Les protéines membranaires (PM)

Les protéines membranaires (PM)

Description

Les protéines membranaires (PM), macromolécules situées au niveau de la membrane cellulaire, présentent une très grande diversité structurale et fonctionnelle. Comme toutes protéines, les PM sont des polymères d’acides aminés, reliés entre eux par des liaisons peptidiques. Il existe deux catégories de PM en fonction de leur localisation in vivo :
– les protéines membranaires intégrales (ou intrinsèques) qui s’insèrent dans la bicouche lipidique de la membrane. Ces protéines ont en fait des propriétés amphiphiles puisqu’elles sont constituées d’une partie hydrophobe qui vient interagir avec les chaînes aliphatiques des lipides de la membrane. Elles peuvent être complètement enchâssées dans la membrane ou posséder des domaines extra-membranaires. C’est par exemple le cas des protéines transmembranaires qui servent à la fixation de ligands, au transport de métabolites, ou à la transduction d’énergie.
– les protéines périphériques (ou extrinsèques) qui n’interagissent pas avec la partie hydrophobe de la membrane, mais avec la partie polaire des lipides de la bicouche ou d’une protéine intégrale. Elles sont impliquées en particulier dans les mécanismes d’adhésion cellulaire, de fusion et fission membranaire ou encore de signalisation cellulaire.

Les protéines membranaires intégrales auxquelles nous nous intéressons dans ce manuscrit, se différencient donc des protéines solubles par leur caractère amphiphile. La présence d’une partie hydrophobe dans leur structure les rend insolubles dans l’eau (elles se dénaturent) et impose lors de leur manipulation, d’utiliser des composés amphiphiles pour les maintenir en solution : les tensioactifs ou détergents.

Pourquoi les étudier ? 

L’intérêt pour les protéines membranaires ne cesse de grandir au fur et à mesure de la découverte de leur implication dans divers processus biologiques essentiels. On estime par exemple qu’environ 50% des médicaments mis sur le marché interagissent avec des protéines membranaires. Elles représentent à ce titre la cible thérapeutique privilégiée des médicaments de demain. Cependant, depuis les travaux sur les récepteurs couplés aux protéines G (GPCRs) [2] à la fin des années 80, qui ont valu le prix Nobel de Chimie 2012 à Robert Lefkowitz et Brian Kobilka, les progrès sur la compréhension des mécanismes de fonctionnement des protéines membranaires restent limités. L’étude fonctionnelle des protéines, qu’elles soient solubles ou membranaires, passe par la détermination de leur structure tertiaire ou quaternaire à haute résolution . Pourtant malgré leur importance, les protéines membranaires représentent moins de 2% des structures cristallographiques résolues recensées dans la Protein Data Bank (PDB). Ce chiffre est d’autant plus surprenant lorsqu’on sait que 20 à 30 % du génome code pour des protéines membranaires chez l’homme ou E. coli [3].

L’étude structurale des protéines membranaires

Il existe plusieurs techniques pour obtenir la structure des protéines : la cristallographie aux rayons X, la spectroscopie par résonance magnétique nucléaire (RMN) et la microscopie électronique avec la microscopie à force atomique (AFM) ou la cryomicroscopie.

La cristallographie aux rayons X

La détermination de la première structure 3D de protéine membranaire par cristallographie date des années 80 [4]. Depuis, cette technique est de loin celle ayant permis d’obtenir le plus grand nombre de succès en biologie structurale. Sa principale limitation réside dans la nécessité d’obtenir des cristaux de protéines de grande qualité,  Le cristal est un état solide ordonné : il est constitué d’un nombre très élevé de molécules identiques (de l’ordre de 10¹²-10¹⁵) disposées de façon répétée et périodique dans l’espace. L’interaction d’un faisceau de rayons X avec le cristal va produire un signal diffracté caractéristique de la géométrie du réseau cristallin. La position et l’intensité des rayons diffractés par le cristal est enregistrée par un détecteur sous forme de tâches de diffraction. La transformée de Fourier de l’intensité et des phases des ondes diffractées permet d’obtenir la densité électronique au sein du cristal et ainsi de construire le modèle protéique.

