Les modèles théoriques du TDAH

Le TDAH chez l’adulte est un trouble psychiatrique très répandu puisqu’il représenterait 2.8% de la population adulte mondiale selon une récente étude de l’OMS. Néanmoins, celui-ci reste controversé et sous-diagnostiqué dans la pratique clinique en Psychiatrie adulte où le TDAH est encore trop souvent considéré comme une pathologie présente uniquement dans l’enfance. Bien que le TDAH soit aujourd’hui considéré comme une maladie neurodéveloppementale débutant uniquement dans l’enfance, les conclusions de plusieurs études récentes suggèrent qu’il puisse exister une forme de TDAH d’apparition plus tardive. Ce travail de recherche consistera en une revue de la littérature et une étude portant sur un échantillon de patients recrutés au Centre Mémoire de Ressources et de Recherche de Caen. La revue permettra de dresser un état des lieux des connaissances actuelles concernant le TDAH de l’adulte. L’étude cherchera à évaluer le niveau de diagnostic dans l’enfance d’un échantillon de patients ayant reçu pour la première fois à l’âge adulte un diagnostic de TDAH. La discussion permettra ensuite de confronter les données issues de ces deux travaux pour déterminer si celles-ci sont plutôt compatibles avec l’une ou l’autre des deux hypothèses possibles permettant d’expliquer ce phénomène, à savoir l’existence d’une forme de TDAH d’apparition tardive ou bien la persistance d’un TDAH de diagnostic tardif qui serait resté « sous les radars » pendant l’enfance.

GENERALITES

Données épidémiologiques

Prévalence dans le Monde

Les données concernant la prévalence du TDAH varient grandement selon les études. Dans une étude internationale descriptive de grande ampleur conduite par l’OMS en 2017, portant sur un éventail de 21 pays dont la France et utilisant un questionnaire standardisé de l’OMS (CIDI 3.0) basé sur les critères diagnostiques du DSM IV, il a été retrouvé une prévalence moyenne du TDAH de 2,8 % chez l’adulte ; ce qui était légèrement plus élevé que la prévalence retrouvée chez l’enfant (2,2 %) (Fayyad et al., 2017). La prévalence chez l’adulte était donc assez proche du chiffre de 3.4% retrouvé dans une autre étude internationale réalisée 10 ans plus tôt (Fayyad et al., 2007) mais qui concernait un éventail de pays plus restreint.

Dans la même étude (Fayyad et al., 2017), les prévalences du TDAH à l’âge adulte variaient de 0.6 à 7.3% selon les pays. Ces variations sont certainement dues à des différences méthodologiques dans la façon dont les critères diagnostiques sont appliqués, notamment l’apparition des symptômes pendant l’enfance, les méthodes d’évaluation des 18 symptômes comportementaux utilisés pour définir le trouble et l’application des critères de handicap (Franke et al., 2018).

Prévalence en France

Il y a peu d’études s’intéressant spécifiquement à la prévalence du TDAH de l’adulte en France. Néanmoins, dans l’étude conduite par l’OMS, la France avait la prévalence de TDAH chez l’adulte la plus élevée parmi tous les pays représentés soit 7.3% (Fayyad et al., 2017).

Disparités géographiques

L’étude de l’OMS distinguait également les pays selon leur niveau de revenu. La prévalence du TDAH chez l’adulte dans les pays à revenus élevés (3.6%) était significativement plus importante que celle retrouvée dans les pays à revenus moyens (3%) et à revenus faibles (1.4%). L’hypothèse avancée par l’étude était que les symptômes du TDAH pourraient moins interférer avec les exigences sociétales dans les pays à bas revenus. Il n’est donc pas clair si c’est le niveau de revenu en tant que tel ou les normes sociétales propres aux pays selon leur niveau de revenu qui impactent la prévalence du TDAH (Fayyad et al., 2017). Une méta-analyse ancienne datant de 2007 (G. Polanczyk et al., 2007) a étudié la prévalence par secteurs géographiques et a retrouvé une grande variabilité entre les prévalences de TDAH [voir Figure 1]. Cette étude concernait des patients enfants et adolescents et, bien que les résultats ne soient donc pas extensibles au TDAH chez l’adulte, ils soulèvent un questionnement. Après ajustement sur les différences méthodologiques (source de l’information, critères diagnostiques, définition du handicap), les différences persistaient uniquement entre, d’un côté, l’Amérique du Nord et, de l’autre, l’Afrique et le Moyen-Orient mais une mise à jour de cette métaanalyse datant de 2014 (G. V. Polanczyk et al., 2014) et incluant un plus grand nombre d’études, n’a retrouvé aucune association significative entre le secteur géographique et prévalence du TDAH.

