Les mobilités quotidiennes et résidentielles pendant le renouvellement urbain, vers des continuités présentielles et résidentielles ?

Des continuités populaires aux continuités communautaires

Ce troisième chapitre est dédié à la construction de la notion de continuités communautaires.
Une notion héritée, comme sa dénomination l’indique, de la notion de continuités populaires et spécifiquement dédiée à l’étude des impacts de la rénovation urbaine sur les quartiers de grands ensembles. Par conséquent, je commencerai par discuter la notion de « communautaire » au regard de son acception dans la littérature scientifique anglo-saxonne sous le terme de communities. Après avoir déconstruit les appréhensions typiquement françaises dans l’utilisation de ce terme et justifié mon choix dans l‘utilisation de ce terme parfois polémique, j’exposerai l’hypothèse de la réalité de ce phénomène dans les quartiers de grands ensembles et ainsi de son utilité dans l’analyse des dynamiques sociales dans les espaces publics ou semi-publics de ces espaces urbains. L’objectif de cette partie est de montrer l’apport que pourrait avoir l’utilisation de la notion de communauté habitante comme étant un groupe de pairs entretenant entre eux des liens de sociabilité, de solidarité ou d’entre-aide fort sans pour autant se fermer à l’extérieur et au reste de la société. Enfin, une fois les notions de continuités et de communauté habitante de ce mémoire étudiées séparément, je m’emploierai à expliciter les bénéfices, les intérêts de les réunir afin de questionner les changements liés à la rénovation urbaine et leurs impacts sur les populations habitantes.

