Selon Peter DRUCKER « La grande majorité des innovations réussies exploitent le changement ». Cette affirmation qui s’avère parfaite, du moins en ce qui concerne les nouveaux moyens de transfert d’argent de ces dernières décennies. En effet le développement des moyens de communications actuels, notamment l’INTERNET successeur d’ARPANET et les cellulaires mobiles connus sous le nom de «PORTABLE », constitue une révolution dans le monde contemporain. En conséquence plusieurs activités sont remises en cause, et les plus remarquables sont : l’activité postale et l’activité bancaire. En d’autres termes la poste et la banque sont les plus touchées par le changement car actuellement on n’a plus besoin d’aller dans une poste pour envoyer une lettre mais il suffit de surfer sur internet et d’envoyer un mail. En outre en ce qui concerne la banque on peut actuellement traiter avec sa banque et accomplir des opérations bancaires tels que le transfert d’argent, les achats, la consultation et la demande des relevés de compte sans se présenter physiquement auprès de cette dernière. Pourtant l’activité postale ne présente pas beaucoup d’intérêt car elle figure parmi les professions qui subissent le monopole d’Etat. Ainsi seul le bouleversement subi par l’activité bancaire, menée par une personne commerçante, mérite d’être étudié.
Analyse du système e-cash
Les portes monnaies mobiles, malgré la dénomination spéciale, présentent des caractères similaires à celui d’un compte bancaire. De ce fait trois remarques préalables s’imposent : la première réside dans la nécessité de la présence des autorités monétaires notamment celle de la CSBF tout au long de l’existence de cette opération. Une solution qui paraît être équitable car « e-cash » n’est pas totalement étranger au système monétaire. Au contraire, dans une certaine mesure, il pourra être utile dans l’innovation du système actuel.
La deuxième remarque concerne les parties présentes dans ce système. Etant donné que « e-cash » est un nouveau moyen pour effectuer des opérations financières notamment le retrait d’une somme d’argent et le paiement de ses créanciers ou fournisseurs, mais à la différence des anciens moyens dont le virement et les cartes bancaires il exige la présence d’autres partenaires à savoir l’opérateur téléphonique, les grossistes et les détaillants.
La dernière remarque repose sur les qualités des partenaires de l’établissement de crédit dans ladite opération. En effet la loi bancaire, en ses dispositions, a voulu faire de ces autres opérateurs, contribuant à la bonne marche de l’opération « e-cash », des intermédiaires en opérations de banque. En fait ce sont les personnes qui, selon l’alinéa 1 de l’article 62 de la loi 95-030, à titre de profession habituelle, mettent en rapport, sans se porter ducroire, les parties intéressées à une opération de banque dont l’une au moins est un établissement de crédit. Or dans la pratique ; ces partenaires, du moins les opérateurs téléphoniques, ne sont plus des intermédiaires dans le premier sens du terme car non seulement il traite avec leurs propres clients mais actuellement, ils participent personnellement à la réception des fonds des clients qui entrent dans le cadre des opérations de banque tel qu’il est défini à l’article 3 in fine de la loi précitée « Les opérations de banque comprennent la réception de fonds du public, l’octroi de crédits, la mise à disposition du public ou la gestion de moyens de paiement ».
Eléments préalables avant même l’existence de l’opération dite « e-cash »
l’interférence des contrats
Une convention de mandat
Le siège de la matière est l’article 63 de la loi bancaire, selon lequel « Les intermédiaires en opérations de banque exercent leur activité en vertu d’un mandat écrit délivré par un établissement de crédit. Ce mandat définit la nature et les conditions des opérations que l’intermédiaire est habilité à accomplir ». Au regard de cet article on devrait faire une analyse sur les conditions de ce contrat de mandat et sur les sur les effets de celui-ci sur les parties .