Les modèles théoriques du TDAH

Approche psychologique

Selon le Pr Clément, trois hypothèses principales permettent de résumer l’approche psychologique : une altération de certaines fonctions exécutives (induite par une inhibition comportementale), une altération du gradient de renforcement (approche comportementale) et une aversion au délai (approche motivationnelle) (Clément, 2010).

Modèle de Barkley
Selon Barkley, un déficit initial de l’inhibition comportementale entraverait quatre fonctions neuropsychologiques exécutives, à savoir : la mémoire de travail ; l’autorégulation des affects, de la motivation et de la vigilance ; l’internalisation du langage ; et la reconstitution (analyse du comportement et synthèse) [voir Figure 3]. Un phénomène de persévération serait induit par le déficit de la mémoire de travail. Un évitement des tâches considérées comme contraignantes (compte tenu d’une dépendance trop importante aux récompenses externes) serait la conséquence du défaut d’autorégulation des motivations et de l’éveil. Une altération de la planification et de la régulation du comportement, ainsi que des difficultés à résoudre les problèmes seraient induites par le déficit d’internalisation du langage interne. Enfin, un manque de flexibilité et de créativité face à un problème nouveau serait lié au déficit de reconstitution et induirait des actions stéréotypées, labiles ou incomplètes (Clément, 2010).

Modèle de Sagvolden
D’après Sagvolden et ses collègues, un renforçateur n’augmenterait pas seulement la probabilité de réapparition de la réponse qui l’a lui-même produit mais présenterait également un effet rétroactif sur les réponses antérieures. Celui-ci diminuerait à mesure que le délai entre la réponse et le renforçateur augmente. Ce phénomène est représenté par le gradient du délai de renforcement qui montre une diminution de l’effet progressif du renforçateur en fonction du temps. Il serait plus court et plus raide chez les enfants présentant un TDAH (Clément, 2010) [voir Figure 4]. En effet, la théorie du développement dynamique de Sagvolden suggère que des niveaux anormalement bas de dopamine dans le système mésolimbique lors de la transmission tonique (sans potentialisation présynaptique) puissent être à l’origine de cette altération du gradient de renforcement (Sagvolden et al., 2005).

Chez l’individu TDAH, un renforçateur perd sa valeur rapidement. Autrement dit, seule une récompense suffisamment proche de la réponse serait à même de renforcer celle-ci en induisant ultérieurement plus de réponses du même type. De plus, le gradient du délai de renforcement raccourci dans le TDAH implique que seuls les intervalles courts entre les réponses soient renforcés et maintenus (Sagvolden et al., 1998).

Ces données expliquent pourquoi les bouffées de réponses qui caractérisent l’hyperactivité ne seraient pas forcément présentes lorsque le patient TDAH est confronté à une situation nouvelle. Celles-ci se développeraient progressivement au fil du temps sous l’influence de renforçateurs successifs ne renforçant que les réponses les plus proches (Clément, 2010).

Le raccourcissement du gradient pourrait également provoquer un plus faible contrôle par le stimulus. Cela impliquerait notamment la persistance de réponses en l’absence du signal normalement associé, ce qui correspond cliniquement à un déficit en attention soutenue (Clément, 2010).

Le modèle de Sonuga-Barke 

Sonuga-Barke a introduit la notion d’aversion au délai qu’il associe aux modèles de Barkley et de Sagvolden au sein d’un modèle à double voie visant à expliquer les comportements observés dans le TDAH [voir Figure 5]. La première voie traduit la théorie de Barkley d’un dysfonctionnement des fonctions exécutives sous-tendue par un déficit de l’inhibition alors que la deuxième voie intègre à la fois la théorie de Sagvolden et celle de Sonuga-Barke ; l’aversion au délai n’étant que la conséquence du raccourcissement du gradient de renforcement chez les patients TDAH (Clément, 2010). Selon Sonuga-Barke, un dysfonctionnement des circuits biologiques impliqués dans l’attribution des récompenses conduirait les personnes TDAH à privilégier les récompenses immédiates par rapport aux récompenses différées même si ces dernières sont plus grandes ou de meilleure qualité. Des choix impulsifs permettraient de minimiser le temps d’attente avant l’obtention d’une récompense, celui-ci étant associé à des émotions négatives. En outre, l’aversion au délai se traduirait cliniquement par les comportements désorganisés, non orientés et inadaptés qui caractérisent le TDAH. Dans les situations sans choix où il ne serait pas possible de raccourcir le délai, l’attention se porterait sur d’autres éléments non temporels de l’environnement (symptômes d’inattention). Dans les cas où les possibilités de porter son attention vers d’autres éléments seraient limitées, les personnes TDAH devraient elles-mêmes inventer ces éléments (symptômes d’hyperactivité)(Clément, 2010).

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Table des matières

INTRODUCTION
I. GENERALITES
A. Données épidémiologiques
1. Prévalence dans le Monde
2. Prévalence en France
3. Disparités géographiques
4. Disparités selon le genre
5. Proportion de patients traités
B. Les modèles théoriques du TDAH
1. Approche psychologique
2. Les mécanismes neurobiologiques
3. Les apports de l’imagerie
II. FACTEURS DE RISQUE
A. Rôle de la génétique
1. Héritabilité du TDAH
2. Facteurs génétiques impliqués dans le TDAH
3. Facteurs génétiques spécifiques du TDAH chez l’adulte
B. Facteurs favorisant l’apparition du TDAH chez l’enfant
C. Facteurs prédictifs de la persistance à l’âge adulte
III. ELABORATION DU DIAGNOSTIC
A. Les difficultés du diagnostic du TDAH chez l’adulte
B. Principes généraux de l’évaluation du TDAH chez l’adulte
C. Critères diagnostiques dans le DSM-V
D. Evolution récente et limites des critères diagnostiques dans le DSM
E. Outils et échelles d’évaluation
F. Tests neuropsychologiques
G. Diagnostics différentiels et comorbidités
1. Diagnostics médicaux et iatrogènes
2. Diagnostics psychiatriques et addictologiques
IV. LA TRAJECTOIRE DU TDAH AU COURS DE LA VIE
A. Données sur la persistance d’un TDAH déjà présent dans l’enfance
B. Evolution des symptômes principaux du TDAH entre l’enfance et l’âge adulte
C. Evolution des déficits cognitifs sur les tests neuropsychologiques entre l’enfance et l’âge adulte
V. L’HYPOTHESE D’UNE FORME DE TDAH D’APPARITION TARDIVE
A. Le cas particulier des TDAH secondaires
B. Etudes suggérant l’apparition d’un TDAH chez l’adulte
1. L’étude de Moffitt
2. L’étude de Caye
3. L’étude d’Agnew-Blais
C. Etiologie du TDAH d’apparition tardive
D. Limites des études
VI. PRISE EN CHARGE
A. Le traitement des comorbidités
B. Traitements médicamenteux dans le TDAH
1. Recommandations internationales
2. Modalités de prescription et options médicamenteuses disponibles en France
3. Efficacité des différents traitements chez l’adulte
4. Adaptation des doses
5. Effets secondaires, risques, contre-indications et phénomène de tolérance du METHYLPHENIDATE
6. Outils permettant d’évaluer l’efficacité et la tolérance du METHYLPHENIDATE
C. Approches non pharmacologiques dans le TDAH
1. Thérapie cognitivo-comportementale (TCC)
2. Thérapie pleine conscience
3. Rééducation attentionnelle
4. Luminothérapie
5. Neurostimulation
D. Le mésusage du traitement
1. Données épidémiologiques
2. Risque de dépendance
3. La voie d’administration
4. Stratégies thérapeutiques chez les patients à risque de mésusage et de détournement du traitement
CONCLUSION

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