Les maladies de l’appareil respiratoire, non néoplasique

Télécharger le fichier pdf d’un mémoire de fin d’études

Les maladies cardiovasculaires

Le tabagisme est impliqué dans la survenue d’un grand nombre de pathologies cardiovasculaires: les coronaropathies, l’artériopathie oblitérant des membres inférieurs (AOMI) et les accidents vasculaires cérébraux (AVC) principalement. Ainsi, le risque d’infarctus du myocarde non fatal est cinq fois plus élevé chez les fumeurs que chez les non fumeurs dans la tranche d’âge 30-49 ans et trois fois plus élevé dans la tranche d’âge 50-59 ans [17]. De même, dans l’étude de Framingham, les fumeurs développaient deux à trois fois plus souvent des symptômes d’AOMI que les non-fumeurs [18]. L’effet du tabagisme sur l’incidence des AVC ischémiques a été étudié par le suivi d’une cohorte de plus de 22 000 médecins pendant 10 ans [19]. Les résultats de l’étude ont mis en évidence que le risque de survenue d’un AVC ischémique était significativement plus élevé chez les fumeurs, à partir d’une cigarette consommée par jour, comparativement aux non fumeurs. Dans une autre étude de cohorte, les auteurs ont mis en évidence un risque plus élevé d’AVC hémorragique chez les fumeurs consommant au moins 20 cigarettes par jour comparativement aux non fumeurs [20].

Les maladies de l’appareil respiratoire, non néoplasique

En termes de morbidité, les broncho-pneumopathies chroniques obstructives (BPCO) constituent la complication respiratoire la plus fréquente du tabagisme. Le tabagisme est, de loin, le principal facteur de risque de BPCO. Ainsi, Thun et al. ont évalué, à partir des résultats des études CPS-I et CPS-II, le pourcentage de décès par BPCO attribuables au tabac : plus de 90 % des décès par BPCO étaient liés à la consommation de cigarettes [21]. Les plus récentes données continuent de fournir des preuves solides du lien causal entre tabagisme et BPCO. Ainsi dans la Nurses Health Study, le risque de BPCO était trois fois plus élevé parmi les fumeuses par rapport aux femmes n’ayant jamais fumé [22]. Enfin, chez les personnes indemnes de pathologies respiratoires chroniques, plusieurs études ont mis en évidence un lien entre la consommation de tabac et la survenue d’infections respiratoires basses. Ainsi, le tabac serait responsable de près de 50% des cas de pneumopathies à pneumocoque et 23 % des cas de pneumonies communautaires étaient attribuables à un tabagisme passé ou actuel [23].

Tabagisme passif et mortalité

Aussi bien le tabagisme actif, le tabagisme passif et la fumée de tabac ont été classés cancérogènes pour l’homme (US Department of Heath 2006). Il n’y a pas que les fumeurs que le tabac rend malades et tue. Le tabagisme passif a lui aussi des conséquences graves et souvent mortelles sur la santé. Aux Etats-Unis, il cause chaque année quelque 3400 décès par cancer du poumon et 46 000 décès par cardiopathie. On estime qu’il est à l’origine chaque année dans ce pays de 430 décès par mort subite du nourrisson [24]. Depuis 1981, plus de 50 études épidémiologiques ont été consacrées à l’analyse des effets de l’exposition à la fumée de tabac secondaire au domicile (exposition par le conjoint fumeur) et/ou sur le lieu de travail. Ces travaux notent de manière quasi constante une élévation significative du risque de mortalité par cancer bronchique dans les deux situations d’exposition [25].
Une méta analyse de ces différentes études [26] montre que le tabagisme du conjoint augmente le risque de développer un cancer du poumon d’environ 20 % chez les femmes et 30 % chez les hommes. Le CIRC estime que 253 non fumeurs (37%étaient des hommes et 63 % des femmes) sont morts en France en 2000 par cancer du poumon attribuable au tabagisme passif. Ce chiffre est de 3000 morts par an aux États-Unis (NCI 2004) et de 1552 en 2002 dans les 25 pays de l’Union Européenne [27]. En 2005, le rapport de la California Environmental Protection Agency a conclu à une association causale certaine entre la fumée de tabac secondaire et le cancer des sinus de la face d’une part, et le cancer du sein chez les femmes pré ménopausées d’autre part [28]. Une étude parue en 2008 a montré qu’une exposition au domicile de plus de 15 ans à la FTS pour un non fumeur augmentait de 60 %1 les risques d’avoir un cancer de la tête et du cou (principalement du pharynx et du larynx) par rapport à une personne non exposée [29].

