Les photographies du moment inaugural par Marcel Gautherot : une construction patrimoniale ?

Courte historiographie : l’objet photographique pris dans les processus sociaux et historiques

L’histoire de la photographie classique : circuits et acteurs

L’histoire de la photographie, conçue donc comme un tout cohérent pouvant faire discipline, est, écrit André Gunthert, une idée datée des années 1980, caractérisée par le contexte de « l’essor du marché de la photographie et une expansion du dispositif institutionnel et muséal, ainsi que par une alliance des marchands, des conservateurs et deschercheurs ». Héritière de l’histoire de l’art, elle a produit un grand nombre de synthèses classiques et narratives tant sur les dispositifs techniques et leurs évolutions , l’histoire des courants et des formes auxquels nombre d’histoires de la photographie font la part belle, que sur l’inscription de la photographie dans un circuit ou un marché aux acteurs nombreux quiont eux-mêmes des rôles variés. De cela, bien sûr, ressort l’importance de la nature matériellede la photographie (d’avant le numérique), de son statut d’objet et donc, nécessairement, deson historicité.
Autour du schéma de communication classique de l’émetteur-artiste, du message-œuvre et du récepteur-spectateur, les récits historiques sur la photographie complexifient ces schémas dans le cadre des différents contextes. Deux exemples brésiliens suffiront à lemontrer11, le premier autour de Dom Pedro II (1831-1889) et le second de Brasília.
L’empereur Dom Pedro II, à l’éducation soignée, a développé un goût pour les humanités (sa bibliothèque personnelle compte plus de 20 000 livres) mais aussi pour les avancées scientifiques. Monarque photographe, il préfère la représentation photographique aux portraits peints classiques, et l’adopte en symbole de modernité et de légèreté, favorisant ainsi la multiplication de sa présence sur le vaste territoire. Associés à la monarchie, les portraits photographiques deviennent des objets de prédilection pour la haute société et des professionnels liés à la famille impériale développent ainsi une clientèle. Devenant photographe, le monarque donne sa légitimité à la pratique, et l’élite suit, validant par là son statut. Marie-Madeleine Ozdoba, dans un court article sur les images de Brasília où elle présente des réflexions en rapport avec ses recherches, souligne à grands traits le rôle de la photographie en tant que support de la diffusion de l’architecture de Brasília comme « ville de demain » ou « capitale de l’ère atomique » . Elle repère divers types d’images, des plans, photographies et photographies de maquettes, diffusées notamment dans la presse spécialisée, et d’autres encore diffusées sur des supports de « vulgarisation » (télévision, presse grand public, encyclopédies), et au cinéma. À partir de là, elle pose des perspectives de recherches plurielles : elle veut étudier d’une part dans quelle mesure les photographies de Brasília ont fonctionné comme un moyen de diffuser et de faire exister l’architecture moderne dans le monde en donnant à voir cette architecture « à l’état réalisé », d’autre part les différents niveaux de la mise en fiction qui transparaît à travers ces photographies, leurs commanditaires, leurs réseaux de diffusion et leurs destinataires.
Qui est l’émetteur, qui est le récepteur et comment le message passe-t-il de l’un à l’autre ? Ce sont là des questions centrales que l’historien doit se poser à nouveau : le photographe portraitiste là et d’architecture ici, assurément, doivent être les émetteurs, maiss’ils se rattachent à un atelier, lui aussi doit faire partie de cette catégorie, en tant qu’il a une identité tant par la qualité de ses clichés que par la renommée de sa clientèle, et les commanditaires – le roi et l’élite brésiliens qui viennent se faire tirer le portrait, les architectes et constructeurs de Brasília – par le cahier des charges plus ou moins strict qu’ils fixent sont eux aussi les émetteurs de ces photographies. Les récepteurs eux aussi sont variés pour la même image : lecteurs de la grande presse illustrée ou des revues professionnelles d’art et d’architecture, ou même spectateurs de l’Homme de Rio, sont touchés par les images de la nouvelle capitale du Brésil dans le temps même de sa construction. Dans chacun des deux exemples, la photographie circule pour rendre présent là, l’empereur lui-même, et ici la lointaine Brasília. Poser des acteurs variés, c’est inscrire la photographie dans un réseau et des rapports sociaux, et donc l’établir en médiation entre ces acteurs, rendue possible par son caractère facilement reproductible, au moins depuis la mise au point du calotype en 1841 par Talbot, et l’usage du collodion lancé par Dis déri en 1851 . Et il est impératif de connaître ces réseaux pour comprendre le sens qui traverse les photographies car elles le trouvent en partie« dans la manière dont ceux qui sont impliqués dans leur élaboration les comprennent, les utilisent et leur attribuent donc du sens ».

