Les moyens pouvant faciliter l’adaptation des personnes âgées à leur nouveau milieu de vie

Les moyens pouvant faciliter l’adaptation des personnes âgées à leur nouveau milieu de vie

État des connaissances :

Ce chapitre présente une synthèse des écrits scientifiques portant sur les divers objectifs de l’étude, soient les motifs qui justifient un déménagement en résidence, les efforts faits par les personnes âgées pour s’approprier leur nouveau chez-soi, les effets de cette transition sur leur vie personnelle, familiale ou sociale ainsi que sur leur état de santé et également les moyens pouvant faciliter l’adaptation à leur nouveau milieu de vie. En tout premier lieu, les principaux concepts reliés à l’étude sont définis.

La définition des concepts:

L’étude veut approfondir les connaissances concernant la transition qui découle de l’entrée des personnes âgées en OSBL. Dans un premier temps, est défini le terme de personne âgée et par la suite, des informations sont données quant à ce qu’est un OSBL à vocation résidentielle pour personnes âgées. Définition du terme personne âgée : Ce terme ne fait pas nécessairement consensus au sein de la littérature gérontologique. Pour certains auteurs (Beaver, 1979 ; Caradec, 2001 ; Lefrancois, Dubé, Leclerc, Hamel & Gaulin, 2001 ; Vézina, Cappeliez & Landreville ,1994 ; Wilson, 1998), l’âge chronologique d’environ 65 ans est le principal critère pour déterminer si une personne est âgée. Par contre, pour Vézina, Cappeliez et Landreville (1994), le critère de l’âge ne suffit pas, et ces derniers citent les auteurs Mishara et Riedel (1984) qui considèrent que l’on doit aussi tenir compte de la santé physique ou mentale des individus quand il est temps de déterminer si les personnes sont âgées ou non. La définition retenue aux fins de l’étude est tirée du Dictionnaire-manuel de gérontologie sociale (1981) qui décrit les personnes âgées comme étant des gens appartenant à une tranche d’âge de 60 ans et plus, présentant des signes de vieillissement, qui assument des rôles en lien avec cet âge t qui se perçoivent ou ont le sentiment d’être âgés. Dans ce même dictionnaire, il est énoncé que l’avancement en âge amène certaines craintes qui se forgent peu à peu une place dans l’esprit des aînés : la crainte de la maladie qui peut surgir à tout moment, la peur de l’handicap, de la dégradation de leur santé, la peur de devenir dépendant d’autrui, la peur de perdre des êtres proches ainsi que la peur de vivre des deuils de toutes sortes. La peur d’être pris en charge par les instances gouvernementales offrant des services sociaux et des soins médicaux s’ajoute à cette liste qui englobe également la peur de devoir demeurer en résidence pour personnes âgées (Dictionnaire de gérontologie sociale, 1981).

Définition du concept résidence sans but lucratif (OSBL) à vocation résidentielle.
Au Québec, les OSBL à vocation résidentielle pour personnes âgées à faible revenu ont pris de l’ampleur dans les années 1970 (Conseil des aines, 2007). Ils ont une part non négligeable dans le marché des résidences privées sur le territoire québécois. Ces résidences ne sont pas des entreprises privées à but lucratif et ne doivent point être perçues de cette façon. La construction de ces résidences, qui sont de type communautaire, a été financée par des fonds publics provenant principalement du  gouvernement du Québec. Charpentier, Ducharme et Vaillancourt (2006) soulèvent que le financement du fonctionnement des habitations communautaires est assuré non pas seulement par des subventions de l’État, mais également par le loyer que doit payer chaque résident. Parfois, à cela peut s’ajouter des contributions provenant de fondations et de dons (Charpentier, Ducharme & Vaillancourt, 2006) ou de la tenue d’activités d’auto financement. Le programme de financement public des OSBL donne la possibilité aux personnes âgées de défrayer un coût de loyer représentant 25 % de leur revenu mensuel. Par contre, à cela s’ajoutent les frais reliés aux autres services offerts par ces OSBL (repas, animation, surveillance, etc.)

La majorité (67 %) des gens demeurant dans ce type de logement est âgée de 55 ans ou plus, et de ce nombre, 36 % ont 75 ans ou plus (Ducharme & Dumais, 2008). De plus, les femmes représentent 63% des locataires des OSBL et ce nombre passe à 72 % dans les OSBL pour personnes âgées.