Bénéfice de l’arrêt du tabac

L’arrêt du tabac réduit considérablement le risque de maladie et de mort prématurée. Bien que les bienfaits pour la santé soient plus importants pour les fumeurs qui s’arrêtent à un âge plus précoce, l’arrêt reste bénéfique à tous les âges. Il est ainsi associé aux bienfaits suivants [30-32]:
• Une diminution du risque de cancer du poumon chez les anciens fumeurs,
• La réduction du risque de la maladie coronarienne, d’accident vasculaire cérébral et de maladie vasculaire périphérique. Le risque de maladies cardiovasculaires est nettement réduit dans les deux premières années suivant l’arrêt .
• La réduction des symptômes respiratoires comme la toux, une respiration sifflante et d’essoufflement. Le taux de déclin de la fonction pulmonaire est plus lent chez les personnes qui cessent de fumer .
• La réduction du risque de Broncho-pneumopathie obstructive chronique (BPOC) ;
• L’arrêt du tabac par les femmes pendant leurs années de procréation réduit le risque d’infertilité. Les femmes qui arrêtent de fumer pendant la grossesse aussi réduire leur risque d’avoir un bébé de faible poids.
Une évaluation des effets de l’arrêt du tabac sur le risque de développer ou de mourir d’un cancer, d’une maladie cardiovasculaire ou d’une BPCO a été menée au Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) à Lyon, en 2006 [33]. Les résultats de ce travail ont été publiés en 2008 dans le Bulletin Epidémiologique Hebdomadaire [34]. La chronologie et l’ampleur de la diminution du risque de développer une maladie donnée après l’arrêt du tabac varient selon le processus de la maladie étudiée (cancers, maladies cardio-vasculaires, BPCO). Le principal bénéfice de l’arrêt du tabac réside dans l’absence d’augmentation du risque qui résulterait de la poursuite du tabagisme. Enfin, plus l’arrêt survient tôt, plus ses bénéfices sont importants.
Ainsi, la diminution du risque de décès par cancer du poumon chez les anciens fumeurs par rapport aux fumeurs actuels apparaît entre 5 et 9 ans après l’arrêt, et elle est proportionnelle à la durée de l’arrêt. Arrêter de fumer avant 50 ans réduit substantiellement le risque de cancer du poumon par rapport aux fumeurs qui n’arrêtent pas. Néanmoins, les anciens fumeurs conservent un risque plus élevé de cancer du poumon comparé aux personnes du même âge n’ayant jamais fumé, même après une longue période d’abstinence.

