Les programmes officiels et les mécanismes de l’évolution au collège

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Des idées erronées sur l ’évolution

Conceptions initiales des élèves de Troisième sur l ’évolution

En classe de Troisième, les élèves peuvent parfois être bloqués dans l’apprentissage des mécanismes de l’évolution suite à différents concepts. Tout d’abord, il existe des concepts sur les contenus propres de la théorie de l’évolution. En effet, les élèves de troisième doivent acquérir la notion de parenté entre les espèces qui ont disparu et les espèces qui sont apparues, en se basant sur des comparaisons qui s‘explique par l‘évolution. Il est possible de voir dans les établissements scolaires que les élèves confondent souvent à ce moment la notion de parenté, avec un ancêtre commun, et la généalogie. En effet la représentation généalogique est plus intuitive comme nous le prouve l’histoire, où les premiers grands systématiciens et naturalistes concevaient l’évolution comme une suite généalogique. Le parallèle peut être fait avec les élèves du secondaire, qui suivent le même processus intellectuel. De plus, les collégiens peuvent aussi avoir des concepts liés au contexte socioculturel, par exemple, lorsque la religion est fortement présente au sein de leur foyer, cela peut les conduire à des blocages sur l’idée même de l’évolution. On peut parler dans ce cas de créationnisme de la part de ces élèves. Il existe également des concepts liés au contexte scolaire, car malgré de nombreuses recommandations aux enseignants des Sciences de la Vie et de la Terre (conformément à la démarche constructiviste), la prise en compte des obstacles rencontrés par les élèves, dans la construction des cours, reste faible.
Enfin, comme le souligne le systématicien Guillaume Lecointre, la théorie de l’évolution est « contre intuitive » (Lecointre. 2009).
Selon C. Fortin, il y aurait cinq grandes catégories de conception d’élèves (Fortin. 2009). Tout d’abord la conception pseudo-évolutionniste où l’élève fonde l’histoire du vivant à partir de la notion d’ancêtre. Les élèves ayant cette conception accorde une part très importante et centrale au hasard. Ils pensent également que l’extinction des organismes est due à une inadaptation de ceux ci au milieu. De plus la place de l’homme reste chez ces élèves assez vagues.
En second vient la conception transmutationniste qui allie la notion d’évolution à une suite de métamorphoses. Ces élèves pensent que les espèces ne se sont pas éteintes mais ont muté. Ici, aucune place n’est accordée au hasard. Les élèves sont souvent adaptationnistes et finalistes : les espèces doivent s’adapter.
La troisième de ces conceptions est la conception non évolutionniste où l’élève est à la fois fixiste (il pense que les espèces actuelles étaient présentes au début de la vie sur Terre) et transformiste (il envisage le fait que des organismes se soient modifiés et perfectionnés au cours des temps géologiques). Mais, ici, l’élève n’établit aucun lien de parenté entre les espèces.
Ensuite vient la conception créationniste comme on a pu le voir précédemment, qui est opposée à l’idée même d’évolution. Néanmoins, elle n’exclut pas les mécanismes biologiques (la mutation par exemple) pour expliquer l’ adaptation de organismes. La place de l’homme sur Terre est ici dictée par le discours religieux.
Enfin, on peut trouver chez les élèves une conception concordiste qui se veut réconciliatrice entre la science et la religion. En effet, l’évolution est acceptée par l’élève mais elle est replacée dans un projet divin.
Il est donc très important d’étudier les conceptions initiales des élèves, ce qui nous permet de voir dans laquelle ils se situent, afin d’y remédier lors de la leçon. A partir de cela nous pouvons donc comprendre pourquoi dans nos sociétés, l’évolution n’est pas assez installée dans nos cultures, au XXIème siècle.

La « théorie » de l ’évolution

“ Une difficulté rencontrée lors de l’enseignement des concepts darwiniens concerne la faiblesse de la formation épistémologique des élèves. Cela renforce l’incommodité d’apprentissage de cette théorie. En effet, il existe un décalage entre la nature de la science telle que l’épistémologie contemporaine tend à la définir et la représentation qu’en ont les élèves : certains élèves considèrent la théorie de l’évolution comme «juste une théorie », la réduisant à des spéculations sans fondements” (Blackwell, Powel, Dukes, 2003). Cela démontre une incompréhension de ce qu’est une théorie scientifique, qui n’est pas seulement une supposition ou une simple hypothèse, comme certains pourraient le penser. Cette vision implique que seul le fait serait valable scientifiquement et que ce dernier « s’exprimerait de lui-même », ce qui revient à considérer que les théories ne sont que des spéculations sans fondements ni preuves. Il semble donc que les élèves éprouvent des lacunes au niveau épistémologique, c’est pourquoi il est urgent d’enseigner aux élèves qu’en sciences, il n’y a pas de faits possibles sans théorie autour, et sans une certaine mécanique de la preuve (Lecointre, 2007). Il est vrai que « les faits participent à la construction d’une théorie, la théorie étant la façon la plus cohérente qui permet de relier entre eux ces faits. En retour, la théorie investit l’appréhension du fait : c’est dans le cadre d’une théorie qu’un fait devient scientifique, c’est-à-dire qu’il est collectivement compris et interprété par les scientifiques » (Lecointre, 2009).
Comme le souligne Patrick Tort (cité par Perbal et coll., 2006, p167), « jamais les erreurs liées à l’interprétation d’une théorie n’ont eu de conséquences aussi graves que quand elles concernaient la théorie darwinienne de l’évolution. » Cette dernière est en effet une construction reconnue par l’ensemble de la communauté scientifique. Elle est d’une importance telle que Rutledge et Warden (2000) la considèrent comme «la théorie la plus puissante dans le domaine de la biologie». De plus, le flou qui entoure la définition, d’une théorie scientifique dans la tête de certains élèves peut les mener à assimiler cette théorie scientifique à une croyance. Il est dès lors primordial de pouvoir distinguer savoir et croyance.
Cela nous amène a prendre en considération ce préjugé des élèves, notamment en classe de Troisième, où l’étude des mécanismes de l’évolution est présente et donc où la théorie de l’évolution est abordée, afin de corriger le plus rapidement possible ce mauvais jugement de leur part.