Plusieurs services sont, offerts dans ces organismes et ce dans différentes sphères. Ducharme et Dumais (2008) catégorisent les services de soutien offerts en deux grands types : le soutien communautaire et les services aux personnes. Les services de soutien communautaire font référence aux services permettant d’augmenter le niveau de la qualité de vie des résidents. Sont inclus dans cette dernière catégorie la gestion et la prévention des conflits, la sécurité des résidents, l’organisation de loisirs, l’accueil, la référence ou l’accompagnement des résidents, les interventions en situation de crise, les services d’alimentation et le soutien à la participation des locataires. Approfondissons quelque peu ces services :
1) La gestion et la prévention des conflits Lorsque plusieurs personnes demeurent dans le même milieu de vie, des frictions peuvent survenir lors des activités et des moments de regroupement. Ce type d’intervention est souvent effectué par les membres du personnel, et ce, au regard du bruit, de l’utilisation des espaces communs et du respect des règlements de l’organisme.
2) La sécurité Cette offre de services englobe tant la sécurité au niveau des problèmes de santé que les risques incendiaire ou toute autre situation indésirable. Le tiers (31 %) des OSBL d’habitation au Québec offrent de la surveillance 24 heures par jour et ce, à tous les jours. Dans les OSBL pour personnes âgées, la présence d’infirmières ou de préposées aux bénéficiaires comble ce besoin.
3) L ‘organisation de loisirs La tenue d’activités récréatives occupe une place importante dans les OSBL d’habitation puisqu’elle a un effet important tant au niveau de la qualité de vie des résidents qu’au niveau de la vie en collectivité. Ces activités sont généralement organisées et offertes par les employés des OSBL avec la collaboration de résidents.
4) L’accueil la référence ou l’accompagnement des résidents Les activités d’accueil, de référence ou d’accompagnement auprès des locataires sont variées : expliquer les clauses du bail et les règlements de la maison, indiquer certains services de la localité, aider les locataires à compléter un formulaire, un rapport d’impôt, formuler une demande au CSSS, etc.
5) Les interventions en situation de crise Plusieurs types de situation de crise peuvent survenir dans un milieu de vie. Que cela soit d’ordres médical, social ou relationnel, les intervenants œuvrant dans les OSBL doivent être en mesure d’être les premiers répondants et de référer les aînés vers les ressources pouvant leur venir en aide.
6) Les services d’alimentation Près de la moitié des OSBL offrent la possibilité d’avoir accès à des services en matière d’alimentation. Ces OSBL ont, dans la plupart des cas, une clientèle âgée ou handicapée. Ces services sont offerts soit en salle à manger ou en cafétéria.
7) Le soutien à la participation des locataires Sous forme de comité, de conseil ou de rencontres de groupe, ce soutien permet aux résidents de donner leur opinion quant au fonctionnement de l’établissement. Des OSBL offrent également un accompagnement lors de la tenue d’activités récréatives à l’intérieur de leurs murs ou au sein de la collectivité.

Les motifs qui justifient un déménagement en résidence:

Selon Burnette (1986), la mobilité résidentielle consiste en un mouvement d’un milieu de vie à un autre et ce, pour de multiples raisons. Les personnes âgées atteignant ‘âge de 75 ans, voient augmenter à chaque année, les probabilités d’être dans l’obligation d’effectuer ce changement de domicile (Burnette, 1986).

Selon Mallon (2005) et Somme (2003), l’admission en résidence semble être, pour la plupart des aînés, un événement ou une décision imposée où leur opinion et leur désir d’y entrer ou non ont peu de poids. Pourtant, cette implication dans la décision semble être d’une importance capitale dans le déroulement de cette transition et dans l’adaptation qui en découle (Somme, 2003). Ainsi, certaines personnes âgées prennent elles-mêmes la décision de quitter leur domicile tandis que pour d’autres, il s’agit d’un choix imposé. Dorange (2005) souligne que cette décision entraîne des moments de remise en cause, des questionnements, des doutes, des crises familiales et des silences pour les aînés et les membres de leur famille.