Mortalité liée au tabac dans le monde

Dans les pays à moyen ou faible niveau socio-économique, les tendances vont dans le sens d’un accroissement de la prévalence du tabagisme chez les adolescents qui commencent à fumer avant l’âge de 18 ans en raison à la fois des investissements massifs des compagnies tabagiques qui n’ont pas les limitations législatives des pays industrialisés et des transformations des modes de vie des populations (transition épidémiologique) [8]. Dans ces pays, l’épidémie tabagique est en phase initiale, de ce fait, le nombre de décès qui lui sont attribués risque d’augmenter dans la prochaine décennie [9]. Peu de données sont disponibles sur l’estimation de la part du tabagisme dans la mortalité globale dans ces pays.
Plusieurs travaux d’estimations de la mortalité attribuable au tabac au niveau mondial ont été réalisés par Ezzati et all. Ainsi, en 2000, le nombre de décès liés au tabac au niveau mondial a été estimé à 4.83 Million dont la moitié (2.41 Million) dans les pays en développement. Les maladies cardiovasculaires représentaient la première cause de cette mortalité avec 1.62 Million dont 670 000 dans les pays en développement ou le tabac était responsable de 11% de la mortalité par ces maladies. Les broncho-pneumopathies obstructives chroniques représentaient 970 000 décès et le cancer du poumon en représentait 850000 [35].
En parallèle, plusieurs études ont été menées dans différents pays pour produire des estimations nationales en utilisant différentes approches méthodologiques. Aux Etats-Unis et au Canada, la part du tabagisme dans la mortalité des personnes âgées de 35 ans et plus variait entre 18% et 23% Ainsi. Aux Etats- Unis, les Centers of Diseases Contrôle (CDC) estiment que le nombre de décès liés au tabagisme durant la période 1997–2001 était de 438 000 décès dont près de 40% (158529) des cas de cancer. Au Canada, en 1998, près de 47 000 décès ont été causés par le tabac représentant 22% de la mortalité globale [36 ; 37].
Dans certains pays Européens, la fraction attribuable au tabac (FAT) variait entre 13,7% et 24,0%. En France, le nombre de décès attribués au tabagisme a été estimé à 60 600 en 2000 [38]. La mortalité liée au tabac est essentiellement masculine (90 %) même s’il est possible que ces données sous-estiment la mortalité féminine [39]. Plus de la moitié de ces décès a lieu avant 70 ans, ce qui représente 32 % de la mortalité dans la classe d’âge des 35-69 ans [38]. Le nombre moyen d’années de vie perdues pour une personne dont le décès est lié au tabac est de 17 ans [38].La part du tabagisme dans la mortalité globale chez les adultes a été estimée au Portugal en 2005 à 11,7% [40]. En Italie, elle a été estimée à 12,5% avec 71 445 décès [41]. En Allemagne elle était de 13% (20,2% chez les hommes et 6,7% chez les femmes) en 2007 avec 106623 décès [42].
Dans certains pays de l’Amérique Latine, la FAT varie entre 4,2% et 14%. Ainsi, au Brésil, en 2003, elle représentait 13,6% (18,1% chez les hommes et 8,7% chez les femmes) chez les personnes âgées de plus de 35 ans avec 117543 décès [43]. Elle était de 18% à Cuba en 2007 [44] et de 10 % au Mexique en 2008 [45].
En Chine, en 2005, 673 000 personnes âgées de 40 ans et plus sont décédées à cause du tabac [46]. Au Hong Kong, en 1998, la mortalité attribuée au tabac était estimée à 3017 décès, elle représentait 15% (25% chez les hommes et 5% chez les femmes) de la mortalité de  personnes âgées de 35 ans et plus [47]. Au Vietnam, en 2008, la FAT a été estimé à 28% chez les hommes âgés de 35 ans et plus [48].

La situation épidémiologique au Maroc

Aperçu général et indicateurs de condition de vie au Maroc

Le Maroc, dont la superficie est de 710 850 kilomètres carrés, est situé au Nord-Ouest de l’Afrique. Il est délimité au Nord par le Détroit de Gibraltar et la Mer Méditerranée, au Sud par la Mauritanie, à l’Est par l’Algérie et à l’Ouest par l’Océan Atlantique. La côte marocaine s’étend sur 3450 km. Son littoral atlantique est de 3 000 km et sa façade méditerranéenne longue de plus de 450 km. Selon le découpage administratif, le Maroc est divisé en 16 régions. Ces régions sont elles-mêmes subdivisées en 75 provinces et préfectures regroupant 1 503 communes (221 urbaines et 1 282 rurales). Le Wali ou gouverneur qui est à la tête d’une wilaya ou d’une province et préfecture, est le représentant de Sa Majesté le Roi. La population du Maroc est constituée de trois principaux groupes ethniques : les Berbères, qui vivent en majorité dans les régions montagneuses du Rif (les Rifains), du Moyen et Haut Atlas (Les Amazighenes) et de l’Anti-Atlas (les Tachelhites ou Souassas) ; les Arabes qui sont installés, en général, dans les plaines intérieures et côtières et les Sahraouis qui vivent au Sahara Marocain. La Figure 1 décrit le découpage administratif du Royaume du Maroc.
Les principaux indicateurs des conditions de vie de la population Marocaine, ainsi que les indicateurs démographiques et de santé que nous allons présenter dans cette partie sont issus des enquêtes menées par le Haut Commissariat au Plan et le Ministère de la Santé. Il s’agit du rapport du recensement général de l’Habitat et de la Population 2004 [50], des enquêtes nationales sur le niveau de vie des ménages (ENNVM) de 1998-99 et 2006-07 [51 ;52], de l’enquête nationale sur la population et la santé familiale (ENPSF-2011) [54], de l’enquête sur la Santé et la Réactivité du Système de Santé-Maroc 2003 [55], du rapport sur l’état de santé de la population Marocaine 2012 (56], ainsi que du livre blanc pour une nouvelle gouvernance du secteur de la santé [57].

