LES PROCEDES DE LA PERSUASION DANS LES DISCOURS RELIGIEUX DE SERIGNE SALIOU

Théories de bases

    Notre travail s’inscrit dans le cadre de l’analyse du discours, plus précisément sur le discours religieux. Ainsi les innombrables recherches qui ont été fait dans ce domaine ont connu un développement remarquable. La diversité des moyens utilisés par les salafistes pour atteindre leurs objectifs nous mène à utiliser une démarche éclectique pour l’analyse du corpus retenu. Seront donc empruntés les outils de l’analyse du discours qui est un domaine qui intègre à la fois plusieurs théories pour l’analyse des faits linguistiques. Toutefois, on fait recours à deux théories que sont l’argumentation et les actes du langage et de l’énonciation.

Les religions célestes ou les religions du Livre

    Ces religions, dans le sens où elles possèdent un livre descendu du ciel, qui porte en lui la guidance de Dieu pour les êtres humains, à l’instar du judaïsme au sujet duquel Dieu a révélé son Livre la Thora, révélé à Son Messager Moussa (Moïse), que la Paix soit sur lui, du christianisme au sujet duquel Dieu a révélé son Livre l’Évangile, révélé à Son Messager ‘Issa (Jésus), que la Paix soit sur lui, et l’islam au sujet du quel Dieu a révélé le Coran à l’ultime de Ses Prophètes et Messagers Mohammad (saws). La différence qui existe entre l’Islam et toutes les autres religions dites du Livre est que Dieu a préservé les fondements et les sources de l’Islam, dans la mesure où il constitue le dernier message divin adressé à l’humanité. Ce dernier n’a subi ni altération ni changement, alors qu’il n’a pas préservé les sources et les livres sacrés des autres religions, subissant ainsi, altération, changement et disparition. En principe, toutes les religions célestes forment à l’origine une seule et même religion dans leurs fondements dogmatiques, même si leurs législations diffèrent en fonction de la différence de leurs époques. C’est ce qu’affirme le Coran en disant : « Il vous a légiféré en matière de religion, ce qu’il avait enjoint à Noé, ce que nous t’avons révélé, ainsi que ce que nous avons enjoint à Abraham, à Moïse et à Jésus : « Établissez la religion; et n’en faites pas un sujet de divisions. » (Sourate 42, Verset 13), « À chacun de vous, nous avons assigné une législation et un plan à suivre. » (Sourate 5, Verset 48). Par ailleurs, le Coran affirme que la religion de Dieu est une. Il a fait descendre tous ses livres avec celle-ci, et c’est avec cette religion qu’Il a envoyé ses messagers. Il s’agit de l’islam. Dieu dit : « Certes la religion auprès de Dieu, c’est l’islam. » (Sourate 3, Verset 19). Ainsi, tous les messagers de Dieu étaient musulmans (soumis). : « Abraham n’était ni Juif ni Chrétien. Il était entièrement Musulman (soumis à Dieu) » (Sourate 3, Verset 67), « Et c’est ce qu’Abraham recommanda à ses fils, de même que Jacob: « Ô mes fils, certes Dieu vous a choisi la religion : ne mourrez point, donc, autrement que musulmans (soumis) ! » (Sourate 2, Verset 132). Moïse dit à son peuple: « Ô mon peuple! Si vous croyez en Dieu, placez votre confiance en Lui si vous Lui êtes musulmans (soumis) » (Sourate 10, Verset 84). Les apôtres de Jésus dirent : « Nous croyons en Dieu. Et sois témoin que nous Lui sommes soumis (mouslimoun) » (Sourate 3, Verset 52). Mohammad, le sceau des Messagers (saws) a été envoyé avec l’islam, religion de tous les Messagers, pour confirmer les religions précédentes et ce que contiennent leurs livres respectifs comme vérités religieuses et fondements moraux. De même, le Coran a la prééminence sur ces livres, rectifiant les altérations textuelles et interprétatives qu’a subies la Parole de Dieu, et parachevant les nobles caractères apportés par les messagers de Dieu auparavant, pour qu’ils atteignent leur niveau le plus haut, après que l’humanité ait atteint sa maturité. Dieu dit en s’adressant à Son Messager Mohammad (saws) : « Et sur toi nous avons fait descendre le Livre avec la vérité, pour confirmer le Livre qui était là avant lui et pour prévaloir sur lui. Juge donc parmi eux d’après ce que Dieu a fait descendre. Ne suis pas leurs passions, loin de la vérité qui t’est venue. » (Sourate 5, Verset 48).

