Méthodes diverses de la relaxation
Le yoga et le prânâyâma
Premièrement, il faut s’intéresser aux origines de la relaxation, notamment le yoga. Le yoga est une tradition indienne qui remonte au 3e millénaire avant Jésus-Christ qui a été répandu en Occident sous sa forme traditionnelle et modifiée. Une grande partie du yoga se focalise sur l’importance de la respiration pour arriver à un équilibre sain. Cette respiration du yoga et ses pratiques, intitulée le Prânâyâma, cherche à redonner de l’énergie à le corps à travers le souffle. La pensée devrait accompagner la respiration dans son parcours, elle devrait être dirigée sur la prise de conscience de notre souffle, « pour tous, femmes, hommes ou enfants, la respiration complète du yoga apporte une meilleure oxygénation et une meilleure circulation du sang » (Kaly, 2016, p.48) Le croisement entre le souffle et le mental produit des bienfaits sur notre corps tout en facilitant la circulation sanguine. Ce nettoyage corporel est notamment fait à travers un exercice intitulé Nâdîshodana ; la respiration alternée. Kaly la définit comme « une respiration lente, profonde et alternée, en ce sens qu’on utilise une narine après l’autre » (Kaly, 2016, p.57). En dirigeant votre pouce vers le nez, vous fermez alternativement et régulièrement la narine droite et gauche tout en suivant des cycles d’expiration et d’inspiration. Cette prise de conscience du souffle peut éviter la fatigue et le stress chez l’individu et devrait être pratiquée régulièrement.
La relaxation active
Le prânâyâma se focalise sur le souffle et son importance pour le bien-être, mais ceci peut être difficile à intégrer dans une classe qui se compose d’élèves qui débutent dans le yoga. Pourtant, une méthode intitulé La relaxation active, fondée par Boski (2008), est plus accessible pour les élèves et se focalise notamment du lien entre la respiration et le mouvement. Selon Boski, ancien psychomotricien de l’Education Nationale qui reprend les études du musicien Martelot, « l’efficacité de la relaxation active réside incontestablement dans la prise de conscience des sensations provoquées par un mouvement » (Boski, 2008, p.15). Selon cette théorie, on est amené à se concentrer sur les moindres sensations de notre corps, par exemple, les petites sensations éprouvées dans nos mains, même dans l’immobilité. Les mouvements et les gesticulations si faibles soient-ils chez l’élève, deviennent des moyens de fixer son attention. En ce qui concerne les séances, la durée ne doit pas dépasser 10 minutes au début du cours et les exercices doivent être repris à chaque séance. Pour Boski, la relaxation est un entraînement qui se déroule pendant des mois, même des années. Au fur et à mesure, l’enseignant pourrait allonger la durée des exercices pour atteindre quinze, même trente minutes. En suivant les consignes et les exercices proposés par Boski, on pourrait, après un moment, récolter les fruits de cette prise de conscience corporelle. Néanmoins, même si l’enseignant reste fidèle à cette méthode, ce n’est pas pour autant qu’il réussisse à y parvenir, « il est impossible d’envisager l’enseignement de la relaxation active aux enfants avant d’avoir au préalable longuement travaillé et expérimenté sur soi-même » (Boski, 2008, p.8). En prenant en compte ce que dit Boski, une vraie « maîtrise de soi » est exigée pour ensuite transmettre ses connaissances aux élèves. Ceci nous amène à aborder l’idée d’un « échec » dans la pratique de la relaxation active. Même si la séance ne se passe pas comme prévu, ni l’enseignant ni l’élève ne devraient craindre l’échec. La réussite de la séance est déterminée par l’attitude de l’animateur. L’enseignant est donc prié de garder une attitude bienveillante et positive tout au long de la séance. On ne juge pas, on ne compare pas un élève à un autre. Même au niveau du vocabulaire, l’enseignant devrait employer des mots et des expressions qui sont connus de ses élèves et qui leur sont adaptés, « la forme du langage utilisé par l’enseignant ne constitue jamais un obstacle à la compréhension de l’exercice » (Boski, 2008, p.21). Afin d’éviter les malentendus, la voix de l’animateur devrait être claire et bien audible de tous les élèves. On devrait donc ajuster notre voix, son rythme et son ton en fonction des exercices proposés. La relaxation active est donc une compétence qui s’apprend au fur et à mesure. C’est un entraînement. Il n’est surtout pas question de brusquer les élèves, mais plutôt de les guider au cours des exercices faits en classe, « Il ne faut pas attendre ‘d’effets’ immédiats : ceux-ci apparaîtront lentement, progressivement […] inutile de rechercher les résultats » (Boski, 2008, p.44).
