Les missions martiennes de la NASA

Gรฉnรฉralitรฉs

La robotique est une science ร  la croisรฉe de plusieurs disciplines scientifiques et techniques (mรฉcanique, รฉlectronique, informatique, . . .). Ses applications sont actuellement principalement connues dans lโ€™industrie. Ici nous nous intรฉresserons ร  la robotique mobile autonome, qui se diffรฉrencie de la robotique industrielle par lโ€™ajout de fonctions perceptuelles et dรฉcisionnelles permettant lโ€™รฉvolution du robot dans un environnement complexe.

Les missions martiennes de la NASA ont permis au grand public de dรฉcouvrir des robots autonomes. Le robot Sojourner de la mission Mars Pathfinder est le premier rover semi-autonome envoyรฉ dans lโ€™espace. Il se posa sur Mars le 4 juillet 1997 et au cours de ses 83 jours de fonctionnement, il envoya 550 photos vers la Terre ainsi que des analyses de roches. Le robot dirigรฉ depuis la Terre embarquait une fonction dโ€™รฉvitement dโ€™obstacles autonome, sa vitesse de dรฉplacement รฉtant de 1cm par seconde. La mission Mars Exploration Rover (MER), qui a pour objectif la recherche de traces de vie, est la plus ambitieuse ร  ce jour. Deux rovers Spirit et Opportunity, de dimensions imposantes (1,5 m de haut, 2,3 m de large et 1,6 m de long pour 185 kg, en comparaison des 10,6 kg de Sojourner), se sont posรฉs sur Mars les 3 et 24 janvier 2004. Les rovers sont dotรฉs dโ€™un planificateur de trajectoires et dโ€™un algorithme dโ€™รฉvitement dโ€™obstacles. Si dans ces deux missions les robots ne planifient pas leurs actions (elles sont envoyรฉes depuis la Terre), elles montrent en revanche le gain dโ€™autonomie des robots dโ€™exploration planรฉtaire.

Dans le domaine civil, la robotique autonome commence ร  faire son apparition. Passons les robots commerciaux (robot Sony AIBO, robots aspirateurs . . .) qui nโ€™intรจgrent peu ou pas de capacitรฉs de dรฉcision, et regardons des applications souvent encore expรฉrimentales. Le robot Rackham du LAAS-CNRS a รฉvoluรฉ pendant plusieurs semaines ร  la Citรฉ de lโ€™Espace ร  Toulouse en prรฉsence du public. Ce robot, dotรฉ dโ€™un trรจs grand nombre de fonctionnalitรฉs (capacitรฉs de dรฉcision, de perception, de locomotion, dโ€™interaction avec le public . . .), a servi de guide interactif pour les visiteurs. De mรชme des projets actuels de recherche concernant la robotique domestique, montrent lโ€™intรฉrรชt croissant pour la robotique autonome. Ainsi le projet europรฉen COGNIRONย  sโ€™intรฉresse au robot cognitif compagnon, lโ€™objectif ultime รฉtant dโ€™arriver ร  concevoir des robots capables dโ€™assister lโ€™homme dans la vie de tous les jours. Ceci requiert des capacitรฉs cognitives avancรฉes et une capacitรฉ ร  interagir en รฉtroite collaboration avec lโ€™homme.

Les recherches actuelles en robotique autonome visent toutes ร  donner plus dโ€™autonomie au robot, que ce soit en dรฉveloppant de nouvelles capacitรฉs ou en rendant plus robustes celles existantes.

La notion dโ€™autonomie

Tout dโ€™abord, diffรฉrencions les systรจmes dit automatiques des systรจmes dit autonomes. Dans [Clough, 2002], les systรจmes automatiques, sont ceux qui ont รฉtรฉ prรฉ-programmรฉs, qui nโ€™ont pas le choix de leurs actions, en opposition aux systรจmes autonomes qui peuvent dรฉcider. On voit trรจs bien que la frontiรจre entre les deux nโ€™est pas franche. On pourrait รชtre tentรฉ de dire quโ€™un systรจme dรฉterministe est automatique, et que les autres sont autonomes. Mais si lโ€™on considรจre par exemple, un robot purement rรฉactif naviguant par la mรฉthode des champs de potentiels, il peut รชtre considรฉrรฉ comme dรฉterministe (si lโ€™on considรจre que les incertitudes attachรฉes aux capteurs ne sont pas trop grandes, sachant lโ€™environnement, les points de dรฉpart et dโ€™arrivรฉe, on peut prรฉdire son chemin), pourtant nous aurons tendance ร  le classer dans les systรจmes autonomes, car il est capable dโ€™agir sur sa trajectoire en fonction de lโ€™environnement. Nous considรฉrerons quโ€™un systรจme est autonome sโ€™il est capable dโ€™adapter son comportement ร  lโ€™environnement, tandis que les systรจmes automatiques sont ceux qui รฉvoluent dans des environnements complรจtement prรฉvisibles. La distinction se fera sur la variabilitรฉ des conditions extรฉrieures, le systรจme automatique agissant dans un environnement assez maรฎtrisรฉ, son comportement ayant รฉtรฉ conรงu en fonction de cela (on pense tout de suite aux tรขches rรฉpรฉtitives de lโ€™industrie manufacturiรจre, gourmande en automatismes).

