La cinématique de l’articulation fémoro-tibiale
Les condyles fémoraux forment deux saillies convexes dans les 2 sens allongées d’avant en arrière. Le rayon de courbure des condyles croit régulièrement d’arrière en avant, passant de 17 à 38 mm pour le condyle interne et de 12 à 60 mm pour le condyle externe [89]. A partir d’un certain point, les rayons de courbure suivent une deuxième spirale adossée à la première : il s’agit de la trochlée fémorale.
Les centres de courbure (figure 6) : chaque segment de la courbure condylienne peut être considéré comme faisant partie d’un cercle et le centre de celui-ci est le centre de courbure de cette portion. Si l’on applique cette notion à l’ensemble du condyle et pour des segments très petits, on obtient une multitude de points disposés selon une spirale : la courbe évolutive de Fick. Frain considérant que le contour condylien interne est une spirale logarithmique centrée sur le point d’insertion (IF) du ligament latéral interne (LLI), peut déterminer cette évolution mathématiquement [90, 91].
Les centres instantanés de rotation (CIR) : ors d’un mouvement associant rotation et translation, le mouvement peut être décomposé en rotation autour de centres variables. Ainsi tout mouvement complexe d’un corps par rapport à un autre dans un plan fixe peut en cinématique plane, être décomposé en une succession de rotations de centres variables. Le mouvement peut alors être caractérisé par les centres instantanés de rotation : centres autour desquels tourne le corps considéré pour passer d’une position à la suivante (figure 7) [91].
La notion de roulement et de glissement : lors de la flexion du fémur sur le tibia, les condyles présentent un mouvement complexe de roulement et glissement. Le condyle se déplaçant sur le tibia, la flexion commence par un glissement, puis apparaît progressivement le roulement pour atteindre 50% de l’un et de l’autre entre 60° et 90°. A la fin de la flexion, on voit que le roulement diminue pour terminer par le glissement : cette courbure est régulière et ne s’accompagne d’aucune contrainte [90].
La stabilité et la statique du genou
Maquet a montré qu’en position debout, en appui monopodal, il y avait une distribution égale de la pression sur les surfaces portantes articulaires et que le genou en charge d’un sujet de 58,7 Kg supporte une charge de 126,82 Kg soit à peu près deux fois le poids du corps. En ce qui concerne la stabilité et la statique du genou, il est intéressant de l’étudier dans les trois plans de l’espace, frontal, sagittal et horizontal [79].
Le plan frontal
L’articulation fémoro-tibial : différents auteurs ont tenté d’établir les normes des axes mécaniques et anatomiques du membre inférieur. Séparant ainsi de grandes familles : genou normoaxé, genu varum et genu valgum. Cette notion d’axe est fondamentale car elle permet le calcul des forces qui s’exercent sur l’articulation, une prévision lors de la réalisation d’une ostéotomie et un positionnement des prothèses totales ou prothèses unicompartimentales. Pour apprécier ces axes et les mesurer, il est possible de les tracer sur une radiographie en charge (figure 11) :
la ligne gravitaire : elle est assimilée à la ligne droite, joignant le centre S2 au milieu de la mortaise tibio-fibulaire ;
l’axe mécanique du membre inférieur : il est défini par la droite joignant le centre de la tête fémorale et le centre de la mortaise tibio-péronière ;
l’axe mécanique fémoral : c’est la droite joignant le centre de la tête fémoral et le point projeté du centre de l’échancrure intercondylienne sur la ligne tangente aux condyles fémoraux ;
l’axe mécanique tibial : c’est la droite joignant le centre du sommet des épines tibiales et le centre de la mortaise tibiofibulaire.