J’ai interrogé M. Boski par mail .
Ses réponses pertinentes furent d’une grande utilité pour mes recherches.
La méthode Snel
La relaxation active est donc une des nombreuses méthodes applicables en classe. Cette méthode a été fondée au début des années 1990 et ses effets positifs sont toujours d’actualité. Cependant, si on veut vraiment comprendre la relaxation dans son intégralité, il faudrait aussi traiter de méthodes plus contemporaines, comme la méthode Eline Snel. Cette thérapeute néerlandaise a écrit plusieurs livres sur la méditation qui sont à pratiquer à la fois à l’école et à la maison. Calme et attentif comme une grenouille, son livre de méditation pour les enfants de 4-12 ans, a connu beaucoup de succès aux Pays-Bas ainsi qu’en France. Son ouvrage suivant, Respirez, reprend les idées principales de son premier livre mais cible plutôt les adolescents de 12 à 19 ans. Elle parle notamment de l’importance de la « pleine conscience » La pleine conscience est la capacité d’être totalement focalisé dans l’instant présent. On est amenés à comprendre ce qui se passe en nous et autour de nous, « être présent dans l’instant, sans juger, sans rejeter ce qui se passe, sans se laisser entraîner par l’agitation du jour […] être dans l’ici et le maintenant » (Snel, 2012, p. 23). Les émotions, qui font partie de l’expérience humaine et notre attitude vis-à-vis de cette ouverture d’esprit, sont aussi des pierres angulaires de la pleine conscience. Il se peut que cela soit la colère, la tristesse ou bien la joie. Mais peu importe le sentiment qu’on éprouve, il exige de nous de l’attention et de la concentration.
Mais au lieu de combattre les émotions, comme on est habitué à le faire, Snel nous demande d’aller vers ‘l’orage’ et de ressentir ces sentiments parfois désagréables. Cet état de conscience, qu’elle s’appelle « la météo personnelle » nous submerge et provoque un sentiment de peur ou de déception. Par exemple : une mauvaise note à l’école, une dispute, une semaine chargée. Ces émotions peuvent mettre l’enfant en colère jusqu’à ce qu’il perde le contrôle de lui-même, ce qui devient problématique en situation de classe pour l’enseignant. Quand cela arrive, l’enfant devrait continuer à éprouver ce sentiment désagréable ; il va falloir qu’il accepte. Cette acceptation l’amène à prendre contact avec sa météo personnelle, à l’observer au lieu de la subir, « on a l’impression d’être ses sentiments au lieu de les avoir[..] Vous pouvez percevoir le stress, au lieu de le laisser vous envahir ou de le nier » (Snel, 2015, p.48 et p.69). Par analogie on peut, à la manière de Snel, dire que les émotions passent comme des orages. De plus, de 2008 à 2010, cette formatrice néerlandaise a lancé une formation de la pleine conscience intitulé La méthode Eline Snel. 300 enfants, 12 enseignants et 5 écoles y ont participé, pendant 8 semaines à raison d’une demi heure par semaine. Les exercices n’ont pas dépassé 10 minutes par jour et les établissements ont continué les exercices avec les élèves toute au long de l’année scolaire, même après la formation. C’est très intéressant de voir qu’à la fin de cette formation, les participants, surtout les enseignants, ont signalé un meilleur comportement des élèves et une ambiance plus agréable en classe, « ils ont constaté davantage de calme en classe, une meilleure concentration et plus d’ouverture d’esprit » (Snel, 2012, p.26). Il est aussi pertinent de voir que les méthodes de Snel et Boski (vu en haut), sont complémentaires « la recherche d’un effet ou d’un résultat crée en soi une tension et c’est justement ce qu’on souhaite éviter » (Boski, 2008, p.22). Comme Boski, Snel souligne le fait qu’il ne faut pas essayer de faire de son mieux ou bien de ressentir quelque chose que nous ne ressentons pas véritablement. Les résultats viendront avec un entraînement stable et progressif et donc il n’y a pas besoin de se précipiter ou de se mettre en colère. Il en va de même pour les enseignants. En situation de classe, quand la colère monte, estil vraiment efficace de réprimander les élèves ? On recourt à nos stratégies habituelles : exclusion, devoirs supplémentaires, mots dans le cahier. Cela va sans dire qu’après l’un de ces scénarios, que l’élève séchera encore des cours et on continuera à tracer ce cercle vicieux encore et toujours « la relation ne devient un véritable contact que si […] nous parlons l’un avec l’autre au lieu de l’un contre l’autre » (Snel, 2015, P.114). Modifier la manière dont on s’adresse à eux, c’est faire face à la violence verbale. Il est maintenant trop facile de mettre les élèves dans des cases selon leur comportement, « les psys se contentent de fournir des étiquettes comme trouble de l’attention avec hyperactivité » (Snel, 2015, P.119). Snel propose un remède plus simple ; écouter avec attention.
