Les manifestations du sacre dans les fleurs du mal de charles baudelaire

Ce travail de mémoire de maîtrise se fait dans le domaine de la poésie. Le choix de travailler dans ce domaine peut s’expliquer de plusieurs manières : La poésie constitue la première forme de la littérature. Les premières œuvres littéraires de l’humanité, l’Iliade et l’Odyssée, sont poétiques. Ecrites depuis l’Antiquité, ces deux œuvres ont été suivies d’autres œuvres importantes produites dans diverses littératures du monde et particulièrement celle de la France. On peut noter qu’en France, depuis le 16e siècle, la poésie n’a cessé d’évoluer pour se perfectionner aussi bien par sa forme que par son contenu. C’est ainsi que des poètes comme Pierre de Ronsard, Joachim du Bellay, Agrippa d’Aubigné ont marqué la littérature française par des œuvres poétiques de grande valeur.

Aujourd’hui, la poésie a encore une grande valeur puisque plusieurs œuvres sont écrites sous cette forme et méritent d’être étudiées. Si Stéphane Mallarmé considérait la poésie comme un langage « réservé aux initiés », c’est qu’il soulignait la nécessité de faire des efforts pour la comprendre. En effet, en poésie, tout a une valeur : le sens des mots, leur son ou musicalité des vers, la forme des vers, des strophes, du poème, le choix des mots employés…. Tout demande l’attention du lecteur, autrement dit comprendre cette partie importante de la littérature revient à apprendre avant tout quelques principes. Le choix de la poésie vise alors à améliorer notre lecture dans ce domaine.

En plus si nous avons opté étudier une œuvre du XIXe siècle, c’est que ce dernier est la période au cours de laquelle la littérature française et en particulier la poésie était plus florissante. Des poètes ayant énormément contribué à l’évolution de la poésie française tels que Victor Hugo, Charles Baudelaire, Paul Verlaine et d’autres encore ont vu le jour au XIXe siècle. C’est également au XIXe siècle que la littérature française connaît plus de courants littéraires par rapport aux autres siècles. Ainsi l’étude de la littérature de cette période semble présenter beaucoup d’intérêts puisqu’elle permet de suivre une évolution notable d’une partie de la poésie française.

LE SACRE RELIGIEUX

LE DUALISME BAUDELAIRIEN

Parlant du dualisme, le dictionnaire Larousse de Poche édité en l’an 2002 le définit comme « tout système religieux ou philosophique qui admet deux principes opposés comme le bien et le mal, la matière et l’esprit, … ».

En effet, pour mieux traduire la vie, et surtout sa complexité, Charles Baudelaire s’est servi de ce dualisme dans son écriture poétique. Le dualisme baudelairien met en évidence l’existence des deux forces opposées qui rongent la pensée jusqu’à mettre l’homme en difficulté dans la prise de ses décisions, et qui le poussent à chaque fois à revoir ses propres actions. Dans cette étude nous nous intéresserons au dualisme seulement dans son côté religieux. Su ce, deux idées principales animeront ce chapitre : La première idée consiste à étudier les imageries de Dieu et de Satan, et la seconde, à montrer qu’à travers Les Fleurs du mal, l’homme peut être perçu comme un objet de conflit entre la puissance divine et la puissance satanique.

LES IMAGERIES DE DIEU ET DE SATAN

Les termes de « Dieu » et de « Satan » ont une valeur plus importante dans cette étude. Par ailleurs ils renvoient à des notions auxquelles s’intéressent des études de théologie. Cependant, une grande partie de cette œuvre baudelairienne semble inscrite dans ce domaine. Donc pour mieux comprendre et éclaircir le sens de certains vers, nous nous servirons de quelques notions de théologie.