La RMN

L’étude structurale par RMN (résonance magnétique nucléaire) permet de convertir les propriétés magnétiques des noyaux des atomes en informations géométriques de la molécule et remonter ainsi par calcul à la structure 3D de la protéine. Il existe deux méthodologies qui se basent sur l’analyse des spins de l’hydrogène ¹H, du carbone ¹³C et de l’azote ¹⁵N pour l’analyse des protéines : la RMN en phase liquide et la RMN en phase solide. Le grand avantage de la RMN du liquide est qu’elle nécessite moins de préparation de l’échantillon que d’autres techniques de caractérisation structurale puisqu’elle utilise des protéines solubilisées et purifiées en micelles de détergent [5]. Les échantillons analysés doivent cependant être en concentration extrêmement élevée. La première structure de protéine membranaire obtenue par RMN a été déposée dans la PDB en 1997 [6]. Depuis la technique s’est développée mais reste souvent limitée aux assemblages protéine/détergent/lipide de petites tailles (<30 kDa).

La microscopie électronique

La microscopie électronique a été utilisée pour la première fois par De Rosier et Klug en 1968 pour obtenir une structure 3D d’un échantillon biologique [7]. Elle requiert l’obtention d’un grand nombre de clichés 2D de l’objet étudié sous différentes orientations. En regroupant informatiquement les images d’une même orientation, le rapport signal sur bruit est augmenté et permet d’obtenir une image 2D précise de la particule. En procédant ainsi sur toutes les orientations, il est alors possible d’obtenir une structure 3D de la protéine. La préparation des échantillons se fait généralement par congélation flash, on parle alors de cryomicroscopie. Les protéines en solution sont plongées dans l’azote liquide, l’eau du solvant est ainsi congelée sous forme de glace amorphe qui n’endommage pas la forme des protéines qu’elle contient. La structure de la bactériorhodopsine a pu être obtenue à haute résolution [8] par cette technique mais dans la plupart des cas la résolution reste moyenne (5 à 10 Å) comme par exemple pour le complexe Sec YEG [9].

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Table des matières

Introduction
1 Les protéines membranaires (PM)
1.1 Description
1.2 Pourquoi les étudier ?
1.3 L’étude structurale des protéines membranaires
1.3.1 La cristallographie aux rayons X
1.3.2 La RMN
1.3.3 La microscopie électronique
1.3.4 La microscopie à force atomique
1.3.5 La modélisation moléculaire
2 La cristallisation des protéines membranaires
2.1 De la cellule au cristal : un chemin semé d’embûches
2.1.1 La production des PM
2.1.2 La solubilisation des PM
2.1.3 La purification des PM
2.1.4 La cristallisation des PM
2.2 Les alternatives à la cristallisation in surfo
2.2.1 La cristallisation en phase cubique
2.2.2 La cristallisation en bicelles
2.3 La cristallisation in surfo
2.3.1 Influence du détergent
2.3.2 Influence des lipides
2.3.3 Voie d’optimisation n◦1 : réduire l’influence du détergent
2.3.4 Voie d’optimisation n◦2 : rationaliser la cristallisation des PM
3 Le complexe protéique RC-LH1-pufX
3.1 La photosynthèse bactérienne
3.1.1 Les bactéries photosynthétiques anoxygéniques
3.1.2 Les pigments photosynthétiques
3.1.3 La chaîne photosynthétique chez les bactéries pourpres
3.1.4 Organisation dans la membrane native
3.2 Structure du photosystème des bactéries pourpres
3.2.1 Les antennes
3.2.2 Le complexe RC-LH1 des bactéries pourpres
3.3 Le complexe RC-LH1-pufX
3.3.1 Le polypeptide pufX
3.3.2 Les différents modèles structuraux proposés
3.4 Pourquoi ce modèle ?
4 Les objectifs de l’étude
Conclusion

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