A partir de ces différents axes ainsi tracés, on peut mesurer :
– l’angle fémoro-tibial mécanique : c’est l’angle entre l’axe mécanique fémoral et l’axe mécanique tibial. Nous le mesurons en dehors et sa valeur moyenne est de 180,8°±2° ;
– l’angle fémoral mécanique : c’est l’angle entre l’axe mécanique du fémur et la ligne tangente aux condyles fémoraux. Nous le mesurons en dehors et sa valeur moyenne est de 92,4°±2° ;
– l’angle tibial mécanique : c’est l’angle entre l’axe mécanique tibial et la ligne tangente aux plateaux tibiaux. Nous la mesurons en dehors et sa valeur moyenne est 92,4°±2° ;
– l’axe épiphysaire tibial proximal : il est indépendant des surfaces articulaires, il s’agit de l’axe joignant le milieu du sommet des épines tibiales au milieu de la métaphyse proximale du tibia;
– les écarts varisants : c’est l’écart entre le centre du genou et la ligne gravitaire ;
– l’écart varisant intrinsèque (EVI) : c’est la distance mesurée en millimètres entre l’axe mécanique du membre inférieur et le centre du genou (lorsque le membre inférieur est normoaxé l’écart varisant intrinsèque est nul et il passe en dedans lorsque le membre inférieur est en varus) ;
– l’écart varisant extrinsèque (EVE) : c’est la distance mesurée en millimètres entre la ligne gravitaire et l’axe mécanique du membre inférieur ;
– et l’écart varisant global (EVG) : c’est la distance mesurée en millimètres entre la ligne gravitaire et le centre du genou.
L’articulation fémoro-patellaire (figure 12) [90] : la résultante du poids du corps passe en dedans du centre articulaire du genou du membre inférieur en appui. Au niveau du quadriceps, du fait de l’existence de l’angle (Q) entre le tendon quadricipital et le ligament patellaire, la décomposition des forces se fait de la manière suivante : la résultante (FQ) du quadriceps se décompose en une force d’extension verticale et une force de subluxation rotulienne externe (FR). Au niveau du ligament patellaire, la résultante (FT) se décompose en une force (FCE) coaptrice du compartiment fémoro-tibial externe et une composante horizontale (RIT) de direction interne. La force (FR) qui comprime la patella contre la facette externe de la trochlée est compensée par les éléments musculo-capsulo-ligamentaires internes. Cette force augmente lorsqu’il existe un valgus et lorsque la tubérosité tibiale antérieure est déplacée en dehors [54].
Le plan sagittal
La pente tibiale : les plateaux tibiaux sont inclinés vers l’arrière selon une pente estimée à 10°±3° en prenant l’axe anatomique comme référence (figure 13).
La stabilité antéro-postérieure
Les obstacles à la translation tibiale antérieure : le LCA est le principal obstacle au tiroir antérieur puisqu’il représente 87% de la résistance à 30° de flexion et 85% à 90° de flexion.
Plusieurs autres éléments vont contrôler la translation antérieure du tibia essentiellement la corne postérieure du ménisque interne, la coque condylienne interne [9]. Mais la section d’éléments périphériques n’entraine pas d’augmentation de la translation antérieure tant que le LCA est intact.
Les obstacles à la translation tibiale postérieure : le LCP est le premier obstacle à la translation tibiale postérieure et sa section est une condition nécessaire et suffisante pour observer un accroissement de celle-ci. Là encore, la section d’éléments périphériques n’entraine pas d’augmentation de la translation postérieure tant que le LCP est intact.
Les contraintes fémoro-patellaires : la résultante R5 qui plaque la patella contre le fémur est la résultante de la force de traction du quadriceps sur la patella (FQ) et de la force exercée par le ligament patellaire sur le tibia (FR). Cette résultante tend à plaquer la patella sur la trochlée avec une pression d’autant plus importante que la flexion augmente. Elle doit être orientée perpendiculairement aux surfaces articulaires portantes et passer par le centre de courbure de ces surfaces articulaires (celui-ci correspond au centre cinématique de l’articulation fémoropatellaire) ce qui permet de déterminer le moment des forces (figure 14).
Le plan horizontal
Au niveau de la fémoro-tibiale [8,54] : la rotation interne dans le genou au cours de la flexion en appui monopodal est freinée par le pivot central alors que ce sont les formations périphériques (PAPI – PAPE) qui freinent la rotation externe.
Au niveau de la fémoro-patellaire : il existe une résultante des forces qui a tendance à plaquer la patella contre la trochlée. Du fait de l’angle Q, la force quadricipitale peut se décomposer en deux (figure 15) :la force RIT qui provoque une rotation interne tibiale ;la force FR qui plaque le versant externe de la patella contre la berge externe de la trochlée, force subluxante externe de la rotule. FR et RIT sont de sens opposé.
