Les acteurs de la sécurité dans les transports améliorent leurs systèmes de protection en effectuant des crash tests. Ces essais sont réalisés en grandeur réelle, en mettant en œuvre des voitures de série et des mannequins de mousse truffés de capteurs. Ces humanoïdes peuvent, par exemple, être équipés d’accéléromètres ou de jauges extensiométriques. Ce sont les dégâts que subissent les mannequins lors de ces tests qui permettent de voir si la voiture possède une structure protectrice vis-à-vis de ses passagers. Ces essais permettent donc aux constructeurs de véhicules de transport de concevoir et de développer des systèmes dits de « sécurité active », qui permettent de réduire au maximum les dégâts corporels que subissent les passagers dans le cas d’un accident réel.
Les maillages en éléments finis en biomécanique
Le maillage dans le domaine des éléments finis représente la forme géométrique des objets intervenant dans la simulation numérique. Il est constitué d’une somme de plusieurs éléments volumiques (3D) ou coques (2D). Il existe plusieurs types d’éléments qui sont classés en fonction de leur forme (triangulaire, quadrilatère, etc.) et de leur nombre de nœuds. l’un est volumique à 20 nœuds et l’autre est plan à 8 nœuds. Il existe, dans la littérature, des ouvrages qui énumèrent les éléments, ainsi que leurs matrices de rigidité associées [Batoz 1992] [Imbert 1991].
Dans les domaines industriel et universitaire, deux manières de réaliser un maillage en éléments finis sont utilisées : la méthode directe et la méthode par mesures. Chaque méthode a son propre domaine d’application. Nous allons donc présenter les caractéristiques de ces deux méthodes, ainsi que leurs avantages et leurs inconvénients.
La méthode directe
Cette première méthode permet de générer mathématiquement le maillage à l’aide de formes géométriques planes ou volumiques de base (pavés, cylindres, cônes, etc.) ou par des algorithmes mathématiques. Pour ce dernier cas, ce sont généralement des équations tridimensionnelles polynomiales d’un degré supérieur ou égal à 2 qui sont utilisées. Cette méthode directe est utilisée lorsque la structure de l’objet à modéliser est symétrique ou de forme assez simple (pièce de moteur, structure métallique, etc.). En principe, ce sont des pièces qui proviennent de la CAO-DAO , le maillage est alors réalisé, de manière automatique, à partir du fichier numérique de la pièce, à la condition qu’il y ait compatibilité entre le logiciel de dessins et le logiciel de maillages appelé «mailleur ». Il est maintenant courant d’avoir, dans les logiciels de CAO-DAO, des modules d’éléments finis qui permettent directement de simuler divers phénomènes mécaniques, afin d’optimiser la pièce lors de sa conception. Cette solution de maillage peut difficilement être appliquée pour la modélisation du corps humain, étant donné la complexité géométrique des organes qui le composent.
Néanmoins, certains travaux dans le domaine de la biomécanique ont déjà été réalisés avec cette technique de réalisation de maillages mathématiques. C’est notamment le cas de la plupart des modélisations simplifiées pour les parties du corps humain.
Ainsi, S.Gross et E.W.Abel [Gross 2001] ont réalisé des travaux numériques sur les implantations de prothèse à l’intérieur d’un os. qui est composé de formes géométriques de base (cylindres). Ce maillage a l’avantage d’être très simple à générer, mais pas obligatoirement proche de la réalité. La question que nous pouvons alors nous poser est de savoir si cette simplification de maillage permet quand même d’obtenir des résultats fiables et proches de la réalité. Certains chercheurs et industriels s’en contentent.
Des études sur des prothèses de hanche insérées dans le fémur ont été réalisées avec des maillages en éléments finis plus proches de la réalité. Par exemple, Pays [Pays 2001], ainsi que Peter et al. [Peter 2001] ont simulé numériquement l’effet d’une prothèse de hanche sur la densité de l’os. Il est courant de rencontrer dans la littérature des travaux effectués sur les prothèses de hanche utilisant des maillages plus ou moins proches de la réalité, mais toujours réalisés avec une méthode directe.
