Les Phénomènes pluvieux en Afrique de l’Ouest
L’observation infrarouge : Premier moyen d’observation satellitaire en Afrique de l’Ouest
Des méthodes manuelles et automatiques de suivi des systèmes convectifs de méso échelles en anglais Mesoscale Convective Systems (MCS) à partir de satellites ont été proposées par différents auteurs dont Velaso and Fritsch, 1987 ; Williams and Houze 1987, Machado et al. 1998, Duvel 1989,1990 ; Laing and Fritsch 1993 a, b ; etc.…. Des critères et plusieurs définitions objectives, subjectives ou quasi-objectives d’amas convectifs et de lignes de grains rendent leur reconnaissance possible (Rowell and Milford, 1993). L’identification des MCS consiste à détecter les sommets froids des nuages qui se situent assez haut à cause de la convection profonde qui pénètre dans la troposphère supérieure. Ces sommets se situent au dessus de 450 hPa dans les régions tropicales et correspondent à des niveaux de températures de 213 à 265K et une altitude de 6 à 12 km. La méthode du seuillage est utilisée pour identifier les nuages. Elle consiste à mettre à zéro les pixels plus chauds que le seuil de température choisi en gardant inchangés les autres. Le suivi des MCS revêt une importance dans l’étude de la circulation de l’Afrique de l’Ouest mais aussi dans l’étude de la dynamique des systèmes convectifs et de l’estimation des pluies.
La diversité des méthodes de suivi des MCS a amélioré la connaissance du cycle de vie des amas convectifs et de leur structure interne. La température de brillance mesurée au dessus des nuages dans l’infra rouge thermique (10 – 12 µm) est proportionnelle à la température de leurs sommets. Les nuages avec un sommet très froid sont associés à la présence d’ascendances marquées, auxquelles sont en général associées les pluies dans les systèmes convectifs. La relation entre la température IR et la pluie est donc indirecte. Cependant, en intégrant dans le temps et en moyennant sur une grande surface, on établit une corrélation assez forte entre l’indice IR ainsi calculé et la pluie cumulée. Dans ce sens, une méthode simple a été proposée par Arkin (1979). Il a mis au point un indice appelé GPI (Goes Precipitation Index) qui relie la fraction de surface (2.5° x 2.5°) couverte par les pixels ayant une température IR inférieure à un seuil fixé à 235 K à une pluie constante de 3 mm.h-1. Cet indice a été couramment utilisé pour les études climatologiques (Arkin and Meisner, 1987 ; Arkin et Janowiak, 1991). D’autres techniques plus sophistiquées, qui tentent d’améliorer la relation température IR-pluie et de mieux identifier les régions précipitantes, ont été par la suite élaborées. Des méthodes classiques ont été également utilisées pour le suivi des systèmes notamment sur l’Afrique de l’Ouest, c’est le cas de la méthode du tracking qui est une méthode automatique de suivi des amas nuageux permettant de déterminer des paramètres dynamiques et thermodynamiques des nuages (surface, indice volumique, position, vitesse, Tmin, Tmax …) et d’en déduire leur cycle de vie (Arnaud et al.1992, Sall et al. 1997, Mathon 2002). Gaye et al. (2000) dans ses travaux sur les lignes de grains en l’Afrique de l’Ouest a par exemple utilisé une méthode de suivi lagrangienne (METLAS) .
Processus de formation des systèmes précipitants
Les systèmes précipitants en Afrique de l’Ouest sont alimentés par un ensemble de processus dynamiques et thermodynamique qui assurent aussi bien leur maintien et également leur évolution de l’échelle microphysique à l’échelle macro physique. En Afrique de l’Ouest, les phénomènes de convection jouent généralement ce rôle de régulateur pour les systèmes pluvieux. La convection profonde ouest africaine s’organise sous trois formes principales que sont l’orage ordinaire, l’orage supercellulaire et l’orage multicellulaire. Les caractéristiques dynamiques et thermodynamiques de ces trois modes d’organisation de l’orage ont été définies conceptuellement, pour mieux comprendre leurs structures.
L’orage ordinaire
C’est la forme la plus courante de la convection humide. Il est considéré comme l’un des éléments de base des systèmes convectifs organisés. Il va servir à présenter les processus ainsi que les caractéristiques de base des différentes formes nuageuses de la convection humide profonde.
-Le cycle de vie de l’orage ordinaire
Ce cycle de vie correspond à l’évolution des processus physiques de déclenchement et de maintien/renforcement de l’instabilité atmosphérique et de transfert de masse/d’énergie qui constitue la convection humide profonde (CHP). L’orage ordinaire est le résultat ou une manifestation météorologique de la CHP. Le cycle de vie de la CHP ou de l’orage isolé peut être divisé en quatre phases assez nettement distinctes qui sont :
• L’initiation
• L’intensification
• La maturité
• Et la dissipation
-L’initiation
Cette phase correspond au début de la convection lorsque sont réunies les conditions favorables d’instabilité de l’atmosphère et une réserve suffisante d’humidité dans les basses couches de la troposphère. Des particules de cet air humide en subissant un mouvement ascendant atteignent le niveau de condensation qui marque la base du nuage naissant de convection, appelé cumulus. La base du cumulus est d’autant plus basse que l’humidité est plus importante dans les basses couches, c’est-à-dire que l’air est très proche de la saturation. Si l’instabilité atmosphérique ainsi que les mécanismes de déclenchement/initiation sont d’origine thermique, c’est-à-dire liées au réchauffement radiatif, la phase d’initiation a alors une évolution diurne très marquée. Elle se produit fréquemment aux heures les plus chaudes de la journée au dessus des surfaces continentales et intéresse des aires très localisées et peu étendues.
-L’intensification
Après la formation du cumulus, lorsque le soulèvement d’air humide continue et que le courant ascendant se renforce, le nuage croît verticalement. Par effet d’entraînement de l’air environnant, le courant ascendant s’agrandit horizontalement aussi. Le flux ascendant dépassant le niveau de l’isotherme 0°C, des particules de glace se forment au sein du nuage devenu un cumulus congestus. Il n’existe à cet instant qu’un seul fort courant ascendant, situé au centre du nuage (Figure 1.6), de vitesse moyenne de 5 à 10 ms-1. La condensation qui a lieu au sein du nuage libère de la chaleur latente qui accroît l’instabilité de l’air (flottabilité) et par conséquent renforce la convection. Il se forme des gouttelettes d’eau et des particules de glace qui grossissent de plus en plus respectivement par coalescence et par accrétion.
En réalité, les phases d’initiation et d’intensification ne sont pas toujours nettement distinctes et constituent souvent une phase unique dite de formation ou de développement de l’orage.
-La maturité
Le nuage convectif a atteint son état de développement maximal avec une dimension verticale qui place son sommet au niveau de la tropopause à environ 18 km (en région tropicale) et une extension horizontale d’une dizaine de kilomètres de diamètre. Ce type de nuage est appelé Cumulonimbus (Figure : 1.7). Les forts courants ascendants atteignant le niveau de flottabilité nulle ou niveau d’équilibre (en anglais Equilibrium Level : EL), s’affaiblissent, commencent à s’inverser et s’étalent horizontalement. C’est le sommet du cumulonimbus qui se situe ainsi au voisinage de la tropopause. L’étalement horizontal des courants entraînant les particules de glace donne au sommet du nuage sa forme d’enclume ou de panache d’apparence fibreuse. Cette morphologie en enclume de la partie supérieure du nuage d’orage ordinaire marque la fin de l’extension verticale de la convection. A ce stade, les gouttelettes d’eau et de glace du nuage formées dans la phase précédente sont suffisamment grosses et assez lourdes pour ne plus être retenues par les courants ascendants ; elles se mettent à tomber de façon modérée à intense. En même temps que la pluie, des éclairs se produisent. De forts courants descendants se développent par effet d’entraînement dû à la chute de la précipitation. Des rafales de vent en surface surviennent généralement au début de la précipitation lorsque les courants descendants arrivent au sol alors que les courants ascendants sont encore vigoureux.
L’orage à la phase mature atteint son plus haut degré d’organisation. Il représente ainsi une structure dynamique très turbulente caractérisée par la coexistence de deux courants verticaux respectivement ascendant et descendant. La durée de cette phase, donc l’intensité des précipitations de l’orage, est largement dépendante du maintien de cette ‘’dynamique couplée’’ de courants verticaux.