Communauté habitante, intérêts de l’utilisation d’une notion critiquée

La notion de communauté est très peu utilisée en France alors que « la référence à la «communauté» est couramment utilisée dans les sciences sociales (en géographie notamment) en Amérique du nord où, dans la tradition de l’école de Chicago, l’identité collective, l’appartenance à un groupe social ou l’attachement à des cultures spécifiques constituent des fondements du lien social » (Vincent Gouëset, Odile Hoffmann, 2006 : 263). En France, les notions de « communautaire et «communautarisme», parfois assimilées, sur un mode accusatoire, au renfermement, au repli identitaire, voire au sectarisme » (ibid : 266) sont ainsi peu utilisées de crainte d’être associées dans une idéologie défiant l’idéal d’intégration républicaine. Ainsi pour ne pas avoir à utiliser cette notion trop subjective, trop négative dans les représentations sociales dominantes, « c’est un autre concept, spécifiquement français qui apparaît, celui de lien social. Renvoyant à ce qui permet aux hommes d’être en relation les uns avec les autres, il semble dépasser l’opposition communauté et société et être adapté à un monde plus flexible, moins structuré où le problème majeur devient la rupture du lien : la désaffiliation. Mais cette histoire ne s’applique pas au monde anglo-saxon dans lequel les communities studies, liées aussi bien à la sociologie qu’à anthropologie, ont toujours tenu une place importante. Dans la période actuelle, le concept de communauté reprend de la force avec toute une série de concepts «dérivés» : communauté de pratiques, communautés épistémiques, communautés virtuelles… » (Ivan Saintsaulieu et al., 2010 : 11). Ainsi, le choix de l’utilisation de cette notion n’est pas anodin dans la littérature scientifique française. C’est pourquoi, je proposerai, dans cette partie de chapitre, d’expliciter ce que comprend la notion de communauté à travers un cadrage théorique avant de questionner la pertinence de l’hypothèse d’observer des communauté habitantes dans les quartiers de grands ensemble français et plus particulièrement dans le quartier de Malakoff – Pré Gauchet à Nantes.
Dans un premier temps, force est de constater qu’en m’appuyant sur cette notion cela me permet de réutiliser tous les travaux scientifiques dont elle a fait l’objet dans des cultures scientifiques où l’étude des communautés est moins tabou voire même usuel. Ainsi, au regard de cette production comment appréhender cette notion, comment la définir dans le champs d’étude que je propose, qu’entend -t-on par communauté ? Suite à ces questionnements, il semble qu’un cadrage théorique de la notion de communautaire nécessite d’être fait afin de préciser l’acception que je ferai de cette notion.
Le terme communautaire renvoie à la notion de communauté, elle est décrite comme étant un « groupe social ou institution uni par des intérêts de même nature, avec quelquefois des origines communes et souvent un territoire commun »16. Cette définition donnée reste assez vague et ne permet pas de réaliser un cadrage théorique suffisamment précis de la notion.
Pour le Larousse, le terme de communauté renvoie à plusieurs acceptations, cela peut être une « identité dans la manière de penser de plusieurs personnes » ou, un « ensemble de personnes unies par des liens d’intérêts, des habitudes communes, des opinions ou des caractères communs »17. Ainsi, la communauté renvoie à des liens forts entre les individus qui seraient plus forts que les autres liens avec la société. En effet, selon Max Weber, ce qui distingue un lien de communauté et un lien de société ce sont les « deux formes de relations : l’une qui repose sur un sentiment subjectif d’appartenance, l’autre sur un compromis d’intérêts ou une coordination rationnelle par engagement mutuel » (Ivan Saintsaulieu et al., 2010 : 12-13). Ainsi, pour faire communauté, il ne suffit pas d’intérêts communs entre les différentes personnes ou habitants mais également qu’il existe une affinité particulière, subjective entre les différents membres comme un ciment liant le groupe et ces intérêts permettant de se distinguer par des présences, des pratiques, des usages de l’espace ou des représentations des autres membres de la société. Si la notion de communauté se distingue de celle de société, il existe plusieurs types de communautés. Max Weber, en s’intéressant aux religions, parle de communauté qu’il qualifie d’émotionnelle. L’auteur précise « qu’il s’agit d’une « catégorie », c’est-à-dire quelque chose qui n’a jamais existé en tant que tel, mais qui peut servir de révélateur à des situations présentes.