Evolution de la natalité et la mortalité

Grâce aux progrès sanitaires (les programmes de vaccination, l’amélioration de l’hygiène, l’amélioration de la qualité des soins préventifs et curatifs, etc..), la mortalité a baissé d’une manière significative dans les années qui ont suivi l’indépendance. En 2010, le taux de natalité était de 18,8 pour mille (urbain 16,2 et rural 22,8), quant au taux brut de mortalité il a atteint 5,6 pour mille (4,4 en urbain et 7,2 en rural), le taux d’accroissement naturel a atteint 13,2 ‰ (11,8 en urbain et 15,0 en rural). En 1960, le taux de natalité était de 52,1 ‰ et le taux brut de mortalité était de 18,7 ‰ en 1962. Le Tableau 4 et le Tableau 5 montrent la réduction observée des taux de mortalité et de natalité entre 1960 et 2010.

Changement de la charge globale de morbidité

Des changements considérables du profil des maladies sont en train de se mettre en place au Maroc. Pendant que la prévalence des maladies infectieuses et de la malnutrition est en déclin progressif et que l’espérance de vie augmente, on note une augmentation de la prévalence des maladies non transmissibles comme les maladies cardio-vasculaires et les maladies chroniques ou dégénératives. Le Ministère de la Santé a mené en 1997 une étude sur la charge de morbidité globale à partir des causes de décès selon trois groupes de maladies au Maroc. Elle a montré que le groupe I de la classification internationale des maladies (CIM 10), constitué par les maladies infectieuses, maternelles et périnatales, représente 33.4 % des AVCI (années de vie perdues corrigées par le facteur incapacité), le groupe II, constitué par les maladies non transmissibles, en représente 55.8 % et les accidents et traumatismes en constituent 11% [source : Ministère de la Santé, Stratégie sectorielle de santé 2012 – 2016].

Les maladies transmissibles, maternelles et périnatales

Elles représentent 33,4% de la Charge de Morbidité Globale (CMG). Il y a lieu de signaler que durant les dernières années plusieurs maladies transmissibles ont été éliminées ou sont en voie d’élimination dans notre pays comme la bilharziose, le trachome, le paludisme, la lèpre, la poliomyélite, la diphtérie et le tétanos néonatal. Par contre, la tuberculose demeure un problème de sante publique au Maroc, son incidence se situe autour de 26 000 nouveaux cas par an depuis l’an 2000. Malgré la prise en charge totalement gratuitement par le Ministère de la Santé, les abondons thérapeutiques et les échecs du traitement continuent à poser de sérieux problème. Selon les données de l’étude tabagisme et tuberculose au Maroc (ETTAM), en 2009 leurs taux respectifs étaient de 30,2% et 6.9% [58 ; 59].

Les maladies non transmissibles

Le vieillissement de la population joue un grand rôle dans l’émergence des maladies chroniques. Le manque d’exercice, l’excès de poids et une mauvaise alimentation sont particulièrement problématiques.

Les maladies cardiovasculaires

L’étude nationale sur les facteurs de risque des maladies cardio-vasculaires réalisée en 2000 [60] a montré que 34% des adultes âgés de plus de 20 ans souffrent de l’hypertension artérielle. Cette prévalence augmente significativement avec l’âge. En effet, elle est de 19.2% chez la tranche d’âge 20-34 ans et de 53,8% chez les personnes âgées de 40 ans et plus. La prévalence de l’HTA est plus élevée chez les femmes (41.3%) par rapport aux hommes (37,2%). Quant à l’hypercholestérolémie, sa prévalence standardisée sur l’âge et le sexe chez la population âgée de 20 ans et plus était de 29%, 25,9% chez les hommes et 32,0% chez les femmes. En milieu urbain, ce pourcentage était de 37,2% et en rural 21,2% [60].

