Une valorisation du patrimoine de plus en plus importante
Depuis la Révolution Française, l’Etat a décidé de protéger et de conserver le patrimoine. Ces efforts n’auraient pas d’intérêts si l’on ne mettait pas tout ce patrimoine restauré à disposition de l’ensemble de la population. L’Etat a développé un certain nombre d’actions afin de promouvoir le patrimoine, ces lieux deviennent des endroits de rencontre et d’échange, engendrant ainsi un développement économique, touristique et local. Il existe une direction de l’Architecture et du Patrimoine (la DAPA), elle a pour mission d’améliorer l’accueil du public mais aussi de définir des projets culturels pour tous les monuments ou sites. La dernière mission de la DAPA, et non des moindres, est de réduire les inégalités d’accès à la culture.
Le Ministère de la Culture et de la Communication organise donc une multitude d’actions diverses et variées afin de toucher tous les types de publics : des expositions, des manifestations, des festivals, des visites guidées, des circuits ainsi que des produits multimédia.
La valorisation du patrimoine répond à de nombreux enjeux : culturel, pédagogique, social, touristique et économique. Les manifestations les plus connues sont les journées du patrimoine, le printemps des musées… Les journées du patrimoine sont un événement majeur, créés en 1984. Celles-ci témoignent de l’intérêt des Français pour ces divers lieux : en 2010, plus de 12 millions de visites ont été recensées . Lors de ces journées, tout type de patrimoine est ouvert : architecture civile ou religieuse (ouverte uniquement pour cette occasion comme l’Elysée), des parcs, des jardins, des sites archéologiques, des objets mobiliers, le patrimoine littéraire… cela souligne l’élargissement de la définition du patrimoine. Depuis 1991, les Journées du patrimoine deviennent européennes, près de 50 pays organisent des manifestations semblables.
Le patrimoine entre également dans les classes par le biais des classes patrimoine ainsi que par une charte sur laquelle nous reviendrons dans la suite du mémoire.
Lien entre patrimoine et capital historique
Définition du capital historique
Il s’agit du « stock d’images mentales ou de représentations » acquises par le biais d’un projet ou d’activités transdisciplinaires qui permettent d’appréhender la structuration du temps passé, compétence difficile à acquérir pour de jeunes enfants. Il ne faut cependant pas entendre dans le terme « représentations » de simples stéréotypes : même si les stéréotypes peuvent permettre dans un premier temps, une première image, il ne faut pas en abuser, de peur que les élèves ne retiennent que cela et est donc une vision étroite de l’histoire. Les images mentales sont nécessaires comme peut nous le dire La Garanderie : « La loi pédagogique fondamentale : pour apprendre et comprendre on a besoin d’images mentales. Et c’est une redoutable erreur pédagogique que de séparer l’acte de compréhension de l’image mentale ».
Il évoque deux types d’images mentales à savoir les images auditives et les images visuelles mais chaque individu fait appel à l’un ou l’autre type mais rarement aux deux, il faut donc faire attention aux supports proposés aux élèves afin que les deux types d’ « habitudes évocatives » soient pris en compte lors des apprentissages. Les images mentales vont permettre d’assurer des apprentissages. Dans le cadre du capital historique, cesimages mentales vont être nécessaires car elles vont fonder la culture historique de base desélèves, c’est sur ces images que va être créé les savoirs ultérieurs.
Le capital historique est la découverte d’objets et de réalités du passé. La structuration progressive de la temporalité va passer par le récit ou encore par l’évocation d’événement passé. Il faut que les enfants apprennent à distinguer l’immédiat du passé proche. Cette notion est très difficile à inculquer à de jeunes enfants. D’autant plus, qu’une fois le passé proche appréhendé, il faut les orienter vers un passé de plus en plus lointain. Cette compétence ne pourra être acquise qu’au bout d’un certain nombre d’année, bien au-delà de l’école maternelle.
La définition du capital historique est délicate, les professeurs ne savent pas forcément ce qui se cache derrière cette notion comme nous le verrons par la suite.
Un capital historique pour tous les élèves de maternelle ?
Nous avons expliqué ce qu’était le capital historique de manière générale, mais il faut préciser en quoi il est important en maternelle et surtout à partir de quel âge. En effet, les classes de maternelles sont composées d’élèves âgés entre 2 ans et 6 ans, de la tout petite section à la grande section. Les enfants entre 2 ans et 6 ans n’ont pas le même niveau de compétence et surtout les apprentissages ne se focalisent pas sur les mêmes objectifs.