La fin de l’histoire de la photographie ou la réévaluation de l’acte et de l’objet photographiques : sous l’apparence d’immédiateté, les construits de la photographie

Les « nouveaux “spécialistes” » des études visuelles ne sont plus aujourd’hui persuadés de l’unité de l’histoire de la photographie. Olivier Lugon situe la désagrégation du champ disciplinaire au tournant numérique que l’on connaît actuellement, qui « a rendu caduque l’opposition longtemps structurante entre le document indiciel d’une part et la peinture et les images fabriquées d’autre part » . Et André Gunthert développe deux arguments supplémentaires, le premier qui relève du fonctionnement des politiques culturelles de l’État et des institutions culturelles, et le second sur l’incapacité du champ disciplinaire à fonder son autonomie sur une compétence propre, le mettant toujours au service des sciences sociales et humaines comme la sociologie, l’anthropologie, ou la communication. C’est certainement l’ouverture trans-disciplinaire qui commence à caractériser les nouvelles approches des sciences humaines, qui sous-tend aussi à rebours ce dernier argument. Ouverture qui permet de re-penser aujourd’hui plus largement la notion du document comme trace et source en prenant en considération les logiques propres à l’objet – qu’elles soient historiques, techniques et artistiques : « La définition courante chez les historiens du document comme trace suppose à la fois deux agents (le témoin et celui ou celle qui relève le témoignage) et un support, qui implique lui-même une inscription spatiotemprelle. Ce jeu à quatre termes est trop souvent réduit à un défilé ou à une mise en récit, naturaliste, unidimensionnelle, de preuves d’existence qui doit imposer une identification compassionnelle. (…) L’exigence artistique permet de rendre au témoignage sa teneur de document, de lui restituer une étrangeté, une opacité, en repoussant l’empressement des interprètes. S’il est une forme, plus qu’un genre médiatique, le document extrait le témoignage du répertoire des différences pour lui donner l’évidence d’une altérité. »
C’est, ici consommée, la fin de l’opposition positiviste simple selon laquelle un réel objectif serait le lieu de la vérité quand les activités de l’esprit sont conçues comme celui de la subjectivité. Mais cela n’est possible qu’à partir du développement de la théorie photographique: les photographies sont toujours déjà comprises dans deux domaines. D’une part, dans l’indicialité technique telle que Rosalind Krauss l’a théorisée en 1977, en reprenant le concept sémiotique à Charles S. Peirce : « Toute photographie est le résultat d’une empreinte physique qui a été transférée sur une surface sensible par les réflexions de la lumière. La photographie est donc le type d’icône ou de représentation visuelle qui a avec son objet une relation indicielle » . Dans l’histoire de l’art, « Notes on the Index » et l’ensemble des productions qui s’inscrivent à la suite de cet article marquent un important tournant critique ; celui de l’entrée du photographique dans le champ de l’art par une critique paradoxale qui se fonde sur ce qu’elle essaie justement de démonter, la définition formaliste du modernisme. En critiquant la pensée d’un Clement Greenberg qui définit le projet moderniste « comme nécessairement inscrit dans une quête ontologique sur la spécificité des médiums individuels et non comme une réflexion sur la nature de l’art en général » , elle ouvre les carcans des catégories artistiques que la définition formaliste avait fermées  auphotographique en réservant à la peinture une position hégémonique. D’autre part, dans le champdu construit, historique, social et artistique. Il faut tenir compte de l’opposition de JoelSnyder à la théorie de Rosalind Krauss, qui met en avant les conventions qui régissent les prises de vues bien plus qu’une objectivité technique idéaliste . André Gunthert, concilie dans un premier temps les deux approches en reformulant la thèse de Rosalind Krauss : à l’empreinte physique laissée par la lumière sur la surface sensible du film, il ajoute la nécessaire situation des images dans le temps qui se traduit par un « consensus historique » sur les normes de représentation des sujets, toujours sous-entendu, et qui garantit l’immédiateté et la transparence que l’on associe à la photographie. Mais elle-même, dans un autre temps de sa pensée , nuance la théorie d’une nature sémiotique indicielle du photographique, affrontée à la pratique des surréalistes, en soulignant le simulacre artistique à l’œuvre dans le travail photographique. Ce faisant, elle déplace l’intérêt de la nature de l’opération technique à ses effets, la photographie, et par là, « elle montre bien la pratique comme un des lieux du théorique ».