La méthode Lémaire
En général, la méthode Snel a connu beaucoup de succès dans divers pays, mais si on s’intéresse aux origines du stress, on est amené à consulter l’état du corps physique. La tension, a-t-elle des racines dans notre corps ? C’est la question que se pose Lémaire dans son livre intitulé La relaxation (1964). D’après lui, la tension dans les muscles du corps qu’il appelle « le tonus » est par définition liée avec notre état psychologique. A l’époque de nos ancêtres, si on se croyait menacé par autrui, les muscles du corps devenaient contractés pour nous préparer à faire face à cette situation. On se mettait naturellement dans un état « d’hypertonie » qui se définit comme une contraction intense des muscles. Cependant, l’homme moderne fait partie d’une société civile et relativement sécurisée. Il ne vit plus ces situations sauvages. Pourtant, cet état d’hypertonie est vécu de plus en plus, « le danger aujourd’hui ne vient pas de l’extérieur mais de l’intérieur » (Lémaire, 1964, p.13). Le danger maintenant semble être plutôt sur le plan psychologique. L’angoisse du travail, de la famille et de nos pensées créent une tension tellement forte que le corps se crispe et se serre. On se trouve alors dans un état psychophysique ; là où le physique et le psychique se croisent. La fonction tonique est donc directement liée avec notre centre nerveux. Le tonus y répond sous la forme d’une contraction, « ce sont les excitations venant des centres nerveux qui provoquent des contractions répétées plus ou moins rythmiques » (Lémaire, 1964, p.32). La réaction de notre corps est donc forcément liée à la vie émotionnelle. Lémaire démontre cette théorie à travers l’exemple d’un nouveau-né. L’hypertonie est obtenue lorsque le déplaisir se montre chez lui et ce dernier pourrait prendre la forme d’une faim, d’une douleur ou le départ de la mère. Ce sont des éléments de la vie émotionnelle qui, à son tour, déclenchent une réaction hypertonique chez le bébé ; il se crispe et pleure. On peut observer ce même phénomène chez l’adulte. Selon la situation de l’individu dans le monde, par exemple, la perte d’un emploi, une dispute dans le couple ou tout simplement la préparation du baccalauréat, un déplaisir émotionnel est ressenti notamment dans la forme d’une angoisse. Cet état émotionnel se traduit toujours sur le plan tonique mais cette-fois ci, l’angoisse se traduit dans des manières diverses. On reconnait tous le langage courant qui exprime un choc émotionnel, « J’ai les jambes coupées », ou « le souffle coupé » (Lémaire,1964, p.40). Encore une fois, les émotions et le tonus interagissent pour produire un état « tonico-émotionnel ».
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Table des matières
1. Introduction
2. Cadre théorique
2.1. Les méthodes diverses de la relaxation
2.1.1. Le yoga et le prânâyâma
2.1.2. La relaxation active (ANNEXE 6)
2.1.3. La méthode Snel
2.1.4. La méthode Lémaire
2.2. Le cerveau de l’adolescent
2.3. L’attention
2.4. La place du yoga dans l’éducation (ANNEXE 5)
3. La Méthodologie
3.1. Hypothèses
3.2. Sélection d’élèves et leurs profils
4. La Protocole
4.1. Les exercices de relaxation
4.2. Les données descriptives
4.3. Questionnaire
4.4. Entretien de rééducation psychotonique
4.5. Production des élèves
5. Recueil et Analyse de données
5.1. Organisation du recueil de données
5.2. Analyse de données
5.2.1 Les exercices de relaxation
5.2.2 Les données descriptives (ANNEXE 1)
5.2.3 Questionnaire (ANNEXE 2.1 et 2.2)
5.2.4 Les entretiens de rééducation (ANNEXE 3.1 et 3.2)
5.2.5 Les productions des élèves (ANNEXE 4)
5.2.6 Ouverture sur d’autre types de données
6. Interprétation
7. Conclusion