En effet, les objectifs de la toute petite section et la petite section restent en priorité de développer le langage et le devenir élève. Même si ces compétences restent prioritaires en moyenne et grande section, il est plus facile de mettre en place d’autres activités, et notamment de pouvoir découvrir un espace, un monde et surtout un temps plus loin de celui connu des enfants. Ils parviennent, à cet âge là, à commencer à se décentrer et pouvoir appréhender la notion de passé proche et donc de pouvoir acquérir la notion d’autrefois et d’hier.
Cette notion de capital historique est donc davantage utilisable et applicable à partir de la moyenne section même si certaines bases peuvent être mises en place chez des enfants plusjeunes comme la découverte du musée qui peut être mise en place dès la classe de toute petite section. Il faut cependant préciser que les programmes concernant la maternelle ne sont pas C.
Présentation du corpus
Le choix et la constitution et la cohérence du corpus
Mon corpus est hétérogène mais reste cohérent. Il est composé de documents de différentes natures.
En effet, le premier élément constitutif de mon corpus est basé sur les instructions officielles, il est important de savoir ce que préconisent ces dernières. Ces instructions sont un élément facilitateur de la transposition didactique (élément de cadrage et de choix). Même si les professeurs ont une liberté pédagogique importante, les instructions officielles sont un guide et permettent d’orienter les professeurs quant à leurs choix pédagogiques. Il m’était donc nécessaire d’analyser les instructions officielles ainsi que les documents d’accompagnements (quant à eux moins prescriptifs), d’analyser les programmes de 2008 qui sont encore en vigueur aujourd’hui mais également de prendre en compte leur évolution concernant la notion de patrimoine.
L’analyse des instructions officielles n’est pas suffisante car même si elles sont prescriptives, les enseignants ne les suivent parfois pas à lettre. Il était donc intéressant de voir ce qu’il se passait du coté des enseignants sur le terrain. C’est pourquoi, j’ai décidé d’interroger des professeurs. J’ai pris contact avec deux professeurs de maternelle qui m’ont accueillie. Ces entretiens m’ont fourni un grand nombre d’informations et m’ont permis de confronter deux avis de deux professeurs différents. J’aurais aimé pouvoir assister à des séances afin de voir la réaction des élèves face à un travail sur le patrimoine mais cela n’a pas été possible. Une fois l’analyse des entretiens effectuée, ils m’ont permis d’appréhender la question sous un angle nouveau et surtout de donner du sens aux différentes lectures effectuées pour le mémoire sans pour autant leur donner un statut de « vérité ». De plus, cela rend l’ensemble de mes recherches beaucoup plus concret et fait apparaître des questions auxquelles je n’avais pas accordé d’importance auparavant.
Afin de compléter les entretiens des professeurs, j’ai décidé de réaliser une enquête afin d’élargir l’échantillon et de savoir ce qui se pratiquaient dans les classes de manière plus large. C’est pourquoi j’ai diffusé un questionnaire dans un certain nombre d’écoles. Par ces questionnaires, j’ai pu obtenir une tendance quant à l’utilisation du patrimoine à l’école maternelle.
Je n’ai pu utiliser des manuels spécifiques au domaine de la découverte du monde concernant le cycle 1 du fait de leur rareté.
J’ai également analysé des séances proposées par l’office de tourisme d’Arras et par le musée auxquelles j’ai assisté J’ai ainsi pu voir comment s’articulait l’enseignement du patrimoine dans ces espaces particuliers.
Description détaillé du corpus
Il est nécessaire de se pencher davantage sur certains éléments du corpus à savoir les entretiens et les questionnaires, il est important de savoir qui sont les professeurs interrogés et comment le questionnaire a été élaboré afin de comprendre la finalité attendue de ce corpus.
Mes entretiens se sont déroulés avec deux professeurs de maternelle, l’une avec des moyennes sections et des grandes sections, l’autre avec des petites sections et moyennes sections, à Arras. Je me suis renseignée en amont pour savoir s’ils utilisaient ou non le patrimoine dans leur classe, ainsi je savais qu’ils seraient susceptibles de pouvoir me répondre. En effet, si ces derniers n’utilisaient pas le patrimoine, l’entretien n’aurait eu que peu d’intérêt.