Les grandes caractéristiques attribuées à ces communautés émotionnelles sont l’aspect éphémère,
la « composition changeante », l’inscription locale, l’absence d’une organisation et la structure quotidienne » (Michel Maffesoli, 2000 : 28). Cependant, la notion de communauté émotionnelle ne peut résumer la notion de communauté puisque l’on peut également parler de communauté de destin, définie par Jean Ollivro comme « provoquée par les réalités extérieures aux individus et qui s’impose à eux avec force ; au premier rang de celles-ci on trouve la réalité territoriale dès lors qu’on n’a pas les moyens de la quitter » (2009). Ici, la notion de choix subjectif d’appartenance n’a pas lieu d’être, ces travaux mettent en évidence la pluralité de la nature des liens qu’il existe au sein de chaque communauté. Cette diversité rappelle que ce qui peut faire communauté pour un individu ou un groupe, ne l’est pas pour d’autre tant les conceptions peuvent être différentes.
En revanche, il ne faut pas considérer la communauté d’habitant comme une structure sociale « opposable aux liens sociaux « raisonnés » qui seraient l’apanage des « sociétés », tant la complexité de certaines communautés est avérée » (ibid). Finalement, la société nationale ou globale ne serait elle pas composée de communautés défendant leurs intérêts par des moyens qui leurs sont propres dont la forme la plus remarquable dans l’espace serait les gated communities, où des populations aisées s’enferment dans des espaces clos et protégés.
Ainsi, la présence d’un individu dans une communauté est le fruit d’un choix personnel mais également le produit d’une acceptation de cette communauté. Ces choix s’opèrent dans la recherche mutuelle de bénéfices objectifs, subjectifs, concrets, matériels ou immatériels.
Celle-ci existant par un ou plusieurs caractères communs unissant les individus entre eux, et le non-respect de normes communes, de valeurs communes, etc., peut entraîner une éviction d’un membre du groupe. Par conséquent, « les groupes semblent plus volontaires que rationnels, au sens où l’affect les guide tout autant que le calcul. Ils ne sont pas immuables, mais ils créent des attaches, des dépendances fortes : « on peut accorder un statut ontologique aux réseaux de relations, organisations et institutions qui encadrent ces individus » » (Ivan Sains au lieu et Monika Salzbrunn in Ivan Saintsaulieu et al., 2010 : 225). Pour revenir vers le sujet d’étude, il semble pertinent de considérer, dans le cas présent, les liens communautaires comme devant être caractérisés par une présence territoriale commune dans le quartier de grands ensembles.
Ces présences peuvent être liées au lieu de résidence, mais peuvent aussi correspondre à des retours dans le quartier d’individus étant partis afin de conserver ces sociabilités communautaires. Ainsi, la notion de communautaire que je propose renvoie à des groupes d’individus dont les caractéristiques communes et le sentiment d’appartenance à ce groupe permet de les distinguer du reste de la société. Cependant, il semble judicieux de préciser que l’utilisation de ce terme pour qualifier les continuités observées, ne doit pas s’apparenter aux visions péjoratives incarnées par la notion de communautarisme. Cette dernière, fortement connotée et politisée, sert les pensées défendant les idéaux républicains d’intégration et d’universalisme face à cette « menace » du repli sur soi. Ici, mon propos, n’est pas d’ancrer ma réflexion dans une vision partisane mais bien de rendre compte d’un point de vue sociologique des stratégies de chaque individu dans la sphère sociale et donc retranscrit dans l’espace par des pratiques, des usages ou des représentations propres à ces sociabilités communautaires. Le fait est que chaque individu se reconnaît, de manière plus ou moins intentionnelle ou consciente, comme faisant partie d’une communauté ou de communautés de pairs. Cependant, les populations de ces quartiers de grands ensembles ont tendance à exacerber ces regroupements comme une réaction aux « mécanismes d’exclusion […] et de construction du « problème social » des quartiers de banlieue » (Didier Lapeyronnie, 2014) par la société dominante, extérieure au quartier. Ainsi, l’utilisation de ce terme est due à la pertinence qu’elle apporte par son cadrage théorique aux phénomènes sociologiques observables dans ces espaces urbains.