Dans le titre : Les Fleurs du mal, apparaît ce dualisme où le mot « Fleur » traduit plusieurs images : il peut représenter la vie, la beauté, le jardin, le paradis, l’amour, le bien. Cela dénote les bonnes « œuvres » et par extension le bon Dieu. Par contre le terme « du mal » (ou de + le mal), qui est d’ailleurs défini, peut signifier toute forme de souffrance et de misère. Ce terme traduit l’état « d’une âme angoissée par l’absence de Dieu, et assaillie pourtant par la damnation et le péché » . D’une façon plus claire, il traduit chez Baudelaire la conscience du péché et de sa chute. Dans cette dernière réflexion du terme « mal », apparaît le personnage du Démon puisque la conscience du péché s’y trouve. On s’aperçoit, donc, que le titre de l’œuvre est constitué de termes qui peuvent renvoyer à deux principes religieux opposés. A travers cette réflexion sur le titre de l’œuvre, il s’avère important de faire une remarque : Les religions révélées prêchent que c’est de Dieu, chez qui est toute bonté, tout ordre, constituant le rayonnement de sa gloire, que vient Satan, source de tout désordre et de tout mal. Cependant, le titre de l’œuvre, Les Fleurs du mal, semble ignorer ce principe sacré. Il nous propose l’ordre inverse. Il place « le mal » au premier plan, au plus haut degré ; le bien peut être né du mal. En ce sens, on peut penser que le poète cherche à fustiger les institutions sociales établies, les religions. Mais la véritable intention du poète serait plutôt d’initier son lecteur à l’idée que le mal n’engendre pas nécessairement le mal et qu’il peut avoir le bien comme fruit. En effet, le bien et le mal sont deux conceptions relatives à une société, à une religion. Ce qui a conçu, comme le mal ou le bien par une société peut prendre la valeur opposée dans la même société et à une autre époque. C’est le cas de l’œuvre de Charles Baudelaire. Sa production poétique en est l’exemple qu’il propose au lecteur. Condamnée pour être conçue comme un mal, « une atteinte à la moralité publique », cette œuvre a fait école quelques années après sa publication.

Dans cette œuvre, le mal peut s’illustrer par la présence d’expressions renvoyant à des images importantes de Satan ou de Dieu valorisant l’une des personnalités ou l’autre. Dans plusieurs passages des Fleurs du mal, on peut relever des images. Les deux premiers vers du poème liminaire laissent penser à cela :

« La sottise, l’erreur, le péché, la lésine
Occupent nos esprits et travaillent nos corps ». 

Les termes énumérés dans le premier vers font penser au Démon dans la mesure où l’accomplissement de telles actions peut résulter d’une tentation satanique. Dans ce poème, se trouvent beaucoup de termes appartenant au champ lexical du diable. On peut citer : « le péché », « l’enfer », « le Déon », « les ténèbres », « l’horreur », « le viol »,…. Il s’agit là d’un vocabulaire très employé dans le domaine religieux pour désigner « l’ange déchu », ses actions ou sa demeure finale ou tout simplement son destin.

Dans l’autre poème intitulé « Bénédiction », le sacré se manifeste de plusieurs manières :

Lisant ce poème, nous nous apercevons que Dieu est parmi les personnages du poème. Sa présence est forte dans le poème et elle se manifeste par le champ lexical suivant : « Dieu », « puissances suprêmes », « Ange », le « Soleil », « le trône», « les saintes voluptés ». En effet, le Soleil écrit en initiale majuscule est une allégorie qui désigne Dieu. La puissance de sa lumière envoie à celle de Dieu. Il est placé très haut, au ciel, comme les angles. Le mot trône évoque également le degré supérieur qui caractérise Dieu. C’est pour cela qu’on peut dire que ces mots constituent un champ lexical qui fait penser à Dieu et à sa puissance. On peut même dire que Dieu est le personnage clé de ce poème dans la mesure où, malgré son mutisme dans cette pièce, les trois autres personnages humains (le poète, sa mère et une autre femme) l’évoquent et s’adressent directement à lui. Ainsi devient-il le personnage le plus présent du poème. A la manière de Moïse qui, selon la Bible, s’adressait à son seigneur, Baudelaire le fait aussi à Dieu : Il le loue en prenant la souffrance pour une voie pouvant le conduire vers Dieu.

« Soyez béni mon Dieu, qui donnez la souffrance
Comme un divin remède à nos impuretés ». 

