Selon les projections des Nations unies (ONU, 2015) la population mondiale serait de 9,7 milliards en 2050. Plus de la moitié de la croissance démographique dans le monde aura lieu en Afrique. La population d’Afrique subsaharienne devrait doubler. Les changements climatiques sont une question déterminante de notre époque. Ils ont des effets sur l’environnement et les activités socio-économiques. En effet, le rendement et la productivité agricole pourraient être perturbés et aggraver le risque de famine, particulièrement dans les régions arides et semi-arides des zones tropicales et subtropicales. Sans action immédiate, il sera beaucoup plus difficile et coûteux de s’adapter aux conséquences futures de ces changements (ONU, 2019). En Afrique subsaharienne l’agriculture est la principale activité de la population (FAO, 2003). Or plus du tiers des sols agricoles sont modérément ou gravement dégradés, affectant ainsi les capacités des populations à se nourrir convenablement (UPADI, 2017; Fimpa Tuwizana, 2018; OMS, 2020). Au Sénégal, 63% des terres arables sont fortement dégradés (Ndiaye, 2017). La perte prononcée de fertilité des sols représente le principal problème de l’agriculture sénégalaise (Ndiaye, 2015; Belmin, 2020, ndiaye 2017). Cela s’observe par la diminution de la production agricole (UPADI, 2017). Face à ce problème, les paysans font recours à l’usage excessif des engrais chimiques (Ndiaye, 2015). Or ces derniers ne permettent pas de corriger la dégradation des terres agricoles mais au contraire participent à leur dégradation (Ndiaye, 2015). Avec les changements climatiques qui affectent les terres, et compromettent la sécurité alimentaire, nourrir le monde actuel et pouvoir nourrir celui de 2050 avec la production biologique devient un challenge. D’où la nécessité de valoriser les produits résiduaires organiques (PRO) pour contribuer à la fertilisation d’une part et à la restauration d’autres part des sols cultivés (Beauvois, 2013; Ntoma et al., 2017). Les PRO sont des matières d’origine résiduaire susceptibles d’être épandues sur les sols agricoles et forestiers dans un but de fertiliser et/ou amender les sols (INRAe et al., 2017). Il s’agit des matières résiduaires issues des activités agricoles (les effluents d’élevage que sont les fumiers, les lisiers et les fientes, les végétaux comme la paille de céréales, la tourbe, les engrais vert), urbaines (les boues d’épuration urbaine, les ordures ménagères, déchets municipaux ) et industrielles (les boues de papeteries, les vinasses de sucreries, les effluents liquides) (Houot et al., 2015). Leur valorisation agricole passe par leur retour au sol (Lashermes et al., 2006). Ceci nécessite la maitrise de leur valeur agronomique. En effet, ils possèdent des propriétés physiques, chimiques et biologiques qui leur permettent d’améliorer la disponibilité des nutriments (NPK), et contribuent à l’amélioration de la qualité physicochimique et biologique du sol ( Pernes-Debuyser & Tessier, 2002; Dragon et al., 2010; Vedie & Leclerc, 2015; ADEME, 2018; Houot, 2018).
Les sols du Sénégal
Au Sénégal, on rencontre plusieurs types de sol dont les sols minéraux bruts de cuirasse, gravillonnaires sur cuirasse, brun-rouge subaride sur sable, ferrugineux tropicaux, ferralitiques sur grès sablo-argileux, halomorphes, hydromorphes, et les sols sulfatés acides sur sables (Khouma, 2002). Il s’agit généralement des sols pauvres en fer et en zinc, qui contiennent des carbonates avec des pH des horizons compris entre 6 et 7 (Khouma, 2002). Leur teneur en carbone est généralement faible . Elle varie de 2 à 15,9t de C /ha (Khouma, 2002; Badian et al., 2020). A Dahra, le carbone du sol est en moyenne 2,61t/ha (Ndiaye et al., 2015). Le modèle Century estime l’évolution du stock de carbone organique de sol de -3,19 à 11,1t de C/ha de 2002 à 2050 en fonction des cultures (Badian et al., 2020). L’azote varie entre 0,012 et 0,12% (Khouma, 2002). A Dahra, l’azote du sol est en moyenne 0,28t/ha (Ndiaye et al., 2015). La zone des Niayes du Sénégal est une zone agro-écologique, périurbaines fortement exploitées. On y rencontre des sols ferrugineux tropicaux peu lessivés, riche en fer mais fréquemment lessivés (Khouma, 2002), des sols carbonatés pouvant être hydromorphes (Ntoma et al., 2017) et des arenosols (Feder et al., 2016).
