclusions
CHAPITRE III CONCEPTION D’AZOBENZENES THIOGLYCOSYLES
1 Introduction d’oligosides : amélioration de l’hydrosolubilité d’azobenzène
1.1 Stratégie d’amélioration de l’hydro solubilité
1.2 Exemples d’azobenzènes couplés à des oligosides
2 Réaction de thioglycosylation de CSp2
3 Résultats
3.1 Synthèse d’azobenzènes thioglycosylés
3.2 Caractérisations et analyses des azobenzènes thioglycosylés
4 Conclusion et perspectives
CHAPITRE IV CONCLUSION