Les conditions de validité du contrat de mandat exigé par la loi bancaire
Comme tout contrat, celui-ci obéit à des conditions de fond et de forme. Dans la première ligne se situent les conditions classiques de validité d’un contrat à savoir : le consentement, la capacité de contracter, la cause et l’objet que l’on ne va pas étudier dans les détails parce que l’analyse minutieuse de ces quatre conditions fait l’objet d’une autre matière qui est le droit de contrat . En plus seule la première condition mérite une attention particulière car les trois autres conditions sont classiques et facile à appréhender dans l’opération e-cash. En effet seul le consentement nous retient car si dans d’autres domaines l’intégrité et l’existence de ce consentement sont les premiers moyens de défense mis à la disposition des parties contractantes. Désormais dans l’opération « e-cash » la qualité des parties contractantes qui sont tous des professionnels conscients de l’étendue de leurs engagements ne pose plus aucun problème. En plus l’article 63 de la loi bancaire exige que la convention de mandat définie exactement la nature et les conditions des opérations que l’intermédiaire est habilité à accomplir. En d’autres termes les mécanismes qui vicient le consentement, notamment l’erreur et le dol, ne présentent pas beaucoup d’intérêt car non seulement les parties contractantes sont des experts en la matière mais, en outre, elles sont aussi guidées par le texte sur le contenu du contrat.
Une deuxième condition qui tienne au caractère du mandat lui-même. En effet pour pouvoir donner mandat à quelqu’un il faut que le mandant donneur d’ordre soit titulaire de la chose qui fait l’objet du mandat. En conséquence l’objet du mandat dans le cadre des portes monnaies mobiles devra figurer parmi les activités que l’établissement bancaire est autorisé à effectuer. Ainsi si « e-cash » entre dans la classe de ces opérations il pourra faire partie des opérations susceptibles d’être données en mandat. On a déjà défini « e-cash » dans l’introduction, ainsi il nous reste à savoir quelle est sa nature juridique. Est-ce une opération entrant dans le champ des opérations bancaires ? C’est la combinaison de l’article 3 et de l’article 6 de la loi bancaire qui nous permet de donner une réponse adéquate. En effet c’est le premier qui nous donne une liste des opérations qu’ un établissement de crédit « ce sont les organismes qui : effectuent à titre habituel des opérations de banque » ; et en son dernier alinéa il nous définit ce qu’est une opération de banque « Les opérations de banque comprennent la réception de fonds du public, l’octroi de crédits, la mise à disposition du public ou la gestion de moyens de paiement. ». Etant donné que la finalité de l’opération « ecash » consiste notamment à pouvoir payer les créanciers. C’est en fait un moyen supplémentaire mis à la disposition de la clientèle pour transférer des fonds qui entrent dans le cadre de l’article 6 qui définit les moyens de paiements comme « tous les instruments, qui, quel que soit le support ou le procédé technique utilisé, permettent à toute personne de transférer des fonds ». Cela nous amène à conclure que l’opération « e-cash » entre bel et bien dans le cadre des opérations que les établissements bancaires sont habilités à effectuer.
Les effets de ce contrat
Car le texte a voulu instituer une représentation parfaite dans la relation du banquier et de l’opérateur de téléphonie mobile, de telle manière que l’opérateur mandataire ne fait que représenter la banque et que tous les actes sont faits au nom de cette dernière suivant la définition donnée par l’article 132 de la loi sur la Théorie Générale des Obligations « La représentation est le fait, par une personne nommée représentant, d’agir dans la passation d’un acte juridique, au nom et pour le compte d’une autre personne nommée représenté, dans des conditions telles que les effets de l’acte se réalisent directement dans la personne du représenté ». Dans la pratique les choses se présentent autrement, l’opérateur intermédiaire traite directement avec ses propres clients sans avoir besoin de révéler son identité. En effet les clients qui utilisent « e-cash » croient que le contrat qui les lie avec l’opérateur téléphonique est le seul contrat dans cette nouvelle modalité et que le système e-cash est un compte que seuls les opérateurs détiennent et à cet effet distinct des comptes bancaires. De plus l’opérateur, à travers ses comportements, n’exprime pas d’une façon claire et précise que dans cette opération il a l’intention d’agir pour le nom et pour le compte de l’établissement bancaire cocontractant. C’est pourquoi on pourrait dire que la représentation qui existe dans la relation banquier – opérateur n’est qu’une représentation imparfaite et le mandat donné par le banquier ne produit effet que dans ses relations avec l’opérateur téléphonique. En revanche dans les relations avec les tiers l’opérateur demeure le seul responsable.