Ces deux entretiens m’ont donné l’occasion d’avancer sur ma réflexion, mon regard sur la question a quelque peu changé. Ils m’ont permis de me rendre compte qu’il fallait approfondir certaines questions plutôt que d’autres et m’ont même apporté de nouvelles questions. Cependant, ces entretiens restent des expériences racontées par des professeurs et n’ont pas statut de références. J’ai donc analysé ces entretiens afin de comparer ce que peuvent penser deux professeurs du patrimoine avec ce que les auteurs peuvent dire. Bien entendu, ils ne sont pas forcément représentatifs de ce que pense l’ensemble du corps professoral.
Le second élément du corpus à expliciter davantage est le questionnaire.
L’échantillon que j’ai obtenu n’est pas forcément représentatif mais il me permet de mettre le doigt sur plusieurs éléments qui sont davantage qualitatifs. En effet, je n’ai pas obtenu beaucoup de réponses (16 pour être exacte) et d’écoles très diversifiées (campagne ou ville).
De plus, j’ai souvent reçu des réponses d’une même école mais de classes différentes, ce qui peut fausser les résultats obtenus car les professeurs d’une même école suivent le même projet d’école et le patrimoine est souvent inclus dans un projet.
La conception du questionnaire a été difficile et j’ai du m’y prendre à plusieurs reprises. J’en avais rédigé un avant mes entretiens, mais ces derniers m’ont permis de l’enrichir et de le préciser. Je me suis rendue compte de la difficulté de sa conception. J’ai tenté au mieux de réaliser un questionnaire accessible à tous et compréhensible par la majorité. J’ai créé des questions à partir de mes lectures afin de voir si les recherches des auteurs (obstacles, intérêts…) et les définitions (capital historique, patrimoine…) écrites par ces derniers étaient en adéquation avec les réponses des professeurs.
D’autres questions concernent davantage la récurrence, les moyens d’utilisation du patrimoine et la réaction des élèves, donc davantage ce qui se passe sur le terrain du point de vue des professeurs. Ces dernières questions ont été quelque fois influencées par les entretiens que j’avais menés auparavant.
Analyse des instructions officielles
Patrimoine et enseignement : évolution de la notion de patrimoine dans les programmes
En 1995, les instructions officielles évoquent le patrimoine : « découverte et observation du patrimoine proche (sites ou objets conservés dans la ville, dans le quartier ou dans la famille) ; questionnement sur des événements du passé, initiation simple à la lecture documentaire, à l’interview de témoins. », « – Éléments de la vie quotidienne : le cadre de vie, le patrimoine et sa conservation, les générations, événements et commémorations. ». Ici, les instructions officielles parlent uniquement du patrimoine proche, ce qui a tendance à restreindre l’étendue de la définition du patrimoine. De plus, ces I.O. n’évoquent que la découverte et l’observation ce qui est assez réducteur.
Les I.O. de 2002 sont plus précises et surtout elles vont donner un sens à l’utilisation du patrimoine, en effet celui-ci devient un outil d’apprentissage, il permet aux élèves de maternelle d’appréhender la notion de temps et d’espace. Voici ce que disent les I.O. de 2002 : « À l’école maternelle, la structuration progressive de la temporalité doit être nourrie par le récit d’événements du passé (ou par le témoignage), mais aussi par la découverte d’objets ou de réalités du passé (patrimoine). Les enfants ont encore de grandes difficultés à distinguer passé proche et passé lointain. L’essentiel reste, en l’occurrence, de leur offrir la possibilité de se donner des représentations de ce qui n’est plus et de commencer à leur permettre de prendre conscience de la différence entre événement passé et événement imaginaire. Ces éléments d’une culture transmise par la voix du maître, par le livre comme par les divers types de médias, seront organisés et structurés à l’école élémentaire. ».
De plus, dans le cadre du plan pour l’éducation artistique et l’action culturelle à l’école, ces I.O. vont être renforcées par la charte pour une éducation au patrimoine publiée le 2 mai 2002 avec une philosophie d’action qui est « adopter son patrimoine », qui s’inspire de l’opération « Adopter un jardin », mise en place à la rentrée scolaire 1996/1997. Son objectif est « de renforcer le partenariat entre les différentes institutions signataires mais aussi de donner un cadre aux différents projets réunissant des établissements scolaires et des structures culturelles ».