Photographie et image – décrire et contextualiser : des résultats avant l’analyse

Des manuels, précis, ou guides de lecture et d’analyse des images à l’usage des étudiants et des chercheurs en histoire paraissent ou sont réédités régulièrement, qui mettent en garde contre une approche dogmatique ou bridée, mais soulignent toujours l’importance de la mise en contexte comme critère de scientificité historique. Ce constat vient chez Laurent Gervereau, Christian Delporte ou Martine Joly après un rapide récapitulatif des tentatives de compréhension des images par l’histoire de l’art ou la sémiotique. En relevant l’aporie, pour le chercheur qui veut produire un discours rigoureusement historique, qui consiste à ne privilégier qu’une approche internaliste, et l’insuffisance de l’approche de l’historien de l’art qui s’intéresse avant tout à l’œuvre et l’auteur dans une histoire des formes et de la réception, des techniques et du style, Laurent Gervereau convoque cependant ces approches comme des outils de l’historien pour l’établissement de l’image photographique.
Au commencement, mais toujours après avoir fixé des objectifs de recherches, il faut replacer la description rigoureuse de la source, car c’est elle qui détermine toutes les étapes de la méthode. Peut-être plus importante encore que celle qui préside au commentaire de document écrit, elle doit prendre le temps d’englober à la fois les conditions matérielles,techniques, stylistiques (au sens plastique) de la photographie et l’inventaire des questionsthématiques et élémentaires de ce qui est représenté. C’est à ce prix seulement que le contexte peut être correctement mobilisé.

Image photographique – culture visuelle et autres iconosphères

À ces contextes, il faut ajouter l’idée de culture visuelle, qui n’y correspond pas tout à fait. Hans Belting, citant la philosophie de la photographie de B. Vilém Flusser, montre comment les images en général et les images photographiques en particulier fonctionnent dans un monde autonome : « le monde de la magie – monde où tout se répète et où toute chose participe à un contexte de signification » . C’est, repris pour les images, le modèle de l’intertextualité : « Le mot (le texte) est un croisement de mots (de textes) où on lit au moins un autre mot (texte) (…) Tout texte se construit comme mosaïque de citations, tout texte est absorption et transformation d’un autre texte. À la place de la notion d’intersubjectivité s’installe celle d’intertextualité, et le langage poétique se lit, au moins comme double. »
Les citations des photographes ne sont pas toujours conscientes au sein même de leurs œuvres – il y a un en-deçà des inspirations affirmées. À partir du tournant du début du XXe siècle identifié par Walter Benjamin où les images sont désormais reproductibles sur toutes sortes de supports, s’opère une inflation de la présence des images à tous les moments de la vie quotidienne. Présentes partout et tout le temps, les images perdent leur « aura » : leur caractère unique à la fois dans leur création et dans l’expérience de leur spectacle qui leur confère une authenticité, qui a pu elle-même conditionner un culte à leur égard ou plus largement une valeur supérieure dans la hiérarchie des beaux-arts. Ce faisant, elles passent dans l’espace public et s’opère une démocratisation de leurs usages ou de leur simple spectacle. C’est ce qui fait décrire à Flusser un monde de l’image fait de répétitions et de dialogues entre des mêmes images, des motifs et des manières de les traiter : « Au lieu de représenter le monde, elles le rendent méconnaissable jusqu’à ce que l’homme finisse par vivre en fonction des images qu’il a lui-même créées » .Et de fait, dans un retournement, l’image devient préalable à la photographie : grille de lecture du monde pour le photographe qui enregistre ce qui est déjà dans son esprit, plus qu’un événement une « presque-image » , et grille de lecture des images, clé pour le spectateur car « une image vient-elle du bout du monde, nous devons la reconnaître, la neutraliser comme exotique, ou nous l’approprier comme familière ».
Dans le cas de l’image photographique, la culture visuelle est alors faite de l’ensemble des contextes évoqués et de ce « bain visuel »
dans lequel tout un chacun trempe qu’il soit derrière la caméra ou devant la photographie. Ce n’est donc pas le fait d’une seule conscience mais bien d’une réalité collective bien que des singularités de parcours tissent des cultures visuelles légèrement différentes, mais qui se neutralisent à l’échelle de la société. Prendre cela en considération, c’est donc rendre nécessaire, dans la méthodologie, le croisement des sources visuelles, mais aussi « de les situer par rapport aux autres formes d’expression, écrites ou orales, gestuelles ou corporelles » à l’exemple d’Estelle Sohier qui, face aux photographies de la cour éthiopienne, fait référence à la chronique royale pour penser la signification des vêtements et du corps du roi.

