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La rรฉplication du gรฉnome
La transcription et la traduction du gรฉnome viral du CMV se dรฉroulent en trois รฉtapes sรฉquentielles et coordonnรฉes. La premiรจre ou la phase trรจs prรฉcoce (Immediate Early, IE) permet de dรฉtourner le mรฉtabolisme cellulaire au profit de la rรฉplication virale, dโinhiber la rรฉplication de lโADN cellulaire et de dรฉclencher la phase prรฉcoce. Les gรจnes trรจs prรฉcoces sont soit exprimรฉs pour initier une cascade dโexpression des gรจnes pour une infection lytique, soit rรฉprimรฉs pour รฉtablir la latence. L’initiation de la transcription des gรจnes IE dรฉbute en lโabsence de lโexpression de novo de protรฉines virales. La transcription des gรจnes IE1 et IE2 (immediate early protein 1 et 2), qui sont les gรจnes les plus abondants parmi les gรจnes trรจs prรฉcoces, est sous le contrรดle du promoteur MIEP (Major Immediate Early Promoter). Grรขce ร des sites dโinteraction avec le NF-ฮบB (nuclear factor-kappa B) dans le MIEP, une signalisation pro-inflammatoire induite par l’entrรฉe du virus est effectivement exploitรฉe pour activer lโexpression des gรจnes IE1/IE2 (Caposio, Luganini et al. 2007; Isaacson, Juckem et al. 2008; Isern, Gustems et al. 2011). Le MIEP est activรฉ par des protรฉines cellulaires et virales, comme la protรฉine du tรฉgument pp71 (pUL82) qui entre avec la particule virale. En lโabsence de pp71, un blocage gรฉnรฉral de la transcription des gรจnes IE peut se produire (Bresnahan and Shenk 2000) et contribue ร la mise en place de la latence virale (Saffert and Kalejta 2007).
A la suite du pic dโexpression des protรฉines trรจs prรฉcoces rรฉgulatrices et avant la rรฉplication du gรฉnome, la phase prรฉcoce dรฉbute. Les protรฉines prรฉcoces comprennent les enzymes et protรฉines nรฉcessaires ร la synthรจse de lโADN viral. Ces gรจnes ont plusieurs fonctions dans la maturation et la sortie des virions. (Browne and Shenk 2003; Abate, Watanabe et al. 2004). La rรฉplication de lโADN viral dรฉpend de plusieurs protรฉines, notamment de lโADN polymรฉrase virale UL54 et de sa protรฉine accessoire UL44. L’expression des gรจnes tardifs est maximale aprรจs la rรฉplication de l’ADN viral. Les gรจnes tardifs codent principalement pour des protรฉines structurales et contrรดlent la maturation de la capside, l’assemblage de lโADN, la maturation du virion et des corps denses et finalement la sortie du virus de la cellule. La synthรจse de l’ADN a lieu dans le noyau des fibroblastes infectรฉs, en commenรงant entre 14 et 16h pi, et peut atteindre plus de 10000 copies par cellule au moment oรน les virions commencent ร se former (Mocarski, Shenk et al. 2013).
Lโassemblage des particules virales et la sortie des virions
Les caractรฉristiques de base de la formation de la capside et la maturation sont communes chez les herpesvirus. Le processus commence lorsque cinq composants de la capside conservรฉs chez les herpesvirus, (MCP, TRI1, TRI2, SCP- UL48A -, et PORT UL104) forment une coquille de procapside autour d’un prรฉcurseur de la protรฉine d’assemblage (AP ou UL80.5) qui est responsable ร la fois de la translocation de MCP vers le noyau et de lโinitiation de lโassemblage de la capside (Gibson 2008). Les protรฉines du tรฉgument sont ajoutรฉes aux nuclรฉocapsides sรฉquentiellement dans le noyau et cet assemblage se poursuit dans le cytoplasme. Ceci assure la stabilitรฉ de la nuclรฉocapside au cours de sa translocation vers le cytoplasme et contrรดle son trafic vers des sites d’enveloppement dans le cytoplasme. Sept structures virales diffรฉrentes sont libรฉrรฉes par les cellules infectรฉes. Parmi elles, on trouve des virions complets, des NIEPs et des corps denses (Topilko and Michelson 1994).