À ce sujet, Somme (2003) a souligné que la plupart des aînés se sentent très peu impliqués dans cette étape difficile de leur vie et voient leur entourage prendre les choses en main sans trop avoir leurs mots à dire. D’ailleurs, selon une étude menée en France auprès de personnes âgées, la décision d’intégrer une résidence pour aînés est prise par la famille dans 37 % des cas et par des professionnels dans 21 % des cas (Somme, 2003). Ainsi, dans cette même étude, seulement 35 % des personnes âgées affirment avoir participé de près ou de loin à la décision. Dorange (2005) affirme que cette décision est due à l’addition de plusieurs aspects dont les circonstances, les événements, l’état de santé et les solutions alternatives manquantes. Toutefois, il semble que l’implication des personnes âgées est plus importante lorsque celles-ci vont vivre dans des résidences privées alors que l’implication des membres de la famille serait prépondérante lors de l’admission dans des unités de soins de longue durée (CHSLD).

Il y a plusieurs motifs qui peuvent nécessiter un changement de milieu de vie et ce ne sont pas toutes les personnes âgées qui déménagent pour occuper un logement dans un OSBL. Ainsi, la plupart des aînés qui quittent leur demeure, le font pour vivre dans une maison plus petite (Lin, 2005 ; Serow, 1987). L’envie de se rapprocher de ses enfants ou de certains membres de sa famille, le désir de vivre dans un voisinage plus agréable, la santé qui est plus précaire ainsi que le désir d’avoir accès à plus d’activités récréatives seraient les principaux motifs qui incitent les aînés à occuper un plus petit logement (Lin, 2005). Lorsque l’entrée en résidence est nécessaire, que ce soit pour aller vivre en appartement, en maison de retraite ou en unités de soins de longue durée, une forte proportion d’aînés proviendrait de leur propre domicile (Somme, 2003).

Processus d’adaptation des personnes âgées et effets de l’admission en résidence sur la santé et la qualité de vie des aînés:

Coffman (1981) affirme que les conséquences d’un changement de milieu de vie pour les personnes âgées peuvent être traduites par les expressions suivantes : choc du transfert, stress du relogement et traumatisme du relogement. À ce sujet, la plupart des auteurs ont dégagé trois facettes de la vie des aînés pouvant être affectées par cette transition, c’est à-dire la santé physique, la santé psychologique ainsi que la vie sociale (Charpentier, 2010 ; Vézina, Cappeliez & Landreville, 1994). Pour sa part, Mallon (2007) considère que les aînés ayant un capital culturel et économique décent, de nombreux individus présents dans leur vie, qui ont pris eux-mêmes la décision d’emménager en résidence et qui tentent d’établir une continuité entre leur ancienne demeure et leur nouveau milieu de vie ont tout pour retrouver un équilibre de vie à la suite de leur changement de résidence. Les personnes âgées démunies, ayant peu de famille et qui ont vécu plusieurs épreuves dans leur vie de même que celles qui tentent de prendre un nouveau départ sans lien avec le passé éprouveraient plus de difficultés à s’adapter à des changements dans leurs habitudes de vie (Mallon, 2007). Le contrôle qu’ont les personnes âgées sur leur changement de milieu de vie influencerait également leur adaptation (Somme., 2003 ; Beaver., 1979). D’ailleurs, une étude qualitative réalisée auprès de cinq personnes âgées a démontré qu’une bonne préparation, avant le déménagement, donnerait la possibilité aux aînés de voir les effets néfastes de ce changement atténués et faciliterait leur adaptation à leur nouvel environnement (Horowitz & Schultz, 1983 ; Maheu & Reindy, 2002).

L’adaptation au nouveau milieu de vie peut donc être facilitée si une continuité entre l’ancienne maison et la nouvelle résidence est créée tant au plan matériel, relationnel que symbolique car l’aîné peut ainsi diminuer les différences entre les deux milieux de vie (Mallon, 2007).

