Les micropolluants dans l’environnement aquatique urbain

Les micropolluants 

Pendant et après la Seconde Guerre Mondiale, les pesticides chlorés ont commencé à être largement utilisés. Bien que dès le départ la communauté scientifique ait eu connaissance de la persitance des ces composés, peu d’attention a été portée à l’époque sur leurs impacts potentiels à long terme sur l’environnement. La découverte de résidus dans les sols, et d’animaux morts sur les sites d’utilisation des pesticides et dans leur environnement immédiat ont entrainé une prise de conscience des risques (Ballschmiter, Hackenberg et al., 2002). Le livre de Rachel Carson intitulé « Silent Spring » (Carson, 1962), paru en 1962, peut être considéré  comme le point de départ de la prise de conscience des impacts sur le milieu naturel des molécules organiques utilisées industriellement. Il compile de très nombreuses données obtenues par les spécialistes des questions de santé ou de gestion de la faune sauvage, et les rend accessibles à un large public. Le but de cet ouvrage de vulgarisation est de dénoncer l’introduction dans notre environnement de substances chimiques toujours plus nombreuses et le danger qu’elles font peser sur le milieu naturel, et sur l’Homme.

Les caractéristiques des micropolluants 

De nombreuses substances chimiques sont produites et utilisées dans le cadre des activités humaines (industries, trafic automobile, bâtiment, agriculture, santé, etc…). Lorsqu’elles sont introduites dans l’environnement à des niveaux de concentrations très faibles de l’ordre du µg/kg ou du µg/l, par des sources ponctuelles (eaux usées) ou diffuses (eaux de ruissellement, dépôts atmosphériques secs ou humides), ces substances sont qualifiées de micropolluants. Nous aborderons plus particulièrement la notion de polluants persistants.

Les polluants persistants ont pour caractéristiques les quatre propriétés suivantes :
• la toxicité : ce sont des molécules qui présentent un ou plusieurs impacts prouvés sur la santé humaine.
• la persistance dans l’environnement : ce sont des molécules résistantes aux dégradations biologiques naturelles,
• la bioaccumulation : ce sont des molécules qui s’accumulent dans les tissus vivants et dont les concentrations augmentent le long de la chaîne alimentaire,
• le transport longue distance : de par leurs propriétés de persistance et de bioaccumulation, ces molécules ont tendance à se déplacer sur de très longues distances et se déposer loin des lieux d’émission (Jones and de Voogt, 1999).

Les sources de ces polluants sont les activités domestiques, économiques, industrielles. Ils sont introduits dans le milieu naturel via les eaux usées et les eaux de ruissellement. Ils sont présents dans les compartiments atmosphérique, aquatique et sédimentaire et dans les organismes vivants (Osibanjo, Biney et al., 1994). Des dynamiques d’échanges existent entre ces différentes phases en liaison avec les propriétés des micropolluants (adsorption sur la matière organique, hydrophobicité). Ces échanges font l’objet de nombreuses études (Jones and de Voogt, 1999; Kawai and Handoh, 2009).

La réglementation

La réglementation environnementale est une approche relativement récente de la maîtrise des déchets et de la lutte contre la pollution chimique. Elle a été initiée en 1972 à Stockholm avec la Conférence des Nations Unies sur l’Environnement suite à la prise de conscience des dangers engendrés par l’activité humaine sur le milieu naturel, et par ricochet sur l’économie. L’essentiel de la législation environnementale a été promulguée au cours des 30 dernières années, majoritairement dans les pays développés.

À l’échelle internationale, il existe deux types de réglementations : celles juridiquement contraignantes et celles qui ne le sont pas. Les réglementations utilisées dans les pays développés sont juridiquement contraignantes. C’est par exemple le cas des directives européennes, adoptées dès les années 1970, qui doivent ensuite être transcrites en législations locales. Les pays en développement n’ont commencé à légiférer dans ce domaine que beaucoup plus récemment grâce à l’adoption d’accords et de mécanismes internationaux qui sont en général juridiquement non contraignants. Les pays ne sont pas obligés de les ratifier, mais la ratification implique l’acceptation des obligations fixées par ces accords, et se traduit par l’intégration des objectifs dans les lois et réglementations nationales. La plupart des pays africains ont ratifié les grandes conventions internationales relatives à la gestion des produits chimiques dans l’environnement, à savoir :
• la Convention de Vienne (1985) pour la protection de la couche d’ozone,
• le Protocole de Montréal (1987) relatif aux substances chimiques qui appauvrissent la couche d’ozone,
• la Convention de Bâle (1992) sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux et de leur élimination,
• la Convention de Stockholm (2001) sur les polluants organiques persistants (POP),
• et la Convention de Rotterdam (2004) sur la procédure de consentement préalable en connaissance de cause, applicable à certains produits chimiques et pesticides dangereux, qui font l’objet d’un commerce international.