LโADN viral produit a une forme de concatรฉmรจres qui sont de longues molรฉcules d’ADN constituรฉes d’un mรชme monomรจre rรฉpรฉtรฉ sรฉparรฉ par des sรฉquences pac (Cis-acting packaging element). Ensuite, une รฉtape dโencapsidation se dรฉroule oรน les concatรฉmรจres seront clivรฉs et empaquetรฉs dans les capsides. Ce processus fait intervenir des protรฉines d’encapsidation ou terminases (UL51, UL52, UL56, UL77, UL89 et UL104 ou PORT).
Un complexe terminase, comprenant les protรฉines UL89 et UL56, sโassocie ร un pentamรจre de la protรฉine portale UL104, qui forme un pore au niveau de la capside permettant lโintroduction de lโextrรฉmitรฉ libre du concatรฉmรจre dโADN viral nรฉoformรฉ. La protรฉine UL56 se fixe sur les sรฉquences pac, ce qui active le premier clivage de lโADN et la fixation du complexe UL56/ADN ร UL89. Puis le complexe UL56/UL89/ADN se fixe ร UL104, permettant le transfert de lโADN dans la capside (Mocarski, Shenk et al. 2013).
Pour expliquer la sortie dans le milieu extracellulaire du virion, deux hypothรจses co-existent. Lโhypothรจse la plus ancienne est quโune fois dans le rรฉticulum endoplasmique (RE), le virion conserverait son enveloppe acquise aprรจs bourgeonnement au niveau de la membrane interne nuclรฉaire et quโil se dirigerait vers lโextรฉrieur de la cellule, via lโappareil de Golgi et le TGN. La deuxiรจme hypothรจse, la plus acceptรฉe aujourdโhui, est que les capsides acquiรจrent une premiรจre enveloppe transitoire en traversant la membrane nuclรฉaire interne. La fusion de cette enveloppe virale avec la membrane nuclรฉaire externe a pour rรฉsultat le dรฉsenveloppement de la nuclรฉocapside et sa translocation dans le cytoplasme. La majoritรฉ des protรฉines du tรฉgument sont alors ajoutรฉes aux nuclรฉocapsides, qui obtiennent leur enveloppe finale par bourgeonnement dans des vรฉsicules dรฉrivรฉes de lโappareil de Golgi (Mettenleiter, Klupp et al. 2006). Quand les virions sont formรฉs, ils sont ensuite transportรฉs vers la surface cellulaire dans des petites vรฉsicules ร l’aide de la machinerie cellulaire d’exocytose.
Manifestations cliniques
Au cours de lโinfection par le HCMV, la physiopathologie dรฉpend du stade de lโinfection ; la primo-infection, la rรฉinfection et la rรฉactivation (Figure 5).
Figure 5 : Physiopathologie de lโinfection par le HCMV (Alain, Hantz et al. 2008).
Infection chez les adultes immunocompรฉtents
En rรจgle gรฉnรฉrale, la primo infection par le HCMV chez les sujets immunocompรฉtents est cliniquement asymptomatique. Lโinfection symptomatique donne parfois de la fiรจvre ou un syndrome mononuclรฉosique, qui est caractรฉrisรฉ par une fiรจvre รฉlevรฉe (entre 39 et 40ยฐC) pendant plus de 10 jours, des malaises, des myalgies, des cรฉphalรฉes et de la fatigue. Le syndrome mononuclรฉosique peut se produire รฉgalement chez les enfants. Les enfants sont moins susceptibles d’รชtre fรฉbriles mais plus susceptibles d’avoir une hรฉpatomรฉgalie ou une splรฉnomรฉgalie (Pannuti, Vilas Boas et al. 1985). La primo-infection peut cependant aboutir ร des manifestations cliniques diverses mais peu frรฉquentes telles que des arthralgies et arthrites, colites ulcรฉratives, pneumopathies, mรฉningites aseptiques et myocardites.
