Les nuisances sonores dans le milieu agricole

BRUITS CONTINUS

   Dans cet exercice, nous considérons qu’un bruit est continu lorsque le niveau de pression acoustique ne varie pas de plus de 3 dB pendant une certaine durée d’observation notée T. Pour expliquer ce qu’est un bruit continu, nous prendrons le cas le plus simple, celui d’un son pur. Il correspond à une vibration acoustique sinusoïdale et donc à une seule fréquence. [2] (Figure 1) Le son se caractérise par :
• son amplitude, qui dépend de la pression acoustique,
• sa fréquence, qui correspond au nombre de période(s) par seconde exprimée en Hertz (Hz),
• sa vitesse de propagation correspondant à la célérité d’un son dans l’air, c’est-à-dire 340 ms-1 à température ambiante et pression atmosphérique normale. Mais les sons purs sont très rarement présents dans l’entourage de l’agriculteur. En effet, les sons produits par une voiture, un tracteur ou tout autre engin utilisé en milieu industriel ou rural sont bien plus complexes. Il aura fallu attendre le mathématicien français, Jean-Baptiste Joseph FOURIER pour découvrir que tout son complexe peut être considéré comme un ensemble de sons purs. Il créa un outil mathématique bien connu sous le nom de « transformée de Fourier » aussi appelé « analyse spectrale ». Ce savant calcul permet de déterminer les composantes fréquentielles d’un son complexe. Nous devons aussi distinguer les sons complexes périodiques des sons complexes apériodiques (Figure1).

BRUITS INTERMITENTS 

  Le bruit intermittent est un bruit dont il est possible de percevoir la variation d’une ou plusieurs caractéristiques physiques se répétant à des intervalles de durée variable. C’est un bruit dont le niveau sonore varie beaucoup au cours de la période d’observation. L’ISO (Organisation Internationale de Normalisation) définit ces bruits comme des « bruits non stables ». Dans ce cas, il est important de tenir compte des facteurs suivants [1] :
• il faut faire attention à l’émergence du bruit considéré par rapport au bruit ambiant. À partir d’une analyse statistique des fluctuations de niveau de bruit, nous pouvons calculer l’émergence moyenne,
• la durée du bruit considéré pose quelques problèmes aux acousticiens, d’une part à cause de l’étendue de la gamme de durée à mesurer : de la milliseconde à quelques heures, et d’autre part à cause du niveau sonore à partir duquel le temps sera compté,
• la durée des silences,
• les temps de montée sont définis comme le temps mis par le signal pour passer de 10 % à 90 % de son amplitude. C’est ce dernier qui est responsable de l’effet de surprise d’un bruit,
• le temps de décroissance du signal en ce qui concerne une potentielle lésion auditive est beaucoup moins important que le temps de montée mais est indispensable pour avoir une bonne affectivité du langage et de bonnes performances psychiques et motrices,
• le facteur de crête correspond au rapport entre la valeur crête et la valeur efficace du signal sonore. Il est indispensable de considérer ce facteur en matière de risques auditifs,
• la régularité d’apparition des bruits : plus un bruit est régulier, plus il est prévisible et donc connu, plus il sera facile de s’en protéger,
• la fréquence d’occurrence des bruits : il est indispensable de la prendre en considération, celle-ci ayant une influence importante sur les effets extra auditifs du bruit et agissant sur la sensibilité auditive.