Depuis les nouveaux programmes de 2008, le patrimoine semble avoir à nouveau perdu de son importance, en effet les programmes sont revenus à ceux de 1995 : « Dès la petite section, les enfants utilisent des calendriers, des horloges, des sabliers pour se repérer dans la chronologie et mesurer des durées. Ces acquisitions encore limitées seront à poursuivre au cours préparatoire. Par le récit d’événements du passé, par l’observation du patrimoine familier (objets conservés dans la famille…), ils apprennent à distinguer l’immédiat du passé proche et, avec encore des difficultés, du passé plus lointain. Observer et décrire des œuvres du patrimoine, construire des collections ». On peut, cependant, penser que cette perte d’importance est compensée par l’instauration dans les nouveaux programmes de l’histoire des arts (Bulletin officiel n° 32 du 28 août 2008) , qui est introduite dès le cours préparatoire, mais de manière précise, à partir du CE2, en lien avec le programme d’histoire.
Dans ce B.O., le mot patrimoine est présent à de nombreuses reprises mais de manière assez particulière, en effet, le patrimoine semble évoquer des œuvres appartenant au passé et non au présent car il est sans cesse mis en complément avec des œuvres contemporaines : « Ces domaines artistiques sont explorés dans leurs manifestations patrimoniales et contemporaines », « Des connaissances sur un certain nombre d’œuvres patrimoniales ou contemporaines ». Le patrimoine n’est pas clairement défini dans ce bulletin officiel, il semblerait que ce soit toutes œuvres appartenant au passé.
Les programmes à propos du capital historique en maternelle.
On ne parle pas d’histoire à l’école maternelle mais on parle uniquement de découverte du monde : « à l’école maternelle, l’enfant découvre le monde proche ; il apprend à prendre et à utiliser des repères spatiaux et temporels. », la notion de capital historique se retrouve dans l’intitulé : se repérer dans le temps.
Les programmes de 2008 disent que « par le récit d’événements du passé, par l’observation du patrimoine familier, ils apprennent à distinguer l’immédiat du passé proche et, avec encore des difficultés, du passé lointain ». La notion de capital historique n’est pas évoquée en soi mais par contre l’idée y est bien ancrée : la découverte d’événements passés par le biais de différents objets ou récits. Cependant ces programmes sont biens moins clairs que l’étaient ceux de 2002 qui indiquaient clairement que l’école devait susciter chez l’élève toutes les occasions d’une découverte active du monde, et de lui offrir « la possibilité de se donner des représentations de ce qui n’est plus ».
Les nouveaux programmes passent sous silence les enjeux mémoriels et méthodologiques du patrimoine et des traces laissées par le passé. Cette idée de structuration du passé n’est pourtant pas nouvelle, en effet dans les années 1980, Johnson « relevait que certains enfants avaient le privilège de vivre, dans leurs familles, des expériences les mettant au contact des traces laissées par le passé et de se construire ainsi un capital historique, un stock d’images mentales ou de représentations, celui que nous qualifions d’implicite et que la majorité des enfants n’ont pas cette chance et que c’est à l’école qu’ils doivent vivre des expériences analogues : visite des musées,notamment ceux qui sont consacrés aux objets de la vie quotidienne ; visite des sites historiques ; organisation d’expositions d’objets anciens apportés par les enfants eux-mêmes ». D’après Johnson, il faut donc que le patrimoine soit étudié à l’école pour réduire les inégalités d’accès à la culture et que l’ensemble des élèves aient la même culture à la fin de leur scolarité car il existe de trop grande disparité dans les familles.
Analyse des éléments du corpus
Analyse des entretiens et de questionnaires
Par l’analyse, j’ai pu dégager certaines idées qui se retrouvent dans l’ensemble des questionnaires et des entretiens. En effet, quand on se penche sur le patrimoine cité par les différents professeurs, on se rend compte que la majorité d’entre eux utilise uniquement le patrimoine architectural, les autres patrimoines semblent oubliés. Je me suis également attardée sur les mots utilisés par les professeurs lors de leur définition du patrimoine, ces derniers n’utilisent quasiment jamais le même vocabulaire, il y en a donc une multitude : héritage, génération, racine, passé, trace, témoignage, culture, ancêtre, vécu, commun, mémoire. Mais il n’y a aucune unanimité, sans parler des professeurs qui pour définir le patrimoine donne uniquement des exemples, je ferais l’interprétation de cette analyse dans la suite de mon exposé.
En ce qui concerne l’intérêt d’utiliser le patrimoine pour les élèves, il semblerait que le patrimoine soit déclencheur de langage or le développement du langage est essentiel chez les jeunes enfants, c’est un des rôles primordiaux de l’école maternelle.