Les accords environnementaux multilatéraux concernant des catégories précises de produits chimiques et dotés d’instruments financiers propres, comme le Protocole de Montréal et la Convention de Stockholm, ont été plus rapidement mis en œuvre dans plusieurs pays africains. Toutefois, l’élaboration de plans nationaux de mise en œuvre et/ou la traduction des objectifs des conventions dans les lois locales sont encore lentes à cause de la diversité des accords multilatéraux et de leur portée, qui dépassent la capacité immédiate d’absorption et de mise en œuvre de nombreux pays africains (UNECA, 2009). C’est par exemple le cas du Cameroun qui a ratifié la  Convention de Stockholm en 2004, pour une mise en œuvre dès 2005. La définition de la stratégie de mise en œuvre nationale n’a débuté qu’en 2012.

Au Cameroun où se trouve le site d’étude, la législation environnementale a débuté en 1994 après la mise en place d’un ministère de l’environnement. Les premières lois relatives à la gestion de l’environnement et de l’eau qui abordent les problématiques des substances chimiques ont respectivement été promulguées en 1996 et en 1998. La loi de 1996 est l’outil le plus cité en matière de protection de l’environnement au Cameroun. Elle a été prise en application de la mise en œuvre du Programme National de Gestion de l’Environnement (PNGE). Le décret d’application de la loi relatif aux substances dangereuses et nocives a été publié en 2011. Il fournit la liste des substances interdites d’utilisation et de rejet comme les PCB, et celles dont l’utilisation et le rejet sont soumis à autorisation préalable comme les ETM, sans précision sur les niveaux de concentrations autorisés. La loi relative au régime de l’eau de 1998 fixe les principes de gestion de l’environnement, de protection de la santé publique, et le cadre juridique général du régime de l’eau. Elle insiste sur : la protection de l’eau des différents éléments polluants, la préservation des ressources en eau, la qualité de l’eau destinée à la consommation, les sanctions dues au non respect des dispositions de la loi. Le décret N° 2001/165/PM du 08 Mai 2001 précise les modalités de protection des eaux de surface et des eaux souterraines contre la pollution. Il impose notamment aux entreprises spécialisées dans la vidange des systèmes d’assainissement qui ont soumis une demande d’autorisation de rejet des eaux usées, de préciser la nature des rejets, la qualité de l’eau rejetée et sa composition en polluants chimiques. En 2007, les concentrations maximales autorisées dans les effluents ont été fixées pour quelques polluants par le Ministère de l’Environnement et de la Protection de la Nature, en concertation avec des industries. En absence de normes nationales, les normes de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), de l’Union Européenne (UE), ou de pays du Tiers Monde qui présentent des réalités économiques similaires (MINDUH, 2009) sont utilisées. Cette réglementation est peu appliquée à cause des faibles moyens financiers et techniques, et de la faible de participation du secteur privé.

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Table des matières

REMERCIEMENTS
RESUME
Liste des figures
Liste des tableaux
INTRODUCTION
CHAPITRE I LES MICROPOLLUANTS DANS L’ENVIRONNEMENT AQUATIQUE URBAIN
I.1 Les micropolluants
I.1.1 Les caractéristiques des micropolluants
I.1.2 La réglementation
I.2 Les familles de polluants sélectionnées
I.2.1 Les Hydrocarbures Aromatiques Polycycliques
I.2.2 Les Polychlorobiphényles
I.2.3 Les Alkylphénols simples : 4 nonylphénol et para – tert -octylphénol
I.2.4 Les parabènes
I.2.5 Le triclosan
I.2.6 Les éléments traces métalliques
I.3 L’archivage sédimentaire de la contamination urbaine
CHAPITRE II LE SITE D’ETUDE
II.1 Collecte des données géographiques et démographiques du bassin versant
II.2 Le bassin versant de la rivière Mingoa
II.2.1 La localisation
II.2.2 La géomorphologie, la géologie et la pédologie
II.2.3 Le climat
II.2.4 L’hydrographie
II.2.5 L’occupation de l’espace
II.3 Le Lac Municipal de Yaoundé
II.3.1 Caractéristiques physiques
II.3.2 Son histoire
CHAPITRE III MATERIELS ET METHODES
III.1 Méthodologie générale
III.2 Enquêtes
III.2.1 Le questionnaire
III.2.2 L’échantillonnage
III.2.3 Le traitement des données
III.3 Analyse des sédiments
III.3.1 Prélèvement
III.3.2 Analyse physique du sédiment
III.3.3 Analyse des micropolluants organiques
CHAPITRE IV RESULTATS ET DISCUSSION
IV.1 Analyse physique
IV.1.1 Description des carottes
IV.1.2 Granulométrie
IV.1.3 Masse volumique apparente sèche
IV.1.4 Composition minérale
IV.1.5 Carbone organique
IV.1.6 Fer
IV.1.7 Datation
IV.1.8 Conclusion de l’analyse physique
IV.2 L’analyse des micropolluants
IV.2.1 Description des profils de micropolluants et niveaux de contamination
IV.2.2 Estimation des flux annuels de micropolluants
IV.2.3 Evolution historique de la contamination par les polluants étudiés
CONCLUSIONS 

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