Impact de la transition épidémiologique sur la mortalité

L’OMS a rapporté dans son rapport sur les statistiques mondiales 2013, un certain nombre de données sur les causes de mortalité durant l’année 2008. Pour le Maroc, le taux de mortalité standardisé sur l’âge pour le groupe I de la classification internationale des maladies [71] (représenté par les maladies transmissibles) est de 104 par 100 000 habitants, pour le groupe II (maladies non transmissibles), il est de 597 et pour le groupe III: traumatismes, il est de 37. La transition épidémiologique est bel et bien amorcée puisque les décès par maladies non transmissibles sont 5,7 fois plus importants que les décès par maladies transmissibles. En ce qui concerne le taux de mortalité adulte (pour 100 000 habitants, 2008) par cause standardisée pour les tranches d’âges 30 à 70 ans, il ressort que les maladies cardiovasculaires et le diabète présentent un taux de 214, suivi par le cancer 127 et par les affections respiratoires chroniques 23 [72]. L’importance de ces valeurs permet d’apprécier le poids que représente chacune de ces affections pour le système de santé.
Selon les statistiques du Ministère de la Santé, en 2012, les maladies de l’appareil circulatoire ont représenté 23,4% des causes de décès, suivies des tumeurs (10,7%), les affections de la période périnatale en ont représenté 8,5% (Tableau 6) [73].

Chez les adultes en population générale

La première enquête nationale qui a permis de recueillir des données sur la prévalence du tabagisme chez les adultes a été effectuée en l’an 2000 par le Ministère de la Santé. Elle portait sur les facteurs de risque des maladies cardiovasculaires et non spécifiquement sur le tabagisme. Cette enquête portait sur 1802 sujets âgés de 20 ans représentatifs de la population adulte Marocaine au niveau de 100 communes urbaines [60].La prévalence globale du tabagisme était de 17,2% (34,5% chez les hommes et 0,6% chez les femmes), elle était de 17,9 % en milieu urbain et 16,5% dans le milieu rural. Selon les tranches d’âges, la prévalence la plus importante était retrouvée chez les hommes âgés entre 35 et 44 ans (42,9%). Une autre enquête Marocaine sur la Santé et la Réactivité des Systèmes de Santé (ENSRS) réalisée en 2003 par le Ministère de la Santé en collaboration avec l’OMS [5] sur un échantillon de 6297 personnes, représentatif de la population Marocaine a montré que la prévalence du tabagisme chez la population adulte Marocaine était de 14,8%. On notait aussi que le tabagisme au Maroc restait un phénomène masculin. En effet près d’un tiers des hommes (32%) étaient fumeurs et que la majorité d’entre eux (29,8%) l’étaient au quotidien. Les femmes, en revanche, n’étaient que marginalement touchées par ce phénomène. Presque la totalité d’entre-elles (99,7%) s’étaient en effet, déclarées non fumeuses. La prévalence du tabagisme était voisine en milieu rural (15,2%) et en milieu urbain (14,5%). Enfin la prévalence la plus importante (21,3%) était retrouvée chez les personnes âgées entre 30 et 44 ans.
Une troisième enquête plus récente, l’enquête nationale « Tabagisme au Maroc: MARTA » a été réalisée en 2006 par le Laboratoire d’Epidémiologie de la Faculté de Médecine de Fès sous l’égide de l’International Union against Tuberculosis and Lung diseases (IUATLD). Elle avait pour objectif l’étude des habitudes et des comportements des sujets fumeurs. Elle a concerné un échantillon représentatif de 9197 personnes âgées entre 15 et 75 ans de l’ensemble des régions du Maroc. Cette étude a montré que la prévalence globale du tabagisme était actuellement au Maroc en augmentation. En effet, elle était de 18 % dans l’ensemble de la population étudiée (14,5 % de fumeurs quotidiens et 3,5 % de fumeurs occasionnels). La prévalence du tabagisme selon le sexe était de 31,5% chez les hommes et 3,3% chez les femmes. De plus, 41,7% des non fumeurs avaient été exposés au tabagisme passif. Selon le milieu de résidence, il y avait 18.6% de fumeurs en milieu urbain et 16.9% en milieu rural [81-85]. Le Tableau 8 montre l’évolution du tabagisme entre 2000 et 2006 chez la population adulte Marocaine, on note une stabilité du tabagisme masculin mais une augmentation du tabagisme féminin entre 2000 et 2006.