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Table des matières
INTRODUCTION
TITRE I : ANALYSE DU SYSTEME E-CASH
Sous titre I : éléments préalables avant même l’existence de l’opération dite «e_cash »
Chapitre I : l’interférence des contrats
Section I : la convention de mandat
Section II : le contrat de distribution
Section III : le contrat de dépôt
Chapitre II : l’autorisation de la CSBF
Section I : l’utilité de cette autorisation
Section II : la procédure d’octroie :
Section III : l’exécution de l’autorisation délivrée par la CSBF :
Sous titre II : Analyse proprement dite de l’opération e_cash
Chapitre I : l’ouverture du compte
Section I : la convention d’ouverture de compte :
Section II : les caractères du contrat d’ouverture
Section III: les personnes pouvant être titulaire des comptes
Chapitre II : le fonctionnement du compte e-cash
Section I : le crédit du compte
Section II : le débit du compte
Chapitre III : la clôture des comptes e-cash
Section I : les causes
Section II : les effets de la clôture
TITRE II : LES RISQUES QUE PEUVENT ENCOURIR LES PARTIES DANS L’OPERATION E-CASH
Chapitre I : Les risques encourus par les clients dans l’opération
Section I : les gammes de clients touchés par l’opération e-cash
Section II : l’absence de protection efficace offerte à la clientèle
Section III : les risques encourus par les clients sur la superposition de deux professionnels dans ce type d’opération :
Chapitre II : les risques qui pèsent sur le banquier évalués comme la contre partie des avantages qu’il tire de l’opération :
Sous chapitre I : les avantages obtenus par lé banquier dans ladite opération :
Section I : L’opportunité de croissance à la portée des établissements de crédits
Section II : La perception d’une double commission sur une même opération
Sous chapitre II : Les risques supportés par l’établissement de crédit :
Section I : les risques bancaires traditionnels :
Section II : les nouveaux risques bancaires :
Section III : L’accroissement de la responsabilité de la banque :
Chapitre III : Les risques encourus par les opérateurs de téléphone mobile et ses éventuels avantages dans l’opération e-cash:
Sous chapitre I : les avantages tirés de l’opération :
Section I : l’opération e_cash : « vers un assouplissement de l’interdiction de parasitisme économique »
Section II : e-cash : accroissement progressif des marges commerciales
Sous chapitre I : Les risques générés par l’opération
Section I : Extension massive de ses obligations :
Section II : Accroissement de la responsabilité de l’opérateur :
Sous section I : Des Obligations nouvelles engendrées par l’opération
Sous section II : Des Obligations empruntées aux autres opérations juridiques :
Sous section I : les cas de responsabilité prévus par la loi bancaire :
Sous section II : Une responsabilité civile bien définie :
TITRE III : LES PROBLEMES ENGENDRES PAR L’OPERATION E-CASH SUR LES AUTRES DOMAINES JURIDIQUES
Chapitre I : Menace qui persiste sur le plan concurrentiel :
Section I : La loyauté commerciale
Section II : Risques subis par le droit de la concurrence
Section III : Le droit de la consommation
Chapitre II : e-cash un moyen d’évasion aux règlementations bancaires
Section I : e-cash : serait-il une limite au monopole bancaire ?
Section II : la menace subie par les dispositions permettant de sanctionner les émetteurs de chèques sans provision notamment la loi 2004-045
Chapitre III : e-cash et blanchiment d’argent
Section I : Le blanchiment de capitaux et la lutte contre ce phénomène :
Section II : e-cash un dépassement qui peut pousser à la facilitation des blanchiments de capitaux
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE