Les modes d’oscillation des pulsateurs de type solaire

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De l’héliosismologie à l’astérosismologie

Les bases théoriques de l’astérosismologie ont été posées par Pekeris (1938) [120] et Cowling (1941) [33], puis Monique Tassoul a dérivé des expressions asymptotiques pour les pulsations stellaires non-radiales (Tassoul 1980 [144], Tassoul 1990 [145]). La théorie des oscillations de type solaire combinée avec les résultats innovants obtenus pour le Soleil ont donné l’idée d’analyser les oscillations d’autres étoiles afin de contraindre leur structure interne. Mais pendant longtemps, l’identification non ambigue des oscillations dans d’autres étoiles n’a pas été possible du fait de leur luminosité apparente plus faible, rendant la détection des oscillations plus difficile. Les premières oscillations extrasolaires de type solaire sont finalement détectées sans ambiguité en 1999 dans les étoiles Procyon et η Cas (Martić et al. 1999 [93], Barban et al. 1999 [6]). La première identification des modes d’oscillation de l’étoile α Centauri, en 2001, marque la naissance de l’astérosismologie à part entière (Bouchy & Carrier 2001 [20], Fig. 1.4). Rapidement, les observations au sol s’avèrent insuffisantes pour contraindre la structure des étoiles étudiées. En effet, l’analyse de Fourier est d’autant plus performante que la courbe de lumière est longue : des données temporelles de longue durée permettent d’améliorer le rapport signal à bruit des spectres d’oscillation ainsi que la résolution en fréquence des modes d’oscillation (Fig. 1.5). De plus, l’interruption des observations au sol pendant la journée pose problème. En effet, une étoile ne peut pas être observée plus de 10 ou 12 h d’affilée depuis un site unique, et cette durée est très loin d’être suffisante pour atteindre la résolution en fréquence nécessaire à l’exploitation des spectres. Si l’on combine les données issues de plusieurs jours d’observation, ceci ajoute de la confusion au sein du spectre : c’est l’effet de fenêtre dû à la durée du jour, qui génère des fréquences additionnelles au sein du spectre compliquant considérablement son interprétation (Fig. 1.6). Une possibilité pour à la fois gagner en résolution, augmenter le rapport signal sur bruit et éviter l’effet de fenêtre est de mettre en place un réseau d’observatoires judicieusement répartis sur Terre, afin que chacun puisse se relayer au cours de la rotation terrestre et que les interruptions dans les données soient minimales, comme le réseau Stellar Oscillations Network Group (SONG) depuis 2006 (Grundahl et al. 2006 [66]), qui fonctionne pour le moment avec deux sites d’observation alors qu’il en faudrait au moins six. L’autre option est de développer des télescopes spatiaux afin de pouvoir enregistrer de façon continue les variations lumineuses des étoiles en s’affranchissant de l’alternance du jour et de la nuit à laquelle servations », cours de Master 2 Recherche Spécialité Astronomie et Astrophysique, 2004 [99]). Haut : Spectre théorique pour une observation continue pendant 5 jours. Bas : Le même spectre modulé par une fenêtre d’observation de 5 nuits ; le spectre de la fenêtre d’observation est représenté en haut à droite. La fenêtre résultant de l’absence d’observation durant la journée dégrade fortement le spectre ; seuls les pics principaux subsistent.

La révolution spatiale : les missions CoRoT et Kepler

La première mission spatiale dédiée à l’astérosismologie, Etude de la Variabilité, de la Rotation et des Intérieurs Stellaires (EVRIS), a vu le jour en 1982 au sein du Centre National d’Etudes Spatiales (CNES) français. L’instrument, embarqué à bord de la mission russe MARS 96, devait observer une dizaine d’étoiles brillantes pendant le trajet entre la Terre et Mars. Le lancement a eu lieu en novem-bre 1996, mais après une orbite autour de la Terre la mission s’est abîmée dans le Pacifique suite à une défaillance du dernier étage du lanceur. Il faut attendre le lancement du microsatellite canadien Microvariability & Oscillations of Stars (MOST), en 2003, pour obtenir des données photométriques spatiales. Le satellite est conçu pour observer en continu une étoile brillante à la fois dans chacun des 24 champs, sur des intervalles d’un mois. Cependant, le rapport signal à bruit est trop bas, et la mission montre très tôt son incapacité à détecter des oscillations de type solaire. De nombreux projets de mission spatiales ont ensuite vu le jour sans aboutir, comme la mission Probing Rotation and the Interiors of Stars by means of Microvariability and Activity (PRISMA) qui a été proposée en 1985 puis en 1993 à l’Agence Spatiale Européenne (ESA), la mission Measuring Oscillations in Nearby Stars (MONS) qui a été proposée au Programme Spatial Danois en 1999, ou encore la mission Eddington sélectionnée par l’ESA en 2000.
En 1993, le projet Convection and Rotation (CoRot) est proposé au CNES. L’objectif initial était d’observer une centaine d’étoiles brillantes pour détecter des pulsations de type solaire, mais un événe-ment inattendu a complètement changé la donne : la découverte de la première exoplanète par Michel Mayor et Didier Queloz en 1995 à l’Observatoire de Haute Provence (Mayor & Queloz 1995 [94]). Cette planète massive orbitant très près de son étoile a été une véritable surprise, car les planètes géantes du système solaire orbitent loin du Soleil. Une telle découverte remettait en cause l’hypothèse de formation du système solaire comme scénario commun de formation des systèmes planétaires, et de nouvelles détections étaient nécessaires afin de savoir si les jupiters chauds étaient répandus. La pho-tométrie s’est vite avérée particulièrement intéressante pour les détecter car leur proximité de l’étoile hôte et leur grande taille provoquent une importante baisse de luminosité de l’étoile lorsque la planète l’occulte. CoRot proposant justement des observations photométriques, la mission a pris une dimen-sion supplémentaire en intégrant une composante exoplanétaire et fut ainsi rebaptisée Convection, Rotation and planetary Transits (CoRoT). La conception de la mission a alors radicalement changé : il s’agissait cette fois d’observer plus de 150 000 étoiles dans un même champ pendant une durée de six mois, calibrée pour atteindre une précision de l’ordre de 0.1 µHz sur les fréquences individuelles d’oscillation. Le projet final est proposé à nouveau en 1997 et enfin accepté en 2000 par le CNES. La mission CoRoT est finalement lancée en décembre 2006 et a pu observer des dizaines de milliers d’étoiles jusqu’en novembre 2012. C’est la première mission qui a permis de mettre en évidence les structures globales des spectres d’oscillation de type solaire dans un grand nombre d’étoiles et de les utiliser pour étudier les intérieurs stellaires.
Un autre projet, Kepler, est proposé à la National Aeronautics and Space Administration (NASA) en 1990 et va révolutionner l’astérosismologie. L’objectif initial était de mettre en évidence les struc-tures fines au sein des spectres d’oscillation en fréquence, notamment les effets de la rotation interne, pour un maximum d’étoiles. Après la détection de la première exoplanète en 1995, l’objectif était également de découvrir des planètes susceptibles d’abriter la vie, c’est-à-dire de type terrestre, plus petites et orbitant plus loin de leur étoile que les jupiters chauds. Une durée d’observation aussi longue représente également une aubaine pour l’astérosismologie. Kepler est ainsi conçu pour ob-server plusieurs milliers d’étoiles avec une durée ininterrompue de 4 ans. La mission n’est acceptée qu’en 2001, et le satellite Kepler est lancé en avril 2009. Il a observé plus de 150 000 étoiles jusqu’en 2013, fournissant des courbes de lumière d’une longueur et d’une précision encore inégalées.
Les nombreux résultats obtenus par CoRoT et Kepler ont établi l’astérosismologie comme une disci-pline essentielle à la compréhension détaillée non seulement de la structure et de l’évolution stellaire, mais également des phénomènes physiques régissant les intérieurs stellaires. Dans ce contexte, la mission spatiale PLAnetary Transits and Oscillations of stars (PLATO) est en cours de préparation depuis 2007. Cette mission est conçue pour mener des observations photométriques ininterrompues de haute précision et de longue durée d’étoiles relativement brillantes, de magnitude dans le visible entre 11 et 13. Les courbes de lumière seront exploitées pour détecter des transits planétaires, en particulier de planètes de type terrestre, et pour des analyses sismiques, afin de mesurer des paramètres stellaires et des âges précis. Plato présentera un large champ de vue afin de couvrir une large région du ciel et de maximiser le nombre d’étoiles brillantes observées à chaque pointage. Le satellite comprendra 24 télescopes, ce qui est nouveau pour une mission spatiale. Les télescopes sont identiques et regroupés en quatre groupes de six télescopes. Les six télescopes de chaque groupe observent le même champ, et les groupes sont légèrement décalés les uns par rapport aux autres pour que leurs champs de vue respectifs se recouvrent partiellement. Cette configuration permet d’avoir un meilleur rapport signal à bruit dans certaines régions du champ de vue total, en particulier au centre où les champs de vue des 24 télescopes se recouvrent. Cette redondance permet également de réduire l’impact d’un éventuel dysfonctionnement d’un télescope. Le plan focal de chaque télescope sera équipé de 4 caméras CCD. Chaque télescope aura un diamètre de 120 mm et un champ de vue de 1100 deg2, permettant de couvrir un champ total de 2250 deg2 à chaque pointage. Actuellement, le plan d’observation prévoit 4 ans de fonctionnement scientifique nominal, consistant en des observations de longue durée de deux champs du ciel distincts sur deux ans. La durée de fonctionnement pourra être étendue jusqu’à 8 ans, et Plato devrait observer des centaines de milliers d’étoiles. Son lancement vers le point de Lagrange L2 est prévu en 2026 à bord d’une fusée Soyouz.

Le cas des géantes rouges

Les géantes rouges sont des étoiles peu massives évoluées qui ont épuisé l’hydrogène de leur cœur. Le cœur d’hélium est dans un premier temps inerte lorsque l’étoile évolue sur la branche rouges, puis entre en fusion lorsque l’étoile arrive sur la branche horizontale. Les géantes rouges subissent d’importants changements de structure interne qui sont détaillés dans le chapitre 2. L’existence d’oscillations de type solaire au sein des géantes rouges est supposée depuis 1983 car ces étoiles possèdent une enveloppe convective externe (Christensen-Dalsgaard & Frandsen 1983 [28]). On s’attendait également à ce que le spectre d’oscillation de ces étoiles présente un grand nombre de modes, absents des spectres des pulsateurs de type solaire sur la séquence principale : les modes mixtes, qui permettent de sonder le cœur des géantes rouges. Cependant, on s’attendait soit à ce que les modes mixtes soient trop amor-tis pour être détectables, soit à ce qu’ils forment une forêt inextricable de pics, rendant les spectres inexploitables. Ce n’est qu’en 2002 que des oscillations de type solaire sont clairement détectées pour la première fois au sein de la géante rouge ζ Hya, grâce au spectrographe CORALIE de l’Observatoire de La Silla (Frandsen et al. 2002 [53]). Ce résultat confirme la possibilité que les géantes rouges sont le siège d’oscillations de type solaire, mais la résolution du spectre est trop faible pour permettre de détecter des modes mixtes. Lorsque les missions spatiales CoRoT et Kepler sont développées, les géantes rouges ne font donc pas partie des cibles prioritaires. Du point de vue de la recherche d’exoplanètes, la différence de taille entre une planète de type terrestre et une géante rouge est trop importante pour que le transit de la planète provoque une baisse significative de la luminosité de l’étoile. Du point de vue des pulsations stellaires, l’existence de modes mixtes n’est pas avérée et les géantes rouges présentent de ce fait un intérêt sismique limité. Les résultats obtenus par CoRoT concernant les géantes rouges ont ainsi été une véritable surprise. En effet, la mission a confirmé l’existence de pulsations de type solaire chez les géantes rouges (De Ridder et al. 2009 [36]). Les modes d’oscillation d’un grand nombre de géantes rouges ont pu être identifiés (Hekker et al. 2009 [72], Bedding et al. 2010, [13], Mosser et al. 2010 [103]), permettant de mesurer les caractéristiques globales de leurs spectres d’oscillation (Huber et al. 2010 [74], Mosser et al. 2011 [102]).
Mais le potentiel des géantes rouges fut pleinement révélé par les quatre ans de données photométriques enregistrées par Kepler, révélant l’existence de modes mixtes (Bedding et al. 2011 [13]) permettant d’obtenir des informations sismiques d’une qualité sans précédent (Fig. 1.7). Ces étoiles subissant des évolutions structurelles très importantes, elles sont particulièrement intéressantes du point de vue de la compréhension de l’évolution stellaire et des mécanismes physiques régissant leur intérieur. L’étude sis-mique des géantes rouges représente ainsi une véritable révolution, et les géantes rouges sont devenues des cibles majeures pour l’astérosismologie. Les principaux résultats apportés par l’astérosismologie concernant les géantes rouges incluent l’estimation précise des masses et rayons stellaires (Kjeldsen et al 1995 [83], Mosser et al. 2013 [111]), l’identification du stade évolutif des étoiles évoluées, permet-tant notamment de distinguer les étoiles sur la branche des géantes rouges des étoiles de la branche horizontale (Bedding et al. 2011 [13], Stello et al. 2013 [138], Mosser et al. 2014 [105]), ainsi que l’étude de la rotation interne des géantes rouges (Beck et al. 2012 [12], Mosser et al. 2012 [109]).

L’importance de la rotation

La rotation est un ingrédient fondamental de la physique stellaire, qui impacte à la fois la structure et l’évolution stellaire (Zahn 1992 [154], Talon & Zahn 1997 [143], Lagarde et al. 2012 [84]). Elle induit un transport de moment cinétique et d’éléments chimiques qui modifient la structure interne des étoiles (e.g., Maeder 2009 [91]). Par exemple, le mélange induit par la rotation est capable d’amener un surplus d’hydrogène dans le cœur, augmentant ainsi la durée de vie de l’étoile sur la séquence principale. De la même façon, le transport d’éléments chimiques détermine la taille du cœur d’hélium dans les phases plus évoluées, qui joue un rôle crucial dans l’évolution stellaire. La rotation a également pour effet de modifier la composition chimique de surface des étoiles (Kippenhahn et al. 2012 [82]). La rotation affecte donc significativement la détermination des âges stellaires (e.g., Lebreton et al. 2014 [87]). Ainsi, la compréhension de la rotation des étoiles à tout moment de leur évolution est nécessaire pour obtenir une image globale pertinente et complète de leur évolution. Il est donc capital d’avoir des contraintes observationnelles sur le profil de rotation interne des étoiles pour comprendre comment la rotation impacte l’évolution stellaire. Les modes mixtes permettent en principe de mesurer le profil de rotation interne des géantes rouges. En pratique, les zones radiative et convective ont des propriétés très différentes, et les modes mixtes permettent essentiellement de mesurer les vitesses de rotation moyennes de ces deux régions. Les modes mixtes sondent principalement le cœur des géantes rouges. Dans ces conditions, il est plus facile de mesurer la rotation moyenne du cœur des géantes rouges que de mesurer la rotation moyenne de l’enveloppe (Goupil et al. 2013 [63]).

Le ralentissement de la rotation du cœur des géantes rouges et le problème du transport de moment cinétique

Lorsque les étoiles quittent la séquence principale, le cœur d’hélium inerte se contracte et l’enveloppe convective se dilate en réponse. Si l’on suppose la conservation locale du moment cinétique, on s’attend ainsi à ce que la rotation du cœur accélère et à ce que la rotation de l’enveloppe ralentisse. Mosser et al. (2012) [109] ont mesuré de façon semi-automatique la rotation moyenne du cœur d’environ 300 géantes rouges à différents stades évolutifs, à la fois sur la branche des géantes rouges où les étoiles fusionnent l’hydrogène en couche au-dessus du cœur d’hélium inerte, et dans la phase du clump où les étoiles fusionnent également l’hélium dans le cœur (Fig. 1.8). Deheuvels et al. (2014) [38]) ont également obtenu des mesures de la rotation du cœur de trois sous-géantes et trois étoiles sur le bas de la branche des géantes rouges (Fig. 1.8). Le rayon stellaire, qui augmente lorsque les étoiles évoluent depuis la fin de la séquence principale jusqu’à la pointe de la branche des géantes rouges, est utilisé dans ces deux études comme marqueur de l’évolution stellaire pour les sous-géantes et les étoiles sur la branche des géantes rouges (Fig. 1.8). Les mesures de Deheuvels et al. 2014 [38] indiquent effec-tivement que la rotation du cœur des sous-géantes semble accélérer (Fig. 1.8) et qu’une importante rotation différentielle se met en place jusqu’au moment ou l’étoile atteint la branche des géantes rouges. Mais les mesures de Mosser et al. (2012) [109] indiquent ensuite que la rotation du cœur ralentit le long de la branche des géantes rouges (Fig. 1.8). Il y a donc nécessairement un transfert efficace de moment cinétique à l’œuvre au sein des géantes rouges. Ce résultat est renforcé par les vitesses plus faibles de rotation mesurées dans le clump (Fig. 1.8), qui sont trop faibles pour être expliquées unique-ment par l’expansion du cœur lorsque la fusion de l’hélium s’enclenche au cours d’un flash et lève la dégénérescence du cœur (Mosser et al. 2012 [109]). De plus, Deheuvels et al. (2015) [37] ont observé [38] pour trois sous-géantes et trois étoiles sur le bas de la branche des géantes rouges. Les cercles vides et les carrés représentent respectivement les mesures de Mosser et al. (2012) [109]) sur la branche des géantes rouges et dans le clump. Le ralentissement observé de la vitesse de rotation du cœur le long de la branche des géantes rouges est représenté par la droite en pointillés.
une faible rotation différentielle au sein d’étoiles du clump secondaire où le cœur tourne presque aussi lentement que l’enveloppe, ce qui confirme l’existence d’un transfert de moment cinétique. Jusqu’ici, les mécanismes physiques à l’origine de cette redistribution du moment cinétique ne sont pas encore entièrement compris. Différentes prescriptions physiques pour le transport de moment cinétique ont été proposées et implémentées au sein des codes d’évolution stellaire : transport par les instabilités hydrodynamiques et la circulation méridienne (Eggenberger et al. 2012 [47], Marques et al. 2013 [92], Ceillier et al. 2013 [24]), par les modes mixtes (Belkacem et al. 2015 [16], [15]), par les ondes de gravité internes (Fuller et al. 2015 [54], Pinçon et al. 2017 [121]), par un champ magnétique généré dans l’intérieur radiatif (Cantiello et al. 2014 [23], Fuller et al. 2014 [54], Rüdiger et al. 2015 [127]). Cependant, les modèles basés sur ces mécanismes physiques prédisent des vitesses de rotation du cœur au moins 10 fois trop élevées par rapport aux mesures, et ne reproduisent pas le ralentissement du cœur observé (Fig. 1.9). Dans ces conditions, un autre processus transportant du moment cinétique est nécessairement à l’œuvre pour ralentir la rotation du cœur (Tayar et al. 2013 [146]). En parallèle, différentes études ont essayé de paramétriser l’efficacité du transfert de moment cinétique à l’intérieur des géantes rouges en utilisant des coefficients de diffusion ad-hoc, qui ne sont pas basés sur une approche physique théorique (Spada et al. 2016 [137], Eggenberger et al. 2017 [46]).
Le désaccord entre les mesures et les modèles basés sur des prescriptions physiques pour le transport de moment cinétique nous indique que la théorie ne nous permet pas encore d’expliquer comment la rotation interne des étoiles évolue. Il est donc essentiel d’obtenir des mesures de rotation du cœur pour un échantillon de géantes rouges bien plus important, afin d’obtenir des contraintes observationnelles plus fortes sur l’efficacité du ralentissement du cœur.

Phase de pré-séquence principale
L’étoile en formation est maintenant en contraction quasistatique. Elle est entièrement convective dans un premier temps, la contraction est adiabatique et le rayon et la luminosité de l’étoile en formation diminuent fortement. Le trajet évolutif est alors à peu près vertical au sein du diagramme Hertzsprung-Russell (première partie du trajet bleu dans les Figures 2.2 et 2.4) : c’est ce que l’on appelle la ligne de Hayashi (Hayashi 1961 [69]), qui correspond à l’endroit du diagramme de Hertzsprung-Russell où sont situées les étoiles en équilibre hydrostatique entièrement convectives. La position de la ligne de Hayashi dépend à la fois de la masse et de la composition chimique de l’étoile. La ligne de Hayashi définit une frontière au sein du diagramme Hertzsprung-Russell entre une zone autorisée, sur la gauche, et une zone interdite, sur la droite, pour les étoiles en équilibre hydrostatique. Les étoiles situées à plus haute température effective que la ligne de Hayashi ont un gradient de température r < rad, où rad = (d ln T /d ln P )s est le gradient de température adiabatique et s est l’entropie. Dans ces conditions, l’étoile n’est plus entièrement convective et une zone radiative interne se développe. Au contraire, les étoiles qui seraient hypothétiquement situées à droite de la ligne de Hayashi auraient un gradient de température r > rad. Dans ce cas, une part importante de l’étoile possèderait un gradient de température superadiabatique. Le terme r − rad serait alors significativement positif, un flux convectif très important se mettrait en place qui permettrait de transporter l’énergie très rapide-ment, sur une échelle de temps dynamique. Dans ces conditions, r diminuerait très rapidement pour redevenir égal à rad, et l’étoile serait aussitôt ramenée sur la ligne de Hayashi. La restructuration rapide de l’étoile implique donc que la région à droite de la ligne de Hayashi est interdite pour toute étoile en équilibre hydrostatique.
La densité finit par devenir suffisamment importante pour que l’étoile en formation soit opaque au rayonnement infrarouge, qui est alors piégé dans les régions centrales. Dans ces conditions, la tem-pérature et la pression augmentent dans le cœur. Le gradient de température devient égal au gradient de température radiatif rrad < rad dans les régions centrales, et un cœur radiatif en équilibre hydro-statique se développe (Fig. 2.6 (a) et Fig. 2.6 (b)). Les modèles indiquent que l’étoile se déplace sur la gauche du diagramme Hertzsprung-Russell lorsque la zone radiative interne occupe environ 45 % du rayon de l’étoile (Fig. 2.6 (a) et Fig. 2.6 (b)), s’éloignant de la ligne de Hayashi vers des températures effectives plus importantes (deuxième partie du trajet bleu dans les Figures 2.2 et 2.4). La luminosité reste à peu près constante lors de la contraction quasi-statique. Le rayon diminue d’un facteur 25 durant la phase de pré-séquence principale dans le cas d’une étoile de 1 M (Fig. 2.7 (a)) et d’un facteur 20 dans le cas d’une étoile de 2.2 M (Fig. 2.7 (b)). L’évolution sur la pré-séquence principale s’effectue sur une échelle de temps caractéristique de l’ajustement thermique de l’étoile, correspondant au temps qu’il faut à une fluctuation thermique pour se propager du centre à la surface de l’étoile. Cette échelle de temps de Kelvin-Helmholtz s’exprime τKH = |Eg| = G M2 , (2.2)
Séquence principale
Début des réactions de fusion nucléaire
La température interne de l’étoile ne cesse d’augmenter et des réactions nucléaires de fusion s’enclenchent, qui ne sont pas à l’équilibre dans un premier temps. La réaction de fusion du carbone, initialement présent au sein du nuage interstellaire, en azote démarre lorsque la température centrale atteint envi-ron 106 K. Cette réaction s’inscrit dans le cycle CNO, dont le taux de production d’énergie nucléaire est très sensible à la température. L’énergie nucléaire est ainsi produite très près du centre, avec un flux d’énergie important. Dans ces conditions, un cœur convectif se développe (Fig. 2.8 (b) et Fig. 2.10 (b)) et l’énergie produite interrompt la contraction de l’étoile (Fig. 2.9 (b) et Fig. 2.11 (b)). Ceci se traduit par une inversion de la variation de la température effective au sein du diagramme de Hertzsprung-Russell pour les étoiles de M ≤ 1 M (Fig. 2.2 entre les deux premiers points rouges). Pour les étoiles de M > 1 M , le tracé au sein du diagramme de Hertzsprung-Russell est un peu plus compliqué. Les modèles indiquent que, la température étant plus élevée, le cœur convectif occupe dans un premier temps environ 20 % de la masse de l’étoile, avant de diminuer pour atteindre environ 10 % en masse comme dans le cas des étoiles moins massives (Fig. 2.10 (b)). Cela se traduit par plusieurs inversions de la variation de la température effective (Fig. 2.4 entre le premier et le quatrième point rouge).
Stabilité de la fusion nucléaire
Lorsque la température atteint environ 107 K, la fusion de l’hydrogène en hélium s’enclenche dans les régions centrales radiatives de l’étoile, qui s’établit sur la séquence principale. Pour les étoiles de M ≤ 1 M , la température centrale n’est pas suffisamment élevée pour maintenir le cycle CNO. Les réactions nucléaires de la chaîne proton-proton dominent rapidement le processus de fusion de l’hydrogène, et le cœur convectif disparaît (Fig. 2.8 (a) et (b)). Pour les étoiles de M > 1 M , le cycle CNO de fusion de l’hydrogène l’emporte et le cœur convectif se maintient sur la séquence principale (Fig. 2.10 (a)).

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Table des matières

1 Introduction 
1.1 Sonder les intérieurs stellaires via l’astérosismologie
1.2 Les différents types de pulsateurs stellaires
1.2.1 Pulsateurs classiques
1.2.2 Pulsateurs de type solaire
1.3 Histoire de l’astérosismologie
1.3.1 Les pulsations solaires
1.3.2 De l’héliosismologie à l’astérosismologie
1.3.3 La révolution spatiale : les missions CoRoT et Kepler
1.3.4 Le cas des géantes rouges
1.4 L’importance de la rotation
1.4.1 Le ralentissement de la rotation du cœur des géantes rouges et le problème du transport de moment cinétique
1.4.2 Enjeux de la thèse
2 Structure et évolution des pulsateurs de type solaire 
2.1 Naissance de l’étoile
2.2 Phase de pré-séquence principale
2.3 Séquence principale
2.3.1 Début des réactions de fusion nucléaire
2.3.2 Stabilité de la fusion nucléaire
2.3.3 Fin de la séquence principale
2.4 Phase de sous-géante
2.5 Branche des géantes rouges
2.5.1 Premier dredge-up
2.5.2 Bump sur la branche des géantes rouges
2.5.3 Perte de masse
2.5.4 Refroidissement du cœur par émission de neutrinos
2.6 Branche horizontale ou clump
2.6.1 Début des réactions de fusion nucléaire de l’hélium
2.6.2 Fusion stable de l’hélium
2.6.3 Fin de la branche horizontale
2.7 Branche asymptotique des géantes rouges
2.7.1 Perte de masse
2.8 Post-branche asymptotique des géantes rouges
3 Les modes d’oscillation des pulsateurs de type solaire 
3.1 Relation de dispersion des ondes sismiques
3.2 Modes de pression
3.2.1 Conditions aux limites
3.2.2 Relation asymptotique des modes de pression
3.2.3 Paramètres sismiques globaux
3.3 Modes de gravité
3.3.1 Conditions aux limites
3.3.2 Relation asymptotique des modes de gravité
3.3.3 Paramètres sismiques globaux
3.3.4 La quête des modes de gravité
3.4 Modes mixtes
3.4.1 Relation asymptotique des modes mixtes
4 Mesure sismique de la rotation du cœur des géantes rouges 
4.1 Effet de la rotation sur les spectres d’oscillation
4.1.1 Cas des modes de pression purs
4.1.2 Cas des modes de gravité purs
4.2 Les géantes rouges, des rotateurs lents
4.2.1 Estimation de la vitesse moyenne de rotation du cœur
4.2.2 Estimation de la période moyenne de rotation du cœur
4.3 Précédentes mesures
4.4 Corriger la modulation de l’espacement en période des modes mixtes
4.4.1 La fonction ζ
4.4.2 Les spectres en période corrigée
4.5 Diagrammes échelle en période corrigée
4.5.1 Sélection des modes mixtes significatifs
4.5.2 Sélection des modes mixtes dominés par la gravité
4.5.3 Lissage des diagrammes échelle
5 Identification automatique des composantes du multiplet rotationnel associé à la rotation du cœur 
5.1 Utilisation de la transformée de Hough
5.1.1 Principe de la transformée de Hough
5.1.2 Mesure de δνrot,core à partir de la transformée de Hough
5.1.3 Application pratique
5.1.4 Limites de la méthode
5.2 Construction de diagrammes échelle synthétiques
5.3 Cas particulier des rotations du cœur modérées à rapides
5.3.1 Identification de l’ordre du croisement observé
5.3.2 Incertitudes sur la mesure du splitting rotationnel
5.4 Une méthode adaptée à la mesure de rotations du cœur lentes à rapides
5.4.1 Sélection des modes mixtes importants
5.4.2 Corrélation du spectre observé avec différents spectres synthétiques
5.4.3 Incertitudes sur la mesure du splitting rotationnel
5.4.4 Comparaison aux mesures précédentes
6 Mesure à grande échelle de la rotation du cœur des étoiles de la branche des géantes rouges observées par Kepler 
6.1 Caractéristiques de l’échantillon étudié
6.2 Etude de l’évolution de la rotation du cœur
6.2.1 Evolution de la rotation du cœur en fonction du rayon
6.2.2 Evolution de la rotation du cœur en fonction de la densité de modes mixtes
6.3 Influence des paramètres stellaires dans le taux du ralentissement de la rotation du cœur
6.3.1 Influence de la métallicité
6.3.2 Influence de la masse
6.4 Origine des différences observées avec les précédentes mesures
6.5 Implications sur le haut de la branche des géantes rouges et le clump
6.6 Conclusion
7 Vers une interprétation complète du spectre d’oscillation des géantes rouges 
7.1 Identification des modes mixtes
7.2 Ajustement des modes mixtes individuels
7.3 Mesure des paramètres sismiques associés aux modes mixtes
7.3.1 Espacement en période
7.3.2 Splitting rotationnel
7.3.3 Largeur des modes mixtes
7.3.4 Amplitude et hauteur des modes mixtes
7.4 Application à grande échelle
7.4.1 Discontinuités dans le profil de Brunt-Väisälä
7.4.2 Espacement en période des modes de gravité
7.4.3 Offset de gravité
7.4.4 Splitting rotationnel
7.4.5 Inclinaison stellaire
7.5 Observabilité des modes mixtes
7.5.1 Modes mixtes dominés par la pression
7.5.2 Modes mixtes dominés par la gravité
7.6 Conclusion
8 Quantifier le moment cinétique extrait du cœur des étoiles le long de la branche des géantes rouges 
8.1 Calcul du couple d’extraction du moment cinétique
8.2 Modèles de référence
8.3 Contraintes apportées par les mesures sur le profil de rotation et son évolution
8.4 Evolution du profil de moment d’inertie interne
8.5 Implication en termes d’extraction locale de moment cinétique dans le cœur
8.6 Perspectives
9 Conclusions et perspectives 
9.1 Conclusions
9.1.1 Mesures à grande échelle de la rotation du cœur sur la branche des géantes rouges168
9.1.2 Quantifier le moment cinétique extrait du cœur le long de la branche des géantes rouges
9.2 Perspectives
9.2.1 Analyse des spectres d’oscillation des géantes rouges
9.2.2 Caractérisation du transport de moment cinétique par la modélisati

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