Sémiotique visuelle – la communication sémiotique, les signes visuels, paradigme et syntagme, analyse sémiotique

Un certain nombre de notions restent communes à la sémiotique visuelle et à la sémiotique attachée à la linguistique malgré de nombreux efforts pour affranchir la première d’une simple transposition aux images des principes de la seconde. Conçue comme un système de signification à l’organisation interne autonome, l’image visuelle s’inscrit dans un schéma de communication tel que dans la Figure 7. Dans la perspective de l’illustration 54, on pourrait décrire les différents facteurs du schéma comme suit. L’émetteur est constitué d’un ensemble d’instances émettrices – c’est le photographe Marcel Gautherot, mais avant lui les commanditaires à la fois Oscar Niemeyer et à travers lui le gouvernement, et s’il y a publication, lejournal et ses divers employés. Le récepteur est, de même, une entité théorique, qui regroupe l’ensemble des spectateurs de la photographie en question des contemporains au tirage jusqu’à nous. Le référent (aussi appelé contexte ) est très littéralement « ce à propos de quoi on communique, ce dont on communique le sens » à travers des signes mis en lieu et place de cela) ; ici une visite de Juscelino Kubitschek, président brésilien, sur le chantier de la nouvelle capitale. Le canal est le support physique du signe, à la fois notre image photographique (caractéristiques de l’appareil émetteur), notre œil, et les stimuli lumineux qui communiquent entre les deux. Le code, c’est ce qui lie idéalement l’émetteur et le récepteur pour la compréhension du message, les règles intériorisées qui permettent de lier une portion du monde à un référent par une simplification en signes ; mais une pluralité de codes particuliers peut être appliquée en même temps et chacun d’eux n’est pas figé mais se voit régulièrement re-négocié de sorte qu’à un signe ne correspond généralement pas qu’un seul sens ni toujours le même. Dans le cas de cette photographie, les codes de l’émetteur sont l’une des énigmes que l’enquête historique se propose de restituer, à la fois par l’explicitation du contexte large et par l’analyse de l’objet lui-même ; les codes des spectateurs sont à rechercher dans les textes qui les évoquent, et la mission de l’historien est d’aborder cette photographie comme indice dans l’enquête et donc de voir dans ces signes des réponses à des questions.
Enfin, le message est le produit des facteurs qui précèdent : fait de signes, il est plus ou moins complexe ; c’est l’objet de la recherche. Dans ce schéma simplifié, des relations n’apparaissent pas : celles qui lient émetteur et destinataire, dits partenaires, qui sont des relations de prises en compte mutuelle de leur existence et qui influencent leurs rôles ; d’autres qui permettent de prendre en compte la pluralité des codes et des messages.

