Les nausées et vomissements gravidiques

Il y a en moyenne 800 000 naissances vivantes par an en France. Les femmes gestantes représentent donc un pourcentage important de la patientèle en officine. Cependant l¹état de grossesse les rend plus vulnérables et exposées à des risques potentiellement susceptibles d’altérer leur bien-être et celui de leur enfant à naître. Les modifications anatomophysiologiques de cet état les soumettent, parfois, à des symptômes dits « petits maux de la grossesse », souvent inoffensifs, mais inconfortables au quotidien . Bien que la législation française impose une surveillance de grossesse codifiée, il n¹en demeure pas moins que dans de nombreuses situations, le pharmacien joue un rôle de pivot en étant souvent le premier conseiller et prescripteur pour « ces petits maux », qui ne justifient pas toujours une consultation médicale .Pour savoir répondre à cette demande, il est donc nécessaire que cette population de professionnels soit formée et régulièrement avertie des possibilités thérapeutiques médicamenteuses accessibles sans ordonnance pour soulager ces patientes.

Les nausées et vomissements gravidiques 

Épidémiologie

Les nausées font partie des « petits maux » du début de grossesse qui contrarient environ 70 à 80% des femmes enceintes(1). Ils ont donc un impact sur le bien-être de ces femmes ainsi que des retombées économiques, car ils engendrent des dépenses importantes (consultations médicales, arrêts de travail et parfois même des hospitalisations). Des études ont même démontré que certaines populations étaient plus à risque; les caucasiennes sont plus sujettes à ces maux que les populations asiatiques et africaines(1) . Les vomissements gravidiques sévères sont eux, bien heureusement moins fréquents, et ne touchent que 0,3 à 2 % des femmes(2). Ils nécessitent bien souvent une hospitalisation, et sont parfois difficiles à gérer, car leurs causes sont multifactorielles; physiologiques, mais parfois aussi psychologiques .

Physiopathologie

La physiopathologie des nausées et vomissements en début de grossesse fait intervenir certains neurotransmetteurs et facteurs métaboliques. Ces facteurs sont principalement libérés par le placenta, et le principal concerné est l’Hormone Gonadotrophine Chorionique (HCG). L’HCG est une hormone constituée de deux sous unités, une sous-unité α commune à l’hormone folliculo-stimulante (FSH), l’hormone lutéinisante (LH) et la Thyréostimuline (TSH) (figure 1); et une sous unité spécifique β. C’est d’ailleurs cette dernière que nous dosons en biologie, afin de savoir s’il y a une grossesse (dosage qualitatif), et plus précisément son évolutivité (dosage quantitatif). La bonne évolution de la grossesse est d’ailleurs constatée par un doublement du taux de cette hormone toutes les 48h. L’HCG est sécrétée dès le 6ème jour suivant la fécondation jusqu’à 10 Semaines d’Aménorrhée (SA). En effet, son rôle est primordial au maintien de la grossesse, elle a une action lutéotrophique en transformant le corps jaune cyclique en corps jaune gestatif et permet ainsi la sécrétion d’œstrogènes et de progestérone en début de grossesse(4). Il faut savoir qu’un taux trop élevé d’HCG peut-être révélateur d’une anomalie de cette grossesse ou l’annonce d’une gémellité. En effet un taux anormalement élevé d’HCG peut être révélateur d’une anomalie de la grossesse (gémellité, môle hydatiforme, Trisomie 21).

Des études ont révélé(1) que le taux de cette hormone est directement corrélé aux effets de nausées ressenties en début de grossesse, c’est pourquoi les femmes enceintes de jumeaux ou malheureusement porteuses d’une grossesse molaire sont particulièrement touchées par ce mal. Au vu de la sous-unité α commune à l’HCG et d’autres hormones (TSH et LH), son augmentation massive en début de grossesse signifie que les récepteurs à la TSH et la LH sont saturés ; c’est pourquoi on observe une baisse physiologique de la TSH (figure 2) en début de grossesse avec une augmentation de la T4L(6). Cette surstimulation des récepteurs à la TSH pourrait expliquer les nausées, car ils sont un des signes cliniques de la thyréotoxicose(7). Il existe différentes isoformes de l’HCG avec des cinétiques différentes. Certaines isoformes sans portion carboxylique terminale ont une demi-vie plus courte, mais une action plus puissante sur les récepteurs à LH et à TSH, alors qu’une HCG hyperglycosylée a une demi-vie longue et une action moins puissante. Ces différentes formes d’HCG sont le fruit de la génétique ainsi que de l’évolution des facteurs environnementaux. Leur variabilité expliquerait aussi la variabilité des nausées et vomissements en début de grossesse en fonction des femmes .

Clinique

Les nausées se définissent par la sensation subjective désagréable non douloureuse provenant du tractus digestif haut, associées au besoin de vomir ou à la sensation que les vomissements sont imminents. Les vomissements sont quant à eux des contractions cycliques violentes de la musculature abdominale, du diaphragme et des muscles respiratoires conduisant au rejet brutal par la bouche du contenu de l’estomac.