Infection au cours de la grossesse et maladie congรฉnitale
Lโinfection congรฉnitale par le HCMV est la plus frรฉquente des infections congรฉnitales en France et toucherait environ 0,5% des naissances. Cependant lโatteinte sรฉvรจre nโest symptomatique ร la naissance que chez 10 % ร 15 % des foetus infectรฉs. Dans ces cas, il existe une atteinte de plusieurs organes, et en particulier des atteintes neurologiques et sensorielles. Lโinfection chez les enfants symptomatiques est associรฉe de faรงon variable ร une hypotrophie, une hรฉpatite, une hรฉpatosplรฉnomรฉgalie, et des signes dโatteinte du systรจme nerveux central (SNC) qui peuvent aboutir, dans les cas les plus graves, ร des sรฉquelles neuro-sensorielles et ร un retard psychomoteur sรฉvรจre. Cette forme grave est lรฉtale dans 30 % des cas (Malm and Engman 2007). Que lโenfant soit symptomatique initialement ou pas, il peut apparaรฎtre ultรฉrieurement des anomalies notamment cรฉrรฉbrales et sensorielles, comme la surditรฉ (Fowler, McCollister et al. 1997; Ivarsson, Lernmark et al. 1997).
Lโincidence de la primo-infection maternelle pendant la grossesse est de 1% ร 4% et le taux de transmission mรจre-foetus est alors de 30 % ร 40% contre 1% au cours dโune infection rรฉcurrente (Boppana, Rivera et al. 2001).
Le HCMV a un tropisme particulier pour le SNC, entraรฎnant des atteintes plus ou moins sรฉvรจres selon la date de lโinfection en antรฉnatal. Si lโinfection du foetus survient durant le premier trimestre de la grossesse, les lรฉsions cรฉrรฉbrales retrouvรฉes seront plus frรฉquemment des anomalies de structuration (Fowler, Stagno et al. 1992). Les nouveau-nรฉs infectรฉs congรฉnitalement excrรจtent du HCMV dans l’urine et d’autres fluides corporels ร des niveaux รฉlevรฉs. Cependant, des niveaux รฉlevรฉs de virus ne sont pas toujours corrรฉlรฉs ร une maladie congรฉnitale grave, mรชme sโil existe un lien entre la charge virale sanguine รฉlevรฉe ร la naissance et la surditรฉ (Boppana, Fowler et al. 2005; Lanari, Lazzarotto et al. 2006).
Infections opportunistes chez les sujets immunodรฉprimรฉs
Le HCMV est un important agent pathogรจne opportuniste affectant les patients immunodรฉprimรฉs. L’infection est frรฉquente suite ร la rรฉactivation du virus latent, ou lors dโune rรฉinfection des patients qui ont eu une infection passรฉe ou encore ร l’initiation d’une primo-infection.
๏ผ Au cours du SIDA
Avant l’utilisation de la thรฉrapie antirรฉtrovirale hautement active, environ 20 ร 40% des adultes atteints du SIDA dรฉveloppait une maladie due au HCMV. Chez les personnes infectรฉes par le VIH (virus de lโimmunodรฉficience humaine), le risque de maladie ร HCMV est liรฉ ร un faible taux de lymphocytes T CD4+. L’utilisation des HAART (Highly active antiretroviral therapy), qui entrainent une meilleure reconstitution ou prรฉservation des cellules T CD4 immunitaires, a considรฉrablement rรฉduit l’occurrence de la virรฉmie et de la maladie ร HCMV (Deayton, Mocroft et al. 1999; O’Sullivan, Drew et al. 1999). Cependant, dans les pays en voie de dรฉveloppement, cette infection continue dโรชtre problรฉmatique, du fait dโun accรจs limitรฉ aux thรฉrapies efficaces. Les manifestations cliniques les plus importantes sont les rรฉtinites suivies par des atteintes du tube digestif, comme lโoesophagite et la colite. On peut retrouver des prรฉsentations cliniques moins courantes comme des encรฉphalites, des neuropathies pรฉriphรฉriques, des pneumopathies, des gastrites et des hรฉpatites.