Les effets et les utilités de la foi

     Ce qui précède nous a permis de percevoir d’une façon relative les effets de la foi religieuse: il convient de les aborder maintenant indépendamment afin de mieux connaître les utilités de cette structure fondamentale et précieuse de la vie. Tolstoï écrit: « La foi est la chose avec laquelle vivent les Hommes ». Le sage Nacir Khosraw Al-Alawi déclare les vers suivants à l’adresse de son fils: « J’ai tourné le dos à ce bas monde pour me réfugier dans la religion. Car sans religion, la vie est comme une prison. Je possède dans mon cœur une fortune; la religion m’en a fait don, Elle y restera – Ô mon fils! – éternellement et tiendra bon ».

La vérité dans le discours religieux

     Selon la célèbre définition scolastique, la vérité est: On le sait. Il est clair que dans ces conditions, la correspondance qui définit le concept classique de vérité est donc correspondance entre l’ordre des choses et ce qui est effectué dans et par le jugement. A l’égard de cette définition, on peut établir que dans cette formule, il est question d’intelligence. Ce qui fait dire que le discours n’est que l’expression d’une opération de l’esprit, par laquelle celui-ci prend position à l’égard des choses. La vérité dans le discours religieux peut être traduite par l’auto-implication, ce qui signifie en ce sens que le sujet parlant se met lui-même en jeu dans l’acte même qu’il accomplit en prononçant une phrase. Ce, peut être sous la forme d’un engagement déterminé, comme le cas paradigmatique de la promesse, ou par une attitude intérieure. En tout état de cause, le fait que le sujet parlant est capable de se lier lui-même par ce qu’il dit indique qu’il est une espèce d’être qui porte la responsabilité de son propre être. Du coup, la théorie de la force illocutionnaire, dans les conditions de vérité, concerne la signification de façon directe. Ce qui dans « Interprétation et vérité », conduit Jean Ladrière à cette articulation: Toute forme de discours ne relève pas de l’idée de vérité. Ainsi il n y a pas lieu de se demander si un impératif est vrai ou non, mais seulement s’il réussit à faire accomplir ce qu’il a l’intention de faire accomplir. De même, il n’y a pas à se demander si une phrase de remerciement est vraie ou fausse, mais seulement si elle est sincère, si elle est prononcée à bon escient, et si elle est formulée de telle sorte qu’elle remplit son intention, si celui à qui elle est adressée sait réellement qu’il est remercié. Il n y a pertinence de vérité, de l’idée de vérité que pour les formes de discours dans lesquelles le locuteur est porté par l’intention de se prononcer de façon correcte et directe à l’égard d’un état de choses ce qui est le plus souvent attendu dans les discours religieux. Du point de vue des actes de langage, il s’agit des  phrases dont la force illocutoire est celle de l’assertion ou d’une modalité, affaiblie ou renforcée. En effet, dans l’Articulation du sens, la problématique de la vérité est au cœur des préoccupations majeures relatives au statut des énoncés de foi. Et depuis très longtemps, la philosophie analytique de la religion a été aux prises avec deux problèmes majeurs : celui du rapport entre philosophie et religion d’une part, et d’autre part, celui du statut logique des énoncés religieux. De ce fait, la révolution opérée par le second entraine Wittgenstein a suscité un débat inauguré par A. Flew qui, en 1952, mettait en exergue le critère de falsifiabilité. Jean LADRIERE, « Interprétation et vérité », in Laval théologique et philosophique, A vrai dire, le critère de falsifiabilité fut d’abord proposé, en 1934, par Karl Popper (Logik der Forschung) comme critère de démarcation entre ce qui est scientifique et ce qui ne l’est pas. Popper s’est toujours élevé contre l’emploi par les analystes du critère de falsifiabilité comme critère de sens. En revanche, chez A. Flew (Essay on theological Philosophy), le critère de falsifiabilité n’est ni un critère de sens, ni le critère de démarcation entre science et ce qui ne l’est pas, mais le critère des énoncés ayant une valeur cognitive. Ainsi, un énoncé de foi, s’il ne passe pas par le test de la falsifiabilité, ne peut être tenu pour une proposition ayant valeur