Cette distinction faite, nous nโ€™avons toujours pas dรฉfini lโ€™autonomie en robotique. Concrรจtement il est trรจs difficile de donner une dรฉfinition ร  lโ€™autonomie. La principale raison รฉtant quโ€™il sโ€™agit dโ€™une notion trรจs subjective et relative. Subjective, dans le sens oรน deux utilisateurs qui รฉvaluent le mรชme systรจme, ne le verront pas de la mรชme faรงon, selon les critรจres quโ€™ils privilรฉgieront. Et relative car on ne peut รฉvaluer et comparer lโ€™autonomie dโ€™un systรจme sur deux tรขches diffรฉrentes. A cela sโ€™ajoute une confusion dans la communautรฉ IA qui est de comparer โ€œlโ€™intelligenceโ€ et lโ€™autonomie des systรจmes. Si lโ€™on qualifie souvent les systรจmes autonomes comme รฉtant des systรจmes intelligents, la dรฉfinition de lโ€™intelligence รฉtant elle mรชme trรจs vague, cela ne rend pas le terme autonomie plus clair. Lโ€™intelligence est une notion que lโ€™on a dรฉjร  bien du mal ร  dรฉfinir pour lโ€™homme (en particulier, les tests de QI sont souvent critiquรฉs). De plus dans notre cas, lโ€™intelligence se rapporte bien souvent aux composants dรฉcisionnels dโ€™un robot et ร  ses capacitรฉs de calcul. Or comme nous lโ€™avons prรฉcisรฉ, un robot purement rรฉactif ne peut รชtre considรฉrรฉ comme non autonome pour la seule raison quโ€™il possรจde une โ€œintelligenceโ€ limitรฉe.

Le grand nombre de dรฉfinitions de lโ€™autonomie dans la littรฉrature, illustre bien le caractรจre subjectif de cette notion. Ici nous ne retiendrons que la dรฉfinition donnรฉe par le National Institute of Standards and Technology (NIST).

Les capacitรฉs des robots

Classiquement on distingue deux types dโ€™autonomie en robotique : lโ€™autonomie opรฉrationnelle et lโ€™autonomie dรฉcisionnelle. Cette distinction vient du dรฉcoupage que lโ€™on trouve dans les architectures de contrรดle sur les robots. implรฉmentรฉe et utilisรฉe au LAAS. On retrouve les capacitรฉs opรฉrationnelles vers le bas de lโ€™architecture, jusquโ€™au niveau fonctionnel. Les capacitรฉs dรฉcisionnelles se trouvent tout en haut. Par la suite nous prendrons cette architecture comme base pour illustrer la prรฉsentation des capacitรฉs des robots. Mรชme si toutes les architectures robotique ne sont pas de type hiรฉrarchique, les architectures les plus รฉvoluรฉes embarquent des composants fonctionnels et des organes dรฉcisionnels.

Capacitรฉs fonctionnelles

Les capacitรฉs fonctionnelles sont les briques de base qui permettent de faire fonctionner les robots. Elles servent de liens entre les composants physiques du robot (capteurs et actionneurs) et la partie qui sert ร  la supervision et ร  la dรฉcision. Dans lโ€™architecture LAAS les modules fonctionnels ont par exemple la charge de :
โ€“ convertir des informations de haut niveau en des commandes pour le matรฉriel (consignes de position ou de vitesse converties en commandes moteur)
โ€“ convertir des donnรฉes capteur en des informations exploitables (impulsions des capteurs odomรฉtriques convertis en des dรฉplacements relatifs)
โ€“ fournir des services utilisables par dโ€™autres modules fonctionnels ou par les organes dรฉcisionnels (planification dโ€™une trajectoire)
โ€“ effectuer des traitements sur des donnรฉes issues dโ€™autres modules fonctionnels (localisation dโ€™aprรจs une carte de segments grรขce aux donnรฉes issues du module qui gรจre le tรฉlรฉmรจtre laser plan) .

Chacune de ces capacitรฉs (ou modules) fournit un service spรฉcifique qui traduit un besoin prรฉcis pour le robot (contrรดle de la locomotion, รฉvitement dโ€™obstacles, planification de trajectoire, . . .). Plus on dote un robot de capacitรฉs fonctionnelles diffรฉrentes et variรฉes et plus on augmente son potentiel et son spectre dโ€™action. Par exemple un robot qui est capable de planifier des trajectoires est capable dโ€™agir dans des environnements plus complexes que le robot qui ne le peut pas. De plus la redondance de capacitรฉs fonctionnelles peut รชtre un avantage dans certains cas (par exemple avoir plusieurs moyens diffรฉrents pour se localiser donne plus de chances de le faire correctement). Dans lโ€™architecture LAAS, lโ€™outil GenoM a รฉtรฉ spรฉcifiquement dรฉveloppรฉ afin de concevoir et dรฉvelopper des modules fonctionnels.