๏ผ Aprรจs transplantation dโorgane solide ou de moelle osseuse
Les patients transplantรฉs reรงoivent un traitement immunosuppresseur qui limite le risque de rejet du greffon. Ce traitement favorise la rรฉplication du HCMV ร partir dโune contamination par le greffon ou dโune rรฉactivation dโune souche latente. Lโinfection ร cytomรฉgalovirus constitue ainsi une cause majeure de morbiditรฉ et de mortalitรฉ chez les patients transplantรฉs dโorganes solides, de moelle osseuse ou de cellules souches hรฉmatopoรฏรฉtiques. La gestion de l’infection par le HCMV reste un problรจme majeur et constitue un composant important du coรปt global de la transplantation. Le plus haut risque dโinfection sโobserve lorsqu’un receveur sรฉronรฉgatif est transplantรฉ avec un organe sรฉropositif. Lโinfection est associรฉe ร une diminution de la survie du patient et au rejet du greffon. Les manifestations cliniques sont les rรฉsultats de la lyse cellulaire suite ร la rรฉplication virale ou sont dues aux effets indirects de cytokines et de chimiokines produites au cours de la rรฉponse immunitaire dรฉclenchรฉe par lโinfection (Nordoy, Muller et al. 2000). Lโinfection sรฉvรจre chez un patient transplantรฉ se manifeste notamment par de la fiรจvre โฅ 38ยฐC et lโun des signes suivants : malaise, leucopรฉnie, une arthralgie, lymphocytose atypique, thrombocytopรฉnie, รฉlรฉvation des transaminases, occasionnellement par une รฉruption cutanรฉe. La maladie est dite invasive lorsquโil y a une dysfonction dโorgane avec preuve de la prรฉsence virale dans cet organe. Bien que les traitements antiviraux arrivent ร prรฉvenir les formes sรฉvรจres, des effets indirects de lโinfection peuvent se produire chez ces patients, y compris un risque accru dโinfections opportunistes par des champignons, des bactรฉries et des virus. Dโautres consรฉquences peuvent survenir comme le rejet dโorgane solide ou un retard ร la prise de greffe en cas dโallogreffe de moelle (Fishman, Emery et al. 2007).
Traitements antiviraux
Plusieurs molรฉcules sont disponibles pour les traitements curatifs et prรฉventifs des infections : le ganciclovir ou GCV (Cymevanยฎ), le Valganciclovir Val-GCV (Rovalcyteยฎ), le cidofovir ou CDV (Vistideยฎ, non commercialisรฉ actuellement), le foscarnet ou PFA (Foscavirยฎ). Toutes ces molรฉcules inhibent lโactivitรฉ de lโADN polymรฉrase virale UL54 (Figure 6) et sont donc sans action sur le virus latent. Ces molรฉcules possรจdent une toxicitรฉ non nรฉgligeable qui limite leur utilisation.
Les personnes transplantรฉes et immunodรฉprimรฉes obtiennent de bons rรฉsultats aprรจs lโutilisation de GCV. Cependant lโapparition de rรฉsistance est assez frรฉquente chez ces patients. Le GCV subit une premiรจre phosphorylation par la phosphotransfรฉrase UL97 puis deux autres phosphorylations par des kinases cellulaires pour arriver ร son รฉtat actif. Le Val-GCV, une pro-drogue du GCV, est aussi couramment utilisรฉe et a une biodisponibilitรฉ 10 fois supรฉrieure ร celle du GCV. Ces deux molรฉcules ont une toxicitรฉ hรฉmatologique, essentiellement neutropรฉnique. LโAciclovir (Zoviraxยฎ) et son ester le Valaciclovir (Zelitrexยฎ), bien que moins actifs sur le HCMV que le GCV, sont utilisรฉs en prophylaxie aprรจs greffe d’organe, chez des patients sรฉropositifs pour le HCMV.