Le niveau de complexité du maillage est fonction des besoins de l’utilisateur et des moyens qu’il a à sa disposition. Certains logiciels industriels d’éléments finis possèdent, dans leurs banques de données, des modules prédéfinis de maillages en éléments biomécaniques simples. Les logiciels Radioss [Radioss 2001] et Pam Crash [Pam Crash 2002] proposent des modèles de mannequin, comme, par exemple, Des mannequins numériques d’enfant et d’adulte, avec divers niveaux de complexité, sont aussi disponibles .
Des sous-systèmes de modèles pour l’étude de la protection du piéton sont aussi inclus dans la base de données des logiciels Radioss et Pam Crash. Il existe des impacteurs de cuisse de piéton et des impacteurs de tête de piéton . Nous pouvons tout de suite remarquer que la modélisation de la tête et des membres est très simple.
La simplicité géométrique des maillages utilisés peut satisfaire la plupart des utilisateurs industriels qui veulent simplement avoir un point de vue global des tests virtuels. Mais nous pouvons nous poser quelques questions sur la fiabilité des résultats en observant la grossièreté du maillage lorsque nous voulons avoir un comportement local du corps humain, comme par exemple pour la modélisation du genou.
Un exemple de simulation biomécanique utilisant un maillage simplifié, que nous allons commenter, est celui de l’impact d’un vélo contre un trottoir. a été obtenu à l’aide du logiciel Radioss® [Radioss 2001]. L’image présentée correspond à la fin de la simulation de l’impact. Nous pouvons remarquer que le cycliste est toujours assis sur le vélo et que les dommages corporels qu’il a subis semblent être une fracture aux deux fémurs, ce qui paraît extraordinaire lorsque l’on percute un trottoir perpendiculairement. Dans le monde du cyclisme, on appelle ce type d’accident : plier une roue en huit. Mais nous avons rarement vu de tels dégâts corporels. Dans la réalité, le cycliste passe par-dessus le guidon du vélo si le choc est trop violent. A propos de la roue avant, il nous semble qu’elle subit très peu de déformations. Elle n’est même pas voilée. En ce qui concerne le maillage, il suffit de se poser une seule question : comment fait le cycliste pour pédaler, étant donné que la position de ses pieds sur le pédalier est sur l’axe de rotation des manivelles? C’est donc l’exemple même qui est globalement satisfaisant, mais qui n’est pas fiable si l’on veut déterminer les différents dégâts corporels sur ce cycliste avec plus de précision.
La génération de maillages par une méthode directe est couramment utilisée dans la simulation de crashs, car elle est simple, rapide et peu coûteuse à mettre en œuvre. En ce qui concerne les simulations numériques plus localisées dans le corps humain, telles que l’implantation d’une prothèse de hanche, cette méthode n’est pas adaptée. Les industriels du domaine de la biomécanique commencent juste à s’intéresser à l’utilisation de maillages les plus fidèles possibles pour améliorer la précision de leur simulation.
La méthode par mesures
La seconde méthode pour obtenir le maillage d’un objet en éléments finis consiste à utiliser les techniques de mesure tridimensionnelle afin d’obtenir celui-ci sous forme de nuage de points. Cette méthode est généralement utilisée pour les objets possédant des formes complexes, c’est-à-dire qui ne peuvent pas être représentés par des formes géométriques ou mathématiques simples. Cette méthode provient du domaine de la productique où elle est appelée « procédé de fabrication inverse» et consiste à numériser un objet réel dont il n’existe aucun fichier DAO-CAO, de manière à obtenir un fichier de type XYZ . C’est à partir de celui-ci ou d’un autre fichier ayant la même fonction que le maillage en éléments finis est créé. Avec la capacité des nouveaux outils numériques, cette méthode par mesures est de plus en plus utilisée. Dans le domaine de la biomécanique, cette méthode a commencé à être mise en œuvre pour l’élaboration d’un maillage en éléments finis d’une petite partie du corps humain.