Ainsi, quitter son milieu de vie afin de faire son entrée dans une résidence pour personnes âgées devient une des expériences les plus stressante qu’un individu puisse vivre au cours de sa vie (Hertz & al, 2007; Melrose, 2004; Parsons, Kosloski & Bergman Evans. 2007). Ce changement implique une séquence complexe d’événements et d’expériences débutant par la décision parfois précipitée d’emménager en résidence pour personnes âgées et se terminant par des efforts afin de s’approprier de son nouveau chez-soi (Risteen Hasselkus, 1978 ; Hendrick., Wells & Faletti. 1982). Chaque personne est unique et réagit différemment, mais, Charpentier (2010), dans une étude réalisée auprès de 20 personnes âgées vivant dans différents types de milieu de vie protégés, a identifié quatre grands profils de résidents selon les stratégies d’adaptation utilisées pour s’adapter à leur nouvel environnement :
1) Les indépendants. Ils sont caractérisés par une bonne adaptation, une bonne capacité d’agir et de défendre leurs droits. Ils ont une attitude proactive dans leur vie quotidienne. Ces personnes sont débrouillardes, ont connu généralement plusieurs déménagements et sont entourées d’une famille nombreuse.
2) Les sereins. Ils ont une bonne capacité d’adaptation et sont en mesure d’accepter leur nouveau milieu de vie. Ils ont eu une attitude généralement passive dans leur vie et sont très attachés à leurs souvenirs. Ils accordent une grande importance à leur famille.
3) Les prisonniers. Ils subissent le milieu d’hébergement et ont un faible pouvoir d’agir. Ils étaient généralement proactifs dans leur vie mais ont maintenant jeté l’éponge. Ils parlent peu du passé et sont axés sur le présent, ont peu de lien avec les membres de leur famille et accordent une forte importance à leur médecin.
4) Les soumis. Ils affirment s’habituer au milieu et ce, parce qu’ils n’ont pas le choix. Ces résidents sont peu actifs face à leur vie. L’on retrouve dans ce groupe une majorité de personnes ayant assumé le rôle d’aidant et ayant vécu une précarité financière. Ces personnes sont souvent prises en charge par leurs enfants. Les deux premiers profils auraient un grand pouvoir d’agir tandis que chez les deux autres, ce pouvoir serait assez faible. Charpentier (2010) a également constaté que les stratégies d’adaptation utilisées par les aînés ne semblent pas subir de modifications majeures lors d’un changement de milieu de vie, demeurant plutôt les mêmes tout au long de leur vie.

Conclusion:

Entrer dans une résidence pour personnes âgées afin de visiter un membre de sa famille n’est pas aussi facile que de se rendre à l’épicerie. Certaines personnes n’y voient que de la tristesse, de l’ennui ainsi que la fin de la vie, et affirment haut et fort que jamais ils n’iront y vivre. Cette vision qu’ont plusieurs individus au regard des résidences pour aînés semble répandue autant dans les médias et dans le discours populaire.

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Table des matières

Introduction : 
1. Problématique : 
2. État des connaissances : 
2.1 La définition des concepts
2.2 Les motifs qui justifient un déménagement en résidence
2.3 Processus d’adaptation des personnes âgées et effets de l’admission en résidence
sur la santé et la qualité de vie des aînés
2.4 Les moyens pouvant faciliter l’adaptation des personnes âgées à leur nouveau
milieu de vie
2.5 Les limites des études existantes
3. Contexte théorique : 
3.1 L’approche systémique
3.2 Le concept du chez-soi
4. Méthodologie de la recherche : 
4.1 But et objectifs de la recherche
4.2 Type de recherche
4.3 Milieu
4.4 Population à l’étude et mode de recrutement
4.5 Stratégie de collecte des données
4.6 Instrument de collecte des données
4.7 Analyse de données
4.8 Considérations éthiques
4.9 Pertinence et limites de l’étude
5. Résultats: 
5.1 La Maison d’un Nouvel Élan.. .un OSBL d’habitation pour personnes âgées…
5.2 Les caractéristiques sociodémographiques des répondants
5.3 Portrait des participants
5.4 Le concept du chez-soi des répondants
5.4.1 Le parcours résidentiel des personnes âgées rencontrées
5.4.2 La Maison d’un Nouvel Élan.. .un nouveau milieu de vie
5.4.3 Moyens et efforts mis en place afin de faciliter leur intégration et
F appropriation de leur chez-soi
5.4.4 Les impacts de cette transition dans la vie des personnes âgées
5.4.5 Et maintenant
5.4.6 Les recommandations des aînés
6. Discussion et interprétation des résultats : 
6.1 Les motifs à l’origine du déménagement à La Maison d’un Nouvel Élan
6.2 Les efforts déployés par les personnes âgées pour s’approprier et s’adapter à leur
nouveau chez-soi
6.3 Les conséquences de la transition de milieu de vie sur divers aspects de la vie
des répondants
6.4 Le concept du chez-soi
6.4.1 Le concept du chez-soi en tant que représentation
6.4.2 Le concept du chez-soi en tant que milieu de vie
6.5. L’apport de cette étude pour la pratique du travail social et sur les avenues de
recherches
7. Conclusion

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