La législation anti tabac au Maroc

Le seul dispositif juridique de lutte anti tabac existant à ce jour au Maroc est le Dahir N° 1-91-112 du 26 juin 1995 portant promulgation de la Loi N° 15-91 relative à l’interdiction de fumer et de faire de la publicité et de la propagande en faveur du tabac dans certains lieux [88] (annexe 1). Votée en 1991, cette disposition n’a été publiée au Bulletin officiel que le 2 août 1995, et elle ne sera mise en œuvre qu’à partir du 3 février 1996. Les principales dispositions de cette loi sont les suivantes :
• Interdiction de fumer dans les lieux publics et spécialement les établissements de soins et d’enseignement .
• limitation des taux de goudron et de nicotine et mention de ces taux sur les paquets de cigarettes.
• Affichage de messages avertissant des dangers du tabac sur les paquets de cigarettes.
• Interdiction de la publicité sur le tabac à la radio et à la télévision et par affichage .
• Interdiction dans toute la presse écrite et les salles de spectacle .
• Interdiction de distribution de cadeaux publicitaires .
• Organisation de campagnes de prévention par les pouvoirs publics.
Avec des résultats très modestes la loi n° 15-91 s’est avérée, malheureusement, peu dissuasive, ne serait-ce qu’en raison de la modicité de l’amende encourue par le contrevenant (10 à 50 DH); sans effets tangibles parce que non accompagnée d’un réel dispositif juridique.
Pour pallier à l’insuffisance de la loi actuelle, la Chambre des Représentants a adopté, en Juillet 2008, à l’unanimité une proposition de loi modifiant et complétant la loi N 15-91 relative à l’interdiction de la consommation du tabac et de la publicité pour ce produit dans les lieux publics, ainsi que sa vente aux mineurs. Ce texte vise à renforcer les dispositions légales en la matière ainsi que la prévention du Tabagisme, à combler certains vides juridiques et notamment l’absence de sanctions, à limiter les effets néfastes du tabagisme, à générer des ressources financières supplémentaires et à réduire la publicité au tabac.
Déclinée en un ensemble de cinq articles, cette loi stipule l’interdiction de la vente de tabac et de ses dérivés, et leur mise à disposition de manière gratuite, aux mineurs (n’ayant pas 18 ans). Un deuxième article pénalise les faits ci-dessus à travers une amende de 2 000 DH et en cas de récidive, comme le stipule l’article 3 de la dite loi, est prévue une peine d’un mois d’emprisonnement, assortie d’une amende de 5000 DH avec, en plus, le retrait de la licence de commercialisation du tabac et de ses produits dérivés. Cette loi aborde aussi la sensibilisation au risque tabagique : l’article 4 enjoint aux Ministères de la Santé et de l’Education nationale de mener, conjointement, des campagnes de sensibilisation régulières auprès des établissements de l’enseignement primaire et des lycées. Enfin, le cinquième article enjoint à l’autorité gouvernementale d’appliquer les dites dispositions qui sont promulguées par décret.
Les lieux d’interdiction visés par ce texte sont définis dans le projet de loi comme tous les lieux réservés à un usage commun : administrations publiques et services semi-publics, moyens de transports en commun, salles de conférences ou de spectacle, toutes les catégories d’établissements de santé ainsi que les cours des établissements scolaires publics et privés. Pour ceux dont la superficie dépasse 50 m2, un coin «non fumeurs» deviendra obligatoire à condition qu’il prenne au moins la moitié de cette superficie et que la dérogation, pour installer un coin fumeurs soit décidée par l’autorité gouvernementale chargée de la santé et selon des conditions bien définies (aération, entre autres).
Cette loi s’attaque aussi au volet publicité en insistant pour que les paquets de cigarettes ou les emballages des dérivés du tabac portent des inscriptions bien visibles avec les mêmes caractères et format des lettres utilisées pour décliner la marque du produit. Les députés donnent même des pistes pour les avertissements comme «Fumer est nuisible à la santé», «Fumer tue» ou encore «Fumer provoque le cancer». Cette loi était censée entrée en vigueur en janvier 2010, mais ses textes d’application n’ont pas encore été publiés à ce jour.
D’autre part, la population Marocaine semble encore peu intéressée par les mesures de lutte antitabac ou faiblement sensibilisée en la matière. Les résultats de l’enquête Marta montrent que seuls 33,3% des Marocains avaient connaissance de la législation antitabac. Parmi eux, 60,1% savaient qu’il était interdit de fumer dans les lieux publics [89]. Ces données soulignent le faible niveau d’information des Marocains au sujet de la législation antitabac en vigueur dans leur pays.