Quant aux obstacles relevés dans les entretiens et les questionnaires, ils sont essentiellement d’ordre financier et logistique (notamment le souci du transport). Les obstacles pédagogiques et didactiques ne sont que peu évoqués.
Concernant l’intérêt du professeur, il semblerait que la plupart d’entre eux soit intéressé par le patrimoine mais seulement la moitié d’entre eux l’utilise et surtout les professeurs ne donnent que peu de réponses quand je leur demande les raisons de son utilisation du patrimoine. Par contre, lorsqu’ils ne l’utilisent pas la plupart d’entre eux expliquent que c’est lié à l’âge des enfants, ils considèrent que les élèves ne sont pas assez âgés pour prendre conscience de ce qu’est le patrimoine.
Analyse des séances du musée
Je me suis intéressée aux différentes propositions faites par l’office de tourismed’Arras. En effet, il propose des visites de la maternelle au lycée. Il est intéressant de sepencher sur ces séances afin de se rendre compte que le capital historique à l’école maternelle est pris en compte dans ces lieux. De plus, le musée est un lieu essentiel car il permet de palier aux insuffisances de connaissances des professeurs ainsi que d’éviter la peur que peuvent avoir les professeurs d’utiliser le patrimoine. C’est une solution importante pour certains professeurs, qui pourront ainsi « prendre modèle » sur ces séances, prendre appui pour créer par la suite leur propre séance.
L’office du tourisme proposent des jeux de piste avec des objets indices représentés dans les œuvres du musée, des visites thématiques, des visites accompagnées de pratique artistiques ou encore la découverte d’une œuvre d’art particulière. En plus de ce partenariat avec le musée, l’office du tourisme propose des visites de la ville.
Cependant, les offres proposées aux classes de maternelle restent encore rares, elles tendent à se développer. En effet, l’office de tourisme propose notamment un travail sur la constitution d’un capital historique (annoncé avec ce vocabulaire spécifique) grâce à l’histoire des places à travers le marché. Les objectifs de cette visite sont en totale adéquation avec les programmes : structurer le temps à travers un exemple de la vie quotidienne, distinguer un passé récent et un passé ancien (de manière relative). Les élèves doivent prendre conscience des réalités du passé mais aussi être curieux des traces laissés par ce dernier.
L’office de tourisme propose d’observer les commerces sur la place et de dégager les caractéristiques d’un habitat mais aussi d’écouter des extraits sonores de marché. La visite de ces places va être réinvestie lors d’une visite au musée avec l’observation de tableau comme celui de Charles Desavary, La grand’place un jour de marché de 1878.
Interprétation des données
Un patrimoine utilisé ou non et lequel ?
La difficulté à définir la notion de patrimoine
Le premier souci qui entre en compte est la définition du patrimoine, elle ne semble jamais claire dans les entretiens tout comme dans les questionnaires.
Dans les deux entretiens que j’ai pu mener, les professeurs ne m’ont pas donné de définition explicite de la notion de patrimoine. En effet, la première se projette directement dans l’utilisation du patrimoine et ne s’attarde pas sur son essence. Je pense que le professeur a anticipé les raisons pour lesquelles je l’interrogeais, elle a donc axé son propos sur l’utilisation du patrimoine. Mais ce que l’on peut comprendre tout au long de l’entretien est que la notion renvoie à une permanence temporelle ainsi qu’à un espace précis. Il permettrait donc de concilier espace et temps.
Pour le deuxième entretien, le patrimoine n’est pas identifié en tant que tel, le professeur fait une différenciation entre celui qu’elle qualifie d’abstrait pour les élèves qu’elle désigne étant « un patrimoine culturel commun», car il est éloigné des élèves, et le patrimoine local étant un patrimoine concret mais surtout personnel pour les élèves. Elle souhaite donc elle construire un « patrimoine commun à tous les élèves » à partir de ces deux types de patrimoine.
Dans aucune des deux définitions ne transparait la notion d’héritage commun, de legs et de transmission. Elle apparait dans le premier entretien lorsque le professeur évoque la transmission orale entre les parents et les enfants sans pour autant être clairement dit.