Les produits résiduaires organiques
Les Produits Résiduaires Organiques (PRO) regroupent les effluents d’élevage et les matières organiques, traitées ou non, provenant de l’agriculture (ex. bois de taille), des activités urbaines (ex. boues de STEP, ordures ménagères), des industries agro-alimentaires (ex. vinasses, plumes, boues de laiteries) et autres industries (ex. boues papetières). Au Sénégal, on rencontre plusieurs types de PRO qui sont utilisés tant en agriculture urbaine que rurale. Il s’agit des produits agricoles (lisiers, fumiers, fientes, les composts), urbains (boues de station d’épuration, déchets ménagers) ou agro-industriels (déchets d’abattoirs, tourteaux, vinasses) (Feder et al., 2016). L’intérêt agronomique de ces PRO n’est plus à démontrer. A titre illustratif, la boue stabilisée issues des stations d’épurations des eaux usées de Dakar contient 3,07g/kg de N total ; 1,31% de P et 0,32% de K de matière sèche avec un rapport C/N faible de 7,4. Le fumier de bovin contient 1,6g/kg de N ; 0,31% de P et 1,66% de K de matière sèche avec un rapport C/N moyen de 16,2 (Badiane Ndour et al., 2016). Une association des engrais chimiques et des PRO permet de booster les rendements. En effet, sur des parcelles recevant à la fois de l’urée et un PRO (fumier) à dose égale à Bélobaka, le rendement des légumes feuilles a augmenté jusqu’à 38% (Thuriès et al., 2016).
La qualité d’un PRO dépend des composantes d’origine et des traitements subis. En effet, les PRO peuvent être des substrats (Girault et al., 2013) qui peuvent être directement utilisé en agriculture pour l’amélioration des rendements (Duchemin, 2020). Ils sont susceptibles de subir des traitements (méthanisation, séchage, compostage) ( Dudkowski, 2000; Roux et al., 2010; Houot et al., 2014).
Traitements des PRO
Le retour au sol de produits résiduaires organiques (PRO) contribue à la fertilisation des cultures (valeur fertilisante) et à l’entretien des teneurs en matière organique des sols (valeur amendante) (Roux et al., 2010). Ils subissent plusieurs types de traitements qui peuvent affecter leur qualité agronomique.
Le séchage
Le séchage est une opération qui permet de réduire de façon considérable le volume de la boue (Arlabosse, 2001). Selon (Roux et al., 2010), lors de la réalisation desincubations en conditions contrôlées, la préparation des PRO influe sur les conditions de minéralisation. Le séchage peut modifier la composition initiale du PRO. Une part de l’azote ammoniacal peut être volatilisée sous forme d’ammoniac.
Le compostage
Le compostage est un processus de dégradation ou de décomposition de la matière organique par les micro-organismes dans des conditions bien définies (présence de microflore, la température, présence d’oxygène, humidité, support organique). Les matières premières organiques, telles que les résidus de culture, les déchets animaux, les restes alimentaires, certains déchets urbains et les déchets industriels appropriés, peuvent être appliquées aux sols en tant que fertilisant, une fois le processus de compostage terminé (FAO, 2005). Le produit issu du compostage est le compost (Berner, 2013; Lopez, 2017). Selon Berner (2013), les apports de composts contribuent à l’entretien et à l’augmentation du stock de la matière organique du sol. Ce qui favorise la séquestration du carbone, améliore la fertilité des sols : stabilisation de la structure, libération d’éléments fertilisants, stimulation d’activités biologiques du sol. Il est apporté en tant qu’amendement organique et son apport répété augmente la fertilité du sol (Berner, 2013; Houot et al., 2014). Cependant, il pourrait ne pas être un bon choix pour les substrats de culture (Lopez, 2017). En effet, les propriétés chimiques et physiques du compost peuvent être très variables. Il contient des taux élevés de sels solubles. Même si les intrants sont constants, les taux de nutriments varient dans les produits compostées. La libération de nutriments (N), est difficile à prédire. L’azote des composts peut être lié aux substrats si le compostage n’est pas complet.
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Table des matières
1. INTRODUCTION
2. SYNTHESE BIBLIOGRAPHIE
2.1 Les sols du Sénégal
2.2 Les produits résiduaires organiques
2.3 Traitements des PRO
2.3.1 Le séchage
2.3.2 Le compostage
2.3.3 La méthanisation
2.4 Minéralisation des PRO
2.5 Valeur agronomique des PRO
2.5.1 Valeur fertilisante
2.5.2 Valeur amendante
2.5.3 Rapport C/N
3. MÉTHODOLOGIE
3.1 Le sol de Sangalkam
3.2 Caractérisation des PRO
3.3 Processus de transformation des PRO
3.4 La minéralisation des PRO
3.4.1 Analyses préalables
3.4.1 Minéralisation du carbone
3.4.2 Minéralisation de l’azote
3.5 Traitement des données
4. RÉSULTATS
4.1 Caractéristiques agro-biochimiques du sol de Sangalkam et des PRO
4.1.1 Caractérisation du sol de Sangalkam
4.1.2 Caractérisation des PRO
4.2 Minéralisation de l’azote N
4.2.1 Minéralisation de N-NH4+
4.2.2 Minéralisation de N-NO3-
4.2.3 Résultats à retenir sur l’azote
4.3 Minéralisation du carbone
4.3.1 Résultats à retenir sur la minéralisation du carbone
5. DISCUSSION
5.1 Minéralisation des PRO
5.1.1 Azote
5.1.2 Carbone
5.2 Influence des traitements sur la valeur agronomique des PRO
5.2.1 La méthanisation
5.2.2 Le séchage
5.2.3 Le compostage
5.3 Influence du type de PRO
5.3.1 L’azote
5.3.2 le carbone
6. CONCLUSION
7. RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
Annexe