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Table des matières
Introduction
Chapitre 1 : Microphysique des systèmes précipitants et problématique de l’évaporation en Afrique de l’Ouest
1. Rappels sur le climat de l’Afrique de l’Ouest
1.1. Circulation Générale
1.2. Circulation de mousson en Afrique de l’Ouest
2. Les Phénomènes pluvieux en Afrique de l’Ouest
2.1. L’observation infrarouge : Premier moyen d’observation satellitaire en Afrique de l’Ouest
2.2. Processus de formation des systèmes précipitants
2.2.1. L’orage ordinaire
2.2.2. L’orage supercellulaire ou supercellule
2.2.3. L’orage multicellulaire ou multi cellule
2.3. Des systèmes convectifs de Méso échelles (MCS) aux Lignes de Grain (LG)
2.4. Les Lignes de Grains Tropicales
2.4.1 Formation des Lignes de Grains (LG)
2.4.2. Cycles de vie des LG
2.4.3. Structure interne des LG
2. Les autres méthodes de suivi et d’estimation des MCS en Afrique de l’Ouest
3.1. La méthode Micro onde
3.2. Méthode combinée
4. Microphysique des processus de basses couches : Notion de coalescence et « breakup »
4.1. Phénomènes de coalescence
4.2. Phénomènes de « break up » ou éclatement
5. Problématique de l’évaporation et ses conséquences en Afrique de l’Ouest
5.1. Notions d’Evaporation et Chaleur Latente
5.2. Importance et Conséquence sur l’environnement
Chapitre 2 : Source et structure des données utilisées : La mission TRMM (Tropical Rainfall Measurement Mission) et le radar météorologique spatial « PR »
1. Généralité sur la Mission TRMM
1.1. Contexte de la mission TRMM
1.2. Description de TRMM
1.3. Le « Precipitation Radar »
2. Le Radar PR de TRMM : Caractérisation de mesure, Algorithmes et Données
2.1. Principe de mesure du radar PR de TRMM
2.2. Algorithme 2A25 pour la restitution de R à partir des données du radar PR
2.3. Améliorations et Corrections de l’Algorithme 2A25 de la version 5 à la version6
3. Microphysique des DSD et notion d’évaporation atmosphérique
4. Outils de diagnostiques : De l’Indexe de Gradient Vertical (IVG) à l’Indexe d’Evaporation Vertical (IVE)
5. Données utilisées dans la présente étude
Chapitre 3 : Caractéristiques des profils verticaux de précipitation sur l’Afrique de l’Ouest
1. Analyses statistiques des profils verticaux de précipitations sur l’Afrique de l’Ouest
2. Climatologie des précipitations régionales obtenues avec le radar PR de TRMM
3. Variation intra-saisonnières et interannuelles des profils verticaux de précipitations sur l’Afrique de l’Ouest
3.1. Variabilité mensuelle des profils verticaux de précipitation sur l’Afrique de l’Ouest
3.2. Variabilité annuelle des profils verticaux de précipitation sur l’Afrique de l’Ouest
4. Etude régionale des profils verticaux de précipitations
5. Bilan d’eau des processus dans les basses couches de l’Atmosphère: Index d’Evaporation Verticale des précipitations
5.1. Distribution de l’Index d’Evaporation Verticale des précipitations sur l’Afrique de l’Ouest
5.2. Variation saisonnière de l’IVE sur l’Afrique de l’Ouest
6. Conclusions
Chapitre 4 : Profils verticaux de précipitation et cycle de l’eau des MCS
1. Résumé de l’article : « Comparaison de profils verticaux de précipitation de TRMM-PR avec les sorties du Modèle LMDZ.»
1.1 Introduction
1.2. Data and Methods
a. TRMM data and analysis methods
b. Model and Experiments design
1.3. Results
a. Comparison of vertical rainfall profiles
b. Comparison of Vertical Gradient seen by observations and model’s schemes
1.4. Summary and Conclusions
2. Influence du cycle de vie sur les profils de précipitation
2.1 Présentation du logiciel RDT de Météo-France : Rapid Developing Thunderstrom
2.2. Labellisation, séparation et identification des systèmes pluvieux avec TRMM-PR
2.3. Profils verticaux de précipitations suivant leur cycle de vie
3. Influence des noyaux et pixels convectifs des systèmes pluvieux sur les profils verticaux de précipitation stratiformes
4. Conclusions
Conclusion générale