Par contre, dans un petit nombre de questionnaires (3 questionnaires uniquement), j’ai pu retrouver la notion d’héritage et d’ancêtre. Ces mots renvoient à la définition scientifique du patrimoine (définition donnée précédemment). Cependant, 5 professeurs interrogés définissent le patrimoine uniquement par une liste d’exemples, une liste exhaustive de différents types de patrimoine (patrimoine architectural…). Ce recours aux exemples montre que les professeurs ne prennent pas en compte la profondeur de la notion et la multitude d’artefacts. Ils ne voient donc pas pour la plupart d’entre eux l’intérêt de l’utiliser. Ils ne l’utilisent pas ou alors uniquement en tant que support et non comme un objet d’enseignement dans son entier. La compréhension et l’appropriation de la définition permet une utilisation plus simple du patrimoine, les professeurs peuvent ainsi se rendre compte qu’ils utilisent du patrimoine même s’ils ne s’en rendent pas en compte. En effet, quand les élèves apprennent une chanson, une comptine ou encore une poésie cela fait partie du patrimoine, mais un patrimoine oral. Cependant, certains professeurs peuvent mal définir le patrimoine et pourtant utiliser des documents ou monuments patrimoniaux en y trouvant intérêt mais sans pour autant l’utiliser dans la constitution du capital historique.
Le patrimoine semble une notion difficile à définir, pourtant il semblerait que certains professeurs pensent qu’il existe un patrimoine particulier à utiliser à l’école et dans les classes.
Le patrimoine étudié à l’école, un patrimoine spécifique ?
Un patrimoine particulier semble être utilisé à l’école, on parle du patrimoine culturel.
Derrière cette notion il y a tout autant les cultures mineures que les cultures majeures avec Rubens, ou Michel-Ange d’un côté et les santons de Provence, les photos de famille de l’autre. De même, elle comprend le tangible et l’intangible : vieilles photos et images mais aussi comptines et histoire. Le patrimoine est tout autour de nous, même celui que nous ne voyons plus, tellement il est omniprésent. La revue HEREDUC donne une définition du patrimoine culturel : « il décrit les traces et expressions de la conduite et de la communication humaines, celles que nous avons héritées de nos ancêtres, que nous choisissons de garder parce que nous leur prêtons une valeur en tant qu’individus et en tant que société. Sans doute, devrions-nous même ajouter, une valeur inestimable.» (p.12, 2005)
Une autre définition est donnée par Gonzalés : « le patrimoine culturel est un construit social qui inclut tous les éléments matériels ou immatériels qu’un groupe, une collectivité, une communauté, un peuple ou une société adopte comme legs du passé. C’est sa dotation dans les temps présents, laquelle doit faciliter l’implication dans une citoyenneté active, critique, et responsable, pratiquée en bonne connaissance de ses valeurs et principes. Il fonctionne comme un héritage qui se transmet aux générations futures pour qu’elles puissent apprendre de lui. »
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Table des matières
Introduction
I. Concepts utiles et dispositif de recherche
A. La définition du patrimoine
1. L’origine du mot patrimoine
2. Définition et évolution du patrimoine
3. Une valorisation du patrimoine de plus en plus importante
B. Lien entre patrimoine et capital historique
1. Définition du capital historique
2. Patrimoine, culture historique et capital historique
3. Un capital historique pour tous les élèves de maternelle ?
C. Présentation du corpus
1. Le choix et la constitution et la cohérence du corpus
2. Description détaillé du corpus
II. Méthodologie d’analyse et analyse des éléments du corpus
A. Méthodologie d’analyse
B. Analyse des instructions officielles
1. Patrimoine et enseignement : évolution de la notion de patrimoine dans les programmes
2. Les programmes à propos du capital historique en maternelle
C. Analyse des éléments du corpus
1. Analyse des entretiens et de questionnaires
2. Analyse des séances du musée
III. Interprétation des données
A. Un patrimoine utilisé ou non et lequel ?
1. La difficulté à définir la notion de patrimoine
2. Le patrimoine étudié à l’école, un patrimoine spécifique ?
B. Une utilisation plus aisée du patrimoine local ?
1. Qu’est ce que le patrimoine local ?
2. Exemple d’utilisation et limites de l’utilisation de ce patrimoine
3. Le patrimoine local, un lien entre les générations ?
C. Les obstacles réels ou ressentis par les professeurs
D. L’intérêt du patrimoine et son impact sur l’enseignement
1. Un support facilitateur d’apprentissage
2. Une contradiction importante
3. L’impact dans les classes
E. Le patrimoine créateur d’identité ?
Les profits professionnels
Conclusion
Bibliographie
Sitographie
Table des annexes
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