L’examen clinique
L’interrogatoire : il renseigne sur les plaintes du patient, ses antécédents et doit aussi apprécier son mode de vie et ses attentes. La douleur survenant ou exacerbée à l’effort, surtout à la marche, à la montée ou à la descente des escaliers est de type mécanique. Mais parfois les douleurs surviennent dans les changements de position, voire la nuit ou au repos. L’instabilité est habituelle à la marche, dans les escaliers, mais aussi pour s’asseoir ou se lever d’un siège. Les antécédents doivent être recherchés : les antécédents locaux tels des infiltrations locales de cortisone, une viscosupplémentation, des interventions antérieures en précisant l’état cutané cicatriciel et les suites éventuellement compliquées (infection, phlébite, algodystrophie, etc.) ; les antécédents généraux : une attention particulière doit être accordée à la prise régulière de traitements en rapport avec une maladie générale (cardiovasculaire, diabète, génito-urinaire , rhumatismale etc.), mais aussi de traitement immunosuppresseur quelle que soit la raison de leur prescription.
L’examen physique : il doit analyser particulièrement : la marche à la recherche d’une boiterie ou d’une instabilité ; le morphotype des membres inférieurs chez un patient couché et debout (genou normoaxé, genu varum ou genu valgum) ; l’état cutané (les cicatrices préexistantes ainsi que l’état cutané au voisinage des cicatrices). La palpation pour rechercher une douleur localisée ou un épanchement ; la mobilité du genou : la flexion, l’extension ou l’existence flexum chronique ou d’un déficit d’extension ; la laxité (en varus, en valgus ou en tiroir) qui est recherchée sur un genou à 0° et à 20° de flexion ; l’état musculaire ; la circulation artérielle et veineuse des membres inférieurs ; les hanches et les pieds; la corpulence: pour desceller une obésité qui est fréquente dans les gonarthroses. Elle est quantifiable par la détermination de l’indice de masse corporelle (IMC=Poids/Taille2).
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Table des matières
INTRODUCTION
I. ANATOMIE ET BIOMECANIQUE DU GENOU
1. L’anatomie descriptive
1.1. Les surfaces articulaires
1.2. Les moyens d’union
1.3. Les moyens de glissement
1.4. Les vaisseaux et les nerfs
2. L’anatomie fonctionnelle du genou
2.1. La cinématique de l’articulation fémoro-tibiale
2.2. La cinématique de l’articulation fémoro-patellaire
2.3. Les éléments capsulo-ligamentaires
3. La biomécanique du genou
3.1. La stabilité et la statique du genou
3.1.1. Le plan frontal
3.1.2. Le plan sagittal
3.1.3. Le plan horizontal
3.2. L’équilibre musculaire
3.2.1. Le quadriceps
3.2.2. Les ischiojambiers
3.2.3. Les co-contractions
3.3. L’utilisation du genou lors de la marche
3.3.1. Dans le plan sagittal
3.3.2. Dans le plan frontal
II. PROTHESES TOTALES TRICOMPARTIMENTAIRES
1. Les types et les dessins
1.1. Selon la configuration du plateau tibial
1.2. Selon les types de contrainte
1.3. Selon le dessin des implants
1.4. En fonction de la fixation des implants
1.5. En fonction de la technique chirurgicale
2. Cinématique des PTG à plateau mobile postéro-stabilisées
3. Les indications et les contre-indications des PTG
3.1. Les indications
3.2. Les contre-indications
4. Le choix de la technique chirurgicale et du matériel ancillaire
5. Les résultats des PTG
5.1. L’évolution normale
5.2. Les complications
III. RAPPEL SUR LA GONARTHROSE
1. L’examen clinique
2. Les examens paracliniques
3. Le traitement médical
DEUXIEME PARTIE
I. PATIENTS ET METHODE
1. Cadre d’étude
2. Patients
2.1. Les supports utilisés
2.2. Critères d’inclusion
2.3. Critères de non inclusion
2.4. Type et période d’étude
3. Méthode
3.1. Temps opératoires
3.2. Caractéristiques de la prothèse
3.3 Les données étudiées
II. RESULTATS
1. Données épidémiologiques
2. Les données cliniques
3. Les données radiologiques
4. Les données thérapeutiques
5. Evaluation
III. DISCUSSION
1. Les données épidémiologiques
2. Les données cliniques
3. Les données radiologiques
4. Les incidents et complications
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXES
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