Capacitรฉs dรฉcisionnelles

Les capacitรฉs fonctionnelles doivent รชtre coordonnรฉes et organisรฉes afin de garantir un bon fonctionnement du robot. On peut le faire de maniรจre prรฉรฉtablie en figeant lโ€™organisation des fonctions (quel module est client et/ou fournisseur dโ€™un autre module ?) et en donnant des rรจgles fixes pour gรฉrer les diffรฉrentes situations que lโ€™on peut rencontrer. Mais pour avoir un robot plus autonome, on le dote de capacitรฉs dรฉcisionnelles plus รฉlaborรฉes qui lui permettent de faire face ร  un plus grand nombre de situations et qui permettent une organisation dynamique des modules fonctionnels selon la tรขche. Dans lโ€™architecture LAAS, on distingue plusieurs capacitรฉs dรฉcisionnelles. Le niveau dรฉcisionnel qui est le plus haut dans la hiรฉrarchie comporte un planificateur et un exรฉcutif procรฉdural. Le niveau de contrรดle dโ€™exรฉcution sert de tampon entre les deux autres niveaux et peut รชtre considรฉrรฉ comme un organe dรฉcisionnel. Le planificateur (nommรฉ IXTET) planifie lโ€™ordre des actions quโ€™il faut exรฉcuter afin de remplir une mission donnรฉe. Il sโ€™agit dโ€™un planificateur symbolique qui prend en compte les contraintes temporelles. Lโ€™exรฉcutif procรฉdural dรฉcompose les actions gรฉnรฉrรฉes par le planificateur en des sรฉquences de requรชtes comprรฉhensibles par le niveau fonctionnel. Par exemple pour une action de dรฉplacement il peut demander une localisation, ensuite une planification de trajectoire, puis il demandera au module chargรฉ du dรฉplacement de sโ€™initialiser et de suivre la trajectoire planifiรฉe. Le niveau de contrรดle dโ€™exรฉcution a un rรดle particulier, il sโ€™agit surtout dโ€™un organe pour la sรปretรฉ de fonctionnement. Il est chargรฉ dโ€™analyser la cohรฉrence des ordres produits par lโ€™exรฉcutif procรฉdural avec des rรจgles prรฉรฉtablies et de vรฉrifier le bon dรฉroulement dโ€™une sรฉquence dโ€™actions รฉlรฉmentaires.

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Table des matiรจres

I Introduction
I.1 Gรฉnรฉralitรฉs
I.2 La notion dโ€™autonomie
I.3 Ce qui se cache dans les pages suivantes
II Etat de lโ€™art
II.1 Les capacitรฉs des robots
II.1.1 Capacitรฉs fonctionnelles
II.1.2 Capacitรฉs dรฉcisionnelles
II.2 Les niveaux dโ€™autonomie
II.2.1 Le systรจme de classification ALFUS
II.2.2 FCS
II.2.3 Difficultรฉs – Limitations
II.3 Benchmarking
II.3.1 Sur des algorithmes
II.3.2 Compรฉtitions robotiques
II.4 Autonomie partagรฉe
II.4.1 Interaction homme/robot
II.4.2 La coopรฉration multi-robots
II.5 Conclusion
III Mรฉthodologie
III.1 Dรฉmarche gรฉnรฉrale
III.1.1 Spรฉcification dโ€™une mission
III.1.2 Paramรจtres influents sur le dรฉroulement de la mission
III.1.3 Une analogie : le systรจme de lโ€™รฉducation nationale
III.2 Mรฉtriques liรฉes aux performances
III.3 Mรฉtriques liรฉes ร  lโ€™environnement
III.3.1 Complexitรฉ de lโ€™environnement
III.3.2 Information possรฉdรฉe sur lโ€™environnement
III.3.3 Mise en ล“uvre : les calculs en pratique
III.4 Une nouvelle mรฉthode dโ€™analyse : les โ€œsystem mapsโ€
III.4.1 Les rรฉseaux bayรฉsiens dynamiques
III.4.2 Les system maps
III.4.3 A quoi cela peut-il nous servir ?
III.5 Conclusion
IV Mise en ล“uvre et expรฉrimentation
IV.1 Simulation et benchmark
IV.1.1 Maรฎtrise de lโ€™environnement
IV.1.2 Le choix de la simulation
IV.2 Intรฉgration dans une architecture robotique
IV.3 Scรฉnarios รฉtudiรฉs
IV.3.1 Corridor
IV.3.2 Exploration du laboratoire
V Analyse des donnรฉes
V.1 Premier scรฉnario : le corridor
V.1.1 Mesures globales
V.1.2 Mesures locales
V.1.3 Confrontation des deux analyses
V.2 Second scรฉnario : exploration du laboratoire
V.2.1 Les System Maps
V.2.2 Analyse des donnรฉes
V.2.3 Extensions
V.2.4 Remarque sur la rรฉactivitรฉ
V.3 Conclusion
VI Conclusion

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