Continuité communautaire et rénovation urbaine des quartiers de grands ensembles, utilité et hypothèses

Pour terminer ce troisième chapitre, je procéderai à une jonction des deux termes de continuité et de communauté habitante. L’association de ces deux termes doit être le cadre d’un rappel de cadrage mais également sur l’utilité attendue d’une étude des stratégies et des dynamiques habitantes sur le quartier de Malakoff – Pré Gauchet. Je poursuivrai cette sous-partie en montrant en quoi la rénovation urbaine contraint, change, dynamise les modes d’habiter des primo-habitants et comment la lecture de cette situation par les continuités communautaires peut-elle être pertinente. Puis, en guise d’ouverture vers la deuxième partie du mémoire, il me semble utile d’envisager des hypothèses sur les possibles observations ou résultats d’analyse.
Pour se faire je me baserai essentiellement sur les hypothèses formulées lors de mon mémoire de Master 1 auxquelles j’ajouterai celle qui me sembleront pertinentes lors de mon expérience du terrain.
Ainsi, pourquoi parler de continuités communautaires pour les quartiers de grands ensemble ayant connu une opération de rénovation urbaine ? Tout d’abord, il me paraît important de repréciser l’origine de la notion de continuité de l’habiter, introduite par Matthieu Giroud dans sa thèse soutenue en 2007. Cette notion, au sein de sa thèse est suivit du qualificatif de populaire en lien avec les caractéristiques des populations des quartiers étudiés. Cependant, ainsi que j’ai pu le montrer dans le chapitre précédent, le qualificatif de populaire n’est pas satisfaisant représentativement parlant pour les habitants des quartiers de grands ensembles.
En effet, si de l’extérieur, l’impression est donnée d’avoir une homogénéité de la population dont la principale caractéristique serait les difficultés socio-économiques, lorsque que l’on s’intéresse de plus prêt au quartier et à la structure de la population, il est aisément observable qu’il existe en son sein une grande diversité. Que ce soit le statut professionnel, que ce soit l’origine nationale, l’âge, la structure du ménage, etc. la population des quartiers de grands ensembles est loin d’être homogène. De cette observation, j’ai donc fait l’hypothèse de retrouver au sein de ces quartiers des communautés d’habitants – pour rappel, ces communautés peuvent être géographique et donner naissance à une ou plusieurs identités locales, culturelles, religieuses, de projet ou d’intérêt (association), de pratiques -. Par conséquent, l’habiter des résidents des quartiers de grands ensembles est en grande partie défini par l’adhésion à une ou plusieurs communautés d’habitants, ou se définir contre une à plusieurs communautés d’habitants.
Cependant, pourquoi utiliser la notion de communauté pour qualifier les regroupements entre habitants dans les quartiers de grands ensembles ? Deux raisons principales justifient l’utilisation de cette notion pour les habitants de ces espaces urbains. La première est liée à l’enclavement voire l’isolement géographique de ces quartiers pendant quelques décennies. Cet isolement associé à des mobilités en dehors du quartier qui sont moins courantes qu’ailleurs créé une identité de quartier forte, un effet village, « un sentiment de communauté […] laissant apparaître l’importance des relations sociales dans la notion d’attachement » (Thierry Ramadier, 2007 : 128). De surcroît, la précarité ou les difficultés socio-économiques des habitants de ces espaces urbains « sensibles » créent « une solidarité étroite » comme « un lien de « communauté » » et « qui n’est pas réductible à un échange rationalisé fondé sur un calcul économique » (Jean- Claude Chamboredon et Madeleine Lemaire, 1970). La deuxième raison expliquant l’intérêt d’utiliser une telle notion est la présence forte de populations immigrées ou issues de familles immigrées. Cette caractéristique démographique a un impact puisque de nombreuses nationalités, cultures, religions se mêlent dans un même espace résidentiel et « les travaux de l’école de Chicago ont montré l’importance des liens de solidarité communautaire lors de l’installation dans le pays d’accueil » (Elise Lemercier in Ivan Saintsaulieu et al., 2010 : 106). Ces regroupements permettent aux personnes immigrées de retrouver un espace social sécurisant puisque maintenant les codes, rites, normes, valeurs ou langues connues, ces communautés permettent de trouver plus facilement des ressources permettant, plus tard, une intégration dans le pays d’accueil.
Ainsi, lors des nombreux changements liés à la rénovation urbaine qui impactent le quartier, les différentes communautés d’habitants seront touchées en fonction des caractères qui fondent leur habiter typique. Par conséquent, chaque communauté ne sera pas touchée de la même manière puisque les changements véhiculés par la rénovation urbaine contraindront ou faciliteront les différents aspects de l’habiter communautaire. Alors, certaines communautés pourraient sortir « gagnantes » de ces changements si son habiter est concordant avec les changements, les normes et les valeurs véhiculées par cette politique de la ville, alors que d’autre seront repoussées, contraintes par les changements. Cette situation de perturbation de l’habiter communautaire pourrait alors provoquer des résistances produisant des continuités dans les présences, les pratiques, les usages et les représentations en dépit des changements.
Ainsi l’intérêt de questionner la rénovation urbaine du quartier de Malakoff à Nantes par la notion de continuités communautaires réside dans cette révélation des différentes stratégies mise en place pour préserver, revaloriser ou adapter les caractéristiques de l’habiter.