Le contexte de communication des années 1930 à Brasília

Le 30 juin 1958 Juscelino Kubitschek inaugure en grande pompe la nouvelle résidence présidentielle à Brasília, le Palais de l’Alvorada (littéralement, « de l’Aube »), devant un parterre de personnalités brésiliennes et de photographes mandatés par des agences du monde entier. Par terre, tous les photographes n’y sont pas, comme dans cette photographie dont l’auteur n’est pas identifié, où l’on voit Peter Scheier faire un cliché de JK. On peut voir dans la photographie un discours officiel prononcé par le président dans la capitale en construction, un public de dignitaires et un photographe – ou les termes du schéma de la communication réunis dans une photographie. Car qu’est-ce que cette étape, sinon mettre en place le contexte de communicationpropre au corpus étudié dans une perspective historique, pour faire advenir les possibilités d’élucidation du message et la part de son code que l’histoire n’a pas encore fait apparaître ? Rétablissant un mouvement apparemment chronologique, ces mises en contextes et recherches de culture visuelle sont en réalité le produit d’une première lecture et elles sont proportionnelles à la diversité des thèmes évoqués et aux questions posées par les photographies. On cherche donc ici bien plus à restituer le contexte profond des structures politiques et sociales dans lesquelles s’insère le moment inaugural de Brasília, que de faire le contexte étroit de son déroulement.
La ville qui est construite alors dans les formes modernistes légères et transparentes pensées par Oscar Niemeyer ne s’insère pas dans le temps long de l’histoire rêvée de Brasília – l’idée du transfert de la capitale à l’intérieur du pays remonte à la période coloniale, entre 1808 et 1821 . Laurent Vidal le montre bien : ce qui persiste entre ce moment là et la construction effective de la nouvelle capitale, c’est avant tout une idée de ville, qui vient cristalliser, en réponse à un temps de crise, un projet social pour le futur . Brasília, elle, s’inscrit plus volontiers pour le temps de sa construction dans une chronologie plus courte, dont les bornes ne sont pas strictes, et qui commence avec l’ère Vargas à partir des années 1930. Ângela de Castro Gomes, dans le quatrième volume de l’Históriado Brasil nação : 1808-2010 ,intitulé Olhar para dentro 1930-1964 , identifie pour cette période une série de conceptions politicoculturelles qui façonnent la pensée politique et motivent son action. Elle assemble les processus qui sous-tendent cette époque, qui englobe la construction de Brasília comme une étape , derrière deux idées principales dont elle souligne le dynamisme et la pluralité des incarnations. C’est d’abord le mot d’ordre de la modernité, dans une lutte permanente pour rattraper un « retard » pensé dans la comparaison avec les pays occidentaux, que ce soit dans le champ politique, économique, social ou culturel. Cette lutte se caractérise par un fort nationalisme de tous bords politiques et par conséquent très nuancé, mais qui place au-dessus de tout l’achèvement de l’indépendance brésilienne à nouveau dans tous ces champs, à travers la recherche de l’unité nationale. Et c’est ensuite, en relation avec ce qui précède, la mobilisation d’un ensemble de traditions en vue d’un changement social. C’est un moment où l’on cherche activement à définir une « brésilianité » et donc, que l’on renforce des réalités toutes nationales à la fois avec et contre des références internationales.

L’héritage de la centralisation de l’ère Vargas : un socle de ressources politiques, structurelles, institutionnelles, culturelles et idéologiques

« Des thèmes polémiques, sans aucun doute – autant le modèle que lafigure–, mais qui restent associés aux idées-forces qui peuplent, pour le meilleur ou pour le pire, l’imaginaire et le débat politique national : la croyance en un Brésil « pays du futur », la consolidation de « l’identité nationale », le déséquilibre entre « les deux Brésils », l’intervention de l’État et la « séduction de la tutelle », le rôle des militaires « salvateurs » et la conjugaison entre libertés publiques et développement – bref, les diverses formes que revêt la vieille question, irrésolue, du retard versus modernisation. » C’est ainsi que Maria Victoria Benevides introduit le gouvernement JK , rappelant qu’il n’y a pas de véritable solution de continuité entre les propositions développementistes de Vargas et celles de JK. Mais si la politique de ce dernier repose en effet sur un socle de ressources politiques et institutionnelles déjà en place, elle repose en outre sur des processus de fond, notamment démographiques.