Figure 6 : Mode dโaction des inhibiteurs de lโADN polymรฉrase virale UL54 (Hantz, Mazeron et al. 2009).
Le PFA est capable, sans aucune modification supplรฉmentaire, dโinhiber sรฉlectivement le site de liaison au pyrophosphate sur l’ADN polymรฉrase virale UL54. Son utilisation est associรฉe avec une toxicitรฉ rรฉnale et des troubles digestifs.
De nouvelles molรฉcules antivirales sont actuellement en dรฉveloppement. Il y avait une nรฉcessitรฉ pour deux raisons : 1), il est nรฉcessaire de trouver des alternatives moins toxiques, notamment en prophylaxie et en traitement dโentretien, aprรจs la baisse de la charge virale. 2) en raison de lโapparition de rรฉsistance du HCMV aux molรฉcules actuelles, rรฉsistances qui peuvent รชtre croisรฉes car ces antiviraux ciblent tous lโADN polymรฉrase, il est nรฉcessaire de trouver des antiviraux qui ont des cibles diffรฉrentes (Figure 7).
Figure 7 : Antiviraux en dรฉveloppement contre le HCMV dโaprรจs (Hantz, Mazeron et al. 2009). LโArtรฉsunate, un traitement antipaludรฉen ร lโorigine, est efficace contre les souches sauvages dโHCMV et celles rรฉsistantes au GCV (Kaptein, Efferth et al. 2006). Il semblerait quโil inhibe les protรฉines trรจs prรฉcoces du HCMV. Il a รฉtรฉ rapportรฉ quโaprรจs un traitement de 7 jours dโartรฉsunate, la charge virale est significativement diminuรฉe chez un receveur de moelle prรฉsentant une infection rรฉsistante au GCV et au PFA (Shapira, Resnick et al. 2008; Wolf, Shimoni et al. 2011). Une รฉtude rรฉcente rapporte que lโartรฉsunate a รฉgalement donnรฉ de bons rรฉsultats chez trois patients transplantรฉs en รฉchec thรฉrapeutique sur cinq (Germi, Mariette et al. 2014). Actuellement, lโartรฉsunate est en autorisation temporaire dโutilisation (ATU) et, comme la forme orale nโest plus disponible en ATU, il sโadministre par voie intraveineuse. Il est bien tolerรฉ, avec une toxicitรฉ modรฉrรฉe in vivo. Il serait plutรดt ร utiliser en prophylaxie, mais comme il est efficace sur les souches rรฉsistantes, il pourrait รชtre utile en cas dโimpasse thรฉrapeutique.
Des recherches sont รฉgalement en cours sur le leflunomide, un inhibiteur de la synthรจse des pyrimidines utilisรฉ dans le traitement de la polyarthrite rhumatoรฏde. Il est efficace sur le HCMV in vitro et sur modรจle animal. Il inhibe les รฉtapes tardives du cycle viral et notamment lโacquisition du tรฉgument du virion. Il pourrait รชtre utile en seconde intention (ยซ rescue therapy ยป), chez des patients infectรฉs par des souches rรฉsistantes au GCV (Ciszek, Mucha et al. 2014).