Le programme national de lutte anti tabac du Ministère de la santé

Le programme s’intègre dans la vision globale du Ministère de la Santé en matière de lutte contre les maladies cardiovasculaires, la tuberculose et les dépendances liées à la toxicomanie. Les principales activités développées dans ce cadre concernant :
• L’évaluation de l’ampleur du tabagisme dans la population générale, notamment chez les jeunes et la population active.
• L’Information, Education et Communication en matière de prévention contre le tabagisme et ses méfaits. En 2000, le Ministère de la Santé a élaboré une stratégie multisectorielle qui cible les fumeurs adultes, les jeunes et les enfants en particulier .
• L’aide au sevrage tabagique : Le Ministère de la Santé a organisé une dizaine de programmes d’aide sevrage tabagique (Plan de cinq jours), et ce, dans le but d’aider les fumeurs désireux d’arrêter de fumer .
• Projet « Usines Sans Tabac » : Le Ministère de la Santé a initié au niveau du Groupe OCP depuis l’année 2001, un projet « Usines Sans Tabac ». Ce projet, qui rentre dans le cadre de la coopération avec l’OMS a abouti en 2006 à la déclaration officielle du Groupe office chérifien des phosphates comme un espace sans fumée .
• La mise en place en 2008 en collaboration avec la Fondation Lalla Salma de prévention et traitement des cancers de l’initiative « hôpitaux sans tabac ». Cette intervention concerne tous les hôpitaux et tous les établissements de soins de santé de base du Pays.