Révéler les continuités communautaires à Malakoff

Cette deuxième partie est un préalable à l’analyse des résultats récoltés pour ce mémoire. Il s’agit d’une part, de faire le lien entre les apports théoriques de la première partie et les changements réellement observés à Malakoff-Pré-Gauchet, puis, d’autre part, de présenter les choix méthodologiques les plus appropriés par rapport à la problématique, par rapport aux hypothèses en découlant et par rapport au terrain et ces populations en eux même.
Pour commencer, avec le chapitre quatre, je contextualiserai les changements socio-spatiaux qui se sont produits sur le quartier depuis le début de la rénovation urbaine.
Cette analyse des dynamiques et des changements provoqués par la rénovation urbaine sur le quartier de Malakoff permet de mieux mesurer, percevoir les évolutions qui s’y sont produites.
Poser le contexte des changements dans le quartier par des outils « objectifs » ou par l’apport des documents officiels véhiculant les ambitions municipales et de l’ANRU permettra de mesurer l’écart entre les changements pensés ou voulus et ceux véritablement effectifs ou ceux non souhaités révélés par des observation sociologiques ou les discours produits par les habitants par la suite.
Puis, pour continuer et en guise de cinquième chapitre de ce mémoire, je présenterai les outils méthodologiques auxquels j’aurai recours. Ces outils sont destinés à révéler les continuités communautaires provoquées par les changements brutaux et imposés présentés dans le chapitre précédent et seront, d’une part, d’ordre qualitatifs par la réalisation d’observations non-participantes sur le quartier, de parcours commenté et quantitatifs, d’autre part, grâce aux ateliers cartographiques avec des participants. J’expliciterai dans ce chapitre les raison de ces choix méthodologiques. Puis, pour clore ce chapitre, ainsi que cette partie, je procéderai à un retour sur l’expérience de terrain où je m’attarderai à identifier les aspects qui ont fonctionné et les limites à cette méthodologie mise en oeuvre. Enfin, je présenterai l’échantillon des participants à cette phase d’étude afin de tester sa représentativité démographique et sociale par rapport à la situation réelle du quartier de Malakoff.

Malakoff – Pré Gauchet à l’heure de la rénovation urbaine. Analyse contextuelle

Durant ce quatrième chapitre, l’objectif sera de contextualiser les propos tenus notamment dans le chapitre 1 de ce mémoire, c’est-à-dire de voir, analyser et comprendre comment se retranscrivent les objectifs généraux de l’ANRU pour ce projet de rénovation urbaine par rapport aux problématiques locales et par rapport à la volonté et aux ambitions des acteurs locaux. Je diviserai la réflexion de ce chapitre en trois sous-parties. Lors de la première, je montrerai les raisons qui ont orienté le choix de la rénovation urbaine pour ce quartier nantais. Cette analyse, commencée dans le cadre du mémoire de Master 1, permettra de mieux comprendre, cerner, les différents objectifs ainsi que leurs évolutions au cours des révisions de la convention. Comprendre l’intention publique du projet est un moyen de mesurer l’écart entre les attentes, les besoins, les envies des principaux concernés, c’est-à-dire les habitants du quartier de Malakoff et les objectifs fixés pour le projet de rénovation urbaine et, ainsi, mettre en évidence les lieux ou les raisons potentielles de résistance par l’habiter des populations résidentes. Puis dans un deuxième temps, j’analyserai les différents changements spatiaux direct ou indirects provoqués par la rénovation urbaine grâce à une analyse cartographique.
Enfin, dans un troisième temps il s’agira de saisir d’appréhender les objectifs de mixité sociale par une analyse statistique de l’évolution démographique mais également de l’évolution du parc de logements. Ces éléments statistiques pourront nous confirmer ou non la réussite de l’objectif de mixité sociale dans le quartier, et donc la possibilité de situations de conflits socio-spatiaux entre les différents groupes d’habitants dans le quartier. Cette analyse des changements opérés sur le quartier pourrait permettre de saisir ou de faire l’hypothèse de zones, de thématiques potentiellement conflictuelles parce que s ‘opposant, menaçant certains actes d’habiter des populations primo-habitantes.
Cependant, avant de commencer à analyser la rénovation urbaine de Malakoff – appelée « le nouveau Malakoff » – il me paraît important de préciser les raisons qui m’ont mené à choisir ce quartier. Dans un premier temps, parce qu’il s’agit d’un programme de rénovation urbaine de grande ampleur, c’est-à-dire concernant tout le quartier, et dont les chantiers principaux sont aujourd’hui terminés. Il s’agit donc d’un terrain d’étude adapté pour l’observation de continuités communautaires puisque celles-ci sont des réactions aux changements brutaux induits par le projet de rénovation urbaine. A Nantes, ce projet a été l’occasion pour la municipalité et la métropole de se gratifier pour ce projet qui se veut exemplaire mais dont les populations concernées n’ont que peu été entendues. Il s’agit pour moi, de porter un deuxième regard sur ce projet mais cette fois-ci centré sur les populations et leurs réactions. Enfin, j’ai choisi ce quartier par commodité et intérêt personnel. Étant nantais, et « voisin » du quartier de Malakoff, j’ai senti l’évolution de près, comme de loin dans ce quartier de grands ensembles dont la réputation a pu être particulièrement sulfureuse. J’ai donc eu l’envie d’analyser, de comprendre, plus en détail, ces changements, et l’approche par les continuités communautaires me permet de redécouvrir cet espace, ce projet de rénovation urbaine sous un autre angle, sous un autre regard.

Malakoff – Pré Gauchet, comment expliquer la mise en place d’une telle politique ?

La première raison de la mise en place de la rénovation urbaine sur le quartier de Malakoff est la plus évidente et la plus visible puisque l’architecture du quartier construit à partir de 1967 répond aux standards des quartiers de grands ensembles. C’est-à-dire, des bâtiments en forme de tours et de barres standardisées permettant de construire vite et avec peu de coûts afin de loger un maximum de populations dans des logements sociaux. Parallèlement, ainsi que de nombreux quartiers de grands ensembles, la connexion avec le reste de la ville a été pensée en fonction de l’utilisation de la voiture, et le quartier, pour des ménages non-motorisés, peut paraître loin du reste de la ville. Cependant, contrairement à certains quartiers de grands ensembles, les espaces publics ont été pensés et ont pour beaucoup une fonction établie et souvent tournée vers l’enfance. Les équipements et les services sont également présents avec quelques commerces de proximité et une moyenne surface, des équipements sportifs et associatifs, une mairie annexe, une poste. Ces particularités, donnent Malakoff une cohérence multi-fonctionnelle accentuant, de fait, l’enclavement par rétention des mobilités quotidiennes notamment des personnes sans activités, des enfants, des adolescents ou des retraités et créant une sorte de quartier autonome au sein même de la métropole nantaise.
Par conséquent, cet enclavement géographique dû au manque de connexions, à une distinction morphologique et à l’absence de raisons de sortir le quartier, cet enclavement social lié à une structure du parc de logements composée à 98,5 % (INSEE, 2003) de logements sociaux. Le tout rehaussé de la réputation sulfureuse du quartier dans la métropole et même au-delà, a, bien évidemment, conduit les pouvoirs locaux à choisir prioritairement le quartier pour y effectuer une rénovation urbaine d’une ampleur inédite à Nantes depuis l’après guerre.
A ces indices de fragilités sociales des habitants du quartier, s’ajoutent des caractéristiques reflétant un certain enclavement des populations, puisque 41 % des ménages de Malakoff ne possèdent pas de voiture contre 28 % des ménages nantais à cette même période.
Cette statistique est à rapporter avec l’observation urbanistique citée précédemment où j’ai rappelé que les quartiers de grands ensembles ayant été construits dans le contexte de l’essor de la voiture individuelle et des idéaux fonctionnalistes, sont adaptés pour des ménages avec voiture et pénalisent les autres ménages par un certain enclavement spatial et des services de transports souvent, comme à Malakoff, insuffisant voire absent certains jours de la semaine.
Par exemple, avant la révision de la carte des transports en commun à Malakoff, liée aux nouvelles infrastructures routières, les bus étaient, peu efficaces, peu nombreux et surtout absents le dimanches, entraînant, de fait, une assignation à l’immobilité ou plus largement une complication des déplacements par des moyens alternatifs à la voiture. Malgré cela, 26,6 % des habitants de Malakoff utilisaient les transports en communs pour aller au travail en 1999 contre seulement 14,5 % des nantais. Ainsi, il faut nuancer cet enclavement, puisque les personnes souhaitant se rendre à l’extérieur y parviendront, cependant, rien n’incite ou ne facilite les connexions entre Malakoff et le reste de la ville de Nantes.