Le Maribavir (MBV) est une molรฉcule inhibitrice spรฉcifique de la kinase virale UL97. Il inhibe la sortie des capsides virales du noyau. Le MBV a trรจs peu dโeffets secondaires et il nโy a pas de rรฉsistance croisรฉe avec les autres inhibiteurs. Son efficacitรฉ clinique en prophylaxie nโest pas totalement convaincante et nรฉcessite des doses รฉlevรฉes. Il reste actif contre les souches rรฉsistantes au GCV, laissant penser que cette molรฉcule pourrait รชtre utile dans le traitement des infections ร HCMV rรฉsistantes, en seconde intention. Des cas de rรฉsistance au MBV ont รฉtรฉ rapportรฉs portant sur UL97. En revanche, il nโexiste pas de rรฉsistance croisรฉe entre le MBV et le GCV, car ils ont des sites dโaction diffรฉrents sur UL97. Le MBV inhibe lโefficacitรฉ du GCV car il cible UL97. Il ne faut donc pas faire de combinaison. Le MBV est disponible en ATU actuellement (Hantz, Mazeron et al. 2009).
Le Brincidofovir (dรฉveloppรฉ par la sociรฉtรฉ Chimerix), est un ester du CDV, qui a un bien meilleur potentiel antiviral in vitro que la molรฉcule dโorigine. Cet analogue conserve son activitรฉ contre les isolats cliniques prรฉsentant des mutations de rรฉsistance au GCV sur les gรจnes UL97 et UL54. Il nโa pas de toxicitรฉ rรฉnale, contrairement au CDV et est bien tolรฉrรฉ. Le brincidofovir est disponible en ATU actuellement, en cas de co-infection (Aldern, Ciesla et al. 2003; Hostetler 2009).
Le letermovir (AIC246) est une molรฉcule anti-CMV en cours de dรฉveloppement. Il inhibe spรฉcifiquement la terminase UL56, bloquant ainsi le clivage des concatรฉmรจres dโADN au moment de lโencapsidation. Ni la rรฉplication de l’ADN du HCMV, ni lโexpression des protรฉines virales ne sont affectรฉes par cette molรฉcule (Goldner, Hewlett et al. 2011). Il est actuellement testรฉ en prophylaxie chez les patients transplantรฉs de rein ou de cellules souches hรฉmatopoรฏรฉtiques (phase II) (Stoelben, Arns et al. 2013; Chemaly, Ullmann et al. 2014). En prรฉventif ร doses รฉlevรฉes, il rรฉduit significativement le nombre d’infections ร HCMV chez les porteurs d’une greffe de moelle. Il est administrรฉ par voie orale et possรจde une faible toxicitรฉ. Il nโy a pas de rรฉsistance croisรฉe avec les autres antiviraux. Il a montrรฉ des rรฉsultats encourageants en seconde intention chez un patient transplantรฉ pulmonaire (Kaul, Stoelben et al. 2011).
Echappement aux mรฉcanismes de dรฉfense antivirale
Au cours de lโinfection, le HCMV est susceptible de rencontrer une large gamme de rรฉponses immunitaires acquises et innรฉes qui sont mises en place par les cellules hรดtes pour contrรดler l’agent pathogรจne. Pratiquement tous les virus ont dรฉveloppรฉ des mรฉcanismes pour contrecarrer les dรฉfenses cellulaires. Un certain nombre des stratรฉgies dโรฉvasion dรฉveloppรฉs par le HCMV sont prรฉsentรฉes ici.
Inhibition de lโapoptose
Lโapoptose, ou mort cellulaire programmรฉ de type I, est un mรฉcanisme antiviral innรฉ car il peut jouer en dรฉfaveur du virus en induisant la mort des cellules infectรฉes, limitant le temps nรฉcessaire ร la production de nouveaux virions et en prรฉvenant l’infection persistante. De nombreux virus, y compris les herpesvirus, modulent l’apoptose afin de faciliter leur rรฉplication.