Le finalisme, un obstacle pour comprendre l ’évolution

Il est assez fréquent de voir chez les élèves et même chez la plupart des individus de façon générale que l’évolution est appréhendée dans un but précis, en l’occurrence celui d’un aboutissement à un être vivant « parfait » et « complexe », doté d’une intelligence. Or, dès lors que l’on attribue un but à l’évolution, cela s’inscrit dans une démarche finaliste et donc engendre une vision erronée de l’évolution. Cependant, si cette vision des choses existe c’est parce qu’elle a souvent été utilisée dans le passé, par des scientifique à l’instar de Linné ou Cuvier.
Le fait de reprendre des théories scientifiques passées est souvent observé dans ce domaine, surtout par les élèves du collège qui n’ont que peu de connaissances des mécanismes de l’évolution avant la Troisième.

L ’évolution des individus

Alors même que l’accent est mis sur le fait que ce sont les populations qui évoluent au fil des générations, la conception des mécanismes de l’évolution la plus instinctivement présente chez les individus, et notamment chez les collégiens, est de type lamarckienne : « ce serait les individus qui s’adapteraient aux changements d’environnement et donc se modifieraient plus ou moins en transmettant ces modifications à leur descendance. » (Dupuis et Hervé, 2008, p58).
Cette représentation est souvent réalisée par exemple dans de nombreuses émissions scientifiques, souvent dans un but de simplification lors de la vulgarisation. Lorsque Yves Coppens explique « Il apparait d’abord clairement que l’homme comme le cheval, l’éléphant ou le phacochère, réagit au changement de milieu […] en s’efforçant de s’y adapter. » (Coppens. 2006), on peut souligner un manque de prudence de sa part dans cet affirmation.
L’une des principales idées erronées sur l’évolution est de dire que l’homme descend du singe. En effet, cette phrase peut être entendue non seulement au collège, par les élèves, novices en matière d’évolution, mais également par un grand nombre de personnes au quotidien au sein de nos sociétés. A tort, cette phrase est souvent attribuée à Darwin. Cette phrase ne peut être vraie seulement dans le sens où l’homme est un primate et qu’il descend d’autres primates ressemblant à des singes. Cependant nous pouvons remarquer que, grâce aux avancées scientifiques et à la divulgation des sciences aujourd’hui (reportages, revues scientifiques), on commence de plus en plus à répandre l’idée que « L’homme est un singe » au sens où l’homme est un primate comme tant d’autres. Cependant il est important de souligner que les premiers primates datent d’il y a -65Ma, qu’ils étaient très diversifiés et n’étaient identiques ni aux singes actuels, ni à l’homme actuel. Cette maxime populaire est souvent accompagnée d’une notion sous-jacente dans l’esprit de celui qui la énoncée : l’idée qu’il y aurait une hiérarchie évolutive entre les groupes. Cela se traduit par des expressions comme « groupes inférieurs, primitifs, versus groupes supérieurs, évolués » (Dupuis et Hervé, 2008, p56). Avec une telle réflexion, l’homme est placé à un rang supérieur par rapport aux autres espèces, et l’évolution n’est plus vue de manière buissonnante mais orientée vers un but, une forme de plus en plus complexe et de plus en plus parfaite (voir figures 5 et 6).

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Table des matières

Introduction
I) Cadre théorique
A) Historique des mécanismes de l’évolution
1) L’évolution selon Lamarck
2) L’évolution selon Darwin
3) Représentations actuelles de l’évolution
B) Des idées erronées sur l’évolution
1) Conceptions initiales des élèves de Troisième sur l’évolution
2) La « théorie » de l’évolution
3) Le finalisme, un obstacle pour comprendre l’évolution
4) L’évolution des individus
5) « L’homme descend du singe »
C) Place des mécanismes de l’évolution au collège
1) Les programmes officiels et les mécanismes de l’évolution au collège
2) Place de l’évolution en classe de Troisième
II) Méthodologie de recueil
III) Analyse des données
A) Analyse du recueil de données en amont de la séquence
B) Analyse de quelques exercices donnés aux élèves pendant le chapitre “L’évolution
des espèces” ainsi que les difficultés dans leurs résolutions
C) Analyse du recueil de données après la séquence
D) Analyse de quelques activités réalisées par les élèves au cours de ce chapitre
E) Quelques activités remédiant à l’encrage des conceptions initiales
Conclusion
Annexes
Bibliographie
Remerciements

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