Enfin, un taux de vacance élevé des logements – autour de 8,6 % en 1999 – sur le quartier de Malakoff – contre 6,4 à l’échelle communale – témoigne, au mieux d’un manque d’attractivité et au pire, d’une répulsion des populations à s’y installer.
Par conséquent, que ce soit par les critères de l’enclavement géographique et social, mais également par ceux liés à l’état du parc de logement ou encore par ceux liés à l’image du quartier. Les éléments justifiants d’une rénovation urbaine au regard des pouvoirs publics locaux ou de l’ANRU sont très largement réunis.
En 1999, le comité interministériel à la ville dote le quartier de Malakoff d’un Grand Projet de Ville. Cette politique de la ville s’inscrivait dans une volonté de faire du renouvellement urbain, c’est-à-dire rénover, réhabiliter les immeubles d’habitation tout en fournissant un soutient social aux populations habitantes. Cependant, dès 2004, alors que le GPV n’avait pas eu le temps de démarrer, Nantes métropole, sur les bases de ce projet initial signe avec l’ANRU une convention de rénovation urbaine, soit un PNRU. Si le projet initial évolue vers la destruction-reconstruction voulue par l’ANRU, la convention garde tout de même un volet social assez conséquent. Par ailleurs, l’originalité du projet est de coupler à ce programme de rénovation urbaine une ZAC, celle du Pré‑Gauchet afin de penser les changements de ces quartiers adjacent de manière cohérente et inclusive.

 

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Table des matières

Remerciements
Introduction générale
Partie 1 : Continuités communautaires et rénovation urbaine des grands ensembles. Cadrage théorique et contextuel
Chapitre 1 : Retour sur la rénovation urbaine, impacts et changements socio-spatiaux
Chapitre 2 : « Continuités populaires » de Matthieu Giroud, cadrage et intérêts
Chapitre 3 : ,Des continuités populaires aux continuités communautaires
Conclusion de la première partie
Révéler les continuités communautaires dans le contexte de Malakoff – Pré Gauchet
Chapitre 4 : Malakoff – Pré Gauchet à l’heure de la rénovation urbaine. Analyse contextuelle
Chapitre 5 : Présentation d’une méthodologie construite pour révéler les continuités communautaires et retour sur l’expérience de terrain
Conclusion de la deuxième partie
Partie 2 : Les continuités communautaire comme une réaction de l’habiter des populations habitantes face au renouvellement urbain de Malakoff
Chapitre 6 : Les mobilités quotidiennes et résidentielles pendant le renouvellement urbain, vers des continuités présentielles et résidentielles ?
Chapitre 7 : Continuités communautaires et rapports quotidien au quartier où reconstitution des lieux par les présences, pratiques ou usages
Chapitre 8 : Continuités des représentations mises en tension entre acte mémoriel et revalorisation
Conclusion de la troisième partie
Conclusion générale
Annexes
Tables
Bibliographie
Résumé

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