Lors de l’infection, HCMV peut bloquer l’apoptose dans diffรฉrents types cellulaires, telles que les fibroblastes, les macrophages et les cellules endothรฉliales (Tanaka, Zou et al. 1999; Michaelis, Kotchetkov et al. 2004). Le HCMV code pour plusieurs protรฉines qui interfรจrent directement avec les voies de signalisation apoptotique. Il sโagit notamment de deux protรฉines trรจs prรฉcoces, la protรฉine vICA (viral inhibitor of caspase-8-induced apoptosis) ou pUL36 et la protรฉine vMIA (mitochondria-localized inhibitor of apoptosis) ou pUL37ร1 (Goldmacher 2005). Une protรฉine virale codรฉe par le gรจne UL38 a รฉgalement รฉtรฉ identifiรฉe (Terhune, Torigoi et al. 2007). Ces protรฉines ont des mรฉcanismes dโaction diffรฉrents. La protรฉine vMIA inhibe l’apoptose en perturbant le rรฉseau mitochondrial ainsi quโen sรฉquestrant la protรฉine pro-apoptotique Bax dans la mitochondrie (Arnoult, Bartle et al. 2004). La protรฉine vICA, qui est indispensable pour la rรฉplication du HCMV, a la capacitรฉ dโempรชcher lโactivation de la caspase-8. La protรฉine UL38 est un inhibiteur de la caspase 3 et de l’apoptose dรฉpendante du stress du rรฉticulum endoplasmique (UPR) (Miszczak and Cymerys 2014).
Modulation de lโimmunitรฉ innรฉe
Le HCMV, malgrรฉ un nombre considรฉrable de protรฉines dรฉdiรฉes ร lโรฉchappement immunitaire, est un virus qui induit une rรฉponse immune spรฉcifique de lโhรดte trรจs importante. Lโimmunitรฉ antivirale innรฉe est mise en place trรจs rapidement, dรจs les phases dโattachement et de fusion du virus au niveau des membranes cellulaires. La rรฉponse immunitaire innรฉe va jouer un rรดle important dans la dรฉfense anti-HCMV et permettra par la suite dโactiver la rรฉponse immunitaire adaptative.
Il a รฉtรฉ montrรฉ que le contact entre le HCMV et la surface cellulaire dรฉclenche des voies de signalisation conduisant ร la production de cytokines inflammatoires (IC) et de lโIFN de type I, deux marqueurs de lโimmunitรฉ innรฉe (Compton, Kurt-Jones et al. 2003). Des ISGs (Interferon-stimulated genes) et des gรจnes inflammatoires, tels que l’interleukine 6 (IL-6), IL-7, IL-11, sont tous fortement induits dans des fibroblastes infectรฉs par le HCMV (Simmen, Singh et al. 2001). En fait, cette induction est dรฉpendante du TLR2 (Toll-Like Receptor 2) et de CD14. Ces rรฉponses permettent de limiter la rรฉplication virale et la dissรฉmination aux รฉtapes prรฉcoces et aussi dโactiver les rรฉponses immunes adaptatives qui pourront รฉliminer lโinfection. Toutefois, la protรฉine du tรฉgument pp65 protรจge les cellules infectรฉes du systรจme immunitaire innรฉ. Il a รฉtรฉ montrรฉ que la rรฉponse ร lโinterfรฉron est attรฉnuรฉe par pp65 et que le niveau d’expression des ISGs sont รฉlevรฉe aprรจs infection par un virus ฮpp65 (Kalejta 2008).
Parmi les gรจnes ISGs, on trouve ceux qui codent pour la protรฉine kinase R (PKR) dรฉpendante de lโARN double brin (ARNdb) et le 2โ-4โ oligoadรฉnylate synthase (2โ-5โ OAS) (Randall and Goodbourn 2008). Lโinfection virale produit de lโARNdb qui, avec lโIFN, vont dรฉclencher des cascades de signalisation aboutissant ร plusieurs mรฉcanismes antiviraux au niveau cellulaire dont lโactivation de PKR et lโarrรชt de la synthรจse protรฉique afin dโinhiber la rรฉplication virale (Katze 1995). รtant donnรฉ que la rรฉplication virale nรฉcessite la synthรจse des protรฉines virales, beaucoup de virus codent des gรจnes qui bloquent lโactivation de PKR. Le HCMV possรจde au moins deux gรจnes qui rรฉgulent nรฉgativement cette voie, TRS1 et IRS1. Cette partie sera discutรฉe en dรฉtail plus loin (voir chapitre 2).
Modulation de lโimmunitรฉ adaptative
๏ผ Modulation du Complexe Majeur dโHistocompatibilitรฉ de classe I (CMH-I) :
Un de mรฉcanismes principaux dโรฉchappement ร lโimmunitรฉ adaptative se fait par lโinhibition de la prรฉsentation aux lymphocytes T cytotoxiques des antigรจnes via le CMH de classe I. Les molรฉcules du CMH-I vont prรฉsenter des peptides endogรจnes provenant du cytoplasme (typiquement les antigรจnes viraux). Elles forment un complexe avec les molรฉcules TAP (Transporter associated with antigen processing) prรฉsentes dans la membrane du rรฉticulum et des peptides de 8 ร 10 acides aminรฉs. Ces peptides de petite taille proviennent du clivage des protรฉines par le protรฉasome (Figure 8). Ce complexe pourra ensuit migrer vers la membrane plasmique via lโappareil de Golgi et รชtre prรฉsentรฉ aux lymphocytes T CD8.
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Table des matiรจres
DONNEES BIBLIOGRAPHIQUES
1. LE CYTOMEGALOVIRUS HUMAIN (HCMV)
A. Gรฉnรฉralitรฉs
B. Caractรฉristiques gรฉnรฉrales des ๏ข-Herpesvirinae
C. Epidรฉmiologie
i. Transmission horizontale
ii. Transmission verticale
D. Structure du virus
i. Gรฉnome viral
ii. Capside
iii. Tรฉgument
iv. Enveloppe
E. Cycle de rรฉplication
F. Manifestations cliniques
i. Infection chez les sujets immunocompรฉtents
ii. Infection au cours de la grossesse et maladie congรฉnitale
iii. Infections opportunistes chez les sujets immunodรฉprimรฉs
G. Traitements antiviraux
H. Echappement aux mรฉcanismes de dรฉfense antivirale
i. Inhibition de lโapoptose
ii. Modulation de lโimmunitรฉ innรฉe
iii. Modulation de lโimmunitรฉ adaptative
iv. Les cellules NK
I. Latence
2. LES PROTEINES IRS1 ET TRS1 DU HCMV
A. Gรฉnรฉralitรฉs
B. Structures
C. Fonctions
3. LโAUTOPHAGIE
A. Gรฉnรฉralitรฉs sur lโautophagie : historique et dรฉfinition
B. Mรฉcanismes molรฉculaires de lโautophagie
i. Initiation et formation du phagophore
ii. Elongation et fermeture de lโautophagosome
iii. Maturation de lโautophagosome
C. Rรฉgulation de lโautophagie :
i. Rรฉgulation de lโautophagie par la voie de signalisation mTOR
ii. Rรฉgulation de lโautophagie par des voies de signalisation indรฉpendantes de mTOR
iii. Rรฉgulation de lโautophagie par des voies de signalisation impliquant des facteurs de transcription
D. Fonctions biologiques de lโautophagie
i. Rรดles physiologiques
ii. Rรดles pathologiques
4. AUTOPHAGIE ET VIRUS
A. Modulation de lโautophagie par les virus
i. Rรดle antiviral de lโautophagie
ii. Rรดle pro viral de lโautophagie
iii. VIH (Virus de l’immunodรฉficience humaine)
B. Interaction entre les infections herpรฉtiques et lโautophagie
i. Cytomรฉgalovirus humain
ii. Herpรจs Simplex Virus type 1
iii. Virus de la Varicelle et du Zona
iv. Epstein-Barr virus
v. Herpesvirus associรฉ au Sarcome de Kaposi
PRESENTATION DES TRAVAUX
Introduction
Article .
Discussion
RESULTATS COMPLEMNTAIRES
CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES
TRAVAUX ANNEXE
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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