LA PRESSION ACOUSTIQUE

   Toute perturbation d’un milieu entraîne l’apparition d’un son. Cette perturbation se déplace dans l’air sous forme d’onde et ce dans toutes les directions. Cela entraîne une variation de pression p(t) autour de la pression atmosphérique bien souvent mesurable et parfois audible. La membrane des microphones et de notre tympan y sont sensibles. Pour caractériser un phénomène acoustique, il est nécessaire de définir une valeur appelée pression efficace définit telle que :
La pression acoustique efficace (peff) est donc la moyenne de la pression acoustique quadratique sur un intervalle de temps donné. Elle est représentative du phénomène acoustique et fonction de la durée d’observation. L’intervalle de temps doit donc être largement considéré. Il sera beaucoup plus petit et plus bref si le son est impulsionnel que si nous étudions un bruit stable et de longue durée. C’est ce que nous prenons en considération lorsque nous utilisons un sonomètre. D’où l’importance de bien choisir sa constante de temps T. En effet, l’opérateur doit régler cette constante de temps en fonction T de la vitesse de variation de la pression acoustique mesurée. Quand cette pression sonore varie plus rapidement que la constante de temps, la sortie de l’intégrateur donne ainsi une valeur moyenne. La norme prévoit trois types de pondérations temporelles :
• S (constante de temps T = 1 s) initialement appelée Slow,
• F (constante de temps T = 0,125 s) initialement appelée Fast,
• I (constante de temps T = 0,035 s) initialement appelée Impulse.
La puissance est ensuite convertie en décibels pour obtenir un affichage facilement lisible sur le sonomètre

COURBE ISOSONIQUE ET PONDÉRATIONS 

   Une courbe isosonique représente le niveau de pression acoustique, en fonction de la fréquence, ayant le même niveau en phone, c’est à dire provoquant la même sensation d’intensité sonore pour l’oreille humaine à 1kHz. Le système auditif humain est sensible à des fréquences allant de 20 Hz à un maximum d’environ 20 000 Hz. Mais l’étendue de fréquences audibles diminue avec l’âge du fait de la presbyacousie. Dans cette gamme de fréquences, l’oreille humaine est la plus sensible entre 1 et 5 kHz. Cela est dû principalement à la résonance du canal auditif et à la fonction de transfert des osselets dans l’oreille moyenne. Les courbes isosoniques furent mesurées pour la première fois en 1933 par Fletcher et Munson. Dans leur étude, on faisait entendre aux sujets des sons purs sinusoïdaux à différentes fréquences et par incréments de 10 dB. On faisait entendre aussi aux sujets un son de référence à 1000 Hz. On ajustait le volume de ce dernier son jusqu’à ce qu’il soit perçu au même niveau sonore que celui en test. Comme la sensation de volume sonore est très subjective et difficile à mesurer, Fletcher et Munson utilisèrent la moyenne des mesures sur plusieurs sujets pour obtenir des moyennes raisonnables. Ainsi, ils ont tracé les courbes isosoniques. Il existe plusieurs pondérations qui ont été choisies car l’oreille humaine possède des courbes de réponse en fréquence différente selon le niveau sonore entendu :
• La pondération A, permettant de définir le dB(A) : correspond à la courbe isosonique 40 phones, traduisant la réponse en fréquence de l’oreille pour les sons faibles,
• La pondération B, permettant de définir le dB(B) : correspond à la courbe isosonique 70 phones. Cette pondération est idéale pour des sons d’intensité moyenne,
• La pondération C, permettant de définir le dB(C) : correspond à la courbe isosonique 100 phones, ainsi, cette pondération sera plus utilisée pour des niveaux assez forts. Elle est aussi adaptée pour étudier les niveaux crête,
• La pondération D, permettant de définir le dB(D) : correspond à la courbe isosonique 110 phones. De manière générale, cette pondération D est beaucoup moins utilisée mais reste très adaptée pour des sons très forts. Ces pondérations définissent des courbes qui sont des approximations des courbes isosoniques mesurées pour la première fois en 1933 par Fletcher et Munson. La majorité des textes de loi concernant les mesures de niveau d’intensité sonore dans les normes prescrivent l’utilisation de la pondération A. Cette décision est discutable car la pondération A sous-estime ce que reçoit réellement l’oreille dans les basses fréquences quand le niveau sonore est très fort (figure 9). En effet, la pondération A filtre beaucoup plus les basses fréquences que la pondération C.

le sone 

   Le sone est l’unité qui défini la bruyance. L’échelle des phones ne correspond pas parfaitement à la sonie. Si deux sons purs de même valeur en phones ont effectivement la même sonie, la progression des phones ne correspond pas à celle de la sensation perçue. Augmenter de 6 dB la valeur en phones ne double pas l’impression de volume sonore, il faut 10 dB. L’échelle en sones tient compte de cette sensibilité. Par définition, un sone correspond à un son de fréquence 1 kHz et de pression acoustique 40 dB. Chaque fois que l’évaluation en phones augmente de 10 dB, la cotation en sones est multipliée par deux.

L’OREILLE INTERNE

   L’oreille interne se situe dans l’épaisseur du rocher entre la caisse et le fond du conduit auditif interne. Elle se compose d’une cavité osseuse, le labyrinthe osseux dans laquelle s’imbrique une cavité membraneuse, le labyrinthe membraneux. Ces cavités sont remplies de liquides : la périlymphe entre les parois osseuses et membraneuses et l’endolymphe dans le labyrinthe membraneux. L’oreille interne est divisée en deux structures : en avant, la cochlée et en arrière, le vestibule. La cochlée, organe de l’audition, a une forme de coquille enroulée en deux tours et demi de spire. Sa base est appuyée sur le fond du conduit auditif interne. Elle soulève le relief du promontoire. Le vestibule, organe de l’équilibration, est en arrière de la cochlée. Sur lui s’implantent les trois conduits semi-circulaires dilatés à une de leurs extrémités par une ampoule. Les canaux semi-circulaires antérieur et postérieur sont verticaux, perpendiculaires entre eux et ont une implantation commune sur leur branche non ampullaire. Le canal semi-circulaire latéral est horizontal vers le dehors. L’oreille interne membraneuse reproduit l’anatomie de l’oreille interne osseuse pour la partie cochléaire : c’est le conduit cochléaire où se trouve les cellules sensorielles auditives encrées sur l’organe de Corti au niveau de la membrane basilaire. Elles possèdent des cils vibratiles au niveau de leur pôle apical qui seront mis en mouvement par les déplacements du liquide endolymphatique. Il en existe deux types : les cellules ciliées externes et les cellules ciliées internes. Au niveau vestibulaire, les structures ne sont pas analogues : il existe deux structures, l’utricule sur lequel s’implantent les trois canaux semi-circulaires membraneux et le saccule. Les cellules sensorielles de l’équilibration sont regroupées au niveau des crêtes ampullaires des canaux semi-circulaire et au niveau des macules de l’utricule et du saccule. Cochlée, utricule et saccule communiquent tous les uns avec les autres

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Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE I : NOTION D’ACOUSTIQUE
I – CARACTÉRISTIQUES PHYSIQUES DU BRUIT
1) BRUITS CONTINUS
2) BRUITS INTERMITENTS
3) BRUITS IMPULSIONNELS
II) – CARACTÉRISTIQUES PHYSIOLOGIQUES DU BRUIT
1) LA FRÉQUENCE
2) LA PRESSION ACOUSTIQUE
3) COURBE ISOSONIQUE ET PONDÉRATIONS
4) LA TONIE OU SENSATION DE HAUTEUR TONALE
5) LA SONIE
6) LE NIVEAU SONORE ÉQUIVALENT : LAeq,T
7) LE NIVEAU CRÊTE (Lpc ou LCpk)
8) LE NIVEAU D’EXPOSITION QUOTIDIEN AU BRUIT : LEX,8H ou LEX,d
CHAPITRE II: ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE DE L’AUDITION
I – L’OREILLE EXTERNE
II – L’OREILLE MOYENNE
III – L’OREILLE INTERNE
IV – LA TRANSMISSION MÉCANIQUE
1) LA CHAÎNE DES OSSELETS
2) RÔLE DES FENÊTRES
3) MEMBRANE BASILAIRE ET ANALYSE TOPOGRAPHIQUE DES SONS
4) CELLULES SENSORIELLES ET MOUVEMENTS CILLIAIRES
5) L’APPAREIL NEUROSENSORIEL
V – LE CODAGE DE L’INFORMATION
1) LE CODAGE EN FRÉQUENCE
2) LE CODAGE DE L’INTENSITÉ
VI – SURDITÉ ET DIAGNOSTIC
CHAPITRE III: LES EFFETS DU BRUIT SUR L’ORGANISME
I – LES EFFETS GÉNÉRAUX DU BRUIT SUR L’ORGANISME
1) LES EFFETS CARDIO-VASCULAIRES
2) LES EFFETS SUR L’ÉLECTROENCEPHALOGRAMME
3) LES EFFETS SUR L’APPAREIL DIGESTIF
4) LES EFFETS SUR LA RÉSISTANCE CIRCULATOIRE PÉRIPHÉRIQUE
5) LES EFFETS SUR L’APPAREIL RESPIRATOIRE
6) LES EFFETS NEUROMUSCULAIRES
7) LES EFFETS SUR LA VISION
8) LES EFFETS SUR LA CONCENTRATION
II – LES EFFETS PHYSIOLOGIQUES DU BRUIT SUR L’ORGANISME 
1) EFFET DE MASQUE
2) L’ADAPTATION AUDITIVE
3) LA FATIGUE AUDITIVE
4) ASPECT CLINIQUE DE LA SURDITÉ PROFESSIONNELLE
5) LES DIFFÉRENTES PHASES DE LA SURDITÉ PROFESSIONNELLE
CHAPITRE IV : QUESTIONNAIRE « LE BRUIT DANS LE MILIEU AGRICOLE »
I – MÉTHODOLOGIE GÉNÉRALE DE DIFFUSION DU QUESTIONNAIRE
II – EXPLOITATION DU QUESTIONNAIRE
III – CONCLUSION DE L’ENQUÊTE
CHAPITRE V : ÉTUDE SONOMÉTRIQUE DES TRAVAUX AGRICOLES
I – ASPECTS LÉGISLATIFS DU BRUIT AU TRAVAIL
1) DIRECTIVE 2003/10/CE DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL DU 6 FEVRIER 2003
2) LA NORME NF 31-084
3) TERMES ET DÉFINITIONS
II – ÉTUDE SONOMÉTRIQUE EN ATELIER AGRICOLE 
1) PROTOCOLE DE L’ÉTUDE
2) INTERPRETATION DES RÉSULTATS
III – ÉTUDES SONOMÉTRIQUES DES TRAVAUX AGRICOLES HORS ATELIERS
1) MATERIEL UTILISÉ
2) LE PROTOCOLE
3) INTERPRETATION DES RÉSULTATS
CHAPITRE VI : ÉTUDE AUDIOMÉTRIQUE DES TRAVAILLEURS AGRICOLES
I – METHODOLOGIE GÉNÉRALE DE L’ÉTUDE, EXAMEN MEDICAL ET AUDIOMÉTRIQUE
II – INFLUENCE DU TRAVAIL SUR L’AUDITION DE L’AGRICULTEUR
1) POPULATION ETUDIÉE
2) LA NORME ISO 7029
3) INTERPRETATION DES RÉSULTATS
III – RÉSULTATS DE L’ÉTUDE
IV – CRITIQUES
CHAPITRE VII : MOYENS DE PROTECTIONS DE L’EXPLOITANT AGRICOLE CONTRE LE BRUIT
I – PRÉVENIR AVANT DE GUÉRIR
1) INFORMER
2) SENSIBILISER ET ACCOMPAGNER
3) DÉPISTAGE PRÉCOCE
II – LE RÔLE DU MEDECIN DU TRAVAIL
III – LES PROTECTIONS INDIVIDUELLES CONTRE LE BRUIT 
1) CLASSEMENT SELON LEURS MODES DE PORT
2) CLASSEMENT SELON LEUR MODE DE FONCTIONNEMENT
3) QUELS PROTECTEURS CHOISIR POUR L’AGRICULTEUR ?
CONCLUSION
TABLE DES FIGURES
BIBLIORAPHIE
TABLE DES ANNEXES

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