cognitive, et par conséquent ne peut être admis comme candidat à la vérité .De même, s’appuyant sur ce critère, A. AYER a posé le célèbre principe de vérifiabilité. Selon ce principe, des propositions seront présentes, et chaque proposition correspond à un état de choses: ses unités constitutives ne sont donc ni des choses ni des propriétés mais des situations de fait. Une proposition peut être vraie ou fausse ; elle est vraie si elle exprime un état de choses qui est réalisé en fait, elle est fausse si elle exprime un état de choses non réalisé. Du coup, l’ensemble des propositions fournit une description complète du monde, puisqu’il indique à la fois quels sont les états de choses qui sont réalisés et quels sont ceux qui ne sont pas réalisés. Or selon ce critère, seules les propositions scientifiques sont douées de sens. Il est alors clair que le mérite du second Wittgenstein est d’avoir introduit une autre théorie du langage appelée contextuelle qui a paru réhabiliter le discours religieux. Selon cette approche, l’erreur du positivisme logique a été de s’intéresser à la seule fonction déclarative du langage, celle qui caractérise le discours scientifique, et de prescrire les règles auxquelles toute proposition doit se plier pour avoir un sens. Or, le commandement, la prière, le souhait, la promesse sont des formes linguistiques dont on ne peut nier le sens. Ainsi, si on prend en compte que le langage de la foi est auto-implicatif d’un côté et qu’il est toujours conçu comme étant une connaissance ; il devient alors évident que c’est par là que se découvre son sens et sa vérité. La tradition philosophique nous a légué un concept, celui de « vérité-cohérence ». Ici le concept de vérité se fonde sur l’idée que celui qui confère à une proposition particulière concernant la religion, la qualifie d’être vraie, c’est sa place dans le tout du discours. Dans cette perspective, on peut en ajouter que si l’énoncé DIEU est le créateur est structuré grammaticalement de la même manière que le ciel est bleu, à savoir comme un énoncé unissant un sujet et un attribut à travers la copule est, ils peuvent être interprétés différemment. Le premier, bien loin d’être en effet un simple constatif, un tel énoncé n’a pas besoin d’un Je crois que qui positionne illocutoirement le sujet comme croyant devant autrui, devant lui-même et devant Dieu ; ajoutons qu’une telle parole ne peut évidemment pas être inventée par le sujet individuel : on ne peut la prononcer que comme reçue. Dès lors, dans l’acte religieux où le croyant s’incline tout en s’adressant au Tout puissant, l’énoncé de foi à sa vérité ; c’est là qu’il déploie son essence auto-implicative. Une proposition n’a de sens que si elle est empiriquement vérifiable. Et retenons que la parole de la foi est une parole opérante, c’est pourquoi, le rapport de cette parole à la vérité est différent de celui du discours philosophique ou scientifique, mais doit être compris en fonction de la proclamation et du crédit que lui octroie le récepteur. La foi est ainsi une attitude à l’égard de la révélation, dont ce récepteur ne cherche pas à savoir si elle comporte une vérité au sens logique, mais qu’il reçoit cependant comme vérité, en tenant ce langage pour vrai. En conséquence, le fait de recevoir ce langage comme vrai est de l’ordre d’une décision subjective, d’une adhésion du sujet. J. Ladrière montre clairement que la pensée scientifique n’est pas radicalement séparée de la pensée spéculative et qu’elle croise d’une certaine manière, la composante cognitive de l’expérience religieuse. Ainsi s’éclaire le rapport de la foi à la vérité. Ce qu’elle fait voir, c’est une vérité qui est à la fois monstration et simple annoncée d’elle-même. Ce que l’homme croyant peut comprendre des propositions qu’il proclame, c’est ce qui, en elles, est promesse d’une compréhension à venir. Le rapport de la foi à la vérité est eschatologique, c’est-à-dire qu’il est à la fois pleinement actuel et entièrement à venir. C’est parce que l’intelligibilité propre à la foi est celle d’une vérité eschatologique que nous pouvons comprendre comment et pourquoi la foi est en même temps ratification d’une vérité déjà présente et effectuation d’une vérité à venir. Et Ladrière conclut en ce sens : (…) Mais si la vérité dont il est question dans la foi a ce statut mystérieux, c’est parce qu’elle trouve son fondement ultime dans la parole qui est révélation même et qui s’est annoncée ellemême en disant : « Je suis la Voie, la Vérité et la Vie ». C’est pour quoi dans son ouvrage Le Désenchantement du monde, Marcel Gauchet, quoi que agnostique, l’a bien compris lorsqu’il estime que : Il est certainement vrai que le mode d’intelligibilité des sciences empirico-formelles et formelles est celui de l’opératoire. La valeur de vérité de leurs résultats n’est pas fonction d’un sujet, ni d’une crédibilité, mais d’une application logique. Néanmoins, en ce qui concerne la foi, la vérité et l’intelligibilité doivent être comprises à partir de la proclamation, vécue comme démarche existentielle totale et donc, avant tout comme démarche du sujet ; car ce dont il est question dans le langage de la foi est un objet en train toujours d’advenir, à travers l’évènement de langage que constitue elle-même la parole de foi. Cf. Jean LADRIERE, L’Articulation du Sens En s’exprimant ainsi, écrit A. VERGOTE, à propos de l’énoncé « Je crois en Dieu », le croyant donne une forme expressive à son attitude envers Dieu et il accomplit en même temps son attitude pour lui-même et devant Dieu ; en d’autres termes, son énoncé est expressif et performatif. Cf. Antoine VERGOTE, L’Interprétation du langage religieux, Paris, Seuil, 1974. La religion de l’Incarnation est fondamentalement une religion de l’interprétation. Le Christ comme vrai Dieu doit assumer l’expression qu’il donne de Dieu comme  »Père », et comme vrai Homme, il donne à cette expression sa plénitude de sens. Ainsi, seule l’exacte position médiane, la pleine conjonction d’une humanité complète et d’une divinité intégrale fournissent les conditions de cette ouverture herméneutique où l’autre divin devient indéfiniment interrogeable au travers et au-delà de son mandant à la fois absolument autorisé en sa qualité de Dieu, et absolument différent en sa qualité d’homme. Il s’ensuit qu’il faut admettre que la vérité de foi est de l’ordre de l’interprétation en ce sens que cette vérité est dogmatique. De ce fait, le langage dogmatique est celui qui révèle, dans son énonciation, la dimension cognitive de la foi, à la manière d’une sentence d’interprétation d’un aspect du mystère auquel l’institution donne l’adhésion. Et c’est en ce sens que se pose la question de la vérité. Pierre Gire montre par exemple qu’en écart avec les langages du constat ou de la description visant des états de choses (les phénomènes du monde ou de l’humanité), il s’offre comme un langage recelant différents ordres linguistiques : « ordre auto-implicatif d’engagement de l’institution ; ordre herméneutique de l’interprétation théologique ; ordre performatif de la normativité et de l’effet spirituel ». De ce fait, il n’est pas un langage du monde, faisant état de ce qui advient à celui-ci. En conséquence, sa vérité reste invérifiable dans le cadre des procédures de falsification élaborées par le contrôle des langages scientifiques. Il est un langage de la vie transcendantale où se formule la signification du destin de l’homme à partir d’un horizon de croyance.

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Table des matières

INTRODUCTION
1. Contexte et justification du sujet
2. Problématique
3. Questions de recherches
4. Objectifs
5. Hypothèse
6. Cadre théorique et conceptuel
6.1. Théories de bases
6.1.1. Théorie de l’argumentation
6.1.3. Théorie de l’énonciation
6.2. Concepts clés
7. Méthodologie de la recherche
8. Présentation du corpus
9. Revue de littérature
CHAPITRE 1 : LA RELIGION
1.1. Les types de religion
1.2. Les aspects de la religion
1.3. Statut du discours religieux
1.4. Le sacré
1.5. La foi religieuse
1.6. La vérité dans le discours religieux
CHAPITRE 2 : L’ISLAM
2.1. La pratique de l’islam
2.2. Le mouridisme
CHAPITRE 3 : ANALYSE DU CORPUS
3.1. Analyse du corpus
3.2. La théorie de la persuasion
3.3. La construction de l’ethos
3.4. Le pathos et l’empathie
3.5. L’autorité
3.6. L’emploi des hadiths et des discours rapportés
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIES

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