Le poète considère la souffrance des hommes, non pas comme une punition ou un problème qui empêche l’harmonie de la vie, mais plutôt comme une voie libératrice de l’homme. Car, selon les deux vers précédents, on peut comprendre que cette souffrance est la solution divine pour laver l’esprit humain de tout ce qui le rend impure : « le péché », « l’ennui », …. On voit dans tout cela une forte empreinte de la foi chrétienne chez le poète. On peut même établir une analogie entre cette souffrance libératrice évoquée par le poète et celle vécue par le Christ crucifié visant à garantir au chrétien une vie éternelle dans le royaume de Dieu.

A travers ces vers, le poète présente donc une foi chrétienne solide, une maîtrise de soi et une connaissance de Dieu sur laquelle serait fondée cette foi. La répétition du verbe « savoir » au début des deux vers suivants en serait la preuve. Ainsi, s’adressant à Dieu, le poète écrit ceci :

« Je sais que vous gardez une place au poète
Dans les rangs bienheureux des saintes légions ».
« Je sais que la douleur est la noblesse unique
Où ne mordront jamais la terre et les enfers » .

La lecture de ce même poème donne l’impression selon laquelle l’arrivée du poète dans la société humaine n’est pas le fruit du hasard, qu’il y a été dépêché pour accomplir une mission décrétée par Dieu : Le poète sait donc avec précision la mission qui l’attend dans la société où il se trouve. Il connaît avec certitude la place d’honneur qui l’attend auprès de Dieu, celle qui est réservée aux « bienheureux ». Quelques vers du même poème donnent l’impression que, comme les prophètes, le poète a reçu une science émanant de Dieu. Celle-ci lui permet de faire connaître ce qu’on peut appeler un mystère :

« Lorsque, par un décret des puissances suprêmes,
Le poète apparaît en ce monde ennuyé,
Sa mère épouvantée et pleine de blasphèmes
Crispe ses poings vers Dieu, qui la prend en pitié : » .

Ces vers nous informent que le poète sait des décisions le concernant, que Dieu a prises avant sa venue au monde. Cela ressemble bien à une révélation. Ils laissent entrevoir également que l’un des objets de la mission poétique de Baudelaire est de lutter contre l’ennui. Il est le premier mal qui frappe l’humanité, souligné par la poésie baudelairienne. Il constitue, par conséquent, la principale cible de la poésie baudelairienne, un Satan contre lequel doit combattre le poète pour frayer le chemin qui mène à la libération des hommes. A travers ces vers précédents et tout le reste du poème, apparaît la plus grande intimité entre Dieu et le poète. Aucune distance ne les sépare, et la plus grande harmonie semble régner entre les deux personnages. La « Bénédiction » qui est l’intitulé du poème est certainement celle de Dieu et non celle de la mère. Une « bénédiction » qui crée l’espoir pour un enfant qui estime être rejeté par sa mère pleine de regrets de l’avoir mis au monde. Alors que Marie, la mère du Christ, exprimait sa tristesse à son Dieu pour avoir apporté un enfant de père non connu par son peuple , la mère du poète se lamentait auprès de Dieu pour avoir porté « un enfant maudit ». Ainsi, elle s’adressa à Dieu :

« Je ferai jaillir ta haine qui m’accable
sur l’instrument maudit de tes méchancetés ». 

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : LE SACRE RELIGIEUX
Chapitre I : Le dualisme baudelairien
I.1. Les imageries de Dieu et de Satan
I.2. L’homme objet de conflit entre Dieu et Satan
Chapitre II : L’écriture de la transcendance
II.1. Transcendance dans la structure de deux poèmes : « L’Albatros » et « Elévation»
II.2. Poésie ascensionnelle
Chapitre III : Le double visage de la femme
III.1. La femme : Une divinité
III.2. La femme : Un être de malédiction
DEUXIEME PARTIE : LE SACRE MYTHIQUE
Chapitre I : Le mythe littéraire de la femme
I.1. La femme, matrice d’une poésie
I.2. Les différentes facettes du mythe littéraire de la femme
Chapitre II : Manifestations des caractéristiques significatives de la mythologie gréco-latine chez quelques personnages
II.1. Les mythes du labyrinthe et d’Icare chez les personnages de l’esprit et de l’albatros
II.2. Les manifestations du personnage de Midas
Chapitre III : Le culte d’une beauté et d’un art mythologiques
III.1. Le culte de la beauté
III.2. Le culte de l’art
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE

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