Le diagnostic de cette affection est principalement clinique, avec un interrogatoire et un examen clinique appropriés. Les nausées sont majoritairement matinales et soulagées par le premier repas. Elles peuvent être aussi déclenchées par le système sensoriel notamment avec certaines odeurs. Le pic de ces nausées est observé vers la 10ème semaine de grossesse, ce qui est contemporain du pic de l’hormone βHCG. Généralement, elles sont résolutives à la fin du premier trimestre de la grossesse(1). Cependant, il faut accorder toute son importance à l’anamnèse, pour ne pas passer à côté d’une autre affection plus grave (bilan biologique au moindre doute).

Le reflux gastro-oesophagien ou pyrosis 

Épidémiologie

Les brûlures d’estomac sont très fréquentes durant la grossesse, elles touchent près de 2/3 des femmes enceintes(9). D’autre part, leur présence aggrave les nausées et vomissements, leur prise en charge est donc indispensable pour limiter ces effets(10). Ces reflux augmentent très souvent au cours de la grossesse, touchant environ 25% des femmes au premier trimestre, et jusqu’à 55% lors du dernier trimestre .

Physiopathologie

Les causes de ce reflux sont nombreuses, il a clairement été observé une baisse de la pression du cardia (sphincter de l’estomac) (11). Effectivement, celui-ci s’ouvre lors de la déglutition et se ferme lors de la digestion. Durant la grossesse, différents phénomènes interviennent :
• Baisse de pression du sphincter qui naturellement s’ouvre plus facilement
• Allongement du temps de digestion
• Augmentation de pression intra-gastrique.

Ces différents effets sont principalement dus à l’augmentation de la sécrétion de progestérone(12). Ces troubles sont plus souvent retrouvés en cours de grossesse lorsqu’ils préexistaient à celle-ci, lorsque l’âge de la patiente est plus avancé et enfin lorsque l’Indice de Masse Corporelle (IMC) est plus élevé .

Clinique

Le reflux se manifeste par la sensation désagréable de brûlures aussi appelées pyrosis accompagnées de régurgitations acides. Ces symptômes sont croissants au cours de la grossesse, car 26% des femmes sont touchées au premier trimestre, 36% au deuxième et enfin 51% des femmes au dernier trimestre (14) (figure 3). D’autre part, ils sont aussi responsables de l’aggravation des sensations nauséeuses de certaines femmes (15). Ces reflux sont principalement présents après un repas et le soir notamment en décubitus dorsal. De manière générale, il ne faut pas s’alarmer pour ces types de symptômes, mais toujours rester vigilants quant à des signes d’appel de pathologie organique sous-jacente, notamment avec un pyrosis incoercible avec hématémèse(3). Dans les formes modérées, le pyrosis est un vrai désagrément pour les femmes qu’il ne faut pas hésiter à traiter pour les soulager .

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Table des matières

INTRODUCTION
I. LES MAUX DE LA GROSSESSE
A. Les troubles gastro-intestinaux
I. Les nausées et vomissements gravidiques
1. Épidémiologie
2. Physiopathologie
3. Clinique
II. Le reflux gastro-oesophagien ou pyrosis
1. Épidémiologie
2. Physiopathologie
3. Clinique
III. Constipation
1. Épidémiologie
2. Physiopathologie
IV. Hémorroïdes
1. Épidémiologie
2. Physiopathologie
3. Clinique
B. Les troubles génito-urinaires
I. Les troubles urinaires
1. Épidémiologie
2. Physiopathologie
3. Clinique
II. Les Vaginites mycosiques
1. Épidémiologie
2. Physiopathologie
3. Clinique
C. Troubles de la circulation
I. Troubles de la circulation veineuse des membres inférieurs
1. Épidémiologie
2. Physiopathologie
3. Clinique
D. Anxiété et troubles du sommeil
I. Anxiété et troubles du sommeil
1. Épidémiologie
2. Physiopathologie
3. Clinique
E. Troubles de la Statique
I. Lombalgies et Syndrome de Lacomme
1. Épidémiologie
2. Physiopathologie
3. Clinique
F. Allergies
I. Allergie
1. Épidémiologie
2. Physiopathologie
3. Clinique
G. Recommandations chez la femme enceinte
I. Sevrage tabagique
1. Épidémiologie
2. Physiopathologie
3. Recommandations
II. Supplémentation vitaminique : L’acide folique
1. Épidémiologie
2. Recommandations
III. Vaccins
1. R.O.R
a. Introduction
b. Recommandations
2. Grippe saisonnière
a. Recommandations
II. L’ÉTUDE
A. Présentation de l’étude mise en place
1. Objectif
2. Méthodes
B. Résultats de l’étude
III. ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE DU PLACENTA
I. Anatomie
II. Les caduques
III. La plaque basale
IV. La plaque choriale
V. La chambre intervilleuse et les villosités choriales
VI. La Barrière placentaire
1. La Variation des échanges : Passage des médicaments
IV. PRISE EN CHARGE THERAPEUTIQUE
A. Les troubles gastro-intestinaux
I. Les nausées
II. Le reflux ou pyrosis
III. La constipation
IV. Les hémorroïdes
B. Les troubles génito-urinaires
I. La Cystite
II. La mycose vaginale
C. Troubles de la circulation
D. Anxiété et troubles du sommeil
E. Trouble de la statique
F. Allergie
G. Sevrage tabagique
V. DISCUSSION
VI. CONCLUSION
VII. BIBLIOGRAPHIE
VIII. ANNEXES
CONCLUSION

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