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Table des matières
Introduction
Partie I – Les maillages
Chapitre 1 – Conception du maillage en éléments finis par mesures tridimensionnelles d’un relief
1-1. Les maillages en éléments finis en biomécanique
1-1-1. La méthode directe
1-1-2. La méthode par mesures
1-1-3. Les interfaces graphiques 3D
1-2. Méthode de mesure 3D par contact
1-3. Méthodes de mesure 3D sans contact
1-3-1. La vitesse de la lumière
1-3-2. Le scanner laser
1-3-3. L’interférométrie
1-3-4. La stéréoscopie
1-3-5. Le moiré
1-3-6. Projection de lumière structurée
1-4. Synthèse
Chapitre 2 – Méthodes de mesure par technique de projection de réseaux de trait sinusoïdaux
2-1. Principe du phénomène de moiré
2-2. Théorie des techniques de mesure basées sur le phénomène de moiré
2-2-1. Notion de base
2-2-2. Le moiré d’ombre
2-2-3. Le moiré de projection
2-2-4. Remarques sur la mise en œuvre du moiré de projection
2-3. Nouvelle approche de la théorie de la technique de projection de réseaux
2-3-1. Les hypothèses
2-3-1-1. Optiques
2-3-1-2. Géométriques
2-3-2. Théorie des équations du relief
2-3-2-1. Modèle de la technique de projection dans le plan
2-3-2-2. Modèle de la technique de projection dans un repère 3D
2-3-3. Procédure d’analyse du réseau de franges
2-3-3-1. Introduction à l’analyse du réseau de franges
2-3-3-2. Théorie de la méthode de quasi hétérodyne
2-3-3-3. Principe du recalage de phases
2-3-3-4. Calcul des déphasages par T.F.R
2-3-3-5. Détermination du masque objet
2-3-3-6. Détermination du masque de discontinuités
2-3-3-7. Synthèse de la technique de quasi hétérodyne à trois images
2-3-3-8. Technique de Morimoto
2-4. Calibrage du montage de la technique de projection de réseaux
2-4-1. Etat de l’art des procédures de calibrage pour les techniques de mesures de reliefs
2-4-2. Principe du processus de calibrage
2-4-2-1. Pour la modélisation plane
2-4-2-2. Pour la modélisation 3D
2-5. Synthèse
Chapitre 3 – Applications de la technique de projection de réseaux de traits sinusoïdaux
3-1. Estimation de l’exactitude expérimentale après le processus de calibrage
3-1-1. Pour la modélisation plane
3-1-2. Pour la modélisation 3D
3-1-3. Synthèse
3-2. Mesure de profil
3-2-1. Etude sur un bas-relief égyptien
3-2-2. Etude des érosions géologiques
3-2-2-1. Relief normal
3-2-2-2. Relief peu accentué, mais très arrondi sur les bords
3-2-2-3. Relief très prononcé avec, a certains endroits, de légères cavités
3-3. Reconstruction de relief complet
3-3-1. Etude d’une statuette de chat
3-3-2. Autres exemples d’application
3-4. Applications biomécaniques
3-4-1. Etude de la scoliose chez l’enfant
3-4-2. Mesure de relief sur la voûte plantaire et la paume de la main
3-4-3. Mesure de relief sur la partie distale du tibia
3-5. Etude des phénomènes de discontinuité
3-5-1. Les zones de discontinuité
3-5-1-1. Identification du problème de saut de frange entière
3-5-1-2. Choix adapté des paramètres géométriques du montage
3-5-2. Application sur une pyramide mexicaine
Partie II – La mesure de grandeurs mécaniques
Chapitre 1 – Méthodes expérimentales pour la caractérisation mécanique d’organes biologiques
1-1. Etat de l’art sur la caractérisation des organes biologiques
1-2. Les techniques optiques de mesure pour l’étude des organes biologiques
1-3. Méthode de suivi de marqueurs
1-3-1. Principe de déformation d’un parallélogramme élémentaire
1-3-2. Localisation d’une tache
1-3-3. Calcul des caractéristiques géométriques du parallélogramme
1-3-4. Exactitude
1-4. Synthèse
Chapitre 2 – Etude du comportement mécaniques de la peau
2-1. Montage expérimental
2-1-1. Le système mécanique de chargement
2-1-2. Le système d’acquisition d’images
2-2. Essais expérimentaux sur de la peau de porc
2-2-1. Essais de traction
2-2-1-1. Approche pratique
2-2-1-2. Résultats expérimentaux
2-2-2. Essais de relaxation
2-2-2-1. Approche pratique
2-2-2-2. Résultats expérimentaux
2-2-3. Essais avec une accélération constante
2-2-3-1. Approche pratique
2-2-3-2. Résultats expérimentaux
2-2-4. Essais biaxiaux
2-2-4-1. Approche pratique
2-2-4-2. Résultats expérimentaux
Conclusion