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Table des matières
Table des abréviations, des sigles et des codes
Introduction
Photographier le moment inaugural de Brasília 1956-1960 : la genèse d’un patrimoine ?
Le cas des photographies de Marcel Gautherot
Un avant-propos à la première personne
Les archives des photographies de la construction de Brasília : premiers liens entre photographie et patrimoine
Les concepteurs de Brasília et le patrimoine national brésilien
Photographies, moment inaugural et patrimoine : des acteurs communs pour une logique commune ?
Chapitre 1 Outils conceptuels et méthodologiques
Introduction – « L’espèce humaine s’attarde obstinément dans la caverne de Platon et continue (…) à faire ses délices des simples images de la vérité »
I – Courte historiographie : l’objet photographique pris dans les processus sociaux et historiques
A – L’histoire de la photographie classique : circuits et acteurs
B – La fin de l’histoire de la photographie ou la réévaluation de l’acte et de l’objet
photographiques : sous l’apparence d’immédiateté, les construits de la photographie
C – Le document photographique comme point de départ d’une enquête historique
D – Histoire culturelle du regard et des représentations, histoire politique
II – Photographie, images, histoire : essai méthodologique
A – Photographie et image – décrire et contextualiser : des résultats avant l’analyse
B – Image photographique – culture visuelle et autres iconosphères
C – Photographie et image – décrire et analyser : sémiotique et rhétorique visuelles
C/1 Pourquoi la sémiotique ? Qu’est-ce que la rhétorique ?
C/2 Sémiotique visuelle – la communication sémiotique, les signes visuels, paradigme et syntagme, analyse sémiotique
C/3 Qu’est-ce qu’une analyse sémiotique ?
C/4 La polysémie de l’image photographique ou la nécessité de l’analyse rhétorique
Chapitre 2 Brasília, fille de la modernité : mises en contextes et cultures visuelles
Introduction – Le contexte de communication des années 1930 à Brasília
I – Démocratie et développement : l’« Âge d’or » du gouvernement Kubitschek
A – JK et Brasília au centre des critiques nationalistes : l’affirmation démocratique et la pratique du compromis
B – Brasília comme synthèse du projet de nationalisme développementiste
C – Le « juscelinismo »
II – L’héritage de la centralisation de l’ère Vargas : un socle de ressources politiques,
structurelles, institutionnelles, culturelles et idéologiques
A – Vargas et la politique de développement : prise en compte de l’évolution
démographique par des politiques territoriales
A/1 Transition démographique et politique de masse
A/2 « A Marcha para o Oeste » : centralisation du pouvoir exécutif et pensée de l’espace dans la politique de développement
B – Nationalisme culturel et institutionnalisation des milieux intellectuels et
artistiques : définir une culture et une identité brésiliennes
III – Marcel Gautherot de Paris à Brasília : vie et œuvre dans les cultures visuelles de la modernité occidentale et brésilienne
A – Marcel Gautherot, les modernistes et l’institution du patrimoine au Brésil :
professionnalisation du photographe et photographie comme ressource d’un milieu
professionnel
A/1 « Fotografia é arquitetura » : Marcel Gautherot, une éducation européenne ?
A/2 Marcel Gautherot dans les milieux modernistes brésiliens de l’architecture :
Pampulha, la Casa das Canoas et le Ministère de l’Éducation et de la Santé ou les jalons de l’institutionnalisation moderniste sur le chemin de Brasília
A/3 Marcel Gautherot et le SPHAN : saisir une image du passé, légitimer l’architecture moderne et construire l’identité nationale
Conclusion : Photographie, architecture moderne et pouvoir au Brésil : simultanéité des processus de construction de l’identité nationale
B – Des albums de ville à Brasília : la formation de normes de représentation de la ville en mutation dans la photographie et les arts visuels
B/1 Deux phénomènes contemporains : la structuration d’une pratique de la
photographie et l’essor du photo-journalisme au Brésil
B/2 Enregistrer les mutations de la ville : fixer des modèles urbains et les normes de leur représentation
Chapitre 3 Les photographies du moment inaugural par Marcel Gautherot : une construction patrimoniale ?
Introduction – tour d’horizon des photographies de Marcel Gautherot au sein de l’IMS : perspectives et limites
I – Photographier le moment inaugural de Brasília : déterminer le regard sur la ville
A – L’encadrement de la communication photographique
B – Ombre et lumière de la splendeur photographique
B/1 Marcel Gautherot dans les logiques professionnelles des architectes de Brasília – interprète des formes de la modernité brésilienne
B/2 Rendre belle l’architecture moderne
II – « Do nada para a Capital », Brasília ou le sertão vaincu
A – Brasília à l’horizon : occuper le sol pour s’approprier la terre
B – Habitat et genre de vie : pédagogie du regard sur la modernité
C – Les icônes du pouvoir : unifier le territoire sous la figuration moderniste
III – Photographie monumentale, photographie héroïque : la patrimonialisation d’une époque ?
A – Le mo(nu)ment des possibles
B – Photographier le quotidien des héros : un folklore du moment inaugural ?
Conclusion générale
Annexes
Bibliographie et sources.
Outils
Brasília : photographie, histoire et architecture
Marcel Gautherot et les photographes du moment inaugural
Histoire de la ville, histoire du moment inaugural
Architectes, architecture, urbanisme et patrimoine de Brasília
Histoire du Brésil
Études visuelles
Études photographiques
Théorie et histoire de la photographie et des images
Analyse historique, analyse sémiotique : la question documentaire en histoire
Questions de Patrimoine
Histoire urbaine, études sur la ville et le territoire (sauf Brasília)
L’événement
Sources photographiques
Sources photographiques
Sources imprimées
Revues
Publications officielles
Témoignages contemporains

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