Ce présent travail d’étude et de recherche sur le terroir de Guéréo, est inspiré par l’intérêt porté sur la GRN. Cet intérêt est nourri et sauvegardé par l’Etat du Sénégal, signataire de nombreuses conventions en rapport avec l’environnement. Le lancement de la stratégie mondiale de la conservation en Mars 1981 sous l’égide de l’UICN et du PNUE, a jeté les bases d’une politique de gestion des ressources naturelles. C’est ainsi que le Sénégal a initié une stratégie nationale de conservation (1982). Le sommet de la terre de Rio (1992), un exemple patent de la mondialisation du phénomène environnemental, a vu naître le concept de développement durable. C’est selon Gland (1991) une manière « d’améliorer les conditions d’existence des communautés humaines tout en restant dans les limites de la capacité de charge des écosystèmes ». En d’autres termes, le développement durable « répond aux besoins des générations présentes sans compromettre ceux des générations futures» (rapport BRUNDTLAND 1987). Cet objectif devrait avoir comme soubassement la démarche participative. Au Sénégal, l’adoption de la loi 96 – 07 portant transfert de 9 domaines de compétences aux collectivités locales dont l’environnement et les ressources naturelles a accompagné cette démarche. Dans ce présent mémoire, le diagnostic de la participation des populations dans l’effort de réhabilitation et de conservation des ressources naturelles nous a conduit à partir de l’étude du cas de la Réserve Naturelle de Popenguine (RNP) et plus précisément de l’ENC Keur Cupaam.
Toutefois, faudrait il préciser que notre travail, loin d’avoir la prétention d’étudier la RNP ou l’ENC de façon exclusive (car ayant fait l’objet d’études et de recherches diverses), se veut de prendre ce cas de gestion participative comme entrée dans l’étude du terroir de Guéréo, une des 9 localités de l’ENC. Le choix de Guéréo qui n’est d’ailleurs pas neutre, s’explique entre autre par l’inexistante d’études faites spécifiquement sur cette partie jusque là. C’est donc une occasion que nous avons saisi pour montrer l’effort de gestion des ressources naturelles par la population, ses relations avec l’ENC Keur Cupaam. Ce thème d’étude va nous permettre aussi de faire le diagnostic du terroir de Guéréo en montrant ses potentialités économiques, sociales, écologiques et par la même occasion d’élaborer un inventaire des acteurs impliqués dans la gestion du terroir villageois.
PROBLEMATIQUE
CONTEXTE DE L’ETUDE
L’environnement et les ressources naturelles sont de tout temps victimes de dégradation, de surexploitation à travers les différents systèmes de production, bref de l’action anthropique mais aussi naturelle. L’intensification de ces actions néfastes conduit à la longue, à la destruction des sols, de la flore et de la faune. Ceci explique en grande partie la convocation d’abord de la conférence des nations unies à Stockholm en Juin 1972 et ensuite à celle de Rio de Janeiro du 03 au 14 Juin 1992, toutes les deux relatives aux questions environnementales. Ainsi à Rio, une panoplie de principes fut adoptée destinée à la protection de la nature, pour un développement durable mais aussi, prônant la participation des citoyens (principe 1 et 10) . Toutefois le Sénégal connait une longue tradition de protection de l’environnement. Dans le domaine forestier on note un domaine dit protégé (non classé) et un autre dit classé. Ce dernier qui couvre 31,7% de la superficie du pays(PAFS, 1993) est composé des réserves spéciales, des périmètres de reboisement et de restauration, des parcs nationaux, des forêts classées et des réserves naturelles intégrales. Au Sénégal, la direction des eaux, forêts, chasse et conservation des sols (DEFCCS) et la Direction des Parcs Nationaux (DPN) sont des structures en charge de la gestion de ces espaces protégés. Certes, le taux de couverture de 12%(norme internationale) du territoire national des aires protégées n’est pas encore atteint.
Aujourd’hui, dans le cadre de la gestion des ressources naturelles et de la protection de la biodiversité d’autres espaces se sont développés et ont pour nom :Aire Marine Protégée(AMP) ,Réserve Naturelle(RN),Réserve Communautaire(RC) ,Espace Naturel Communautaire(ENC),Aires du Patrimoine Communautaire(APC). De ces expressions, il convient de retenir le vocable « communautaire ». Il traduit dans une certaine mesure l’implication des acteurs locaux dans la gestion de l’environnement, ce qui sous entend une approche participative .Celle-ci est corollaire à l’approche gestion des terroirs. La gestion des terroirs est une approche de développement rural basée sur la participation et la responsabilisation des populations pour une meilleure gestion et valorisation des ressources naturelles de leur terroir. Elle correspond à une approche d’autopromotion et vise à intégrer les populations villageoises aux différents stades de conception, de mise en œuvre et de suivi évaluation des actions. Toutefois, l’approche terroir est revigorée suite au constat d’échecs des actions de grande envergure des gouvernements de la sous région, menées par le passé dans le cadre notamment de la lutte contre la désertification . Dés lors, l’approche apparut comme une méthodologie particulièrement adaptée et susceptible d’assurer une durabilité aux actions entreprises. Au Sénégal ce changement d’attitude a été favorisé par le processus de décentralisation avec la redéfinition du rôle et le désengagement progressif de l’Etat des activités de production et de gestion. Le Sénégal, bénéficiant d’une longue tradition de décentralisation a franchi un pas décisif en 1996.
En effet, les articles 16 à 53 de la loi 96 – 07 transfèrent aux collectivités locales et donc à la communauté rurale des domaines de compétence qui relevaient jusque là de la compétence de l’Etat. C’est ainsi que désormais, entre autres domaines, l’environnement et les ressources naturelles sont du ressort de la communauté rurale qui associe à leur gestion les populations locales.
LE CADRE CONCEPTUEL
Gestion
La gestion est une notion très usitée et peut être appliquée à tous les domaines de la vie de la société qui nécessitent une certaine administration, une certaine organisation. C’est ainsi que selon le petit Larousse, gérer c’est l’action d’administrer, de diriger, d’organiser quelque chose.
C’est un mode d’intervention qui consiste à utiliser et à valoriser une catégorie de ressources naturelles ou de l’environnement en vue de satisfaire des besoins préalablement définis et sans compromettre les possibilités de renouvellement (Titre 1, article 2 du décret n° 96-1134 du 27 Décembre1996 portant application de la loi portant transfert de compétence.).
Terroir
Le terroir est défini selon la loi sur le domaine national comme un « ensemble homogène de terres du domaine national nécessaire au développement de la population du ou des villages qui y sont implantés, y ayant des intérêts ruraux communs » Paul Pélissier et G. Sautter (1970) le désignent par « une portion de territoire appropriée, aménagée et utilisée par le groupe qui y réside et y tire ses moyens d’existence » Le terroir est un espace occupé selon divers systèmes d’utilisation des ressources. Il se caractérise par une double réalité. Il s’agit d’abord d’un espace « naturel »dont les particularités sont déterminées par des données d’agro – pastorales. Il s’agit ensuite d’un espace « socialisé » car chaque terroir est en effet occupé par une ou des populations qui y projettent ses droits d’occupation, d’usages, ses disciplines, son système de production, ses techniques de conservation des ressources naturelles. (Diatou Thiaw) L’organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) définit le terroir comme un espace géographique variable, d’habitude limité, qui contient l’ensemble des terres contrôlées par une communauté donnée, les terres cultivées, les jachères, les zones sylvo – pastorales et la brousse. Cette définition semble occulter une portion importante du concept à savoir le terroir halieutique. Par terroir halieutique nous entendons : un espace localisé dans une zone de pêche ou de cueillette (mer, lagune) que s’approprie un groupe d’individu qui y tire ses moyens d’existence. Cependant, les limites du terroir halieutique sont souvent indéfinies. Les communautés exploitant ces terroirs leurs donnent souvent des noms. C’est le cas à Guéréo où les pêcheurs Lébou divisent l’espace halieutique en 4 zones : Kélleu : c’est la partie constitué par la haute mer, où seules les pirogues motorisées peuvent accéder (pour la pêche traditionnelle). Biti : c’est la partie proche de la terre ferme. Dans ces endroits, les pêcheurs peuvent apercevoir les habitations. C’est l’aire de pêche des pirogues non motorisées. C’est également là où se pratique la pêche à la senne. Lorsqu’il y’a un « mauvais temps » (brouillard, forte orage), les pirogues motorisées quittent la haute mer (kélleu) pour entrer dans la zone proche de l’estran (Biti). Goppa : c’est la partie Nord de la mer. Mais, il faut signaler que la position Nord ou Sud en mer, c’est par rapport aux zones d’embarquement. Tankka : c’est la partie Sud de la mer par rapport au point de départ.
Gestion des terroirs
La gestion des terroirs est une approche de développement rural basé sur la participation et la responsabilisation des populations pour une meilleure gestion et valorisation des ressources naturelles de leur terroir. L’approche gestion des terroirs correspond à une approche d’autopromotion et elle vise la responsabilisation des populations villageoises aux différents stades de conception, de mise en œuvre et de suivi – évaluation des actions .L’approche gestion terroir prend en compte des expériences et connaissances locales. Cette gestion participative apparaît comme une alternative aux stratégies précédentes caractérisées par une prééminence des acteurs gouvernementaux. Elle constitue maintenant une volonté politique de responsabiliser les communautés dans la gestion de leur environnement. Elle se manifeste par une politique de décentralisation avec le transfert de compétence aux collectivités locales.
Ressources Naturelles
C’est est une notion d’abord écologique. Elles correspondent à l’ensemble des potentialités qu’offre le milieu physique et dont dispose ou peut disposer une collectivité, un pays. Les ressources naturelles sont l’ensemble des ressources comprenant l’eau, l’atmosphère, le sol, la faune, la flore et les combustibles fossiles (Titre 1, article 2 du décret n°96-1134 du 27 Décembre 1996 portant application de la loi portant transfert de compétence). Les ressources naturelles sont donc l’ensemble des potentialités fournies par la nature avant l’intervention de l’homme. Qu’elles soient renouvelables ou non ou même permanentes, il convient de mettre en évidence le caractère épuisable des ressources naturelles. La destruction de ces dernières par des facteurs naturels et anthropiques a conduit à la mise sur pied de site où l’exploitation de ces ressources est réglementée.
Réserve naturelle
Cette notion s’intègre dans une autre plus globalisante « aire protégée ». Toutefois, toutes ces deux notions témoignent de la volonté de conserver la biodiversité .Le Sénégal s’est très tôt engagé dans la protection de la nature comme en témoigne la ratification de la convention africaine sur la conservation de la nature et des ressources naturelles de 1968. Cette convention définit trois types d’aires protégés :
– Les réserves naturelles intégrales
– Les parcs nationaux
– Les réserves spéciales
La réserve naturelle permet de maintenir les conditions naturelles nécessaires pour la protection des espèces, groupes d’espèces, communautés biologiques. Mais il peut arriver qu’un prélèvement contrôlé soit autorisé.
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Table des matières
INTRODUCTION GENERALE
PROBLEMATIQUE
METHODOLOGIE
PREMIERE PARTIE : PRESENTATION DU TERROIR DE GUEREO
CHAPITRE I : LOCALISATION DU TERROIR ET ETUDE DU CADRE PHYSIQUE
CHAPITRE II : LE CADRE HUMAIN
DEUXIEME PARTIE : LES POTENTIALITES SOCIO ECONOMIQUES DU TERROIR ET LA DYNAMIQUE DES ACTEURS
CHAPITRE I : LES POTENTIALITES SOCIO ECONOMIQUES DU TERROIR
CHAPITRE II : L’INVENTAIRE DES ACTEURS DE LA GESTION DU TERROIR ET L’ACCES A LA TERRE
TROISIEME PARTIE : LA GESTION DES RESSOURCES NATURELLES ET SES IMPACTS SUR LE TERROIR
CHAPITRE I : LES MODELES DE GESTION DURABLE DES RESSOURCES NATURELLES
CHAPITRE II : LES IMPACTS DE LA GRN SUR LE TERROIR
CONCLUSION GENERALE
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
TABLE DES MATIERES
LISTE DES ILLUSTRATIONS
ANNEXE