Le plan national de prévention et du contrôle des cancers

Depuis sa création en 2005, la Fondation Lalla Salma de prévention et traitement des cancers s’est fortement impliquée, avec l’ensemble de ses partenaires, dans la lutte contre le cancer pour en faire une priorité de santé publique au Maroc. Créée à l’initiative de son Altesse Royale la Princesse Lalla Salma, elle œuvre depuis 2005 à améliorer la prise en charge des patients, à encourager les actions de prévention et à faire de la lutte contre le cancer une priorité de santé publique au Maroc. La Fondation Lalla Salma de lutte contre le Cancer a adopté une démarche participative et multidimensionnelle pour cerner la problématique du cancer. Elle œuvre, aux côtés de tous ses partenaires, à la mise en place d’un dispositif national de lutte contre le cancer, s’inspirant pour cela des meilleures pratiques dans le domaine.
Le Plan National de Prévention et de Contrôle du Cancer (PNPCC) a été lancé officiellement lancé le 24 mars 2010 [90]. Le Programme est le fruit d’un partenariat stratégique entre la Fondation Lalla Salma et le ministère de la Santé. Il a vu la participation de plusieurs spécialistes nationaux et internationaux. Ce plan s’inscrit dans le cadre de la résolution WHA 5822 adoptée en mai 2005 par l’Assemblée Mondiale de la Santé, recommandant à tous les états membres de renforcer les actions de lutte contre le cancer, en élaborant des plans adaptés au contexte socio-économique de leur pays. Véritable chantier national, le PNPCC aura un impact positif sur tout le système de santé à travers une action complémentaire par l’ensemble des professionnels de la santé, les patients et leurs proches.
Elément clé d’une politique moderne de santé publique, le PNPCC définit un programme stratégique de 10 ans. La vision de ce plan est de prévenir et de contrôler les cancers à travers une approche multisectorielle proposant des actions concrètes, durables, régulièrement réadaptées selon les priorités et adaptées aux contextes socio-économique et culturel du pays. Son objectif est de réduire la morbidité et la mortalité et d’améliorer la qualité de vie des patients et de leurs proches. Il permettra une utilisation rationnelle et pertinente des ressources existantes et d’en mobiliser d’autres afin de mieux répondre aux besoins des patients.
Le PNPCC prévoit 78 mesures opérationnelles à entreprendre dans des domaines stratégiques comme la prévention, la détection précoce, la prise en charge thérapeutique, les soins palliatifs et les mesures d’accompagnement des patients. La lutte anti tabac fait partie des huit premières mesures de la stratégie de prévention de ce plan, il s’agit des :
• Mesure 1 : Organiser et mettre en place des campagnes de sensibilisation du grand public contre le tabagisme .
o Mettre en place des programmes d’information et d’éducation ciblant les jeunes et les groupes de personnes vulnérables .
o Impliquer les médias dans la lutte antitabac et établir une charte de bonne conduite avec les professionnels des médias.
• Mesure 2 : Encourager et soutenir l’abandon des habitudes tabagiques.
o Informer et mettre en garde les fumeurs sur les dangers du tabac .
o Mettre en place des consultations d’aide au sevrage dans les établissements de soins de santé de base .
o Instituer le remboursement des médicaments et des produits de substitution nicotinique .
o Soutenir les services de sevrage tabagique.
• Mesure 3 : Protéger les non fumeurs.
o Informer et sensibiliser aux risques du tabagisme passif en famille .
o Informer et sensibiliser aux risques du tabagisme passif dans les lieux publics .
o Soutenir les actions éducatives scolaires et non scolaires.
• Mesure 4 : Réduire l’accessibilité aux produits tabagiques et l’incitation à leur consommation
o Augmenter les taxes sur le prix du tabac de façon régulière et significative .
o Interdire la vente fractionnée .
o Interdire la publicité directe et indirecte .
o Interdire la vente aux mineurs .
o Renforcer la lutte contre la contrebande.
• Mesure 5 : Ratifier la Convention Cadre de la Lutte Antitabac.
• Mesure 6 : Mettre en place les mesures d’application de la loi (15 – 91).
o Faire appliquer l’interdiction de fumer dans les lieux publics, au travail, dans les établissements d’enseignement .
o Faire appliquer l’interdiction de la promotion du tabac.
• Mesure 7 : Mobiliser les associations œuvrant dans la lutte contre le tabac.
• Mesure 8 : Mise en place d’une instance multisectorielle de surveillance de la consommation du tabac et de suivi et évaluation des actions de lutte anti-tabac.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela chatpfe.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

Liste des abréviations
I.1 – Lien entre le tabagisme et la mortalité
I.1.1 – Les cancers
I.1.2 – Les maladies cardiovasculaires
I.1.3 – Les maladies de l’appareil respiratoire, non néoplasique
I.1.4 – Tabagisme passif et mortalité
I.1.5 – Bénéfice de l’arrêt du tabac
I.2 – Mortalité liée au tabac dans le monde
I.3 – La situation épidémiologique au Maroc
I.3.1 – Aperçu général et indicateurs de condition de vie au Maroc
I.3.2 – Transition démographique
I.2.3 Transition épidémiologique
I.4.1 – La consommation tabagique au Maroc
I.4.2 – Les politiques de lutte anti-tabac
II. Questions de recherche et objectif de la thèse
II.1 – Les questions de recherche
II. 2 – Les objectifs de la thèse :
II.2.1 – Objectif général
II.2.2- Objectifs spécifiques
III. METHODES
III.1 – Revue de la littérature
III.1.1 – Stratégie de recherche
III.1.2 – Les principaux modèles
III.1.3 – le modèle retenu
III.2 – Le recueil des données nécessaires pour le modèle
III.2.1 – Recueil des données de la fréquence de la consommation tabagique au Maroc
III.2.2 – Données de la mortalité
III.3 – Analyse statistique
III.3.1 – Codage des données
III.3.2 – Analyse descriptive
III.3.2 – Modélisation
IV. RESULTATS
IV.1 – La Fréquence de la consommation tabagique
IV.2 – Le profil de mortalité
IV.2.1 – Dans la région du grand Casablanca
IV.2.2 – Au niveau national
IV.3 – Les risques relatifs de mortalité
IV.4 – La fraction attribuable au tabac
IV.4 – La MAT au niveau national
V. Discussion
A. Principaux résultats
B. Limites méthodologiques
C. Epidémie du tabagisme dans le Maroc
D. Recommandations
E. Perspectives de recherche
Références

Télécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *